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RAYMOND GRAVEL Tourmenté jusqu’à la fin malgré tout…

Tuesday, September 9th, 2014

Roger-Luc Chayer

L’abbé Raymond Gravel, ce personnage connu et respecté de nombreux québécois, est décédé des complications d’un cancer des poumons récemment, à l’âge de 61 ans.

Malgré une façade très souriante jusqu’à la toute fin, Raymond, qui avait été collaborateur à la Revue Gay Globe il y a quelques années, souffrait d’une anxiété terrible à l’idée de ne pas pouvoir régler quelques affaires qui le tourmentaient depuis longtemps comme, par exemple, le fait de savoir que les organisations qu’il poursuivait en Cour supérieure, en diffamation, retardaient le plus possible l’avancement des dossiers, espérant sa mort avant qu’il ne puisse témoigner. C’est ce qui sera finalement arrivé. Raymond Gravel avait aussi manifesté un sincère regret à l’idée d’avoir été impliqué, malgré lui, dans une autre affaire en Cour, une histoire de faux journaliste qui avait attaqué notre magazine et qui avait finalement été condamné à plus de 12,000$ de dommages. Raymond s’était excusé auprès du magazine, personnellement, pour ses gestes dans cette affaire. Dossier clos…

Jugement Steeve Biron: Stupéfaction!

Saturday, August 30th, 2014

Par Roger-Luc Chayer

Screen Shot 2014-08-30 at 07.45.45STUPÉFACTION!!!
Steeve Biron condamné à 6 ans de prison…
Stupéfaction au palais de justice de Québec le 29 août dernier, voilà que l’Affaire Steeve Biron trouvait un dénouement plus que surprenant, 6 ans de prison pour un utilisateur de Gay411 qui sollicitait des rencontres sexuelles.

Petit rappel de l’affaire… Steeve Biron est un jeune homme de Québec qui, comme de nombreux gais, sollicitait des rencontres sexuelles principalement via le site très connu Gay411. Biron sollicitait essentiellement des relations «bareback», ses adeptes sachant très bien que le barebacking est une forme de roulette russe qui consiste à avoir des relations non protégées et risquées, avec des individus qui peuvent potentiellement être porteurs du VIH ou d’autres maladies sexuellement transmises. Le kick pour ses adeptes est d’obtenir une plus grande jouissance à cause de la tension générée par le prise de risque. Se sachant séropositif, Biron ne mentionnait pas son statut à ses rencontres et comme pour la plupart des adeptes du barebacking, «jouait la game», jusqu’à ce qu’une ex-baise décide de violer sa vie privée et de consulter son dossier hospitalier, cette personne étant infirmier.

La pseudo victime s’est ensuite présentée à la police pour porter plainte, les policiers se sont mis à la recherche des autres baises bareback de Biron et 15 personnes se sont manifestées. Suite au dépôt d’accusations d’agression sexuelle, Gay Globe a fait enquête et a réussi à obtenir, sous une fausse identité via Gay411, des rendez-vous multiples avec la plupart des pseudo-victimes, en mentionnant clairement que c’était pour du bareback, sans l’usage de condom, CES MÊMES PERSONNES ÉTAIENT SIGNATAIRES DE PLAINTES DISANT QU’ELLES N’AVAIENT JAMAIS CONSENTIES À CE TYPE DE SEXE.

L’affaire était dans le sac, pour notre enquête du moins, mais voilà que l’avocat de Biron a décidé d’abord de ne pas présenter notre dossier de milliers de pages en preuve lors du procès initial et, pire, il a décidé de ne pas en faire mention lors des plaidoiries, affirmant alors que le tribunal n’en tiendrait pas compte. Or, voilà que dans le jugement de la Juge  Marie-Claude Gilbert, elle mentionne spécifiquement que le consentement éclairé des victimes ne s’est pas fait et qu’elles ont été trahies. FAUX puisque notre dossier prouvait le contraire.

Steeve Biron se voit donc condamné à 6 ans de prison, qu’il devra purger dans une prison fédérale. L’ordonnance de non-publication subsistant, nous ne pouvons pas mentionner le nom des victimes. Le pire dans toute cette affaire est que dorénavant, toute personne qui se sait infectée par le VIH peut être arrêtée et condamnée à la prison si elle omet de mentionner son statut à ses relations.

Le Québec retourne 20 ans en arrière en matière de campagnes de dépistage du VIH!
À cause du refus de la part de l’avocat de Steeve Biron de produire un dossier journalistique prouvant que certaines victimes sollicitaient en toute connaissance de cause des relations bareback même après le dépôt de leurs plaintes, contredisant leurs affirmations sur le consentement éclairé et pouvant faire bénéficier Steeve Biron du doute raisonnable nécessaire à son acquittement, voilà que les personnes susceptibles de bénéficier de dépistages du VIH pour se traiter rapidement pourraient dorénavant refuser ces tests car en découvrant leur nouveau statut, elle deviennent potentiellement criminelles si elles ne respectent pas certaines obligations de divulgation à tous leurs partenaires, AVANT d’avoir une seule relation sexuelle. Allez convaincre maintenant les jeunes de se faire dépister! Entre l’ignorance et la prison, la liberté vaut plus cher!!!

André J. Saindon et Maison Urbaine condamnés à près de 14,000$

Wednesday, February 12th, 2014
Chayer c. Maison Urbaine inc.

2014 QCCQ 646

COUR DU QUÉBEC
« Division des petites créances »
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE MONTRÉAL
« Chambre civile »
 
DATE : 17 janvier 2014
______________________________________________________________________
 
SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE MARIE MICHELLE LAVIGNE, J.C.Q.
______________________________________________________________________
 
N° : 500-32-127858-118
 
ROGER-LUC CHAYER
Demandeur
c.
MAISON URBAINE INC.

et

ANDRÉ J. SAINDON

Défendeurs
______________________________________________________________________
 
N° : 500-32-127902-114
 
ROGER-LUC CHAYER
Demandeur
c.
MAISON URBAINE INC.

et

ANDRÉ J. SAINDON

Défendeurs
 
______________________________________________________________________

JUGEMENT
______________________________________________________________________
 

[1]           Les deux présentes causes sont réunies pour les fins de l’audition et pour les fins de la réclamation puisque que ces deux dossiers impliquent les mêmes parties dans le cadre des mêmes relations professionnelles.  Le demandeur comprend la situation et accepte de limiter ses réclamations à la somme de 7000,00$ pour les 2 dossiers.

[2]           À la suite de discussions entre les parties, il appert que la défenderesse Maison Urbaine Inc. a été incorrectement identifiée. Maison Urbaine inc. n’est pas une entité légale.  Les réclamations s’adressent plutôt à la Société en commandite Papineau-Sherbrooke et son commanditaire Maison urbaine Papineau Ltée. Puisque André J. Saindon est administrateur de ces 2 entités juridiques, qu’il est présent aujourd’hui et qu’il ne s’oppose pas aux amendements, la demande de modification du nom de la défenderesse est accueillie et la signification des procédures aux deux nouvelles défenderesses n’est pas requise.

[3]           André J. Saindon informe la Cour que ces 2 entités juridiques défenderesses ont été mises sous séquestre et sont maintenant administrées par PricewaterhouseCoopers.  

[4]           Il reconnaît que ces 2 entités juridiques défenderesses doivent à Roger-Luc Chayer des honoraires professionnels totalisant au moins 7000,00 $.

[5]           POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL

ACCUEILLE la demande d’amendement de la réclamation pour remplacer la défenderesse Maison Urbaine Inc. par les défenderesses la Société en commandite Papineau-Sherbrooke et son commanditaire Maison urbaine Papineau Ltée;

CONSTATE la renonciation de André J. Saindon à la signification des réclamations à la Société en commandite Papineau-Sherbrooke et son commanditaire Maison urbaine Papineau Ltée;

ACCUEILLE la réclamation de Roger-Luc Chayer faisant affaire sous le nom de Revue Le Point – Gay Globe Magazine;

CONDAMNE la Société en commandite Papineau-Sherbrooke, Maison Urbaine Papineau Inc. et André J. Saindon solidairement à payer à Roger-Luc Chayer la somme de 7000,00 $ avec intérets conventionnels au taux de 24% par année, à partir du 6 mai 2010;

LE TOUT avec les frais judiciaires pour les 2 dossiers.

 
  __________________________________

MARIE MICHELLE LAVIGNE, J.C.Q.

 
Date d’audience :  17 janvier 2014

Le calcul est donc de 7,000$ X 24% l’an depuis 2010 plus les dépens. 13,670$

Éric Messier: Jugement intégral de la Cour Supérieure

Wednesday, February 12th, 2014
Chayer c. Messier

2014 QCCS 357

 

COUR SUPÉRIEURE

 
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE MONTRÉAL
 
N° : 500-17-060774-109
   
 
DATE : Le 5 février 2014
______________________________________________________________________
 
SOUS LA PRÉSIDENCE DE : L’HONORABLE MARC DE WEVER, J.C.S.
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ROGER-LUC CHAYER
Demandeur / Défendeur reconventionnel
c.
ÉRIC MESSIER
Défendeur / Demandeur reconventionnel
 
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JUGEMENT
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[1]           Le demandeur, se disant victime d’écrits diffamatoires rédigés par le défendeur et propagés sur des sites internet, demande des ordonnances pour forcer leur retrait et l’arrêt de leur publication.  Il réclame aussi 85 000 $ à titre de dommages moraux, punitifs et frais d’avocat.

[2]           Invoquant son droit à la liberté d’expression, le défendeur nie le bien-fondé de la requête du demandeur et se portant demandeur reconventionnel réclame 90 000 $ à titre de dommages moraux et punitifs.

LES FAITS

[3]           Le demandeur se décrit à la fois comme musicien et journaliste.

[4]           En 1983 il s’inscrit au Conservatoire musical de Nice et obtient un diplôme équivalent à une maîtrise dans le système d’éducation québécois.  Il bénéficie de plusieurs bourses et joue dans différents orchestres en France.

[5]           En 1992, de retour au Canada, il écrit plusieurs centaines de chroniques culturelles dans la revue RG.

[6]           Le demandeur déclare qu’il œuvre essentiellement comme journaliste à compter des années 1998-1999 à titre de collaborateur au réseau de télévision TVA et du magazine Le Point.

[7]           En 2002, il acquiert le magazine Le Point qui devient Gay Club Média / Gay Club Magazine.  Parallèlement, il développe un site web pour la tenue de tables rondes et la projection de films.

[8]           Enfin, il organise sa propre compagnie de production de disques appelée Tempo; le dernier disque date de décembre 2012.

[9]           En novembre 2012, il reçoit la Médaille du jubilé de la Reine pour ses carrières musicale et journalistique.

[10]        Le demandeur explique qu’il rencontre pour la première fois le défendeur vers 1995-1996 alors que les deux collaborent à la revue RG.  Par la suite, ils se croisent à quelques reprises.

[11]        En 1997, le demandeur découvre que le défendeur imagine des événements qu’il décrit ensuite dans la revue RG.  Il décide de dénoncer ce fait au Conseil de presse.

[12]        Le demandeur soutient que de 1999 à septembre 2009 il n’a pas de contact avec le défendeur.

[13]        Le 12 septembre 2009, le défendeur, sous le pseudonyme Spiritos22, enregistre sur YouTube le commentaire suivant : « Ah, d’accord, « Devant » l’Assemblée nationale, je vois ! ciel quel clown. » (pièce P-4).

[14]        Le demandeur explique que le défendeur veut le ridiculiser en faisant allusion à sa prestation, devant l’Assemblée nationale, de la « Marseillaise » à l’occasion des Festivités du 400e anniversaire de la ville de Québec.

[15]        Le lendemain, 13 septembre 2009, il prend connaissance d’un document (pièce P-3, pages 6 à 10) intitulé « dossier Roger-Luc Chayer : une nuisance pour la société et la justice » mis en ligne par le défendeur sur son site web.

[16]        Il y a lieu de reproduire in extenso ce document qui marque le début du présent débat judiciaire :

« DOSSIER ROGER-LUC CHAYER : UNE NUISANCE POUR LA SOCIÉTÉ ET LA JUSTICE – DÉNONCIATION DU ²CONSEIL DE PRESSE GAI DU QUÉBEC² ET DE ROGER-LUC CHAYER :

La présente dénonciation vise à servir l’intérêt public à l’encontre de Roger-Luc Chayer (rue Bourbonnière, Montréal), un journaliste auto-proclamé, maintes fois blâmé par ses pairs et qui est reconnu pour avoir abusé du système de justice du Québec pour poursuivre un très grand nombre de personnes et d’organismes.

Le système de justice du Québec a décidé il y a quelque temps de prendre des mesures pour freiner les abus de cet individu, mais sans avoir un succès complet.

Attendu que le “Conseil de presse gaie du Québec” n’est ni légitime ni représentatif des communautés gaies et lesbiennes en ce qu’il est constitué de quelques individus qui se sont déclarés eux-mêmes membres de ce “Conseil”, sans consultation ni participation de ces communautés ni du milieu de la presse;

Attendu que ce “Conseil”, par ces quelques personnes, se saisit lui-même de l’essentiel des plaintes et en dispose par la suite;

Attendu que ce “Conseil” ne suit pas les règles élémentaires en matière de déontologie ET QUE ce “Conseil” ternit l’image des communautés gaies et lesbiennes;

Attendu que le Conseil de presse du Québec, l’autorité reconnue pour les questions de déontologie en matière journalistiques, a condamné à deux reprises les écrits de Roger-Luc Chayer (décisions D199603-020, décision maintenue en appel, et décision d199908-08);

Attendu que le “Conseil de presse gaie du Québec” est intimement et essentiellement lié à deux médias, Le National et Le Point, violant ainsi les règles élémentaires d’impartialité et d’objectivité;

Attendu que Roger-Luc Chayer est l’artisan du “National” et du “Conseil de presse gai du Québec“, et rédacteur en chef de la revue Le Point;

Attendu que Roger-Luc Chayer suscite et entretient inutilement, artificiellement et de façon tendancieuse la polémique à l’encontre de groupes et d’individus qui oeuvrent au sein des communautés gaies et lesbiennes;

EN CONSÉQUENCE

Nous ne reconnaissons pas les décisions du “Conseil de presse gaie du Québec” car nous ne reconnaissons pas sa légitimité. Nous nous dissocions des écrits et opinions de ce “Conseil“, du site “Le National” et de Roger-Luc Chayer, ainsi que de la revue “Le Point” tant que Roger-Luc Chayer en sera le rédacteur en chef.

Pour plus d’informations, visitez le site du comité de défense juridique

VOICI LA LISTE DES GROUPES ET INDIVIDUS

QUI ONT DÉNONCÉ LE JOURNALISTE AUTO-PROCLAMÉ ROGER-LUC CHAYER,

SES PRÉTENDUS MÉDIAS ET SON SUPPOSÉ ²CONSEIL DE PRESSE GAI²

29 GROUPES QUI ONT SIGNÉ LA DÉNONCIATION

48 INDIVIDUS QUI ONT SIGNÉ LA DÉNONCIATION (ordre alphabétique)

Comité de défense juridique des communautés LGBT

ROGER-LUC CHAYER DÉNONCÉ PUBLIQUEMENT

ÉCHEC DE LA TENTATIVE DE ROGER-LUC CHAYER DE MUSELER LA PRESSE

(Autre lien sur cette tentative échouée)

Lancement du Fonds de défense juridique des communautés lesbiennes et gaies du Québec

COMMUNIQUÉ :  LE (VÉRITABLE) CONSEIL DE PRESSE DÉNONCE LE PRÉTENDU JOURNALISTE ROGER-LUC CHAYER

Le National n’est pas un média au sens du cyberjournalisme, mais plutôt le site web personnel de M. Roger-Luc Chayer.

Le Conseil de presse du Québec a conclu à une faute professionnelle majeure de la part de M. Roger-Luc Chayer et retient la plainte, qui s’applique conjointe-ment au média écrit et électronique Le Point pour avoir cautionné un tel état de fait.

Détails sur le site de la Table (section Documents)

Les décisions du (seul véritable) CONSEIL DE PRESSE DU QUÉBEC concernant Roger-Luc Chayer

À remarquer qu’il est étonnant que le CPQ se préoccupe de Chayer puisque ce dernier n’est un “journaliste reconnu” par aucun regroupement professionnel, c’est-à-dire seulement par lui-même.

Mais pour PLEINEMENT MESURER le degré de nuisance de Roger-Luc Chayer pour la société, il faut consulter les innombrables poursuites judiciaires, dont certaines jugées ridicules par les juges eux-mêmes, qu’il a entreprises depuis 10 à 20 ans contre Pierre-Jean-Jacques

à la COUR DES PETITES CRÉANCES DU QUÉBEC

à la COUR SUPÉRIEURE DU QUÉBEC

et à la COUR DU QUÉBEC, entre autres.

Du vaudeville ! »

[17]        Or, le demandeur constate que ce document est presque en tout point identique à un communiqué émis en 2000 par l’Association des lesbiennes et des gais sur internet (ALGI) (pièce P-3, pages 11 à 15).  À la suite de ce communiqué, il intente alors  des procédures contre cette association et certains des signataires du communiqué. Ces procédures aboutissent à une déclaration de désistements réciproques et de règlement hors de cour homologuée par le Tribunal le 6 novembre 2007 (pièces P-1 et P-2).

[18]        Le demandeur mentionne que parmi les liens apparaissant dans le document (au bas de la page 8, pièce P-3), il y en a qui mène à un jugement (pièce P-6) rendu dans le cadre de procédures contre l’ALGI, jugement rejetant une demande de non-publication pendant l’instance et à un commentaire à propos de ce jugement.

[19]        En réaction à la diffusion par le défendeur du document se rapportant à lui (pièce P-3), le demandeur achemine au défendeur une mise en demeure (pièce P-8) lui demandant de retirer le document puisqu’il contient de graves et fausses informations.

[20]        Le défendeur ne s’exécute pas, mais, au contraire, apporte en plusieurs occasions des modifications au document original (pièces P-9 et P-10).

[21]        En décembre 2009, le demandeur constate que le défendeur persiste à mettre sur son site web le document découvert trois mois plus tôt et, à nouveau, avec des ajouts (pièce P-15).

[22]        Ainsi, en examinant un curriculum vitae du défendeur (pièce P-17, page 71), il note qu’il s’y trouve toujours un lien avec le document auquel il s’objecte (pièce P-17, page 72 et suivantes), dans une version modifiée et avec des liens additionnels (pièce P-18).

[23]        Dans la version du document de fin décembre 2009 (pièce P-19), le demandeur remarque que le défendeur insère même ses adresse et numéro de téléphone personnels (pièce P-19, page 80).  De plus, le défendeur présente maintenant une version anglaise du document (pièce P-19, page 80).

[24]        Le demandeur mandate alors ses procureurs pour transmettre au défendeur une mise en demeure (pièce P-16).

[25]        Le 5 janvier 2010, le défendeur répond au demandeur en ces termes : « pour quelle raison ? Allez tu peux sûrement en trouver deux-trois en te forçant, non ? Peut-être que je m’ennuyais tout simplement. Ou alors, c’était pour la vérité, toi qui aimes tant la vérité.  Ou alors pour « aller là où personne d’autre ne va » ? » (pièce P-20, page 85).

[26]        Toujours en janvier, le défendeur modifie le document pour inclure d’autres informations, notamment « Décisions de justice qui ont impliqué Chayer » (pièce P-21, page 102).

[27]        Le 10 janvier 2010, le défendeur insère la photographie du demandeur sur son site avec plusieurs liens (pièce P-23, page 107).

[28]        Le 20 janvier 2010, le défendeur émet un communiqué intitulé « le journaliste Éric Messier lance la veille médiatique où il parle, notamment, de son plus « récent dossier » au sujet du « journaliste gai et Montréalais, Roger-Luc Chayer, plusieurs fois condamné par le Conseil de presse du Québec, la plus haute instance en matière d’éthique journalistique » (pièce P-24, page 109).

[29]        Le défendeur voit à transmettre ce communiqué sur un site européen appelé Categorynet.

[30]        Le 26 janvier 2010, le défendeur ajoute à son document le titre suivant : « usines à faux diplômes » (pièce P-27, page 125) toujours avec un lien en rapport avec le demandeur.

[31]        Après d’autres ajouts ou modifications (pièce P-31), le 15 février 2010, le défendeur, dans une section intitulée « dossiers », juxtapose les titres « États-Unis : une business d’escroquerie » « Québec : l’Académie Ville-Marie créée par Roger-Luc Chayer est dénoncée par le Ministère de l’Éducation. » (pièce P-32, page 148).

[32]        Tout au long de février et mars 2010, le défendeur persiste à publier sur son site le document se rapportant à Chayer, et ce, avec ou sans modifications.

[33]        Le 21 mars 2010, le défendeur utilisant le site « pilule rouge ou bleue? », place la photo d’un singe à côté d’un texte qui commence par les mots : « Roger-Luc Chayer : délire de mars…» (pièce P-44, page 207).

[34]        Le demandeur témoigne qu’en voyant cette photographie d’un singe accolée à son nom il ressent une grande humiliation.

[35]        Quelques jours plus tard, le défendeur, toujours sur le site « pilule rouge – pilule bleue », relie le nom du demandeur aux mots : « faux, harcèlement, accusation au criminel, …fascisme. » (pièce P-55, page 305).

[36]        Le 3 mai 2010, le demandeur fait appel à un autre procureur pour acheminer au défendeur une deuxième mise en demeure (pièce P-57) qui reste sans réponse.

[37]        Le 7 juin 2010, le défendeur émet à nouveau le document au sujet du demandeur encore une fois avec des variantes.

[38]        Entretemps, le demandeur écrit à plusieurs responsables de sites pour tenter de mettre un terme à la dissémination du document puisque celui-ci se retrouve même en Chine.

[39]        En septembre, le demandeur intente les présentes procédures contre le défendeur.

[40]        Néanmoins, le défendeur non seulement ne retire pas le document, mais y rajoute même des propos au sujet de la carrière de musicien du demandeur.

[41]        Le 11 février 2011, le Tribunal émet une ordonnance de sauvegarde du consentement des parties, qui se lit notamment :

« ORDONNE aux parties de retirer dans les vingt-quatre (24) heures tous les articles publiés sur les sites internet sous leur contrôle, concernant l’autre partie, y incluant les ²TAGS² et autres liens permettant un renvoi sur d’autres sites ou moteurs de recherche;

ORDONNE aux parties de ne pas publier d’article relatif à l’autre partie d’ici le 10 juin 2011, sur tout support quel qu’il soit, informatique ou autre. »

[42]        Le demandeur constate qu’en dépit de cette ordonnance de sauvegarde plusieurs articles sur un site contrôlé par le défendeur restent accessibles (pièces P-82 à P-89).

[43]        Le 9 juin 2011, le Tribunal donne acte à l’acquiescement du défendeur aux conclusions de la requête en injonction interlocutoire.

[44]        Néanmoins, le demandeur constate que le défendeur, en dépit du jugement, ne retire pas des sites Web tous les documents à son sujet (pièce P-91 en liasse).

[45]        Enfin, le demandeur explique que plusieurs des requêtes introductives d’instance  (pièce D-1) auxquelles réfère le défendeur, ne concernent que des actions sur compte pour services rendus par lui-même ou ses entreprises.

[46]        De son côté, le défendeur explique qu’il exerce trois métiers au cours des ans.

[47]        De 1989 à 2011, à titre de journaliste, il écrit quelques 3,000 articles autant dans des journaux que sur l’internet.

[48]        Deuxièmement, à compter de 1993 jusqu’à ce jour, il enseigne les techniques de communication.  D’ailleurs, il est détenteur d’un baccalauréat en psycho-sociologie de la communication et en adaptation scolaire et sociale

[49]        Enfin, étant titulaire d’une maîtrise en relations internationales, au cours de ces mêmes années, il agit comme consultant en communication au niveau international.

[50]        Il rencontre le demandeur en 1995 lorsqu’il veut écrire pour la revue RG.

[51]        Quatre ans plus tard, le demandeur publie un article critique à son égard dans la revue Le National.  Il décide de porter plainte contre le demandeur au Conseil de presse du Québec (pièce D-7) qui ne retient qu’une partie de la plainte pour une simple inexactitude dans l’article.

[52]        Le défendeur n’a plus de contact avec le demandeur jusqu’en 2009.

[53]        En septembre 2009, à titre de citoyen et non de journaliste, il décide de publier sur son site web un dossier (pièce P-3) à propos du demandeur.

[54]        Il prend cette décision en réaction aux agissements du demandeur qui, selon lui, multiplie les procédures judiciaires, engorge le système judiciaire et cause du stress à maints défendeurs.

[55]        Il prend la peine d’insérer des commentaires (pièce P-3, page 7), d’ajouter le mot « véritable » pour distinguer le Conseil de presse du Québec du Conseil de presse gai du Québec (pièce P-3, page 8).  Lorsqu’il parle de dénonciation, il se réfère aux décisions du Conseil de presse du Québec (pièce P-3, page 8).  Il insère « rue Bourbonnière » (pièce P-3, page 7) pour départager tout autre individu portant le même nom que le demandeur.

[56]        Son dossier réfère à la déclaration de désistements réciproques et de règlement hors cour dans l’affaire ALGI (pièce P-1) parce que le demandeur achemine cette procédure à certaines personnes sous prétexte que ce règlement les lie.

[57]        Il veut donc expliquer à ces mêmes personnes qu’il n’en est rien.

[58]        Toujours dans ce dossier, le défendeur parle « d’échec de la tentative de Roger-Luc Chayer de museler la presse » (pièce P-3, page 8) et, plutôt que de mettre un lien avec le jugement en question (pièce P-6), il crée un lien avec un article sur ce sujet publié dans le magazine Fugues (pièce P-7, page 29).

[59]        Pour lui, le lecteur comprendra mieux la teneur de l’article dans Fugues que le jugement lui-même.

[60]        Au sujet de son commentaire à propos du demandeur interprétant la Marseillaise (pièce P-4), le défendeur déclare qu’il s’agit d’une boutade puisqu’il trouve cocasse que le demandeur se place devant l’Assemblée nationale pour interpréter cet hymne national.

[61]        Le défendeur soutient que tout site web nécessite des mises à jour, d’où les nombreuses modifications au document initial (pièce P-3).

[62]        Dans ce contexte, il décide d’ajouter l’adresse civique du demandeur (pièce P­10, page 39) trouvée dans un bottin téléphonique public.

[63]        Dans la version du 17 décembre 2009 (pièce P-15, page 65), il juxtapose au nom du demandeur, le nom de famille « Lacelle » car il se questionne quant à certaines identités utilisées par le demandeur.

[64]        Pour le défendeur, son but est toujours de protéger l’intérêt public.

[65]        Onze jours plus tard, il ajoute un lien intitulé « Chayer rend hommage à André Gagnon » (pièce P-17, page 73) parce que le demandeur est alors en dispute avec André Gagnon.

[66]        Toujours dans cette version, il écrit : « Chayer attaque un organisme communautaire (ALGI) mais abandonne après six ans » (pièce P-17, page 74).

[67]        Selon ses informations, le demandeur est celui qui propose le désistement d’où l’emploi du mot  « abandonne ».  Cependant, il ne contrôle pas cette information.

[68]        Le 5 janvier 2010, le défendeur écrit : « quant à ta condition de bipolaire, c’est effectivement quelque chose qui t’appartient, … » (pièce P-20, page 89).  Il ne vérifie pas l’existence d’un tel diagnostic et ne peut donner de raison pour y référer.

[69]        Dans la version du 21 janvier 2010 (pièce P-25), le défendeur explique qu’il parle de « poursuite bâillon » (pièce P-25, page 113) parce que le demandeur le poursuit aux petites créances après sa plainte au Conseil de presse du Québec.

[70]        Dans ce même document, à la page suivante (pièce P-25, page 114), le défendeur, après le titre « Il joue « devant l’Assemblée nationale » (sic), c’est intéressant! », écrit que « … (le demandeur) a été accusé il y a quelques années d’utiliser frauduleusement le logo de l’UIPF… » (pièce P-25, page 114).  À ce sujet, il déclare n’avoir aucune source fiable, mais se baser sur des ouï-dire.

[71]        À propos de l’utilisation de la photo d’un singe (pièce P-44, page 207), le défendeur affirme que son but est d’illustrer l’aspect cocasse de la situation qui existe alors entre le demandeur et lui-même plutôt que de comparer le demandeur à cet animal.

[72]        Le 26 mars 2010, le défendeur titre : « Roger-Luc Chayer traite de menteurs ses présumés collabos » (pièce P-55, page 305).  Il soutient qu’il utilise le mot « collabos » dans le sens de « collaborateur » et non dans le sens péjoratif souvent associé au mot « collabo ».

[73]        Pour cet article, il ne contacte pas le demandeur pour obtenir sa version parce qu’il n’a aucune confiance en lui.  Il ajoute qu’il comprend bien que si ce texte émanait d’un journaliste, et non d’un simple citoyen, il aurait eu le devoir de contacter le demandeur.  En effet, un journaliste doit vérifier ses sources.

[74]        De plus, le dossier étant sur un site web, il ne voit aucune utilité ou nécessité à vérifier la version du demandeur, d’autant qu’il est un spécialiste en communications incluant l’utilisation de l’internet.

[75]        Le défendeur reconnaît être l’auteur des trois commentaires qui apparaissent dans le document (pièce P-64, pages 455 et 456).  Il soutient qu’ils reflètent la vérité.

[76]        Alors qu’il se trouve au Sénégal, son procureur l’avise de l’ordonnance de sauvegarde du 11 février 2011.  Il tente de cet endroit lointain de retirer de l’internet les textes que l’ordonnance lui commande de faire.

[77]        Pour lui, le dossier qu’il met sur internet à propos du demandeur équivaut à une anthologie.

[78]        Il réitère sa prétention que tout lecteur de ce dossier doit comprendre qu’il ne s’agit pas du travail d’un journaliste, et ce, d’autant plus que le tout se retrouve sur son site web.

[79]        Il répète que son but, en 2009, en insérant sur son site web le document au sujet des désistements et règlement hors cour dans le dossier ALGI, est de mettre en garde le public devant le fait que, selon lui, le demandeur se sert à tort et sans réserve de ce document pour intimider certaines personnes.

[80]        Dans la version du 5 janvier 2010 du document (pièce P-20, page 87), les mots « dossier médiatique », réfèrent au dossier sur son site web depuis septembre 2009.

[81]        Il est l’auteur du document intitulé « actualité-news » (pièce P-36, page 171).  Ce document, qui relève de sa discrétion éditoriale, regroupe des textes qui ne sont pas nécessairement de lui.

QUESTIONS EN LITIGE

[82]        Le demandeur prétend que le document publié par le défendeur, tant dans sa forme originale qu’en versions amendées, est diffamatoire et lui cause un grand tort.

[83]        Le défendeur, invoquant la liberté d’expression, affirme que le document mis sur son site web présente des commentaires loyaux et raisonnables, n’est nullement diffamatoire et ne vise qu’à protéger l’intérêt public.

[84]        Les questions en litige se résument de la façon suivante :

1)    Le document publié par le défendeur est-il diffamatoire ?

2)    Si oui, le défendeur commet-il une faute qui porte atteinte à la réputation du demandeur ?  S’agit-il d’une faute intentionnelle ?

3)    Y a-t-il un lien de causalité entre la faute et les dommages réclamés ?

4)    Si oui, quels sont ces dommages ?

LE DROIT

[85]        Les articles 4 et 5 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne protègent le droit à la réputation :

« 4. Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation.

5.    Toute personne a droit au respect de sa vie privée. »

[86]        Les articles 3, 7 et 35 C.c.Q. édictent que :

« 3. Toute personne est titulaire de droits de la personnalité, tels le droit à la vie, à l’inviolabilité et à l’intégrité de sa personne, au respect de son nom, de sa réputation et de sa vie privée.

Ces droits sont incessibles

7. Aucun droit ne peut être exercé en vue de nuire à autrui ou d’une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l’encontre des exigences de la bonne foi.

35. Toute personne a droit au respect de sa réputation et de sa vie privée.

Nulle atteinte ne peut être portée à la vie privée d’une personne sans que celle-ci y consente ou sans que la loi l’autorise. »

[87]        D’un autre côté, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne stipule que la liberté d’expression s’insère parmi les libertés fondamentales :

« 3. Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association. »

[88]        Ainsi, le Tribunal doit concilier ces deux droits, celui à la réputation et celui à la liberté d’expression.

[89]        Sur ce sujet, la Cour suprême écrit :

(iii) Le régime civiliste de responsabilité

« Le droit civil québécois ne prévoit pas de recours particulier pour l’atteinte à la réputation.  Le fondement du recours en diffamation au Québec se trouve à l’art. 1457 C.c.Q. qui fixe les règles générales applicables en matière de responsabilité civile.  Ainsi, dans un recours en diffamation, le demandeur doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, l’existence d’un préjudice, d’une faute et d’un lien de causalité, comme dans le cas de toute autre action en responsabilité civile, délictuelle ou quasi délictuelle.

Pour démontrer le premier élément de la responsabilité civile, soit l’existence d’un préjudice, le demandeur doit convaincre le juge que les propos litigieux sont diffamatoires.  Le concept de diffamation a fait l’objet de plusieurs définitions au fil des années. De façon générale, on reconnaît que la diffamation « consiste dans la communication de propos ou d’écrits qui font perdre l’estime ou la considération de quelqu’un ou qui, encore, suscitent à son égard des sentiments défavorables ou désagréables ».

La nature diffamatoire des propos s’analyse selon une norme objective.  Il faut, en d’autres termes, se demander si un citoyen ordinaire estimerait que les propos tenus, pris dans leur ensemble, ont déconsidéré la réputation d’un tiers.  À cet égard, il convient de préciser que des paroles peuvent être diffamatoires par l’idée qu’elles expriment explicitement ou encore par les insinuations qui s’en dégagent.  Dans l’affaire Beaudoin c. La Presse Ltée, [1998] R.J.Q. 204 (C.S.), p. 211, le juge Senécal résume bien la démarche à suivre pour déterminer si certains propos revêtent un caractère diffamatoire :

«La forme d’expression du libelle importe peu; c’est le résultat obtenu dans l’esprit du lecteur qui crée le délit ». L’allégation ou l’imputation diffamatoire peut être directe comme elle peut être indirecte « par voie de simple allusion, d’insinuation ou d’ironie, ou se produire sous une forme conditionnelle, dubitative, hypothétique ». Il arrive souvent que l’allégation ou l’imputation « soit transmise au lecteur par le biais d’une simple insinuation, d’une phrase interrogative, du rappel d’une rumeur, de la mention de renseignements qui ont filtré dans le public, de juxtaposition de faits divers qui ont ensemble une semblance de rapport entre eux.

Les mots doivent d’autre part s’interpréter dans leur contexte. Ainsi, « il n’est pas possible d’isoler un passage dans un texte pour s’en plaindre, si l’ensemble jette un éclairage différent sur cet extrait ». À l’inverse, « il importe peu que les éléments qui le composent soient véridiques si l’ensemble d’un texte divulgue un message opposé à la réalité ». On peut de fait déformer la vérité ou la réalité par des demi-vérités, des montages tendancieux, des omissions, etc. « Il faut considérer un article de journal ou une émission de radio comme un tout, les phrases et les mots devant s’interpréter les uns par rapport aux autres.

Cependant, des propos jugés diffamatoires n’engageront pas nécessairement la responsabilité civile de leur auteur.  Il faudra, en outre, que le demandeur démontre que l’auteur des propos a commis une faute.  Dans leur traité, La responsabilité civile (5e éd. 1998), J.-L. Baudouin et P. Deslauriers précisent, aux p. 301-302, que la faute en matière de diffamation peut résulter de deux types de conduites, l’une malveillante, l’autre simplement négligente :

La première est celle où le défendeur, sciemment, de mauvaise foi, avec intention de nuire, s’attaque à la réputation de la victime et cherche à la ridiculiser, à l’humilier, à l’exposer à la haine ou au mépris du public ou d’un groupe. La seconde résulte d’un comportement dont la volonté de nuire est absente, mais où le défendeur a, malgré tout, porté atteinte à la réputation de la victime par sa témérité, sa négligence, son impertinence ou son incurie. Les deux conduites constituent une faute civile, donnent droit à réparation, sans qu’il existe de différence entre elles sur le plan du droit. En d’autres termes, il convient de se référer aux règles ordinaires de la responsabilité civile et d’abandonner résolument l’idée fausse que la diffamation est seulement le fruit d’un acte de mauvaise foi emportant intention de nuire.

À partir de la description de ces deux types de conduite, il est possible d’identifier trois situations susceptibles d’engager la responsabilité de l’auteur de paroles diffamantes.  La première survient lorsqu’une personne prononce des propos désagréables à l’égard d’un tiers tout en les sachant faux.  De tels propos ne peuvent être tenus que par méchanceté, avec l’intention de nuire à autrui.  La seconde situation se produit lorsqu’une personne diffuse des choses désagréables sur autrui alors qu’elle devrait les savoir fausses.  La personne raisonnable s’abstient généralement de donner des renseignements défavorables sur autrui si elle a des raisons de douter de leur véracité.  Enfin, le troisième cas, souvent oublié, est celui de la personne médisante qui tient, sans justes motifs, des propos défavorables, mais véridiques, à l’égard d’un tiers.

Ainsi, en droit civil québécois, la communication d’une information fausse n’est pas nécessairement fautive. À l’inverse, la transmission d’une information véridique peut parfois constituer une faute. On retrouve là une importante différence entre le droit civil et la common law où la fausseté des propos participe du délit de diffamation (tort of defamation).  Toutefois, même en droit civil, la véracité des propos peut constituer un moyen de prouver l’absence de faute dans des circonstances où l’intérêt public est en jeu.

Dans tous les cas, l’appréciation de la faute demeure une question contextuelle de faits et de circonstances.  À cet égard, il importe de rappeler que le recours en diffamation met en jeu deux valeurs fondamentales, soit la liberté d’expression et le droit à la réputation. Notre Cour a reconnu très tôt l’importance de la première de ces valeurs dans une société démocratique. »[1]

[90]        La Cour suprême ajoute :

« La défense d’immunité relative n’est pas exclusive aux élus municipaux. Elle trouve application chaque fois qu’une personne qui communique des renseignements a un intérêt ou une obligation légale, sociale ou morale, de les transmettre à une autre personne qui a un intérêt réciproque à les recevoir.  C’est notamment le cas lorsqu’un employeur ou un professeur donne des références sur son employé ou son étudiant ou encore lorsqu’un journaliste publie dans l’intérêt public des informations diffamatoires qu’il croit honnêtement vraies. »[2]

[91]        Par ailleurs, le Tribunal se range à l’opinion de madame la juge Blondin à l’effet que la définition du terme diffamation ne change pas d’un medium à l’autre :

« [40] La définition donnée au terme « diffamation » ne change pas, peu importe le médium utilisé. Ainsi, les tribunaux ont reconnu que la diffamation en ligne devait être traitée comme toute autre forme de diffamation, qu’elle se fasse par le biais des journaux, de la radio ou de la télévision :

[248] Les mots sont des outils puissants de communication : ils détruisent une réputation en peu de temps alors que, parfois, il a fallu des années pour la construire. L’Internet est un puissant outil de diffusion : la communication n’a presque plus de frontière. La liberté d’expression est une valeur fondamentale de première importance mais le respect de la dignité et de la réputation de la personne l’est tout autant. Ceux qui parlent ou écrivent et ceux qui diffusent sur Internet doivent le réaliser. »[3]

(Soulignement dans le texte)

ANALYSE

Le document publié par le défendeur est-il diffamatoire ?

[92]        Pour répondre à cette question, le Tribunal doit se demander si un citoyen ordinaire estimerait que le document publié par le défendeur, pris dans son ensemble, déconsidère la réputation du demandeur.

[93]        Avant de répondre à la question, rappelons les propos de notre collègue, monsieur le juge Sénécal:

« La forme d’expression du libelle importe peu; c’est le résultat obtenu dans l’esprit du lecteur qui crée le délit ». L’allégation ou l’imputation diffamatoire peut être directe comme elle peut être indirecte « par voie de simple allusion, d’insinuation ou d’ironie, ou se produire sous une forme conditionnelle, dubitative, hypothétique ».  Il arrive souvent que l’allégation ou l’imputation «soit transmise au lecteur par le biais d’une simple insinuation, d’une phrase interrogative, du rappel d’une rumeur, de la mention de renseignements qui ont filtré dans le public, de juxtaposition de faits divers qui ont ensemble une semblance de rapport entre eux. »[4]

[94]        Le Tribunal est d’opinion que le document préparé et publié par le défendeur à propos du demandeur, pris dans sa globalité et analysé dans le contexte de sa dissémination par le défendeur, est de nature diffamatoire.

[95]        Quel est ce contexte ?

[96]        En juillet 2001, une dénonciation (pièce P-3, pages 11 et suivantes) dirigée contre le demandeur voit le jour.

[97]        Celui-ci réplique en instituant des procédures contre l’ALGI et certaines des personnes signataires de la dénonciation.

[98]        Bien que le défendeur soit un des signataires, il ne figure pas à titre de défendeur dans la procédure intentée par le demandeur.  En novembre 2007, intervient le règlement hors cour (pièce P-1) entériné par la Cour supérieure (pièce P-2).

[99]        Presque deux ans plus tard, en septembre 2009, le défendeur met sur son site ce qu’il appelle le « dossier Roger-Luc Chayer » (pièce P-3, page 6 et suivantes).

[100]     Le défendeur structure le document de la façon suivante : sous le titre déjà cité, il inscrit : « une nuisance pour la société et la justice ».

[101]     Ensuite, avant de citer le texte même de la dénonciation de juillet 2001, il insère, en caractères gras, les deux commentaires suivants de son cru :

« La présente dénonciation vise à servir l’intérêt public à l’encontre de Roger-Luc Chayer (rue Bourbonnière, Montréal), un journaliste auto-proclamé, maintes fois blâmé par ses pairs et qui est reconnu pour avoir abusé du système de justice du Québec pour poursuivre un très grand nombre de personnes et d’organismes.

Le système de justice du Québec a décidé il y a quelque temps de prendre des mesures pour freiner les abus de cet individu, mais sans avoir un succès complet. »

[102]     Après ces deux commentaires, suit le texte original de la dénonciation.

[103]     Puis le défendeur, après l’énumération des signataires de la dénonciation, enchaine avec d’autres commentaires, toujours de son cru, regroupés sous le sous-titre « Comité de défense juridique des communautés LGBT: ROGER-LUC CHAYER DÉNONCÉ PUBLIQUEMENT, Échec de la tentative de roger-luc chayer de museler la presse ».                                                         (soulignement dans le texte)

[104]     Enfin, le défendeur inclut des liens qui, plus souvent qu’autrement, sont vides.  De plus, il omet de mettre les liens actuels permettant à un lecteur de prendre connaissance des décisions judiciaires elles-mêmes.

[105]     Le Tribunal constate qu’à la lecture du document, il est très difficile, sinon impossible, de différencier entre le texte original de la dénonciation en juillet 2001 et les ajouts par le défendeur en septembre 2009.

[106]     Une chose est certaine : l’organisation et la présentation du document laissent croire aux lecteurs que des tribunaux qualifient, de fait, le demandeur de nuisance, sans pouvoir y mettre un terme.

[107]     Le 14 septembre 2009, lendemain de la première diffusion du document, le demandeur écrit par courrier recommandé au défendeur lui demandant de retirer le document qui contiendrait de fausses informations.

[108]     Débutent alors la mise en ligne par le défendeur de versions amendées du document, chaque version ajoutant des commentaires tels : « lourd dossier sur Roger-Luc Chayer » (pièce P-10, page 38), « Il joue devant l’Assemblée nationale », trop drôle! (pièce P-10, page 39), « Chayer s’en prend à l’organisme de soutien ALGI, il se désiste après avoir grugé l’os pendant six ans » (pièce P-10, page 39), sans oublier la juxtaposition du défendeur à une photo d’un singe (pièce P-44, page 207), et l’association du nom du demandeur au régime du dictateur irakien Saddam Hussein (pièce P-28, page133).

[109]     Ce ne sont là que quelques exemples de la façon dont le défendeur crée et met en ligne ce qu’il appelle le dossier du demandeur.

[110]     Le défendeur soutient qu’il agit dans l’intérêt public.

[111]     Le Tribunal est d’avis qu’il n’en est rien.  Il s’agit plutôt d’un plan d’attaque contre le demandeur pour que le lecteur ne voit en lui qu’une personne agressive, constamment en guerre contre d’autres individus ou groupes, monopolisant le temps des tribunaux par ses sagas juridiques.

[112]     Non seulement les titres et expressions utilisés par le défendeur sont-ils péjoratifs, mais, de plus, leurs agencements sont tendancieux.

[113]     En somme, par des titres accrocheurs, des insinuations ou juxtapositions malveillantes, des résumés ou citations incomplètes de décisions judiciaires impliquant le demandeur sans que le lecteur puisse, de lui-même, lire in extenso les dites décisions, des références à de supposées poursuites bâillons, le défendeur crée chez le lecteur une croyance que le demandeur n’est qu’un quérulent, et au surplus un quérulent qui n’est qu’un clown.

[114]     Il est évident que le document monté par le défendeur a pour effet de faire perdre l’estime et la considération des lecteurs à l’égard du demandeur et de susciter contre lui des sentiments défavorables ou désagréables.

[115]     En somme, le Tribunal ne doute pas qu’un « citoyen ordinaire estimerait que le dossier constitué par le défendeur, pris dans son ensemble, déconsidère la réputation du demandeur ».

Y a-t-il faute du défendeur?  Si oui, est-elle intentionnelle?

[116]     Le demandeur a le fardeau de prouver une faute de la part du défendeur.

[117]     Tel que mentionné, les auteurs Baudoin et Deslauriers écrivent qu’une telle faute peut résulter d’une conduite malveillante ou simplement négligente, ce qui amène la Cour suprême, dans l’arrêt Prud’homme précité, à identifier trois situations qui engagent la responsabilité de l’auteur de l’écrit diffamatoire.  Répétons ces propos de la Cour suprême :

« À partir de la description de ces deux types de conduite, il est possible d’identifier trois situations susceptibles d’engager la responsabilité de l’auteur de paroles diffamantes. La première survient lorsqu’une personne prononce des propos désagréables à l’égard d’un tiers tout en les sachant faux. De tels propos ne peuvent être tenus que par méchanceté, avec l’intention de nuire à autrui. La seconde situation se produit lorsqu’une personne diffuse des choses désagréables sur autrui alors qu’elle devrait les savoir fausses. La personne raisonnable s’abstient généralement de donner des renseignements défavorables sur autrui si elle a des raisons de douter de leur véracité. Enfin, le troisième cas, souvent oublié, est celui de la personne médisante qui tient, sans justes motifs, des propos défavorables, mais véridiques, à l’égard d’un tiers. »[5]

[118]     Le Tribunal est d’opinion que la prépondérance de la preuve est à l’effet que le défendeur, sciemment, veut s’attaquer à la réputation du demandeur et, certainement, le ridiculiser et l’humilier auprès des lecteurs de son site web.

[119]     Ainsi, le défendeur est le premier à reconnaître qu’il entend mettre un terme à ce qu’il appelle de l’intimidation de la part du demandeur à l’égard de plusieurs personnes ce qui, toujours selon le demandeur, est dans l’intérêt public.

[120]     Or, le défendeur ne présente au Tribunal aucune preuve de semblable intimidation vécue par une personne ou l’autre  pas plus qu’il ne met en preuve que le demandeur utilise la déclaration de désistements réciproques et de règlement hors cour (pièce P-1) dûment homologuée (pièce P-2), pour tenter de bâillonner qui que ce soit.

[121]     Le procureur du défendeur est, d’ailleurs, le premier à le reconnaître en plaidoirie.

[122]     La preuve, de façon globale, révèle que le défendeur, en partant d’éléments réels et véridiques, telles la déclaration de règlement hors cour (pièce P-1) ou les diverses décisions du Conseil de presse du Québec (pièces D-7 à D-10), s’en sert comme point de départ pour son document, mais s’assure de présenter le tout de façon défavorable, médisante même à l’égard du demandeur.

[123]     Le Tribunal constate que le défendeur ne se contente pas de déformer la vérité en référant à des décisions judiciaires, lesquelles découlent des activités profession- nelles du demandeur à titre de journaliste, mais parle aussi du domaine de la musique, autre activité professionnelle du demandeur, pour encore là tenter de le ridiculiser et de l’humilier.

[124]     Le Tribunal ne voit aucun lien entre les prétentions du défendeur à l’effet que le demandeur tente d’intimider et de bâillonner certaines personnes et sa décision de référer au fait que le demandeur interprète la Marseillaise devant l’Assemblée nationale.  Ce geste en soi est public mais le défendeur le présente de façon à attaquer la réputation du demandeur.

[125]     Le défendeur a beau prétendre qu’il s’agit simplement d’une blague, tout comme l’association au singe, il n’en reste pas moins que le tout s’intègre dans l’ensemble du document constitué par le défendeur contre le demandeur.

[126]     Le Tribunal est d’avis que, dans le contexte global des faits mis en preuve, le demandeur a raison de prétendre être victime d’une conduite fautive de la part du défendeur.

[127]     Le défendeur soutient qu’il ne fait qu’exercer son droit à la liberté d’expression et que les commentaires dans le document se veulent loyaux et honnêtes.

[128]     Le Tribunal ne retient pas cette prétention.

[129]     Le Tribunal ne retrouve pas cette objectivité certaine qui est nécessaire en matière de commentaires loyaux.  Au contraire, en associant, à titre d’exemple, un dictateur tel Saddam Hussein au demandeur, le défendeur fait fi de cette objectivité.

[130]     De plus, puisqu’il n’y a aucune preuve d’intimidation ou de tentative de bâillonnement par le demandeur de quelques personnes que ce soit, le Tribunal ne saurait conclure que le document monté par le défendeur peut intéresser les gens en général ou certaines personnes en particulier.

[131]     Toujours en rapport avec l’argument de la liberté d’expression, le Tribunal rappelle ce que le juge Cory de la Cour suprême écrit dans l’arrêt Hill :

« Les démocraties ont toujours reconnu et révéré l’importance fondamentale de la personne.  Cette importance doit, à son tour, reposer sur la bonne réputation.  Cette bonne réputation, qui rehausse le sens de valeur et de dignité d’une personne, peut également être très rapidement et complètement détruite par de fausses allégations.  Et une réputation ternie par le libelle peut rarement regagner son lustre passé.  Une société démocratique a donc intérêt à s’assurer que ses membres puissent jouir d’une bonne réputation et la protéger aussi longtemps qu’ils en sont dignes.»[6]

[132]     En voulant agir en justicier, le défendeur s’investit d’une mission soit disant au bénéfice de l’intérêt public et bénéficiant de la liberté d’expression.  Or, l’ensemble du témoignage du défendeur manifeste son préjugé à l’égard du demandeur qu’il décrit comme un personnage abusant du système judiciaire et voulant bâillonner tout adversaire.

[133]     Le Tribunal se doit de conclure à l’intention de nuire de la part du défendeur à l’égard du demandeur.

[134]     Il s’agit donc d’une faute intentionnelle.

Le lien de causalité faute – dommages

[135]     Ce qui précède démontre amplement le lien de causalité entre cette faute intentionnelle et les dommages réclamés.

LES DOMMAGES

[136]     Pour évaluer les dommages, le Tribunal doit prendre en considération les éléments suivants :

-       La gravité des propos dans le document bâti par le défendeur ;

-       La diffusion du document tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif;

-       L’identité du demandeur, en d’autres termes, son statut social et sa profession;

-       L’identité du défendeur;

-       La conduite du défendeur suite à l’institution des procédures.

[137]     Toute diffamation revêt un caractère grave en soi.

[138]     En l’instance, même si le demandeur établit que le document circule jusqu’en Chine, par contre il omet d’établir, même de façon approximative, le nombre et le type de personnes qui accèdent à ces sites du défendeur.

[139]     Le demandeur affirme qu’il vit difficilement ces attaques menées contre lui par le défendeur et tente par maints moyens d’en arrêter la propagation.  Par contre, il ne présente aucune autre preuve pour démontrer une atteinte à son statut social, une entrave à l’exercice de sa profession.

[140]     En somme, la preuve quant aux dommages reste plutôt générale.

[141]     Ainsi, bien que le demandeur réclame à titre de dommages moraux une somme de 25 000 $, le Tribunal lui octroie à ce titre 5 000 $.

[142]     Il demande aussi, à titre de dommages punitifs, 15 000 $ pour violation,  notamment, des articles 4 et 5 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, plus une somme de 30 000 $ pour violation de l’ordonnance de sauvegarde du 11 février 2011 et ce en application de l’article 131 de ladite Charte.

[143]     L’article 1621 C.c.Q. stipule que :

« 1621. Lorsque la loi prévoit l’attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.

Ils s’apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.»

[144]     Au sujet des dommages punitifs, notre collègue, Madame la juge Blondin, écrit :

[93] L’atteinte illicite à un droit reconnu par la Charte confère à la victime non seulement le droit d’obtenir «la cessation de l’atteinte» et «la réparation du préjudice» subi, mais aussi, en cas d’«atteinte intentionnelle», le droit de réclamer à l’auteur de la violation «des dommages-intérêts punitifs»:

49.  Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente Charte confère à la victime le droit d’obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.

En cas d’atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs.

[94] Trois conditions sont requises en vertu de cette disposition :

§  le recours en dommage punitif ne pourra qu’être l’accessoire d’un recours principal visant à obtenir condamnation du préjudice moral ou matériel, en ce sens, il doit y avoir identification d’un comportement fautif constitutif de responsabilité civile;

§  il faut une atteinte à un droit reconnu par la Charte québécoise;

§  cette atteinte doit être illicite et intentionnelle. »

[97] La Cour suprême définit ce qu’il faut entendre par atteinte illicite et intentionnelle dans l’arrêt de principe Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand :

« En conséquence, il y aura atteinte illicite et intentionnelle au sens du second alinéa de l’art. 49 de la Charte lorsque l’auteur de l’atteinte intentionnelle a un état d’esprit qui dénote un désir, une volonté de causer les conséquences de sa conduite fautive ou encore s’il agit en toute connaissance des conséquences, immédiates et naturelles ou au moins extrêmement probables, que cette conduite engendrera. Ce critère est moins strict que l’intention particulière, mais dépasse, toutefois, la simple négligence.

[98] Baudoin et Jobin résument ainsi l’état du droit sur la question :

«[L]a Cour suprême a réitéré le principe selon lequel le résultat du comportement fautif doit avoir été voulu pour que l’atteinte soit qualifiée d’intentionnelle. Elle a cependant interprété cette condition comme pouvant inclure la simple connaissance des conséquences immédiates et naturelles, ou au moins extrêmement probables, que la conduite fautive engendrera, un test qui dépasse de beaucoup la simple négligence mais qui se situe en deçà de la volonté de causer le dommage, et qui est appliquée avec souplesse par les autres tribunaux.» [7]

(Soulignement dans le texte)

[145]     Le Tribunal n’hésite pas à dire que ces trois conditions existent en l’instance.

[146]     Faut-il rappeler que le défendeur, à titre de spécialiste en communication, se doit de savoir que sa conduite fautive en diffusant le document tant dans sa forme initiale qu’avec les ajouts, aura «des conséquences immédiates et naturelles, ou au moins extrêmement probables» à l’égard du demandeur.

[147]     Madame la juge Blondin ajoute au sujet de la quotité de ces dommages punitifs :

« [110] Pour en fixer le quantum, le tribunal tiendra compte des critères suivants :

Ø  L’aspect préventif, dissuasif ou punitif de tels dommages;

Ø  La conduite du fautif et la gravité de la faute;

Ø  Le préjudice subi;

Ø  Les avantages retirés par le fautif;

Ø  La capacité de payer du fautif ou sa situation patrimoniale;

Ø  Le quantum des dommages compensatoires ou l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier;

Ø  L’inégalité du rapport de force, y compris les ressources, entre la victime et l’auteur du préjudice;

Ø  Le fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers. »[8]

[148]     En l’instance, la gravité de la faute du défendeur est évidente.

[149]     Devant le Tribunal, le défendeur persiste à affirmer qu’il agit dans l’intérêt public et comme simple citoyen, non comme journaliste, qu’il veut empêcher le demandeur de bâillonner ou intimider d’autres personnes.  Toutefois, tel que mentionné, concrètement il ne présente aucune preuve de tels gestes par le demandeur.

[150]     Par ailleurs, la preuve quant à la situation patrimoniale du défendeur est minime.

[151]     Ceci étant, le Tribunal est d’opinion qu’il y a lieu d’allouer une somme de 5 000 $ à titre de dommages punitifs pour violation des articles 4 et 5 de la Charte québécoise.

[152]     Par contre, le Tribunal n’accueille pas la demande en application de l’article 131 de la Charte.

[153]     En effet, même si au lendemain de l’émission de l’ordonnance de sauvegarde, le défendeur n’élimine pas entièrement le document du site web, la preuve est à l’effet qu’il tente de s’exécuter, mais rencontre certains problèmes du fait qu’il se trouve alors en Afrique.

[154]     Enfin, le demandeur réclame le remboursement de ses frais d’avocat totalisant plus de 20 000 $ depuis le début des procédures.

[155]     Le procureur du demandeur insiste sur le fait que le défendeur, à la toute dernière minute, accepte de se soumettre à la demande d’ordonnance de sauvegarde prévue pour deux jours de procès.

[156]     À la lumière des propos de Monsieur le juge Dalphond dans l’arrêt Genex[9], le Tribunal considère que rien ne pouvait forcer le défendeur à confesser jugement et, de plus, un débat sur la nature et la gravité de la faute, l’étendue des préjudices étaient nécessaires.

[157]     Dans les circonstances, le Tribunal refuse la demande de remboursement des honoraires extrajudiciaires.

LA DEMANDE D’INJONCTION PERMANENTE

[158]     Le défendeur plaide que le Tribunal ne peut accéder à cette demande essentiellement pour deux motifs : premièrement, le délai par le demandeur pour présenter sa demande; deuxièmement, selon la théorie des « mains propres », le demandeur lui-même ne répond pas à ce critère.

[159]     En ce qui concerne le délai, le Tribunal ne retient pas ce motif.

[160]     En effet, même si le défendeur met le document sur son site web dès septembre 2009 et que le demandeur n’intente ses procédures qu’un an plus tard, il n’en reste pas moins que pendant ces douze mois, le demandeur tente d’abord par lui-même de convaincre le défendeur de retirer le tout du site web puis, devant son échec, mandate ses procureurs pour obtenir le même résultat, malheureusement sans succès.

[161]     En ce qui concerne le critère des « mains propres », le défendeur prétend que les communiqués (pièce D-2 en liasse) émis par le demandeur en réplique au document, démontrent le bien-fondé de cet argument.

[162]     Le Tribunal n’endosse pas ce deuxième motif.

[163]     Rien ne saurait empêcher l’émission de ces communiqués par le demandeur, communiqués qui, selon le Tribunal, ne sont pas de nature diffamatoire et ne dépassent pas le « très raisonnable et très mesuré » selon l’expression du défendeur lui-même dans sa demande reconventionnelle.

[164]     Ainsi, le Tribunal accueillera la demande d’injonction permanente du demandeur.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[165]     ACCUEILLE la requête introductive d’instance;

[166]     ORDONNE au défendeur, Éric Messier de retirer, dans les trente-cinq (35) jours de la date du présent jugement, tous les articles diffamatoires (Pièces P-3, P-4, P-9, P – 10, P-17, P-19, P-21, P-22, P-23, P-24, P-25, P-26, P-27, P-28, P-29, P-30, P-31, P-32, P-34, P-35, P-36, P-42, P-43, P-44, P-53, P-54, P-55, P-58, P-62, P-64, P-66, P-68, P-69, P-70, P-71, P-72, P-82, P-83, P-84, P-85, P-86, P-87, P-88, P-89 et P-91) relativement au demandeur, Roger-Luc Chayer, publiés sur quelques sites internet ou quelques supports que ce soit;

[167]     ORDONNE au défendeur, Éric Messier, de cesser d’exprimer ou de publier, sur quelques supports que ce soit, tous commentaires, articles ou messages diffamatoires identiques à ceux déjà diffusés (Pièces P-3, P-4, P-9, P-10, P-17, P-19, P-21, P-22, P-23, P-24, P-25, P-26, P-27, P-28, P-29, P-30, P-31, P-32, P-34, P-35, P-36, P-42, P-43, P-44, P-53, P-54, P-55, P-58, P-62, P-64, P-66, P-68, P-69, P-70, P-71, P-72, P-82, P-83, P-84, P-85, P-86, P-87, P-88, P-89 et P-91) relativement au demandeur, Roger-Luc Chayer;

[168]     CONDAMNE le défendeur à verser au demandeur la somme de 10 000 $ avec intérêts et l’indemnité additionnelle selon l’article 1619 du C.c.Q. sur une somme de 5 000 $ depuis l’assignation et depuis le jugement sur une somme de 5 000 $;

[169]     LE TOUT AVEC DÉPENS;

[170]     REJETTE, sans frais, la demande reconventionnelle.

 
  __________________________________

MARC DE WEVER, J.C.S.

 
Me Claude Chamberland
Asselin Chamberland Avocats
Procureurs du demandeur
 
Me Jérôme Dupont-Rachiele
Ferland Marois Lanctôt sn
Procureurs du défendeur
 
Dates d’audition : Les 21, 22, 23 et 24 mai 2013

 



[1]     Prud’homme c. Prud’homme, [2002] 4 R.C.S. 663, p. 683 à 686.

[2]     Id., p. 691.

[3]     Corriveau c. Canoe inc. et Martineau, 2010 QCCS 3396, p. 8 de 30.

[4]     Beaudoin c. La Presse Ltée, [1998] R.J.Q. 204, p. 211.

[5]     Id. Note 1, p. 685.

[6]     Hill c. Église de scientologie de Toronto, [1995] 2 R.C.S. 1130, par. 108.

[7]     Précité note 3, p. 15 et 16 de 30.

[8]     Id., p. 17 et 18 de 30.

[9]     Genex Communication inc. c. Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo, 2009 QCCA 2201, p. 61 et 62 de 63.

Éric Messier condamné en Cour supérieure (Février 2014)

Saturday, February 8th, 2014

COMMUNIQUÉ

Éric Messier, un résident de Montréal au Canada, a été condamné le 5 février dernier par la Cour supérieure de Montréal au Canada pour des actes graves perpétrés contre le journaliste et musicien franco-canadien Roger-Luc Chayer.

Dans un jugement de 24 pages comportant plus de 170 paragraphes (numéro 500-17-060774-109), le Juge Marc deWever, de la Cour supérieure, livre une analyse et décision résultant de quatre jours de procès et de plus de huit mois de réflexion pour rendre jugement.

Non seulement il condamne l’ensemble des gestes posés par Éric Messier, qui totalisent des centaines d’actes illégaux et diffamatoires contre Roger-Luc Chayer, il rejette toutes les demandes de M. Messier qui prétendait en défense que les textes de Roger-Luc Chayer à son endroit, publiés en défense aux graves accusations portées par Messier contre Chayer, étaient eux-mêmes dérogatoires. Le Tribunal à dit NON!

Dans un jugement historique qui fera très certainement jurisprudence tant en ce qui a trait à l’utilisation dérogatoire du titre de journaliste qu’en matière de diffamation sur Internet, d’atteinte à la vie privée ou d’atteinte illicite et intentionnelle à des droits protégés par la Charte québécoise des Droits et Libertés, l’Honorable Juge deWever conclut essentiellement ainsi son jugement:

ACCUEILLE la requête introductive d’instance de Roger-Luc Chayer;

ORDONNE à Éric Messier, dans les 35 jours de la date du jugement, de retirer plus de 45 documents comportant plusieurs pages considérés diffamatoires à l’endroit de Roger-Luc Chayer, publiés sur quelques sites internet ou quelques supports que ce soit;

ORDONNE à Éric Messier de cesser d’exprimer ou de publier, sur quelques supports que ce soit, tous commentaires, articles ou messages diffamatoires identiques à ceux déjà diffusés, relativement à Roger-Luc Chayer;

CONDAMNE Éric Messier à verser 10,000$ à Roger-Luc Chayer, en plus des intérêts et de l’indemnité additionnelle (5000$ à titre de dommages moraux et 5000$ à titre de dommages punitifs);

CONDAMNE Éric Messier à rembourser les dépens entiers des procédures judiciaires à Roger-Luc Chayer;

REJETTE entièrement toutes les demandes d’Éric Messier;

Éric Messier n’a pas encore annoncé s’il s’acquittera de ses obligations résultant de ce jugement en injonction permanente.

P.S. Le jugement intégral sera publié ici-même en annexe à ce communiqué, dès qu’il sera disponible en version PDF.

André J. Saindon et Maison Urbaine condamnés à plus de 13,000$

Wednesday, February 5th, 2014

COMMUNIQUÉ

L’homme d’affaire André J. Saindon, administrateur des sociétés “Maison Urbaine Inc.”, Société en commandite Papineau-Sherbrooke et Maison Urbaine Papineau Limitée viennent d’être condamnés conjointement et solidairement à payer à l’éditeur Roger-Luc Chayer la somme de 13 632$ incluant les frais de Cour pour avoir floué l’éditeur en signant des contrats publicitaires sous de fausses représentations, en utilisant faussement un nom d’entreprise qui n’existait pas, services qui n’ont jamais été payés d’où la poursuite.

Pendant près des 3 ans durant les procédures judiciaires, Saindon déclarait dans sa défense assermentée et dans les contrats publicitaires parler au nom de Maison Urbaine Inc. obligeant le demandeur Chayer à des procédures inutiles puisque le jour du procès, Saindon avouait à la Juge Marie-Michelle Lavigne de la Cour du Québec à Montréal que la société n’existait pas et qu’elle n’avait jamais existée.

Enfin, André J. Saindon a déclaré lors de son procès être en faillite et avoir cédé ses biens selon la loi sur la faillite. Or, en communiquant avec le syndic responsable de cette prétendue faillite, il a été découvert que Saindon n’avait jamais payé son syndic et qu’il était en violation de la loi fédérale sur les faillites. Une enquête du Surintendant des faillites a été ouverte.

À suivre.

Saga Pierre-André Vaillancourt: Suite et presque fin d’une saga de plus de 10 ans

Tuesday, June 12th, 2012

Par Gay Globe Média

Suite à un jugement très sévère de l’honorable Juge Armando Aznar de la Cour du Québec reconnaissant Pierre-André Vaillancourt coupable de gestes graves à l’endroit de l’Éditeur de Gay Globe Magazine, Roger-Luc Chayer, en relation avec la violation d’un accord de règlement qu’il avait pourtant signé et qu’il s’était engagé à respecter suivant un ordre de la Cour Supérieure en 2007, le défendeur Pierre-André Vaillancourt avait, début 2012, porté la cause en appel.

Or, suite à une requête de l’avocat de Chayer, Maître Claude Chamberland, visant à faire déclarer l’appel frivole, abusif et non fondé, voilà qu’à quelques heures de l’audition devant les trois juges de la Cour d’Appel du Québec de la requête en rejet d’appel, Vaillancourt annonce, après avoir tenté quelques minutes auparavant de se négocier un nouveau règlement hors cour, qu’il se désistait purement et simplement de son appel sans plus, comme si l’ensemble des faits allégués dans le rejet d’appel était exact.

La Cour d’Appel, le 4 juin dernier, prenait donc acte du désistement mais réservait à Chayer ses recours car comme il y a eu geste frivole de la part de l’avocate de Vaillancourt, qui est maître de son appel, les conséquences financières d’un appel frivole devront être assumées.

Sans plus attendre, Chayer a annoncé qu’il allait réclamer l’ensemble de ses déboursés payés pour rien en appel directement à l’avocate de Vaillancourt en responsabilité professionnelle, comme la loi le prévoit, en espérant que ce dossier trouvera un dénouement final d’ici quelques mois.

“Le Tribunal a été cinglant avec Vaillancourt tout au long de son jugement initial, c’est de plein droit que je demande aux tribunaux de statuer sur la conduite subséquente de son avocate dans le cadre de cet appel bidon qui n’a été produit que pour me faire dépenser et c’est surtout avec la conscience en paix que maintiens le cap dans ce dossier qui n’a été que la démontration d’une haine envers moi du début à la fin, d’un individu que je ne connais même pas”, déclare Roger-Luc Chayer.

Jugement Roger-Luc Chayer contre Pierre-André Vaillancourt

Tuesday, March 6th, 2012

COUR DU QUÉBEC

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° :

500-22-164824-099

DATE :

Le 13 février 2012

______________________________________________________________________

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

ARMANDO AZNAR, J.C.Q.

______________________________________________________________________

ROGER-LUC CHAYER

Demandeur et défendeur reconventionnel

c.

PIERRE-ANDRÉ VAILLANCOURT

Défendeur et demandeur reconventionnel

______________________________________________________________________

JUGEMENT

______________________________________________________________________

[1] Le litige opposant le demandeur au défendeur a pour trame de fond un litige antérieur introduit en Cour Supérieure en 2001 (dossier 500-05-067713-014) opposant le demandeur, Roger-Luc Chayer, à une série de défendeurs dont le défendeur en la présente instance.

[2] Dans le dossier de la Cour Supérieure, le demandeur Chayer reprochait aux défendeurs, dont le défendeur Vaillancourt, d’avoir tenu des propos libelleux, mensongers et diffamatoires à son endroit.

[3] La requête introductive d’instance amendée datée du 17 septembre 2003 déposée par le demandeur Chayer contenait 67 paragraphes et réclamait des défendeurs le paiement d’une somme de 400 000 $ en dommages-intérêts.

[4] L’action en dommages intentée par le demandeur Chayer en Cour Supérieure a été réglée en date du 6 novembre 2007. Ce règlement est constaté par un document intitulé « Déclaration de désistements réciproques et de règlement hors de Cour », ci-après désigné « Déclaration de désistements » (pièce P-1).

[5] Le recours du demandeur Chayer devant la Cour du Québec a pour motif le non-respect des termes de l’entente par le défendeur Pierre-André Vaillancourt.

[6] Le litige opposant les parties devant la Cour du Québec a pour origine, selon le demandeur Chayer, le non-respect des termes de la Déclaration de désistements et de l’ordonnance prononcée par la Cour Supérieure entérinant celle-ci qui ordonnait aux parties de la respecter (pièce P-2).

[7] À ce stade-ci, il convient de reproduire les termes de la Déclaration de désistements et de l’ordonnance prononcée par la Cour Supérieure :

« déclaration de désistements réciproques et de règlement hors de cour

Attendu que le requérant et les intimés Association des lesbiennes et des gais sur internet (ALGI), ci-après appelée ALGI, Mario Lalancette, Marie-Claude Carrière, Paul Lessard, François Daoust, Martin Lapierre et Pierre-André Vaillancourt, désireux de mettre un terme définitif à tout litige les opposant, sans admission de responsabilité et afin d’éviter les coûts et inconvénients d’un procès d’une durée de 18 jours, déclarent la présente cause réglée hors de Cour de la façon suivante :

1. Les parties se désistent de leurs procédures respectives, chaque partie payant ses frais;

2. Les intimés ALGI, Mario Lalancette, Marie-Claude Carrière, Paul Lessard, François Daoust, Martin Lapierre et Pierre-André Vaillancourt s’engagent à prendre les mesures nécessaires pour que toutes informations et échanges entre participants se rapportant aux faits du présent ligie soient mis hors ligne sur les sites internet dont ils ont le contrôle, et ce dans un délai de 24 heures de la signature de la présente entente, et le requérant s’engage à faire de même pour les sites qu’il a sous son contrôle dans le même délai;

3. Les parties se donnent une quittance mutuelle complète et finale, ainsi qu’à leurs représentants, administrateurs, employés, successeurs et ayants droits de toute réclamation de quelque nature que ce soit découlant ou se rapportant aux faits du présent litige.

(…)

ordonnance

(…)

Le Tribunal donne acte et entérine la déclaration de désistements réciproques et de règlement hors cour signée en date du 6 novembre 2007 et ordonne aux parties de la respecter. »

[8] À la requête introductive d’instance déposée devant la Cour du Québec, le demandeur Chayer allègue, entre autres, ce qui suit :

« 1. Le 6 novembre 2007, les parties mettaient un terme à un long litige en Cour Supérieure dans le dossier numéro 500-05-067713-014 (ci-après ”le litige”) en signant une déclaration de désistement réciproque et de règlement hors cour (ci-après ”l’entente du 6 novembre 2007”) dont copie est produite au soutien des présentes pour en faire partie intégrante sous la cote P-1;

2. Le même jour, une déclaration de règlement hors cour était homologuée par l’Honorable Nicole Morneau, J.C.S., tel qu’il appert dudit jugement d’homologation produit au soutien des présentes pour en faire partie intégrante sous la cote P-2;

3. Le litige résultait de la diffusion par les intimés en 2001 de messages internet offensants pour lesquels le demandeur réclamait une somme de 400 000$ alors que les intimés, parmi lesquels le défendeur, s’étaient portés demandeurs reconventionnels pour une somme de 95 000$;

4. La considération principale de l’entente du 6 novembre 2007 apparaît au paragraphe 2 et est à l’effet que :

”Les intimés ALGI, Mario Lalancette, Marie-Claude Lapierre (sic), Paul Lessard, François Daoust, Martin Lapierre et PIERRE-ANDRÉ VAILLANCOURT (le défendeur en l’instance) s’engagent à prendre les mesures nécessaires pour que toutes informations et échanges entre participants se rapportant aux faits du litige soient mis hors ligne sur les sites internet dont ils ont le contrôle, et ce dans un délai de vingt-quatre (24) heures de la signature de la présente entente, et le requérant s’engage à faire de même pour les sites qu’il a sous son contrôle dans le même délai”;

5. Depuis le 6 novembre 2007, le vieux contentieux qui opposait les parties dans le litige semblait à toutes fins pratiques réglé, mais à sa grande déception, le demandeur a, le ou vers le 13 août 2009, découvert que des courriels anonymes étaient envoyés à des tiers avec en pièces jointes copie ”d’informations se rapportant aux faits du litige”, le tout à l’encontre de l’entente du 6 novembre 2007, copie d’un des dits courriels étant produite au soutien des présentes pour en faire partie intégrante sous la cote P-3;

6. Afin de faire cesser ces atteintes à sa réputation pour une affaire réglée depuis presque deux ans, le demandeur a alors demandé l’intervention de la police de Montréal qui a, à son tour, procédé à des vérifications auprès du serveur de l’auteur du message (P-3) à savoir l’entreprise Vidéotron, pour connaître l’identité de l’auteur de ce message anonyme ([email protected]) et/ou signé d’une fausse identité (Manon Legault);

7. Il est apparu que le défendeur, qui a personnellement apposé sa signature sur l’entente du 6 novembre 2007 (P-1) était l’auteur du message anonyme ([email protected]) et/ou signé d’une fausse identité (Manon Legault) qui communiquait à un tiers certaines des ”informations et échanges entre participants se rapportant aux faits du litige”, le tout en violation manifeste du paragraphe 2 de l’entente du 6 novembre 2007;

8. Le défendeur a agi malicieusement dans le seul dessein de nuire à la réputation du demandeur en faisant resurgir illégalement ”des éléments d’informations et échanges se rapportant au litige” qu’il s’était pourtant engagé à mettre hors de ligne sur les sites internet dont il avait le contrôle;

9. De plus, le défendeur a tenté de camoufler son intervention illégale en agissant de manière anonyme ([email protected]) et/ou signé d’une fausse identité (Manon Legault), démontrant ainsi clairement la conscience qu’il avait de faire du tort au demandeur;

10. Le demandeur entend prouver à l’audience que le numéro IP correspondant au message anonyme ([email protected]) et/ou signé d’une fausse identité (Manon Legault) est celui du défendeur PIERRE-ANDRÉ VAILLANCOURT;

11. Le demandeur demande réparation des dommages moraux que lui cause le défendeur en ramenant à la surface les éléments d’un contentieux qu’il avait en toute bonne foi voulu régler au moyen de l’entente du 6 novembre 2007 (P-2);

12. Le demandeur évalue donc ses dommages moraux à 12 000$ puisque les envois du défendeur par courriel anonyme ciblaient directement des gens qui connaissaient le demandeur, obligeant ce dernier à expliquer de nouveau autant que faire se pouvait, des événements remontant maintenant à plus de huit (8) ans;

13. Le demandeur demande de plus que le défendeur soit condamné à verser à l’organisme de charité suivant: ”Fondation d’aide directe SIDA MONTRÉAL” une somme de 12 000$, le tout à titre de dommages punitifs conformément à l’article 1621 du Code civil du Québec et aux articles 4 , 5 et 49 (2) de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, vu le caractère intentionnel des actes posés par le défendeur strictement dans le but de nuire au demandeur. »

[9] Le défendeur conteste l’action du demandeur et se porte lui-même demandeur reconventionnel.

[10] En fait, le défendeur ne conteste pas le fait qu’il a transmis par Internet la pièce P-3. Il plaide plutôt qu’en se faisant, il n’a pas contrevenu aux termes de la Déclaration de désistements intervenue entre les parties en Cour Supérieure puisque le texte de la pièce P-3 n’a pas été publié dans un site Internet « qu’il a sous son contrôle ».

[11] De plus, le défendeur reproche au demandeur d’avoir lui-même contrevenu aux termes de la Déclaration de désistements ainsi qu’à l’ordonnance de la Cour Supérieure l’entérinant et ce en diffusant publiquement sur Internet des informations concernant certains des faits allégués à la poursuite introduite dans le dossier 500-05-067713-014.

[12] Ainsi, aux paragraphes 29, 30, 31 et 32 de la défense et demande reconventionnelle amendée, le défendeur allègue ce qui suit :

« 29. Au contraire, tel qu’il appert du document intitulé « Dénonciation ou Approbation », pièce D-5, si reproduire dans un courriel la pétition pièce D-4 contrevenait aux termes du Désistement P-1, ce serait plutôt le demandeur qui diffuse publiquement sur internet des informations sur la poursuite dans le dossier 500-05-087713-014 dans ce document découvert par le défendeur le ou vers le 28 avril 2009;

30. Si le demandeur prétend que le défendeur est coupable d’avoir diffusé à une tierce personne « des éléments d’informations et échanges se rapportant au litige », alors le demandeur est d’autant plus « coupable » de l’avoir fait puisqu’il publie des textes sur internet répandant le document qui avait été reproduit dans le courriel P-3;

31. Par ailleurs, en décembre 2009 le défendeur a appris que si on mettait son nom « Pierre-André Vaillancourt » dans le moteur de recherche Google, tel qu’il appert de la pièce D-6, son nom apparaît comme faisant l’objet d’une poursuite judiciaire sur un site appartenant au défendeur, www.gayglobe.us, de même que la Déclaration de désistement réciproque pièce P-1;

32. Des recherches plus approfondies sur internet révèlent que le demandeur, en plus d’avoir lui-même diffusé des « informations sur le litige », a aussi créé un lien internet qui associe le nom du défendeur Pierre-André Vaillancourt avec les mots « poursuite judiciaire, outrage au tribunal, dommages moraux et punitifs » le tout tel qu’il appert de la pièce D-6. »

[13] Le défendeur allègue avoir subi des dommages en raison des agissements qu’il reproche au demandeur et il réclame donc la somme de 66 800 $ à titre de dommages-intérêts détaillés comme suit :

· Dommages moraux : 25 000 $

· Dommages exemplaires suivant les articles 4 , 5 et 49

de la Charte des droits et libertés de la personne : 25 000 $

· Pertes de revenus : 16 800 $

[14] Le Tribunal signale que le procès dans la présente affaire a duré quatre jours et par moments, la preuve présentée de part et d’autre a été peu pertinente et peu utile.

[15] Ceci dit, de la preuve, le Tribunal retient, entre autres, les éléments suivants.

[16] Parmi les écrits qui ont été communiqués par voie d’Internet dont le demandeur se plaint et qui sont visés dans la poursuite intentée en Cour Supérieure dans le dossier 500-05-067713-014, se trouve le courriel produit sous la cote P-3.

[17] Or, à cet égard, la preuve a révélé que, le 13 août 2009, le défendeur, en utilisant un nom qui n’est pas le sien à savoir Manon Legault et en utilisant aussi le nom « [email protected] », a, par courrier électronique, fait parvenir à Mme Sandrine Viel, une cliente du demandeur, un « copie-collé » d’un article intitulé « affaire Chayer », paru en 2001.

[18] La parution sur Internet du susdit écrit avait été l’un des éléments matériels invoqués par le demandeur dans la poursuite intentée contre le défendeur en Cour Supérieure.

[19] Le fait que le défendeur est l’auteur du message transmis par courrier électronique (pièce P-3) a été établi de manière claire et limpide par l’enquête policière qui a été menée par le service de police de la Ville de Montréal et notamment par l’agent de police Benoît Soucy, lequel a témoigné à l’audience.

[20] La preuve révèle clairement, de l’aveu même du défendeur, qu’il a transmis le courriel par Internet (pièce P-3) à Mme Sandrine Viel et possiblement à d’autres personnes et que l’objectif de cette transmission était de faire connaître une série de faits qui se rapportaient au litige qui l’avait opposé au demandeur en Cour Supérieure.

[21] Le fait que le défendeur se soit caché derrière un faux nom illustre bien qu’il savait vraisemblablement que ce qu’il faisait n’était pas acceptable.

[22] La preuve démontre que le défendeur a transmis le courriel (pièce P-3) dans le but, entre autres, de dénoncer les agissements du demandeur. Toutefois, en se faisant, il a aussi porté atteinte à sa réputation et notamment, en portant à la connaissance de Mme Viel le texte de la pièce P-3 dont l’extrait suivant :

« (…)

Toujours à la quête de sensations pour alimenter son propre média et son propre « Conseil de presse gai », Roger-Luc Chayer viole régulièrement les frontières du droit à l’intégrité des personnes et des institutions. Se disant journaliste, il déforme les faits, ajoute des insinuations, des interrogations qui suggèrent des réponses malicieuses, allant jusqu’à l’invention pure et simple d’événements qu’il traite par la suite sur son média électronique Le National. Aussi, il saisira son propre « Conseil de presse gai » d’un litige dans lequel Le National ou lui-même sont impliqués.

(…) »

[23] Le défendeur prétend qu’il a décidé de faire circuler le texte contenu dans la pièce P-3 après qu’il eut lui-même constaté que le demandeur avait, selon lui, violé les termes de la Déclaration de désistements intervenue en Cour Supérieure ainsi que de l’ordonnance prononcée par la Cour Supérieure en faisant paraître, en décembre 2008, sur son site Web, un document intitulé « dénonciation ou approbation » (pièce D-5).

[24] Or, relativement à la parution du susdit document (pièce D-5), le demandeur a témoigné à l’effet qu’il ne l’a jamais fait paraître sur son site. Il affirme catégoriquement que son site a été piraté et c’est comme cela que le document s’y serait retrouvé.

[25] Afin d’établir le fait que le demandeur est seul responsable de la parution, sur son site Web, du document (pièce P-5), le défendeur a appelé comme témoin M. Eric Vinter.

[26] La preuve révèle que M. Vinter connaît le demandeur ainsi que le défendeur depuis 1999 approximativement.

[27] M. Vinter a déclaré que le document publié en décembre 2008 sur le site Web du demandeur (pièce D-5) était en fait une copie trafiquée de la pièce D-4, un des documents qui devaient être retirés des sites Internet sous le contrôle des parties aux termes de la Déclaration de désistements déposée en Cour Supérieure.

[28] Au cours de son témoignage devant le Tribunal, M. Vinter a manifesté un partie pris évident en faveur du défendeur et ce à un point tel que sa crédibilité en a été sérieusement affectée. Ceci étant, le Tribunal ne peut retenir le témoignage de M. Vinter à l’effet que M. Chayer a effectivement publié le texte (pièce P-5) sur son site Web.

[29] En fait, eu égard à l’ensemble de la preuve, le Tribunal conclut que l’hypothèse soumise par le demandeur voulant que son site Web ait vraisemblablement été piraté ne peut être exclue. De plus, sur cette question, le Tribunal n’a aucune hésitation à retenir le témoignage du demandeur de préférence à celui du défendeur et de M. Vinter.

[30] Par ailleurs, la preuve a révélé que les agissements du défendeur (transmission du document P-3) étaient principalement guidés par l’animosité qu’il porte au demandeur.

[31] D’autre part, le Tribunal souligne que, après avoir constaté ce qu’il considérait être une violation par le demandeur des termes de la Déclaration de désistements intervenue en Cour Supérieure, à savoir la publication de la pièce D-5, il ne l’a jamais mis en demeure de la retirer de son site Web.

[32] La réaction du défendeur, agissant sous le couvert d’un faux nom, a plutôt été de faire circuler le document (pièce P-3) en le transmettant à Mme Sandrine Viel, une cliente du demandeur, et ce bien qu’il savait pertinemment bien que le contenu du document était visé par les termes de la Déclaration de désistements ainsi que par l’ordonnance prononcée par la Cour Supérieure.

[33] L’explication du défendeur à l’effet qu’il n’a pas violé les termes de la Déclaration de désistements et de l’ordonnance prononcée en Cour Supérieure parce qu’il ne contrôlait pas le site Web où le document P-3 a été publié le 13 août 2009 est cousue de fil blanc et peu crédible.

[34] À la lecture de la Déclaration de désistements, il apparaît évident que l’esprit de l’entente était que les parties s’engageaient à prendre les dispositions nécessaires pour cesser la distribution et la parution sur Internet des articles et des informations ayant mené au litige. Ainsi, en transmettant par courrier électronique le document (pièce P-3) à Mme Viel, le défendeur savait ou devait raisonnablement savoir qu’il violait l’esprit de l’entente.

[35] Ceci dit, en agissant comme il l’a fait, le défendeur a commis une faute génératrice de responsabilité envers le demandeur.

[36] Sur le plan des dommages, le demandeur réclame un montant de 12 000 $ à titre de dommages moraux. Le demandeur demande aussi que le défendeur soit condamné à payer à l’organisme « Fondation d’aide directe SIDA MONTRÉAL » une somme de 12 000 $ à titre de dommages punitifs conformément à l’article 1621 du Code civil du Québec et aux articles 4 , 5 et 49 al. 2 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne.

[37] Le Tribunal estime que la preuve présentée par le demandeur ne révèle pas que l’envoi, par le défendeur de la pièce P-3 par voie de courrier électronique à l’une de ses clientes lui ait causé des dommages moraux d’une ampleur telle que cela justifierait une condamnation à 12 000 $.

[38] En fait, la preuve du demandeur se limite à son seul témoignage sur l’impact qu’a eu sur lui la circulation du document (pièce P-3). Il dit avoir été très affecté par cet événement et ce par du stress, de la fatigue et des problèmes d’estomac. Toutefois, à cet égard, aucune preuve médicale n’a été présentée afin de corroborer ses dires quant à l’existence de ces malaises et quant à l’existence d’un lien de causalité entre ceux-ci et la faute reprochée au défendeur.

[39] Aucun témoin n’est venu corroborer les dires du demandeur quant à l’impact qu’a eu sur lui la circulation de la pièce P-3 et aucune preuve documentaire n’a été déposée pour appuyer son témoignage peu convaincant quant à l’ampleur des dommages qu’il dit avoir subis.

[40] Ceci dit, le Tribunal ne doute pas que la circulation du document (pièce P-3) a affecté le demandeur et lui a causé des dommages moraux. Cependant, considérant la preuve présentée, le Tribunal fixe le montant de ces dommages à 2 000 $.

[41] Quant aux dommages punitifs réclamés par le demandeur, la preuve révèle que le défendeur a, en faisant circuler par courrier électronique la pièce P-3, aussi porté atteinte à sa réputation. À cet égard, la partie du texte reproduite précédemment au paragraphe 22 constitue une atteinte à la réputation.

[42] Cependant, pour que l’atteinte à un droit garanti par la Charte des droits et libertés de la personne[1] (la Charte) puisse donner lieu à l’octroi de dommages punitifs, il faut que l’atteinte soit illicite et intentionnelle.

[43] À cet égard, l’article 49 al. 2 de la Charte prévoit ce qui suit :

« [Dommages-intérêts punitifs] En cas d’atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs. »

[44] Or, selon la jurisprudence, pour qu’une atteinte soit intentionnelle, il faut que le résultat du comportement fautif soit voulu. Il faut que l’auteur de l’acte ait un état d’esprit qui dénote une volonté de causer les conséquences de sa conduite ou encore qu’il ait agi en toute connaissance des conséquences, immédiates et naturelles ou au moins extrêmement probables que sa conduite engendrera.

[45] À cet effet, dans l’arrêt Syndicat national des employés de l’Hôpital St-Ferdinand (C.S.N.) et al. c. Le Curateur Public et al.[2], la Cour Suprême du Canada, sous la plume de la Juge L’Heureux Dubé, écrit :

« En conséquence, il y aura atteinte illicite et intentionnelle au sens du second alinéa de l’art. 49 de la Charte lorsque l’auteur de l’atteinte illicite a un état d’esprit qui dénote un désir, une volonté de causer les conséquences de sa conduite fautive ou encore s’il agit en toute connaissance des conséquences, immédiates et naturelles ou au moins extrêmement probables, que cette conduite engendrera. Ce critère est moins strict que l’intention particulière, mais dépasse, toutefois, la simple négligence. Ainsi, l’insouciance dont fait preuve un individu quant aux conséquences de ses actes fautifs, si déréglée et téméraire soit-elle, ne satisfera pas, à elle seule, à ce critère.

En plus d’être conforme au libellé de l’art. 49 de la Charte, cette interprétation de la notion d’«atteinte illicite et intentionnelle» est fidèle à la fonction préventive et dissuasive des dommages exemplaires qui suggère fortement que seuls les comportements dont les conséquences sont susceptibles d’être évitées, c’est-à-dire dont les conséquences étaient soit voulues soit connues par l’auteur de l’atteinte illicite, soient sanctionnés par l’octroi de tels dommages: Roy, Les dommages exemplaires en droit québécois: instrument de revalorisation de la responsabilité civile, op. cit., t. I, aux pp. 231 et 232. J’ajouterais que la détermination de l’existence d’une atteinte illicite et intentionnelle dépendra de l’appréciation de la preuve dans chaque cas et que, même en présence d’une telle atteinte, l’octroi et le montant des dommages exemplaires aux termes du deuxième alinéa de l’art. 49 et de l’art. 1621 C.c.Q. demeurent discrétionnaires. »

[46] En l’espèce, vu l’ensemble de la preuve, le Tribunal ne peut conclure que le défendeur a agi avec un état d’esprit qui dénote une volonté de causer les conséquences engendrées par sa conduite et qui justifierait l’octroi de dommages punitifs. Il appert que le défendeur cherchait plus à dénoncer les agissements du demandeur qu’à porter atteinte à sa réputation.

[47] En conséquence, la réclamation du demandeur pour ce qui est des dommages punitifs est rejetée.

[48] En ce qui concerne la demande reconventionnelle du défendeur, le Tribunal est d’avis que celui-ci n’a pas établi, par prépondérance de la preuve, que le demandeur a effectivement contrevenu aux termes de la Déclaration de désistements intervenue en Cour Supérieure ni aux termes de l’ordonnance prononcée par celle-ci.

[49] Tel que déjà mentionné, la preuve ne permet pas de conclure que la parution sur le site Web du demandeur de la pièce D-5, parution que le défendeur lui attribut, a véritablement été publiée à l’instigation du demandeur.

[50] Aux paragraphes 31, 32, 33, 35, 37, 38, 39, 46, 47, 48 et 49 de la défense et demande reconventionnelle amendée, le défendeur allègue ce qui suit :

« 31. Par ailleurs, en décembre 2009 le défendeur a appris que si on mettait son nom « Pierre-André Vaillancourt » dans le moteur de recherche Google, tel qu’il appert de la pièce D-6, son nom apparaît comme faisant l’objet d’une poursuite judiciaire sur un site appartenant au défendeur, www.gayglobe.us, de même que la Déclaration de désistement réciproque pièce P-1;

32. Des recherches plus approfondies sur internet révèlent que le demandeur, en plus d’avoir lui-même diffusé des « informations sur le litige », a aussi créé un lien internet qui associe le nom du défendeur Pierre-André Vaillancourt avec les mots « poursuite judiciaire, outrage au tribunal, dommages moraux et punitifs » le tout tel qu’il appert de la pièce D-6.

33. En outre, le demandeur donne l’impression que le défendeur a commis des actes criminels.

(…)

35. Un article dans la revue Le Point publiée le 7 janvier 2010, pièce D-8, et qui apparaît sur le site www.gayglobe.us appartenant au demandeur, invoque que le demandeur a écrit des courriels haineux, ce qui n’est pas le cas, et qu’il y a eu enquête policière permettant de traduire le défendeur devant les tribunaux.

(…)

37. En effet, le fait même d’associer le nom du défendeur avec des termes tels que « outrage au tribunal, dommages moraux et punitifs, haine, accusations graves » avant même qu’un jugement soit rendu dans le présent dossier, fait preuve de la mauvaise foi du demandeur.

38. En exposant le défendeur dans les articles pièces D-7 et D-8, le demandeur ne cherche qu’à humilier le défendeur et à le harceler.

39. En allant jusqu’à publiquement condamner le défendeur et en introduisant la présente procédure, il appert clairement que le demandeur ne cherche qu’à faire taire les critiques qui osent faire la lumière sur les débordements du demandeur et ainsi empêcher le libre cours des discussions sur internet.

(…)

46. La publication d’articles par le demandeur à propos du défendeur, pièces D-7 et D-8, la diffusion de la requête introductive d’instance sur internet ainsi que la création par le demandeur de mots associant le défendeur avec les mots « outrage au tribunal, dommages moraux et punitifs, haine, accusations graves » causent de graves dommages à la réputation du défendeur, en plus de lui créer de l’angoisse et du stress.

47. Les allégations vexatoires diffusées par le demandeur dans différentes revues et sites internet ont gravement affecté le défendeur qui souffre d’une forme avancée de la sclérose en plaques, tel qu’il appert de l’évaluation médicale du Dr. Marc Girard, neurologue, pièce D-9.

48. Même si le défendeur était conscient que les allégations du demandeur étaient fausses, le défendeur s’est senti atteint dans sa dignité, puisque son intégrité et sa probité ont été mises en doute aux yeux du public à cause des allégations apportant le discrédit sur le demandeur.

49. En invoquant que le défendeur a commis outrage au tribunal, sans aucune condamnation, le demandeur commet un acte de diffamation intentionnel et a contrevenu de façon expresse aux droits du défendeur prévus aux articles 3 et 35 du Code civil du Québec et aux articles 4 , 5 et 23 de la Charte des droits et libertés de la personne. »

[51] Or, relativement aux susdits faits allégués, la preuve ne permet pas de conclure que le demandeur est responsable, de quelque façon que ce soit, du fait que le nom du défendeur apparaît sur le moteur de recherche « Google » avec références à des hyperliens.

[52] De plus, relativement à cette question, la seule incorporation dans un texte d’un hyperlien renvoyant à des soi-disant propos diffamatoires, s’il en est, n’équivaut pas nécessairement à la diffusion de ceux-ci.

[53] À cet égard, dans Crookes c. Newton[3], la Cour Suprême du Canada, sous la plume de la Juge en chef McLachlin et du Juge Fish, écrit ce qui suit :

« [48] … À notre avis, la combinaison du texte et de l’hyperlien peut, dans certaines circonstances, équivaloir à la diffusion des propos diffamatoires auxquels ce dernier renvoie. Il faut conclure à la diffusion de propos diffamatoires par le biais d’un hyperlien s’il ressort du texte que l’auteur adopte les propos auxquels l’hyperlien renvoie, ou y adhère. Si le texte indique qu’il souscrit au contenu auquel renvoie l’hyperlien, l’auteur sera alors responsable du contenu diffamatoire. Il faut démontrer que le défendeur adopte les mots ou les propos diffamatoires, ou y adhère; le simple renvoi général à un site Web ne suffit pas. Ainsi, le défendeur qui renvoie à un site Web anodin en approuvant le contenu ne verra pas sa responsabilité engagée si ce dernier est ultérieurement modifié par l’ajout de propos diffamatoires.

[49] Conclure à la diffusion dans les cas où l’auteur adopte les propos diffamatoires contenus dans un site Web ou y adhère est conforme aux règles générales du droit en matière de diffamation. Pour reprendre les propos de la Cour dans Hill c. Église de scientologie de Toronto, [1995] 2 R.C.S. 1130 , au par. 176:

L’auteur d’un libelle, celui qui le répète, et celui qui approuve l’écrit, se rendent tous trois coupables de libelle diffamatoire. La personne qui prononce pour la première fois la déclaration diffamatoire et celle qui exprime son accord sont toutes deux responsables du préjudice.

[50] Bref, selon nous, l’hyperlien équivaut à de la diffusion s’il ressort du texte qui le contient, interprété en fonction de son contexte, que l’auteur adopte le contenu auquel il renvoie, ou y adhère.

[51] Certes, la règle traditionnelle en matière de diffusion n’exige pas que la personne qui diffuse le contenu approuve celui-ci; il suffit qu’elle le communique à un tiers. Or, la norme de l’adoption des propos ou l’adhésion à ceux-ci que nous proposons d’appliquer aux renvois diffère de cette règle sur le plan conceptuel. En effet, le simple renvoi à des propos sans pour autant les adopter ou y adhérer n’est rien de plus qu’un renvoi neutre sur le plan du contenu. On peut considérer que l’adoption du contenu auquel mène un lien figurant dans un texte, ou l’adhésion à ce contenu, incorpore effectivement le contenu diffamatoire dans le texte. Il en résulte donc que le texte englobe le contenu diffamatoire auquel renvoie l’hyperlien. Ainsi, l’hyperlien, conjugué aux mots et au contexte qui l’encadrent, cesse d’être un simple renvoi, et le contenu auquel il renvoie devient partie intégrante du texte qui l’incorpore. »

[54] En l’espèce, le défendeur n’a pas établi que le demandeur a posé un acte délibéré afin de diffuser des propos diffamatoires le concernant.

[55] Par ailleurs, en ce qui concerne la parution sur Internet des pièces D-7, D-7.1 et D-8 dont se plaint le défendeur, la preuve révèle que le demandeur a bel et bien publié les documents sur son site Web (gay globe). Cependant, le contenu de ces textes n’est pas diffamatoire pour le défendeur. En substance, ils ne font que référer, sans nuance et parfois de façon erronée, au fait que le défendeur a, selon le demandeur, contrevenu à la Déclaration de désistements et à l’ordonnance prononcée par la Cour Supérieure le 6 novembre 2007 et qu’il est poursuivi en dommages-intérêts en raison de cette violation alléguée.

[56] La preuve ne permet pas de conclure que le demandeur a cherché à humilier le défendeur ni à le harceler ni que l’introduction de l’action devant la Cour du Québec avait pour objectif de priver le défendeur de son droit de discourir sur Internet.

[57] Enfin, même si le défendeur n’a pas établi que le demandeur a commis une faute génératrice de responsabilité, le Tribunal constate qu’il n’a pas démontré que son état de santé s’est détérioré en raison des agissements du demandeur ni qu’il a subi une perte de revenus en résultant.

[58] Enfin, considérant les principes dégagés par la jurisprudence en matière de dommages punitifs, le Tribunal est aussi d’avis que le défendeur n’a pas établi que le demandeur a agi avec l’intention de nuire à sa réputation ou à son honneur ou à sa dignité au sens de l’article 49 al. 2 de la Charte.

[59] Dans ces circonstances, la demande reconventionnelle du défendeur est rejetée.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE en partie l’action du demandeur.

CONDAMNE le défendeur à payer au demandeur la somme de 2 000 $ avec intérêts au taux légal ainsi que l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de l’assignation.

REJETTE la demande reconventionnelle du défendeur.

LE TOUT, avec les entiers dépens.

__________________________________

ARMANDO AZNAR, j.c.q.

Me Claude Chamberland

ASSELIN, CHAMBERLAND

Avocat du demandeur et défendeur reconventionnel

Me Claudette Dagenais

DJB AVOCATS

Avocate du défendeur et demandeur reconventionnel

Dates d’audience :

Les 13, 14, 15 et 16 septembre 2011.

Jugement intégral Chayer contre Pierre-André Vaillancourt

Tuesday, February 21st, 2012

Voici le jugement intégral Chayer contre Vaillancourt dans lequel le Juge Aznar confirme une fois pour toutes la crédibilité du journaliste que je suis et les actes de mon opposant. Il confirme que son principal témoin Éric Vinter n’a aucune crédibilité et rejette aussi 100% des arguments et la réclamation de mon opposant. http://www.gayglobe.us/500-22-164824-099.pdf

Jugement Vaillancourt: Publication de la version électronique

Wednesday, February 15th, 2012

Suite au jugement rendu par l’honorable juge Armando Aznar, de la Cour du Québec, district de Montréal, le 13 février 2012 dans l’affaire opposant Roger-Luc Chayer contre Pierre-André Vaillancourt, Gay Globe annonce que le jugement intégral sera publié sur le fil de presse Le Point dès que la version électronique sera disponible. Le demandeur se tiendra alors disponible pour toute entrevue sur les questions soulevées par le jugement.

Silence radio à Rézo!

Friday, December 9th, 2011

Suite à une décision d’un tri-
bunal criminel et à la stupé-
faction des saunas gais, le
Directeur Rousseau se tait et
refuse de se justifier!
Photo: Google.com
Dans notre édition #79, nous vous parlions des déclara- tions du Directeur général de l’organisme Rézo (Séro-Zéro) relatées dans un jugement récent à l’effet que les clients des saunas gais fréquentaient ces établissements car ils sou- haitaient volontairement et en toute connaissance de cause contracter le virus du SIDA. Cela avait mené le Juge Alain Legault, siégeant dans le district judiciaire de Montréal, chambre criminelle, à rejeter le témoignage de M. Rousseau la qualifiant de “pseudo-expertise” car ses propos étaient non-fondés et n’étaient pas appuyés par quelque recherche que ce soit. Les déclarations de M. Rousseau, se présentant comme porte-parole de Rézo (Séro-Zéro) et “spécialiste de la communauté gaie” ne choquaient pas seulement le juge; la Couronne n’en revenait pas que l’on puisse ainsi, en 2011 et surtout de la part d’une organisation oeuvrant dans le milieu homosexuel, tenir des propos aussi graves et géné- ralisés.
Gay Globe Média a tenté d’obtenir une entrevue avec M. Rousseau qui a refusé, tout en s’amusant de nos questions pourtant très sérieuses, de nous expliquer l’origine de son analyse et surtout ce qui ressemble à des préjugés d’une autre époque car il en allait de la réputation non seulement des saunas gais mais des clients de ces établissements.
Gay Globe a aussi tenté d’obtenir les commentaires de trois membres du Conseil d’administration de l’organisme que prétendait représenter M. Rousseau en Cour soit messieurs David Thompson (Président), Conrad DiLorenzo DeBorgie (Vice-président) et Serge Levasseur (Trésorier) surtout pour savoir si le CA avait autorisé par résolution de tels com- mentaires. Nous attendons toujours une retour d’appel de la part de cette organisation réfugiée dans ce qui semble être un silence préoccupant certainement expliqué par les demandes de démission formulées par certains saunas à l’endroit du Directeur-général Robert Rousseau.
VIH/sida : effica- cité prouvée d’un gel microbicide rectal
Par: Informationhospitaliere. com
Pour la première fois, des chercheurs américains dé- montrent l’efficacité d’un gel microbicide anal pour réduire les risques d’infec- tion VIH lors d’un rapport non protégé. D’après les spé- cialistes, les risques d’être contaminé lors d’un rapport anal sont de 20 à 2 000 fois supérieurs à ceux résultant d’un rapport vaginal.
Les chercheurs ont ainsi pu constater, d’une part, que le produit ne causait pas d’ef- fets secondaires notables, et qu’il permettait, d’autre part, de réduire considéra- blement les risques d’infec- tion. D’autres essais sont prévus dès janvier 2012, avec une concentration plus importante d’antirétroviral dans la formule du gel. Af- faire à suivre …

François Robert Lemire condamné pour fraude électorale

Friday, December 9th, 2011

Juin 2011) À Montréal, le 3 janvier 2008, M. Fran- çois-Robert Lemire a pro- duit un faux reçu pour une contribution électorale alors qu’il était représentant offi- ciel du parti République du Québec. M. Lemire a ainsi commis l’infraction prévue au paragraphe 2e de l’article 559.0.1 de la Loi électorale. Après avoir plaidé coupa- ble au constat d’infraction émis contre lui, le contreve- nant s’est vu imposer par le juge une amende de 1 000 $. Étant donné que l’infrac- tion constitue en plus une manœuvre électorale frau- duleuse, M. Lemire se voit privé de ses droits élec- toraux pour cinq ans au niveau provincial, ce qui inclut notamment le droit de vote et le droit de se pré- senter candidat. En outre, il ne pourra, durant cette pé- riode, exercer la fonction de représentant officiel.

Daniel Draws condamné en appel

Thursday, March 17th, 2011

Draws c. Avocats (Ordre professionnel des)

2011 QCTP 18

TRIBUNAL DES PROFESSIONS

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

LONGUEUIL

N° :

505-07-000045-107

DATE :

4 mars 2011

______________________________________________________________________

CORAM : LES HONORABLES MARTIN HÉBERT, J.C.Q.

DENIS LAVERGNE, J.C.Q.

RENÉ DE LA SABLONNIÈRE, J.C.Q.

______________________________________________________________________

DANIEL DRAWS

APPELANT-intimé

c.

MARIE-CLAUDE THIBAULT, en qualité de syndique adjointe du Barreau du Québec

INTIMÉE-plaignante

NANCY J. TRUDEL, en qualité de secrétaire du

Conseil de discipline du Barreau du Québec

MISE EN CAUSE

______________________________________________________________________

JUGEMENT

______________________________________________________________________

JH 5215

JL 1755

JS 0741

[1] Daniel Draws (l’appelant) appelle de la décision sur sanction rendue par le Conseil de discipline (le Conseil) le 2 mars 2010, lui imposant une radiation de cinq ans sur les chefs numéros 3, 4, 5, 6, 8 et 10. Il conteste également l’ordonnance de remboursement des sommes appropriées illégalement au motif que cela constitue une double sanction.

[2] La syndique adjointe du Barreau du Québec (l’intimée) allègue que les sanctions sont justifiées en considérant les critères applicables et la preuve présentée à l’audience. Selon elle, l’ordonnance de remboursement ne constitue pas une double sanction puisqu’elle est prévue à l’article 156 du Code des professions[1] (le Code).

LE CONTEXTE FACTUEL

[3] Le 5 février 2009, l’intimée dépose une plainte comportant 11 chefs d’infraction :

Ø aux chefs 3, 4, 5, 6, 8 et 10, s’être illégalement approprié des sommes reçues à titre d’avances d’honoraires de son client;

Ø aux chefs 1, 2 et 7, ne pas avoir déposé dans son compte en fidéicommis des sommes d’argent remises par son client;

Ø au chef 9, avoir fait de fausses déclarations à son client.

[4] Le jour prévu pour l’audition, le 28 mai 2009, le Conseil constate l’absence de l’appelant malgré un avis dûment signifié. L’audience sur le fond se tient en son absence. Une preuve testimoniale et documentaire est présentée. L’audition se termine le jour même et le dossier est mis en délibéré.

[5] Le 21 juillet 2009, le Conseil dépose sa décision sur la culpabilité de l’appelant le déclarant coupable sur les 11 chefs d’infraction.

[6] Le Conseil entend la preuve et les observations sur sanction de l’intimée le 17 février 2010, toujours en l’absence de l’appelant bien que la décision sur culpabilité et l’avis d’audition sur sanction lui aient été dûment signifiés.

[7] Le 2 mars 2010, le Conseil dépose sa décision sur sanction. Sur les chefs 1, 2, 7, et en regard de l’article 59.2 invoqué au chef 9, le Conseil suspend conditionnellement les procédures. Il aurait été plus convenable de prononcer la suspension conditionnelle des procédures lors du jugement sur la culpabilité. Le Tribunal a répété à plusieurs reprises que c’est une règle de droit que de se prononcer sur cette règle au stade de la culpabilité. Même si le conseil commet une erreur, dans les circonstances il n’y a pas lieu de nous prononcer puisqu’il n’y a pas d’appel de la culpabilité.

[8] Le Conseil impose une radiation temporaire de cinq ans pour les chefs 3, 4, 6, 8 et 10; une radiation temporaire de deux ans sur le chef 9 et de six mois pour le chef 11. Ces radiations doivent être purgées concurremment.

[9] Le Conseil rend également une ordonnance de remboursement de la somme de 8 348 $ à l’acquis du client de l’appelant en vertu de l’article 156 d) du Code.

LE POURVOI EN APPEL

[10] L’appelant se pourvoit en appel contre la décision sur sanction du Conseil.

[11] L’appelant soulève premièrement la sévérité de la radiation temporaire de cinq ans pour les chefs 3, 4, 6, 8 et 10 et deuxièmement l’ordonnance de remboursement à l’acquis de son client au motif que cela constitue une double pénalité.

[12] L’intimée soumet que les sanctions sont conformes à la jurisprudence et que l’ordonnance de remboursement constitue un aspect de la sanction prévue à l’article 156 du Code.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[13] Les deux questions en litige sont les suivantes :

Ø les radiations temporaires de cinq ans constituent-elles une sanction déraisonnable justifiant l’intervention du Tribunal et

Ø l’ordonnance de remboursement est-elle une double pénalité si elle est ajoutée à une radiation?

LA NORME DE CONTRÔLE

[14] L’appelant ne traite pas de cette question dans son mémoire.

[15] Dans le cas d’un appel d’une sanction disciplinaire, l’intimée soumet que la norme de contrôle de la décision raisonnable s’applique.

[16] L’ensemble de la jurisprudence sanctionne ce principe[2]. La norme de la décision raisonnable commande la déférence envers les conclusions du Conseil à moins que celles-ci ne soient déraisonnables.

[17] Dans l’arrêt Dunsmuir[3], la Cour suprême définit ainsi les critères de la décision raisonnable :

[47] [...] Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[18] Pour décider si l’ordonnance de remboursement prévu à l’article 156 du Code constitue une double pénalité, l’intimée énonce dans son mémoire que la norme de la décision correcte s’applique.

[19] L’appelant n’aborde pas ce point dans son mémoire. Il allègue qu’une ordonnance de remboursement en sus d’une radiation constitue une « duplicité de sanction ». Ainsi formulée, il s’agit d’une question de droit qui concerne l’application de l’article 156 du Code. Ce dernier s’applique à toutes les professions, il est d’intérêt général et il ne relève pas d’une loi constitutive du Barreau.

[20] Dans l’arrêt Dunsmuir[4] :

[60] Rappelons que dans le cas d’une question de droit générale « à la fois, d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et étrangère au domaine d’expertise de l’arbitre » (Toronto (ville) c. S.C.F.P., par. 62, le juge LeBel), la cour de révision doit également continuer de substituer à la décision rendue celle qu’elle estime constituer la bonne. Pareille question doit être tranchée de manière uniforme et cohérente étant donné ses répercussions sur l’administration de la justice dans son ensemble. […]

[21] La Cour suprême a réitéré récemment les principes de l’arrêt Dunsmuir dans l’arrêt Smith c. Alliance Pipeline Ltd.[5] :

[26] Selon l’arrêt Dunsmuir, les catégories énumérées ci-après sont susceptibles de contrôle judiciaire soit selon la norme de la décision correcte soit selon celle de la décision raisonnable.  La norme de la décision correcte s’applique : (1) aux questions constitutionnelles; (2) aux questions de droit générales qui sont « à la fois, d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et étrangères au domaine d’expertise de l’arbitre » (Dunsmuir, au par. 60, citant l’arrêt  Toronto (Ville) c. S.C.F.P., section locale 79, 2003 CSC 63 , [2003] 3 R.C.S. 77 , au par. 62); (3) aux questions portant sur la délimitation des compétences respectives de tribunaux spécialisés concurrents; (4) aux questions « touchant véritablement à la compétence ou à la constitutionnalité » (par. 58 à 61).  En revanche, c’est généralement la norme de la décision raisonnable qui s’applique dans les cas suivants : (1) la question se rapporte à l’interprétation de la loi habilitante (ou « constitutive ») du tribunal administratif ou à « une loi étroitement liée à son mandat et dont il a une connaissance approfondie » (par. 54); (2) la question soulève à son tour des questions touchant les faits, le pouvoir discrétionnaire ou des considérations d’intérêt général; (3) la question soulève des questions de droit et de fait intimement liées (par. 51, 53 et 54).

(Soulignement ajouté)

[22] Revenant à l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême écrit que le tribunal de révision doit appliquer sa propre interprétation du texte législatif à l’étude :

[50] […] il ne fait par ailleurs aucun doute que la norme de la décision correcte doit continuer de s’appliquer aux questions de compétence et à certaines autres questions de droit. On favorise ainsi le prononcé de décisions justes tout en évitant l’application incohérente et irrégulière du droit. La cour de révision qui applique la norme de la décision correcte n’acquiesce pas au raisonnement du décideur; elle entreprend plutôt sa propre analyse au terme de laquelle elle décide si elle est d’accord ou non avec la conclusion du décideur. En cas de désaccord, elle substitue sa propre conclusion et rend la décision qui s’impose. La cour de révision doit se demander dès le départ si la décision du tribunal administratif était la bonne.

L’ANALYSE

[23] Examinons dans un premier temps, sous le critère de la décision raisonnable, la sévérité de la sanction. Dans un deuxième temps, sous le critère de la décision correcte, l’ordonnance de remboursement en regard de la double sanction.

- Sévérité de la sanction

[24] Le Conseil apprécie la preuve présentée lors des plaidoiries sur la sanction. Il retient notamment les antécédents disciplinaires de l’appelant. En 2003, il a été déclaré coupable d’avoir fait défaut à six reprises de compléter et de faire parvenir sa déclaration annuelle; en 2005 d’avoir fait défaut de répondre à la syndique et enfin en 2007, s’être fait imposer une radiation de 30 jours après avoir été déclaré coupable d’avoir fait défaut de respecter une ordonnance entraînant une condamnation pour outrage au tribunal.

[25] Dans sa décision sur sanction, le Conseil énumère les circonstances aggravantes du cas à l’étude :

[21] En matière de gravité objective, les gestes reprochés à l’intimé sont graves et sérieux.

[22] De façon plus particulière, l’appropriation des sommes d’argent appartenant à son client et les fausses représentations à ce dernier sont des fautes qui se situent au cœur même de l’exercice de la profession d’avocat.

[23] Elles mettent en cause la probité de l’intimé.

[24] Ce faisant, la conduite de l’intimé porte ombrage à l’ensemble de la profession.

[25] Le public est en droit de s’attendre à une conduite irréprochable de l’avocat, notamment en regard des sommes d’argent qui lui sont confiées ; en agissant comme il l’a fait, l’intimé a rompu le nécessaire lien de confiance qui doit prévaloir dans les relations de l’avocat avec son client.

[26] C’est pourquoi, des sanctions sévères s’imposent dans les circonstances[6].

[...]

[42] Ces sanctions sont justes et raisonnables dans les circonstances.

[43] Elles prennent en compte notamment l’absence totale de collaboration de l’intimé tout au long du processus disciplinaire.

[44] Elles prennent de plus en compte le fait que l’intimé n’ait pas remboursé son client.

[45] Non seulement l’intimé n’a-t-il pas remboursé son client, mais il lui a menti de façon délibérée en lui représentant qu’il avait pris une entente avec le ministère du Revenu alors que cela était faux, avec pour conséquence que son client a dû payer la somme de 4 082.80 $ audit ministère.

[46] Le conseil prend de plus en compte les antécédents disciplinaires de l’intimé et notamment sa culpabilité aux reproches d’avoir fait défaut de répondre à la syndique dans le dossier 06-04-01944 en 2004, les gestes reprochés à l’intimé sous le onzième chef dans le présent dossier constituant une récidive.[7]

(Soulignements ajoutés)

[26] Le Conseil a considéré les décisions antérieures rendues dans des circonstances analogues[8]. Dans le contexte d’appropriations illégales de sommes d’argent variant entre 5 000 $ et 12 000 $, les radiations temporaires imposées sont de l’ordre de 4 et 5 ans.

[27] La décision du Conseil satisfait aux critères de la décision raisonnable énoncée par la Cour suprême dans l’arrêt Dunsmuir[9].

[28] L’appelant n’a pas démontré de motifs remettant en question la transparence ou l’intelligibilité du processus décisionnel suivi par le Conseil. Il a amplement justifié sa décision sur sanction eu égard à la preuve. La sanction s’inscrit dans la norme d’une décision raisonnable.

[29] Ce motif d’appel est rejeté parce que non fondé.

- L’ordonnance de remboursement

[30] Examinons maintenant la légalité de l’ordonnance de remboursement à l’acquis de la personne spoliée. L’argument de l’appelant veut que le Conseil en prononçant une radiation de cinq ans ait considéré tous les facteurs atténuants et aggravants pour se prononcer. En imposant un remboursement, le Conseil impose une double pénalité puisqu’il a déjà considéré ce fait comme une circonstance aggravante au paragraphe 44 de sa décision.

[31] L’article 156 du Code énonce :

156. Sanctions imposables. Le conseil de discipline impose aux professionnels déclarés coupable d’une infraction visée à l’article 116, une ou plusieurs des sanctions suivantes sur chacun des chefs contenus dans la plainte :

[...]

b) la radiation temporaire ou permanente du tableau, même si depuis la date de l’infraction il a cessé d’y être inscrit;

[...]

d) l’obligation de remettre à toute personne à qui elle revient une somme d’argent que le professionnel détient ou devrait détenir pour elle;

Radiation et amende. Le conseil de discipline impose au professionnel déclaré coupable d’avoir posé un acte dérogatoire visé à l’article 59.1, au moins la radiation temporaire et une amende conformément aux paragraphes b et c  du premier alinéa. Il impose au professionnel déclaré coupable de s’être approprié sans droit des sommes d’argent et autres valeurs qu’il détient pour le compte de tout client ou déclaré coupable d’avoir utilisé des sommes d’argent et autres valeurs à des fins autres que celles pour lesquelles elles lui avaient été remises dans l’exercice de sa profession, au moins la radiation temporaire conformément au paragraphe b du premier alinéa.

[32] L’article 156 du Code énumère les différentes sanctions qui peuvent être imposées. Il énonce que « une ou plusieurs des sanctions » mentionnées peuvent être imposées. La radiation temporaire ou permanente est prévue à l’alinéa b et l’ordonnance de remboursement à l’alinéa d.

[33] Le texte de l’article est explicite quant à l’aspect cumulatif de ces sanctions. Rien dans le texte n’indique qu’il s’agit de sanctions disjonctives. Le Conseil, après avoir reconnu la culpabilité d’un professionnel et avoir envisagé une sanction pour la protection du public, examine la possibilité de dédommager la personne victime d’une appropriation illégale par le professionnel fautif.

[34] L’ordonnance de remboursement dénote de la part du Conseil une préoccupation pour la victime et les inconvénients qu’elle a subis. Cette ordonnance s’intègre à la mission de protection du public du Barreau et du Conseil en limitant, en autant que faire se peut, les difficultés occasionnées à la victime par l’acte dérogatoire du professionnel déclaré coupable.

[35] Le Tribunal lors de l’examen de l’article 156 d) du Code écrit dans la cause de Garneau c. Notaires (Ordre professionnel des)[10] :

[51] [...] L’objectif de cette sanction est d’accorder aux personnes lésées la possibilité de récupérer les sommes d’argent confiées au professionnel, mais détournées par celui-ci.

[36] Ce motif d’appel également n’est pas retenu puisque l’imposition d’une ordonnance de remboursement à l’égard de la victime en sus d’une radiation temporaire ne constitue pas une double sanction.

CONCLUSION :

[37] L’appelant ne convainc pas qu’il y a lieu d’intervenir. La décision du Conseil en regard de la radiation temporaire de cinq ans satisfait aux critères de la décision raisonnable énoncée par la Cour suprême dans l’arrêt Dunsmuir[11].

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

REJETTE l’appel de la décision du Conseil de discipline du Barreau du Québec rendue le 2 mars 2010.

CONDAMNE l’appelant au paiement des déboursés tant en première instance qu’en appel.

__________________________________

MARTIN HÉBERT, J.C.Q.

__________________________________

DENIS LAVERGNE, J.C.Q.

_________________________________

RENÉ DE LA SABLONNIÈRE, J.C.Q.

M. Daniel Draws

APPELANT-intimé

Agissant personnellement

Me Marie-Claude Thibault, en qualité de

Syndique adjointe du Barreau du Québec

INTIMÉE-plaignante

Agissant personnellement

Me Nancy J. Trudel, en qualité de secrétaire du Conseil

de discipline du Barreau du Québec

Mise en cause

Date d’audience :

8 février 2011

C.D. No :         06-09-02466

Décision sur culpabilité rendue le 21 juillet 2009

Décision sur sanction rendue le 2 mars 2010


[1] L.R.Q., c. C-26.

[2] Pigeon c. Daigneault, [2003] R.J.Q. 1090 (C.A.); Schrier c. Tribunal des professions et al, [2004] R.J.Q. 2432 ; Laliberté c. Huneault, 2006 QCCA 929 .

[3] Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190 .

[4] Id.

[5] 2011CSC 7.

[6] D.c., p. 46 , 47 et 49.

[7] D.c., p. 49.

[8] Lapierre c. Goyette, décision du comité de discipline, 06-05-02090, 17 janvier 2006. (4 ans) ; Lapierre c. Rupp, décision du comité de discipline, 06-04-01937, 3 mai 2005. (4 ans); Richard c. Bellemare, décision du comité de discipline, 06-08-02454, 12 mars 2009. (5 ans).

[9] Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190 .

[10] 2002 QCTP 068 .

[11]Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190 .

Jugement contre l’homophobie Thibault-Wouters

Tuesday, February 15th, 2011

TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE

Canada

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

Montréal

N° :

500-53-000313-096

DATE :

16 décembre 2010

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

DANIEL DORTÉLUS

AVEC L’ASSISTANCE DES ASSESSEURES :

Me Claudine Ouellet

Mme Judy Gold

COMMISSION DES DROITS DE LA PERSONNE ET DES DROITS DE LA JEUNESSE, agissant en faveur de THÉODORUS WOUTERS et ROGER THIBAULT

Demanderesse

c.

Gordon Lusk

Défendeur

-et-

THÉODORUS WOUTERS et ROGER THIBAULT

Plaignants

JUGEMENT

1.         objet du litige

[1] Le Défendeur a-t-il, par ses agissements, ses propos et ses attitudes, harcelé les Plaignants et porté atteinte à leur droit à la reconnaissance et à l’exercice en pleine égalité des droits fondamentaux des Plaignants, sans distinction fondée sur leur orientation sexuelle; tel est l’objet de ce litige.

[2] Il s’agit d’un recours intenté par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (« CDP ») qui agit pour les plaignants, Wouters et Thibault, qui avaient déposé, le 3 février 2005, auprès d’elle, une plainte contre le Défendeur, concernant trois incidents qui remontent à la période de 2001 à 2004.

[3] Dans sa demande introductive d’instance, déposée au greffe de la Cour le 20 octobre 2009, la CDP réclame, pour chacun des Plaignants, la somme de 7 000 $ à titre de dommages moraux, et 3 000 $ à titre de dommages punitifs.

[4] Dans son mémoire, le Défendeur allègue que les Plaignants utilisent le système judiciaire de manière abusive.

[5] Comme moyen préliminaire, le Défendeur présente une requête pour faire déclarer les Plaignants plaideurs vexatoires et faire rejeter la demande.

[6] Sur le fond du litige, le Défendeur nie les agissements et les gestes discriminatoires et les propos homophobes qui lui sont reprochés.

2.         décision sur le moyen préliminaire soulevé par le défendeur

[7] Voici les motifs de la décision du Tribunal rendue séance tenante rejetant la requête du Défendeur pour faire déclarer les Plaignants plaideurs vexatoires.

[8] Dans sa requête, le Défendeur allègue que les Plaignants ont intenté contre ses voisins, de nombreux recours judiciaires. Au soutien de sa requête, il produit une série de pièces qui consistent en des copies de procès-verbaux, de transcriptions de notes sténographiques, de jugements dans des causes dans lesquels les Plaignants ont été impliqués devant les tribunaux.

[9] Il y a lieu de faire un survol des sept causes auxquelles réfère le Défendeur, dans lesquelles les Plaignants sont impliqués.

[10] La première réfère à une cause devant la Cour municipale de Montréal impliquant le Défendeur et les Plaignants.

[11] Selon le procès-verbal, daté du 7 juin 2006, produit par le Défendeur, ce dernier est acquitté de l’infraction initiale, après avoir reconnu les faits en signant un engagement selon l’article 810 du Code criminel. (R. c. Lusk Gordon[1]).

[12] La deuxième cause réfère à un jugement rendu le 26 novembre 2002, dans R. v. Walker[2]. Dans cette affaire, la Cour du Québec a acquitté monsieur Walker des accusations de harcèlement criminel portées contre lui pour des incidents impliquant les Plaignants qui remontent à la période de mai à septembre 2000.

[13] Le Défendeur produit un jugement rendu le 16 mai 2002, par la Cour supérieure, dans la cause Walker c. La Reine, le juge a retenu qu’il n’y avait pas de preuve suffisante pour établir un bris de condition de la part de M. Walker.

[14] Il produit un jugement dans la cause portant le numéro 500-53-000269-074. Dans cette cause, le Tribunal des droits de la personne du Québec condamne deux défendeurs à payer 5 000 $ à titre de dommages moraux et 2 500 $ à titre de dommages exemplaires en réparation à la violation des droits de messieurs Wouters et Thibault en vertu des articles 4, 6 et 10 de la Charte des droits et libertés.

[15] Le Défendeur produit un jugement rendu le 22 mai 2003, dans le dossier 500-53-000178-028, par le Tribunal des droits de la personne qui suspend l’instance en attendant l’issu de deux autres causes pendantes devant la Cour supérieure.

[16] Au soutien de sa requête, le Défendeur produit copie de la demande introductive d’instance d’un recours en dommages impliquant M. Walker qui poursuit les Plaignants pour la somme de 270 000 $, devant la Cour supérieure.

[17] Le Défendeur a appelé M. Walker comme témoin au soutien de sa requête.

[18] La CDP s’objecte au témoignage de M. Walker.

2.1       Décision sur l’objection à la preuve testimoniale, au stade de la présentation d’un moyen préliminaire.

[19] Le Tribunal est d’avis qu’il y a lieu de limiter la preuve sur la requête du Défendeur aux allégations contenues dans la requête, aux pièces et transcriptions d’interrogatoire produit au dossier.

[20] Il n’existe aucun motif valable pour s’écarter de la règle générale voulant que le Tribunal saisi d’une requête préliminaire dispose d’une telle requête à partir des allégations contenues dans la requête, des procédures et des pièces produites au dossier, en d’autres termes, le tribunal doit reposer son analyse sur l’ensemble du dossier constitué lors de la présentation d’une telle requête[3].

[21] Le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu de permettre à M. Walker de témoigner sur la requête du Défendeur, ce serait aller à l’encontre de la règle de la proportionnalité de permettre d’importer dans ce dossier la preuve d’un autre litige devant la Cour supérieure qui n’implique pas le Défendeur en l’espèce.

[22] La suggestion du Défendeur d’appliquer les dispositions prévues aux règles de pratique de la Cour supérieure pour traiter sa requête, n’est pas retenue par le Tribunal qui préfère s’inspirer des dispositions des articles 54.1 et suivants du Code de procédure civile[4] (« C.p.c. »), qui remplacent l’article 75 C.p.c.[5].

[23] Règle générale, le juge saisi d’une requête comme celle présentée par le Défendeur ne tient pas d’enquête et n’entend pas des témoins. Il dispose de la requête à partir des allégations de la requête et des transcriptions de l’interrogatoire, des pièces au dossier et, s’il y a lieu, de l’affidavit qui appuie la requête, en vertu de l’article 88 du Code de procédure civile.

[24] Le test que le Défendeur doit rencontrer est celui de l’article 54.2 C.p.c., soit d’établir sommairement l’abus ou le caractère vexatoire des procédures.

[25] Les pièces produites au soutien de la requête suffisent, pour permettre au Tribunal de disposer de la requête.

[26] Il n’y a pas lieu d’entendre, comme témoin, M. Walker qui a une cause pendante devant la Cour supérieure contre les Plaignants. Il y a lieu de circonscrire le débat devant le Tribunal, aux faits pertinents à ce litige, ce en application de la règle de la pertinence et de la proportionnalité.

[27] Pour ces motifs, l’objection au témoignage de M. Walker sur la requête préliminaire du Défendeur est maintenue.

2.2       Décision sur la requête pour rejet de la demande au motif que les Plaignants sont des plaideurs vexatoires

[28] L’article 113 de la Charte énonce :

« 113. Le Tribunal peut, en s’inspirant du Code de procédure civile (chapitre C-25), rendre les décisions et ordonnances de procédure et de pratique nécessaires à l’exercice de ses fonctions, à défaut d’une règle de procédure ou de pratique applicable.

Règles par le Tribunal.

Le Tribunal peut aussi, en l’absence d’une disposition applicable à un cas particulier et sur une demande qui lui est adressée, prescrire avec le même effet tout acte ou toute formalité qu’auraient pu prévoir les règles de procédure et de pratique. »

[29] Les règles de pratique du Tribunal des droits de la personne du Québec ne contiennent pas de dispositions qui s’adressent à la question soulevée, soit l’abus par les plaignants des tribunaux et du système judiciaire.

[30] Depuis sa création en 1989, au fil des ans, le Tribunal a eu à disposer d’un nombre significatif de requêtes présentées en vertu des dispositions du Code de procédure civile, telles des requêtes : en radiation d’allégués (articles 168 , 184 C.p.c.), requête en irrecevabilité et en exception déclinatoire (articles 163 , 164 , 165 C.p.c.)  requêtes présentées en vertu des articles 20 , 46 , C.p.c.[6]

[31] Il est exact d’affirmer que le Tribunal s’est inspiré largement de diverses dispositions du Code de procédure civile en appliquant l’article 113 de la Charte.

[32] Dans la cause C.D.P.D.J. (Lapointe) c. Doucet[7], le Tribunal s’est inspiré des dispositions du Code de procédure civile pour ordonner la radiation d’une série d’allégués du mémoire de la défenderesse.

[33] Dans la cause C.D.P.D.J. c. Centre de la petite enfance Les Pandamis[8], la requérante est autorisée par le Tribunal à présenter sa requête en vertu des articles 20 et 46 du Code de procédure civile et 113 de la Charte.

[34] Dans l’affaire C.D.P.D.J. c. Centre de la petite enfance le château des adorables[9], le Tribunal suit l’article 113 de la Charte pour appliquer les nouvelles dispositions des articles 54.1 et suivants C.p.c..

[35] La décision Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Société des casinos du Québec Inc.[10] s’oriente vers un courant jurisprudentiel opposé.

[36] Les objectifs du législateur lors de la création du Tribunal[11], qui a opté pour la célérité et l’efficacité du recours pour sanctionner les atteintes aux droits protégés par la Charte, sans pour autant compromettre les principes fondamentaux de justice qui sont, entre autres, protégés par la Charte, cadrent bien avec les principes, codifiés aux articles 54.1 et suivants du Code de procédure civile, qui permettent à un Tribunal d’intervenir d’office pour sanctionner les abus qui peuvent résulter, entre autres, d’une demande en justice, de l’abus de procédures, de délais déraisonnables, d’un comportement quérulent et vexatoire.

[37] L’article 54.2 C.p.c. crée un régime qui cadre bien aux principes d’application et d’interprétation de la Charte en matière de preuve, il en est de même pour l’article 54.3 C. p. c. qui autorise le Tribunal à imposer certaines conditions quant à la poursuite du recours.

[38] Vu les objectifs visés en 1989, lors de la création du Tribunal, vu le libellé de l’article 113 de la Charte, il est logique et réaliste d’inférer que les règles de pratique du Tribunal des droits de la personne auraient pu prévoir des dispositions afin de permettre au Tribunal de soulever d’office la question de délai déraisonnable et établir un mécanisme similaire à celui des articles 54.1 et suivants C.p.c. pour sanctionner le déni de droit résultant des délais déraisonnables et assurer la célérité et l’efficacité du recours auprès de la TDP.

[39] Avec égards pour l’opinion contraire, il n’existe pas de motif valable pour s’écarter de cette approche qui s’inscrit dans la culture d’assainissement de l’activité judiciaire.

[40] Pour ces motifs, afin de disposer de la requête préliminaire du Défendeur, le Tribunal estime tout à fait justifié de s’inspirer des dispositions prévues aux articles 54.1 C.p.c et suivants qui codifient différentes règles et sanctions en matière d’abus de procédures qu’on retrouvait à l’article 75.1 C.p.c., et dans certaines règles de procédure des tribunaux qui ont été élaborées par les tribunaux au fil des ans.

[41] Le Tribunal fait sien le raisonnement de l’honorable Chantal Coriveau, de la Cour supérieure, qui résume bien, dans l’affaire Matic c. Trottier[12], les objectifs de l’article 54.1 C.p.c. en ces termes :

« [22]    L’article 54.1 est de droit nouveau et s’inscrit dans la volonté du législateur d’assainir l’activité judiciaire en fournissant des outils additionnels aux tribunaux pour sanctionner des comportements abusifs dans l’institution et le déroulement des procédures judiciaires.

[…]

26]        Le Tribunal souligne qu’à l’origine, comme le précise le législateur, ce nouvel article visait beaucoup plus à sanctionner les poursuites baillons pour éviter les déséquilibres entre les justiciables dans certains dossiers d’intérêt public.  Or, une lecture du nouvel article 54.1 révèle qu’il dépasse largement l’objectif avoué à l’origine et permet au Tribunal d’intervenir dans les cas d’abus dans tous les genres de dossier.

[27]       Ce nouvel article en appelle à la discrétion du tribunal mais ce dernier est d’avis que cette discrétion doit être exercée judiciairement puisqu’il faut s’assurer que tous les justiciables ont l’occasion de faire valoir leurs droits sans mettre fin de façon précipitée ou prématurée au processus normal et légitime entrepris. Seul l’excès de l’exercice des droits doit être sanctionné par le Tribunal. »

(Soulignements ajoutés)

[42] Au sujet de l’exercice excessif et déraisonnable du droit d’ester en justice reproché dans un jugement récent[13], le juge Gascon, de la Cour supérieure, résume les principes :

« [81]    […] le test applicable est aujourd’hui connu.  Une doctrine[14] et une jurisprudence[15] bien établies cernent une dizaine de caractéristiques ou traits permettant d’identifier si un plaideur doit être assujetti aux restrictions qu’imposent les articles 54.5 C.p.c. et 84 R.p.c.

[82]       Ces facteurs indicatifs se résument pour l’essentiel à ceci :

1º   Le plaideur quérulent fait montre d’opiniâtreté et de narcissisme;

2º   Il se manifeste généralement en demande plutôt qu’en défense;

3º   Il multiplie les recours vexatoires, y compris contre les auxiliaires de la justice.  Il n’est pas rare que ses procédures et ses plaintes soient dirigées contre les avocats, le personnel judiciaire ou même les juges, avec allégations de partialité et plaintes déontologiques;

4º   Il réitère les mêmes questions par des recours successifs et ampliatifs : la recherche du même résultat malgré les échecs répétés de demandes antérieures est fréquente;

5º   Les arguments de droit mis de l’avant se signalent à la fois par leur inventivité et leur incongruité.  Ils ont une forme juridique certes, mais à la limite du rationnel;

6º   Les échecs répétés des recours exercés entraînent à plus ou moins longue échéance son incapacité à payer les dépens et les frais de justice afférents;

7º   La plupart des décisions adverses, sinon toutes, sont portées en appel ou font l’objet de demandes de révision ou de rétractation;

8º   Il se représente seul;

9º   Ses procédures sont souvent truffées d’insultes, d’attaques et d’injures.

[83]       Pour sa part, le Tribunal ajouterait à cette énumération deux autres traits assez courants en la matière :

a)     La recherche de condamnations monétaires démesurées par rapport au préjudice réel allégué et l’ajout de conclusions atypiques n’ayant aucune commune mesure avec l’enjeu véritable du débat[16];

b)     L’incapacité et le refus de respecter l’autorité des tribunaux dont le plaideur quérulent revendique pourtant l’utilisation et l’accessibilité.

[84]       Cela dit, pour conclure à un comportement quérulent, excessif et déraisonnable sur la foi de ces caractéristiques, il ne faut pas qu’elles soient nécessairement toutes présentes.  Chaque cas est d’espèce.  C’est la globalité de l’analyse qui importe. »

(Soulignements ajoutés)

[43] C’est en appliquant ces principes que le Tribunal dispose de la requête du Défendeur pour faire déclarer les Plaignants plaideurs vexatoires.

[44] Comme première difficulté posée par la requête du Défendeur, le recours est intenté devant le Tribunal par la Commission qui agit pour les Plaignants.

[45] Il est vrai que les Plaignants peuvent être qualifiés de « partie » au litige, cependant, la demanderesse en l’instance, c’est la Commission.

[46] Comme deuxième difficulté, avant d’arriver devant le Tribunal, les Plaignants ont déposé une plainte devant la Commission des droits de la personne qui, après enquête, a déterminé qu’il y a preuve suffisante pour saisir le Tribunal du dossier.

[47] Dans un des jugements produits au soutien de la requête du Défendeur, les Plaignants se sont fait accorder, en sus des dommages moraux, des dommages exemplaires, ce qui est loin de supporter la position du Défendeur voulant que les Plaignants utilisent de manière abusive les Tribunaux.

[48] Suite au recours intenté en vertu du Code criminel contre le Défendeur, dans la cause R. c. Lusk Gordon[17], le Défendeur a négocié et conclu une entente avec le poursuivant, soit le procureur de la Ville, il a reconnu les faits reprochés et a accepté de signer un engagement selon l’article 810 du Code criminel.

[49] L’ensemble de ces facteurs amène le Tribunal à conclure que le Défendeur n’a pas réussi à établir sommairement l’abus ou le caractère vexatoire des procédures. Le test de l’article 54.2 C.p.c.[18] n’est pas rencontré; en conséquence, la requête doit être rejetée.

3. FACTS AND EVIDENCE

3.1       Evidence submitted by the Plaintiffs

[50] The plaintiffs, Roger Thibault, 64, and Théodorus Wouters, 68, have resided on  Parkdale Avenue, Pointe-Claire since 1978.

[51] They were the first homosexual couple to formalize their union under Quebec’s Civil Union Law.

[52] The defendant, Gordon Lusk, 57, has resided on the same street as the Plaintiffs since 1990 with his wife and their two sons.

[53] There had been no personal contact between the Plaintiffs and the Defendant prior to the winter 2001.

[54] During the winter 2001, the Plaintiffs, returning home from the supermarket, immobilized their vehicle, a 1994 black Volvo station wagon, at the stop sign at the intersection of Parkdale and Belmont in Pointe-Claire.

[55] When turning left onto Parkdale, the Plaintiffs found themselves face to face with Gordon Lusk who was playing hockey with a group of children in the middle of the street, with the hockey net placed on the yellow line of the intersection. The Plaintiffs honked the car horn so that the children remove their hockey equipment and allow them to pass.

[56] Mr. Lusk, who was in front of the car, lifted a hockey stick in a simulated gesture of hitting the hood of the car.

[57] When he then approached the side door of the vehicle, Mr. Thibault rolled down his window and the Defendant said, “You didn’t make your stop. You turned at 100 miles an hour, you fucking faggots”. Mr. Thibault then raised the car window and left.

[58] The Plaintiffs mentioned that due to the limited visibility at the intersection of Parkdale and Belmont, it is impossible not to drive slowly and come to a full stop when approaching the 4-stop intersection, especially when children are playing on the street.

[59] On June 26, 2003, Mr. Thibault was driving east on St-Louis Avenue in Pointe-Claire. He stopped at the stop sign at the corner of St-Louis and Broadview and was about to turn left onto Broadview when he heard someone loudly shouting from behind.

[60] Through his rear-view mirror he saw Mr. Lusk driving his red truck and yelling at him. Mr. Thibault nevertheless continued on his way. When he arrived at the stop sign at the corner of Braebook and Delmar, Mr. Lusk, who had taken an alternative route, was already there, at the stop sign on his right.

[61] The Plaintiff specified that he had been driving in a zone of 50 km an hour whereas Mr. Lusk’s alternative route, east on St-Louis and north on Delmar, was one of 30 km per hour. The Plaintiff concluded, therefore, that the Defendant had to have been driving fast in order to reach the intersection before him.

[62] Mr. Thibault gestured to Mr. Lusk to proceed through the intersection. The Defendant then shouted, “Asshole, I will break your fucking mouth”.

[63] Mr. Lusk, subsequently, advanced his car, after which Mr. Thibault turned left onto Delmar, driving behind Mr. Lusk. Mr. Lusk then repeatedly drove forward and braked with the apparent intention of causing an accident.

[64] When they reached the intersection of Delmar and des Canots, the Defendant immobilized his vehicle at the stop sign. As Mr. Lusk wasn’t advancing his vehicle, Mr.Thibault began to drive around him on the left. Mr. Lusk then began to drive in such a way that he was pushing Mr. Thibault towards the left and onto the sidewalk. The Plaintiff, consequently, stopped the car and called 911 with his cellular phone.

[65] Mr. Thibault began to drive again while telling the police exactly where he and the Defendant were located. When they were near the service road of Highway 40, the Plaintiff informed the police that a piece of metal had fallen from Mr. Lusk’s truck. Upon directives from the police, the Plaintiff then continued on his way and is unaware of what happened afterwards

[66] On April 24, 2004, Roger Thibault left his house at 11:44 a.m. to go downtown to help friends with their garage sale, returning at 6:36 p.m. His precision, he explained, is due to a surveillance camera on his property that recorded his departure and arrival times on that particular day.

[67] On his way home, he drove north on Parkdale towards his residence. Prior to reaching the intersection of Parkdale and Belmont, he saw a group of children playing on the street.

[68] He immobilized his vehicle at the stop sign at the intersection, then slowly advanced and, as the children continued to play on the street, he stopped his car and honked the horn so that the children remove their hockey equipment and allow him to pass. As he drove through, the children, on both sides of his car, called him “fag” and simulated the gesture of hitting his car.

[69] A few minutes after he arrived home, he and Mr. Wouters heard someone yelling loudly and hitting the metal gate which is always kept locked.

[70] While Mr. Wouters went outside to see what was going on, Mr. Thibault called 911. Mr. Lusk accused Mr. Wouters, who had not been in the car, of driving dangerously, endangering the life of his children and called him “you fucking faggot”. When asked by Mr. Wouters to repeat these words, the Defendant replied, “Well that’s what you call yourself, isn’t it?”

[71] Mr. Thibault then went outside and saw the Defendant, who appeared agitated, walking aggressively back and forth between the driveway and the gate.

[72] When asked, during cross-examination, why he didn’t approach Mr. Lusk in a civil manner to see why he had come, Mr. Thibault replied that Mr. Lusk was shouting and banging on the fence in such an aggressive and violent manner that it was out of the question to approach him to calm down.

[73] Mr. Wouters repeatedly asked the Defendant to get off their property. Mr. Lusk moved back and said “Come here. I will break your fucking mouth, you fucking faggot. You fuckers in the chocolate and you players in the brown. It is your profession, isn’t it?”

[74] Mr. Lusk, subsequently, moved back again, made obscene gestures with his finger several times and proceeded towards his car, leaving the Plaintiffs’ property. He then returned towards the middle of the street, crouching and making inviting gestures with his hands and repeated at least twice “I will kill you. I will kill you both here”.

[75] During cross-examination, Mr. Thibault affirmed that at no time did he or Mr. Wouters invite Mr. Lusk to fight, nor call him “maudit nazi”, “asshole” or “chicken”. He added that it was unthinkable that he would provoke Mr. Lusk, considering that he had never taken part in a physical confrontation and that the Defendant was in considerably better physical shape due to his military training.

[76] Mr. Lusk then left, the police arrived to the Plaintiffs’ home and a second police car was dispatched to Mr. Lusk’s residence.

[77] The police, not wanting to take a written declaration from the Plaintiffs on-site, invited them to submit a written declaration at the police station, which they subsequently did.

[78] Mr. Lusk, consequential to the incident of April 24, 2010, signed a Recognizance to keep the peace and be of a good behavior, pursuant to Section 810 of the Criminal Code, in addition to the commitment of a $500 donation to a community group.

[79] Unknown to Mr. Thibault, Mr. Lusk was also acquitted of assault charges and uttering death threats, resulting from this incident.

[80] Due to past incidents of vandalism to the Plaintiff’s property and vehicle, which are unrelated to the Defendant in the present case, the organization Indemnisation des victimes d’actes criminels (IVAC) purchased a surveillance camera that was installed on their property. The incident of April 24, 2004 was filmed by the surveillance camera. A copy of the film was introduced as evidence during the hearing.

[81] The Plaintiff also submitted an extract of the municipal by-law RM 2565 of the Ville de Pointe-Claire, emphasizing Article 19.5 which states, “Il est interdit d’utiliser la rue pour y pratiquer des jeux ou des sports, sauf dans les rues ou parties de rues qui auront été déclarées « Rues de Jeux » par le Conseil municipal.”

[82] He claimed that the children could have played street hockey elsewhere in the neighbourhood, notably on an asphalted surface at a nearby park and in an empty parking lot behind a nearby school. He had in fact received confirmation from the Commission scolaire Lester-B.-Pearson that this lot was available to the community-at-large during the weekends.

[83] Around 3 p.m. on September 17, 2004, Mr. Wouters, while driving to the grocery store, saw Mr. Lusk’s red van driving in his direction when in front of at 74 Parkdale.  When Mr. Wouters began to pass a parked car, Mr. Lusk, with a big grin on his face, veered towards the Plaintiff’s car, leaving him barely any space in which to pass. Mr. Lusk then continued to drive.

[84] During cross-examination, Mr. Thibault stated that in May 2008, he had called 911 in regards to the son of Mr. Lusk who, for approximately one month, had repeatedly driven by the Plaintiff’s house at night, decelerated his vehicle and honked his horn with the intent of waking up the Plaintiffs. Although the surveillance camera had captured the passing car on film, the colour of the car was not identifiable.

[85] One night, around May 7, Mr. Thibault, standing at the window when the car passed, clearly saw the son of Mr. Lusk as well as Mr. Lusk’s vehicle, a red Ford station wagon. Following the submission of his declaration to the police the next morning, these incidents stopped.

[86] During cross-examination, Mr. Thibault stated that he is unaware of an incident that occurred at a dépanneur, alleging that he had called 911 regarding homophobic comments made to him by, among others, the children of Mr. Lusk.

[87] During cross-examination, Mr. Wouters categorically denied that, on a regular basis in the mornings, he would drive by Mr. Lusk’s son and his friends who were walking to school, stop his vehicle, watch them and attempt to have them speak to him.

[88] The Plaintiff, on the contrary, claimed that on two occasions he had been obliged to stop because Mr. Lusk’s son had thrown himself in front of his car when he was driving.

[89] Although the Plaintiffs could not specify the exact number of times they had contacted the police regarding incidents with the Lusk family, Mr. Thibault mentioned that they had both written to and met Commandant St-Pierre of poste de quartier (PDQ) 5 in 2004 regarding the children of Mr. Lusk, as they couldn’t drive by without being insulted and called “queer” and “fag”.

[90] Mr. Wouters stated that it was notably Alex Lusk, the son of the Defendant, who would call him “queer” each time he passed by.

[91] The Plaintiffs affirmed that the police officers of PDQ 5 never proposed that they participate in a mediation session with Mr. Lusk.

[92] As a result of these events, the Plaintiffs felt humiliated, insulted and profoundly hurt. They could never have imagined the use of such vulgarity to describe a homosexual relationship; the use of such language was “inhuman and disgraceful”.

[93] Due to the harassment they endured, they couldn’t sleep, suffered from depression, took anti-depressants and were followed by psychologists. In addition, they found it all the more humiliating to repeat the degrading expressions to the police and to the Human Rights Commission.

[94] During cross-examination, the Plaintiffs stated that the numerous incidents of harassment, intimidation and vandalism that the Plaintiffs had been subjected to, prior to the incident concerning the Defendant, had contributed to their depression.

[95] They began taking antidepressants in 2002. Even though the events involving Mr. Walker and X had been stressful, the events with Mr. Lusk were worse due to the fear he instilled in them by his aggressive behavior and his threats. Notably, their dosages of antidepressants were increased subsequent to the April 24, 2004 incident with Mr. Lusk.

[96] Mr. Wouters, a creative artist, added that he has been unable to create since 2001 as a result of the cumulative events that had occurred, including the Walker, Inglis and X cases as well as the many incidents of vandalism the Plaintiffs had been subjected to, vandalism that is unrelated to the Defendant in the present case.

[97] During cross-examination, the Plaintiff stated that that he was not diagnosed with obsessive-compulsive disorder and, in the year 2000, his behavior regarding the Walker case was neither obsessive nor paranoid but rather a natural reaction considering the circumstances.

[98] The Plaintiffs stated, during cross-examination, that they do not see themselves as activists in the defense of gay rights. They fight for their own rights, which in turn sets an example for others to come forward and denounce harassment based on sexual orientation.

[99] Aware of the media attention given to other cases in which the Plaintiffs were involved, Mr. Thibault had no recollection of media attention regarding this particular case and was unaware of the articles that appeared in the magazine Fugue and in the Suburban regarding this case.

[100] Michel Lejeune, 61, has known Roger Thibault for approximately ten years.

[101] On April 24, 2004, Mr. Lejeune organized a garage sale, as on May 1 he was moving from Wolfe Street to Hochelaga Street in Montreal. Mr. Thibault arrived at his house at approximately noon or 12:30 p.m, spent the afternoon helping him with the sale and departed at approximately 6 p.m.

3.2       Evidence submitted by the Defendant

[102] Commandant Jacquelin St-Pierre of poste de quartier (PDQ) 5 of the Service de la police de la Ville de Montréal, located at 395 St-Jean Boulevard, Pointe-Claire, has known the Plaintiffs since his arrival to PDQ 5 in November 2000.

[103] He noted that the principal interventions made by the police regarding the present case occurred between April 2004 and June 2004 and, in chronological order, he reviewed each one.

[104] In view of the increasing tension between the Plaintiffs and the Defendant during this period, Commandant St-Pierre decided that precautionary steps had to be taken to appease the situation in order to avoid a possible deplorable outcome.

[105] On June 22, 2004, a meeting was held at PDQ 5 between Gordon Lusk, Barbara Yule, their 2 children and two community relations officers, preceded by a meeting between Gordon Lusk and Commandant St-Pierre. The purposes of these meetings were to clarify the issues and to determine the possibility of initiating a mediation/conciliation process between the Defendant and the Plaintiffs.

[106] The necessity to proceed cautiously was emphasized in order not to interfere with the inquiry that was underway. The Plaintiffs were not invited to attend these meetings.

[107] Gordon Lusk and his wife stated that they were open to participate in mediation/conciliation with the Plaintiffs but without their children’s presence.

[108] Commandant St-Pierre recalled that Roger Thibault, whom he had contacted regarding his interest to participate in mediation/conciliation, had responded that he would seek legal advice on the matter.

[109] Commandant St-Pierre affirmed, however, that the mediation/conciliation process involving the Plaintiffs and the Defendant never in fact happened.

[110] The Defendant, Gordon Lusk, having graduated with a Bachelor of Science in Mechanical Engineering in 1976, is currently working as a general contractor.

[111] During the incident of 2001, there were approximately ten or twelve neighbourhood children, between the ages of 9 and 15, playing street hockey in front of the Defendant’s house, at the intersection of Belmont and Parkdale, including his own children, ages 11 and 13 at the time.

[112] Being a parent who is protective of his children, he found it desirable that the children play in front of his house: He knew where they were and could watch over them as well.

[113] The Defendant noticed a black Volvo station wagon that didn’t come to a stop at the intersection of Belmont and Parkdale. Although the speed of the car wasn’t excessive, it was nevertheless dangerous because, by not stopping, there was very little time for the children to react.

[114] The car stopped among the children and, being the only adult around at the time, the Defendant walked to the driver’s side of the car.

[115] He affirmed that he was neither carrying a hockey stick nor playing hockey with the children that day.

[116] Both Plaintiffs were in the car and the Defendant asked them what the problem was. They indicated that children shouldn’t be playing hockey on the street, that it was dangerous and that there are laws.

[117] The Defendant replied “Okay, I understand that. They’re not all my kids. I’ll do my best. But if you don’t like it today, drive on another street, that’s all I can say. I mean, I can’t do anything about it. I can’t send twelve kids home; it’s not my authority to do so”.

[118] He did not mention to the Plaintiffs that they could kill the children. He said, “We don’t want children getting hurt on the street because they’re having fun. Just slow down”.

[119] He categorically denied the Plaintiff’s allegation that he simulated hitting the hood of the car with a hockey stick and mentioned that none of the children present swung their stick at the car.

[120] He added that he believed it important to handle the situation in a calm manner and set an example for the children who were present during his interaction with the Plaintiffs.

[121] He stated that he did not call the Plaintiffs “fucking faggots”. Other than recognizing them as people in the neighbourhhood who drove by a lot, it was his first encounter with the Plaintiffs, he didn’t know who they were and wasn’t aware of their sexual orientation.

[122] There was no further contact between the Defendant and the Plaintiffs until June 2003.

[123] On June 26, 2003, Gordon Lusk was driving north on Broadview. Having immobilized his vehicle at the four-way stop intersection of Broadview and St-Louis, he noticed a gray Volkswagen Beetle, being driven by Roger Thibault, arrive at the stop sign on his left. As the Defendant was the first to arrive at the intersection, he proceeded to turn right and drove east on St-Louis and north on Delmar towards the Trans-Canada highway.

[124] He specified that he was then driving at approximately 30 to 40 km/hour.

[125] Upon reaching the three-way stop intersection at the corner of Delmar and Braebook, he saw the same Volkswagen approaching the stop sign on his left. He noticed that Mr. Thibault appeared somewhat agitated as Mr. Lusk, being the first to arrive at the intersection, was the first to proceed through the intersection.

[126] Mr. Thibault then turned left onto Delmar north, drove around the Defendant’s truck and cut him off with his Volkswagen. Subsequently, Gordon Lusk drove around the Volkswagen and continued on his way.

[127] The Defendant mentioned that the incident described by Mr. Thibault at the corner of Delmar and des Canots never occurred. Furthermore he never repeatedly drove forward and braked in front of the Plaintiff’s vehicle, nor did he drive with the intention of pushing the Plaintiff’s car towards the sidewalk.

[128] He added that he never rolled down his window and never made contact with the Plaintiff. He did not make any threats and did not say “Asshole, I will break your fucking mouth”.

[129] On April 24, 2004 around 5:15 p.m., while the Defendant was in his office in the garage and a group of 10 to 12 children were playing outdoors, his son, Alex, came to see him and said “Those two guys did it again”. When asked which two guys he was referring to, Alex responded, “The guys up the street. They almost ran us over.” The Defendant, following further questioning of his son, understood that his son was referring to the Plaintiffs.

[130] Although the Defendant had not personally witnessed the incident, his son appeared very agitated and specified that one of the children had almost been hit.

[131] The Defendant, after having gone outside to talk to the children who confirmed the event, called the police thinking that a potential infraction had been committed or somebody could have gotten hurt.

[132] He stated that the police, however, wouldn’t come because they themselves hadn’t witnessed the incident.

[133] After considerable consideration, the Defendant decided to go see the Plaintiffs en route to a barbecue at a neighbour’s house.

[134] The intent of this visit, he explained, was to ensure the safety of his children and their friends. His reasoning was that the police were not going to help him that day, that he was a reasonable person, that he didn’t know the Plaintiffs and whether or not they were reasonable, however if he approached them in a reasonable fashion, he could have a dialogue with them.

[135] As he walked towards the Plaintiff’s house, he felt anxious due to the potentially confrontational situation.  He specified that he was not aggressive.

[136] Having never been to the Plaintiff’s residence, the Defendant was unaware that he couldn’t access the front door. He arrived to the metal gate and, pondering what to do as he could neither knock on the door nor ring the doorbell, he shook the gate and called out, “Hello, anybody home? Hello, hello” in order to let the Plaintiffs know that he was there.

[137] The Defendant affirmed that he did not shake the metal gate in an aggressive or violent manner. He noted that the gate, nonetheless, does make noise when you touch it because it is made out of metal.

[138] Within five to ten seconds, Mr. Wouters came outside, initially appearing calm. Unaware of who had been driving during the incident earlier that day, Mr. Lusk told the Plaintiff that he was concerned about the safety of the children playing on the street and asked him to slow down so that people don’t get hurt.

[139] The Defendant was shocked by the Plaintiff’s aggressive reaction and hostile reply, including “I know all about you, I know where you live….”

[140] The Defendant then tried to explain to Mr. Wouters that the only reason he had come was to talk about the children. He claimed that the conversation with Mr. Wouters was not productive as the Defendant was trying to make his point whereas the Plaintiff refused to hear his point.

[141] Gordon Lusk said that when Mr. Thibault arrived outside, about a minute later, the actual aggressive behavior began. Describing Mr. Thibault’s arrival to the gate, the Defendant said “That to me really set the tone of the whole anxiety because from the second he arrived, he was calling me names”, such as “asshole”, “chicken” and “Nazi”.

[142] He added that the principal interaction that took place at the time was between himself and Mr. Thibault. He claimed to have made no derogatory comments to the Plaintiffs during the heated argument that ensued.

[143] He stated that the Plaintiffs were not listening to his request regarding the safety of the children; they demonstrated no open-mindedness in this regard.

[144] The Defendant explained that he then found himself in a situation where Mr. Wouters was telling him to get off his property while, at the same time, Mr. Thibault was calling him back to fight.

[145] Having no desire to trespass or to fight, the Defendant walked back and forth a couple of times in front of the gate, as was shown on the video, partly due to anxiety and also because he wanted to leave the Plaintiff’s property as per Mr. Wouters’ request all the while returning to respond to Mr. Thibault who wanted to fight.

[146] The Defendant testified that when off the Plaintiffs’ property, he did not provoke a fight. In reaction to Roger Thibault’s invitation to fight, he said, “Okay, now I’m off your property. If you really are intending on fighting me, then come out on the public street and we’ll fight it out. That’s what you want.”

[147] He specified that his hand gestures, as viewed on the video, signified “right here, right now”. He then drove off.

[148] His entire stay in front of the Plaintiff’s house lasted approximately four minutes. The gate was never opened and during the entire time the Plaintiffs were on one side of the gate while he was on the other side.

[149] The Defendant denied that he had made obscene gestures with his finger while walking back and forth. He stated that, in actual fact, he was gesticulating with his hands, as he normally does when he expresses himself.

[150] The Defendant affirmed that he did not call the Plaintiffs “fucking faggots”, nor did he say, “You’re a fucker in the brown and players into chocolate”. He neither made death threats nor threatened to hurt them.

[151] Two minutes after having left the Plaintiffs’ residence, the police caught up with the Defendant in front of his neighbour’s house. In the presence of his wife and his neighbour, Mr. Paris, the Defendant was accused of breaking and entering.

[152] The Defendant explained to the two constables that he had gone to see the Plaintiffs regarding the incident of street hockey and dangerous driving, that he had tried to be reasonable with the Plaintiffs, and that he neither broke into their house nor assaulted them.

[153] Concerned about the accusation of breaking and entry, Gordon Lusk went to the police station on April 29, 2004 to see if he should contact a lawyer or take any other action. The desk sergeant told him that no report of the April 24 incident had been submitted and it was likely that nothing would subsequently happen.

[154] Criminal charges, however, were brought against him several months later, of which he was acquitted in June 2006.

[155] The Defendant mentioned that he signed the Recognizance to keep the peace and be of a good behavior, pursuant to Section 810 of the Criminal Code, upon the advice of his lawyer at the time, with the understanding that it was not an admission of wrong-doing.

[156] In May 2004, the Defendant received a letter from Commandant St-Pierre regarding the by-law that forbids playing certain sports on the streets of Pointe-Claire. He had been unaware of the by-law until then.

[157] During a subsequent meeting with Commandant St-Pierre, the Defendant explained that he understood and wanted to uphold the by-law. However to restrict his own two children from playing on the street whereas 10 or 12 others would be playing would be difficult for him.

[158] During this meeting, Commandant St-Pierre suggested mediation/conciliation with the Plaintiffs. The Defendant agreed, stating that he, his wife and two children would be available at any time.

[159] He understood that a mediation session was scheduled for June 22, 2004. He and his family went to the police station that day, fully expecting to meet the Plaintiffs in the hope of finally resolving the contentious issues.

[160] With surprise and disappointment, he and his wife learned that the Plaintiffs had not been invited to the meeting.

[161] Gordon Lusk mentioned that he had served in the Canadian Army for 21 years, had retired the rank of lieutenant colonel in the year 2000 after having commanded the Black Watch for four years. His years of training had taught him that if people have a problem, they should, if at all possible, discuss it and resolve it among themselves.

[162] During his many years in military service, he had authority over hundreds of people, and was required to provide fair judgment in order to properly exercise his authority. He had therefore received many years of “tolerance training – how to deal with the minorities, the sexual orientations, whatevers that exist within an organization.”

[163] In the unit he commanded, his job was to protect all in his regiment from harassment, be they heterosexual or homosexual, and he was very well trained in this aspect.

[164] The Defendant mentioned that his personal physician of 25 years is homosexual as is his massage therapist. He has never had any homophobic feelings towards them nor towards anybody else.

[165] The Defendant affirmed that he raised his children to respect others and never permitted, encouraged or ignored derogatory comments of any nature about anybody.

[166] He stated that in the heat of the moment and despite the difficult relations with the Plaintiffs, he never had any homophobic feelings towards them. He had gone to see the Plaintiffs on April 24 with the sole intent of discussing the safety of his children and their friends.

[167] Gordon Lusk testified that he has no recollection of any incident that occurred between him and Théodorus Wouters on September 17, 2004, alleging that he endangered the Plaintiff while driving in front of 74 Parkdale.

[168] Being a general contractor, he regularly drives his company vehicle on Parkdale.  Although he is the primary driver of his vehicle, it is occasionally driven by his employees. As the date of September 17 has no particular significance for him, he has no idea who was driving his vehicle that day.

[169] Alex Lusk, currently a journalism student at Concordia University, stated that he witnessed the interaction between his father and the Plaintiffs during the incident that occurred in the winter of 2001.

[170] He claimed that when his father approached the Plaintiff’s car to talk to them, the Plaintiffs started screaming at him.

[171] He never heard his father say “fucking faggot” or “I am going to kill you” and didn’t see him swinging a hockey stick in front of the Plaintiffs’ car.

[172] Alex Lusk recalled that when he was 15 years old and playing street hockey in front of his house, the Plaintiffs would sometimes drive through the stop sign at the intersection, often at an excessive speed.

[173] Although he hadn’t mentioned these incidents to anyone, at approximately 3 or 4 p.m. on April 24, 2004, he went to talk to his father following an incident of dangerous driving involving Roger Thibault.

[174] Regarding the incident of May 2008, Alex testified that the police came to his house regarding the honking of a car horn the previous night in front of the Plaintiff’s house. They stated that the incident occurred at midnight and had happened many times before as well.

[175] Alex claimed that he never honked his car horn in front of the Plaintiff’s house. In fact he had returned home the previous night after 1 a.m.

[176] In addition, he noted that there are two other red Ford Focus station wagons in the neighbourhood that are the same model as his own.

[177] Alex testified that he never encountered the police regarding an incident at a dépanneur involving the Plaintiffs, nor ever saw the Plaintiffs at a dépanneur.

[178] The witness stated that he never called the Plaintiffs derogatory names and denied the Plaintiff’s allegation that he called them “queer” or “fucking faggot” when they would drive by.

[179] However, he noted that it was possible that somebody else called them “queer”, “fucking faggots” or “faggots” during one of the many times that the children yelled at the Plaintiffs as they drove by.

[180] He added that he doesn’t remember having heard anyone call them these names “but it’s possible but I don’t think so”.

[181] Barbara Yule, the Defendant’s spouse, works as a recruiter in the pharmaceutical industry.

[182] She declared that she was the first to notice, approximately 9 or 10 years ago, the Plaintiffs driving at an excessive speed when the children were playing street hockey, then stop their vehicle and shake their hands.

[183] She was witness to many subsequent incidents whereby the Plaintiffs would drive quickly, appearing as if they wouldn’t stop, and then quickly immobilize their vehicle very close to where the children were playing.

[184] Worried that someone would get hurt, she told her husband, “I don’t know what the problem is but there are these two gentlemen in a car; every day they’re up and down the street when the kids are playing hockey. They look like they’re not going to stop. And I think, oh God, they’re going to hit somebody.”

[185] Barbara Yule testified that during the incident of winter 2001, she was outside when the Plaintiffs stopped their car quickly, scaring the children who were playing street hockey. They appeared angry because the children weren’t getting off the street quickly enough.

[186] She claimed that the Plaintiffs rolled down the car window and began yelling at everybody, including her husband who asked the Plaintiffs to please slow down and not to speed on a residential street when children are playing hockey. She mentioned that her husband “said something to them like, ‘Well, they’re only playing street hockey. If you don’t like it, move away’ or something like that.”

[187] Barbara Yule, who was standing approximately 12 -14 feet from the Plaintiff’s vehicle, affirmed that her husband never said “fucking faggots”, adding that he would never say that.

[188] Regarding the incident of April 24, 2004, Barbara Yule stated that she felt very embarrassed when, in front of many people at a neighbourhood barbecue, the police accused her husband of breaking and entering.

[189] Ms. Yule described another incident whereby she was standing on the porch when the Plaintiffs immobilized their vehicle after having passed through the intersection.

[190] Her son, Alex, eating a bagel on his way to the park, threw a piece of the bagel onto the street.  She claimed that, at the time, she thought to herself, “This will become an incident, for sure”.

[191] Fifteen minutes later, the police arrived to her home alleging that Alex had been throwing things at the Plaintiffs’ car, calling them names and yelling at them. She told the police that she had been standing on the porch the entire time that this incident allegedly occurred, that her son had thrown a piece of bagel onto the street and wasn’t anywhere near the Plaintiff’s car.

[192] Jordan Dumoulin, 20, is employed as an assistant physical education teacher at a special needs school and an instructor. He has known the Lusk family for 14 years.

[193] The witness testified that during the autumn 2002, while playing street hockey in front of the Lusk’s house, Mr. Thibault drove by and inadvertently squashed the tennis ball with which the children were playing. The children, 12 years old at the time, were upset at the loss of the ball as they had no others.

[194] Drew Paris, one of the eight children present at the time, yelled, “fucking fag”. Subsequently a few other children, including Alex Lusk, joined in “a chorus of fag”.

[195] Mr. Thibault, understandably very upset, subsequently turned his car around, immobilized his vehicle in front of the children and yelled, “Vous n’avez pas vu la fin de moi”.

[196] The witness understood, by the Plaintiff’s comment, that his parents would be informed of the incident and he would therefore be reprimanded by them and by Mr. Lusk for having made these derogatory comments.

[197] Jordan Dumoulin apologized on behalf of those present during the incident, acknowledging that it was wrong and hurtful to have made these comments to the Plaintiff.

[198] He recalled that on April 24, 2004 at approximately 5 p.m., he was playing street hockey with Nicholas Lusk and another friend when Mr. Thibault, not having immobilized his vehicle at the stop sign, not only drove by quickly but also drove close to one of the children. He stated, “It was close. You could feel a brush of the mirror on the side of your arm”.

[199] Frightened and upset, as it felt as if they were almost hit by a car, the friends went to talk to Mr. Lusk who had not been present during the incident. Mr. Lusk appeared very calm and said, “Alright guys, I’m going to have to go over and discuss this”.

[200] The witness stated that Mr. Lusk then proceeded to “put on his shoes and left. There was no anger. It seemed like he didn’t really want to go and talk to them, didn’t want to confront them at all but went because there was a close encounter”.

[201] During cross-examination, Jordan Dumoulin mentioned that he and his friends did not play street hockey in a neighbourhood park because the sport couldn’t be played on grass and there was not sufficient pavement on which to play. In addition, the school grounds and nearby parking lots were private property, and therefore not accessible to them.

4. analysis

4.1       Decision on the objection to the filing of new evidence

[202] At the start of the last day of the hearing, which had been scheduled to hear a witness for the defense who had been previously unavailable to testify, the Defendant presented a motion to file new evidence which consisted of a document, signed by the Plaintiffs, that had been taken from a Superior Court file involving the Plaintiffs and another Defendant.

[203] The lawyer of the Commission objected to the filing of the document as evidence.

[204] The objection was based on:

· The confidential nature of the document that had been signed during a settlement conference presided by a Superior Court judge in a case unrelated to the present litigation.

· The lack of relevance of the document to the present litigation.

· The doctrine of res judicata, considering that the Tribunal had already rendered its decision regarding the Defendant’s motion to have the Plaintiffs declared vexatious litigants.

[205] The Defendant argued that the right to confidentiality had been renounced, as the Plaintiffs, having introduced the document in another judicial proceeding, had rendered it public.

[206] The principle of confidentiality regarding all that is said or written during the conference is codified in article 151.1 of the Code of Civil Procedure[19].

[207] According to the Court of Appeal in the decision Weinberg c. Ernst & Young, l.l.p.[20]:

« 49.     Bien qu’il soit reconnu que l’entente de règlement est confidentielle, cela n’empêche pas un juge d’en permettre l’accès à un tiers – et même le dépôt en preuve, le cas échéant – si cela s’avère nécessaire ou utile pour permettre à ce justiciable de faire valoir pleinement ses droits dans un litige. »

[208] A judge, however, cannot, without due consideration, lift the confidential status of a document forming part of a settlement. The Court of Appeal has established guidelines in this regard:

« 61.     Si on doit énoncer un critère permettant de vérifier si un document confidentiel a une apparence de pertinence, je préconiserais celui de la connexité véritable. »

[209] The Tribunal recognizes that the filing as evidence of a document signed in the context of a settlement agreement that the parties have undertaken contractually to keep confidential, can constitute a renunciation of the privilege of confidentiality by the party that files the document.

[210] The affidavit presented by the Defendant as evidence is insufficient to establish the renunciation of the privilege of confidentiality. Such a renunciation must be explicit.

[211] The Tribunal, moreover, considers that the two other arguments brought up by the Commission are well-founded, as similar act evidence presented by the Defendant does not apply to the case at hand. This litigation must be adjudicated based on the evidence relating to the three incidents involving the Defendant and the Plaintiffs.

[212] Notwithstanding the issue of credibility, the document that the Defendant wants to produce and which the Tribunal has examined is neither pertinent nor actually related to the present litigation. The Superior Court’s file involving the Plaintiffs and a third party has no relevance to the three incidents that are at the core of the present litigation.

[213] The Defendant did not establish valid grounds that would justify the revocation of the decision initially rendered by the Tribunal during the proceedings, which had denied the motion to have the Plaintiffs declared vexatious litigants.

[214] The Tribunal sustains the objection in conformity with the Court of Appeal’s decision in the Weinberg case previously cited. Consequently, the filing as evidence of a document taken from a Superior Court’s file, not involving the same parties, is not authorized.

5.         The nature of the questions before the Tribunal

1- Did the Defendant discriminatorily harass the victims, thus interfering with their rights to the safeguard of their dignity and their right to the peaceful enjoyment of their property without distinction or exclusion based on their sexual orientation, contrary to sections 4, 6 and 10.1 of the Charter?

2- If so, what damages are the victims entitled to?

6. APPLICABLE LAW

[215] The relevant sections of the Charter read as follows:

« 4. Every person has a right to the safeguard of his dignity, honour and reputation.

6. Every person has a right to the peaceful enjoyment and free disposition of his property, except to the extent provided by law.

10. Every person has a right to full and equal recognition and exercise of his human rights and freedoms, without distinction, exclusion or preference based on race, colour, sex, pregnancy, sexual orientation, civil status, age except as provided by law, religion, political convictions, language, ethnic or national origin, social condition, a handicap or the use of any means to palliate a handicap.

Discrimination exists where such a distinction, exclusion or preference has the effect of nullifying or impairing such right.

10.1 No one may harass a person on the basis of any ground mentioned in section 10.

49. Any unlawful interference with any right or freedom recognized by this Charter entitles the victim to obtain the cessation of such interference and compensation for the moral or material prejudice resulting therefore. In case of unlawful and intentional interference, the tribunal may, in addition, condemn the person guilty of it to punitive damages. »

[216] The Charter does not define the concept of harassment as it does the legal concept of discrimination.

[217] In the case Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse[21] the Tribunal had reviewed the relevant jurisprudence pertaining to the definition of the concept of harassment, as related to section 10.1 of the Charter:

« 51.     The courts have since consistently reiterated and refined the prohibition against discrimination based on sexual orientation, yet research continues to show that homophobia remains prevalent and that a very significant proportion of homosexuals experience homophobic violence, be it verbal, psychological, physical or sexual.

52.        Clearly, the impact of homophobic acts cannot be underestimated.

53.        Over the years, the Tribunal has rendered a number of decisions dealing specifically with discrimination or harassment based on sexual orientation. In Bronzage Évasion, a young homosexual was fired because his employer, the director of the tanning salon, deemed that he was not virile enough. The defendant employer added, referring to prejudices about gay men’s flirting habits, that her salon was not a “dépanneur” but a respectable place. The evidence established that the victim lost his job and had been discriminated against because of his sexual orientation.

54.        In another case, the defendant was condemned for harassing a homosexual neighbour who was a tenant in the same building. The defendant repeatedly insulted the victim in connection with his sexual orientation, encouraged fellow tenants to mock and demean the victim and otherwise made the victim’s life in the building extremely difficult. In that case, the Tribunal quoted the following definition of homophobia from the Groupe de travail mixte contre l’homophobie:

Toutes les attitudes négatives pouvant amener au rejet et à la discrimination, directe et indirecte, envers les gais, lesbiennes, les personnes bisexuelles, transsexuelles et transgenres, ou à l’égard de toute personne dont l’apparence ou le comportement ne se conforme pas aux stéréotypes de la masculinité ou de la féminité.

56.        In 1982, the right to freedom from discriminatory harassment was added to the Charter, as explained by the Court of Appeal in Habachi, to eradicate unacceptable behaviour tolerated for too long, primarily towards women and homosexuals.

57.        In Habachi, Justice Baudouin explained that harassment may consist of repeated words or acts. However, a single act may also be sufficient to constitute harassment under certain circumstances, “à condition cependant qu’il soit particulièrement grave et sérieux”. Justice Baudouin’s analysis thus confirmed what the Tribunal had stated in other words in the first instance:

La durabilité qu’une conduite vexatoire doit également comporter pour constituer du harcèlement peut donc tantôt être établie par la répétition de certains actes, tantôt par leur gravité dans la mesure où leurs effets ont alors un caractère de continuité.

58.        More recently, in a case of racial harassment in the workplace, the Tribunal reviewed the relevant jurisprudence and concluded that the victim had suffered from repeated acts and words attacking his race. Coworkers and superiors repeatedly mistreated the victim, shouting racial slurs at him, put up a poster of a monkey meant to refer to him at his workplace, and conspired to lodge unfounded complaints of sexual harassment against him, ultimately leading to his dismissal.

59.        As a result of discriminatory harassment, a victim often suffers violations of his rights to the safeguard of his dignity and to the peaceful enjoyment of his property, rights guaranteed respectively at sections 4 and 6 of the Charter. »

[Références de bas de page omises]

[218] It is neither necessary nor useful to re-examine the principles established in the jurisprudence cited in Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. X[22], which, according to the Tribunal, reflect the state of the law and apply to the case at hand.

Le contexte social /Social context

[219] Selon les enseignements de la Cour suprême dans l’arrêt R. c. S. (R.D.)[23], le juge peut se faire une idée claire du contexte ou de l’historique, ce qui est essentiel pour rendre justice, il peut aussi se faire une idée sur sa propre compréhension et son expérience de la société au sein de laquelle il vit et travaille. Ce processus d’ouverture est non seulement conforme à l’impartialité, il peut aussi à juste titre être considéré comme une condition préalable essentielle.

[220] La Cour suprême dans ce même arrêt cite avec approbation l’énoncé du juge de Grandpré dans l’arrêt Committee for Justice and Liberty[24] voulant qu’une personne raisonnable est censée connaître le passé de discrimination dont ont souffert les groupes défavorisés de la société canadienne que protègent les dispositions de la Charte relatives aux droits à l’égalité. Il s’agit de facteurs dont le juge peut prendre connaissance d’office.

[221] Appliquant ces enseignements de la Cour suprême, le Tribunal estime nécessaire de jeter un regard sur le contexte social existant au moment où surviennent les incidents au cœur de ce litige.

[222] Le rapport, De l’égalité juridique à l’égalité sociale[25], qui résulte de la démarche de consultation entreprise par un Groupe de travail mixte mis sur pied, suite au mandat confié, en 2005, à la Commission des droits de la personne par le ministre de la Justice[26], dresse un portrait de la situation relative à l’homophobie au Québec.

[223] On y retrouve les résumés de diverses recherches et enquêtes réalisées au Québec au cours des dernières années qui permettent de faire le point sur la discrimination envers les personnes homosexuelles et de cerner l’ampleur de l’homophobie, dans divers secteurs. Voici quelques extraits pertinents :

« Deux  sondages d’opinion effectués  par Léger Marketing 2003 et 2004, révèlent que  près du tiers des Québécois ont déjà constaté dans leur entourage des attitudes ou des comportements homophobes, qu’une majorité de Québécois estiment que les comportements homophobes sont aussi graves que les comportements xénophobes ou racistes[27].

[…]

Au Québec, les personnes de minorités sexuelles doivent souvent composer avec un environnement social homophobe, malgré des avancées sur le plan juridique. Diverses études recensées dans le présent contexte démontrent que l’homophobie a un effet direct sur le bien-être et la santé mentale de ces personnes.

Les personnes homosexuelles et bisexuelles constituent une population à risque ou plus vulnérable sur le plan psychosocial, en raison non pas de leur orientation sexuelle, mais de la stigmatisation sociale, ainsi que des attitudes et comporte­ments homophobes à leur égard. L’homophobie envers les gais et les lesbiennes se manifeste souvent par de la violence, qu’elle soit verbale, psychologique, physi­que ou sexuelle. Environ 50 % des personnes homosexuelles (jeunes ou adultes) ont été victimes de violence homophobe au cours de leur vie . L’homophobie, qu’elle vienne de l’extérieur ou qu’elle soit intériorisée, provoque un stress important ayant des incidences sur le bien-être de ces personnes, de même que sur leur santé mentale et physique[28].

[…]

La présence d’homophobie en milieu scolaire

Au Québec, l’existence d’un problème d’homophobie en milieu scolaire fait de plus en plus consensus. Une étude réalisée en 2002 auprès de 158 intervenant-e-s du milieu scolaire (en majorité du personnel enseignant et professionnel) de la Commission scolaire de Montréal révèle que :

· 85 % constatent la présence d’homophobie;

· 79 % considèrent pertinentes les actions préventives contre l’homophobie;

· 76 % se disent peu ou très peu informés sur les réalités homosexuelles;

· 74 % disent avoir besoin d’information ou de formation.

En 2005, une étude exploratoire conduite par le Groupe de recherche et d’inter­vention sociale [GRIS] de Québec démontre que l’homosexualité constitue une source importante de malaise et d’inconfort pour une vaste proportion de jeunes qui fréquentent l’école. On apprend également dans cette étude que :

· 76 % des enseignant-e-s et des intervenant-e-s disent entendre des commen­taires homophobes à l’école;

· 55 % disent en entendre dans la cour de récréation;

· 36 % disent en entendre à la cafétéria;

· 34 % disent raconter des histoires de « tapettes » sous le couvert de l’humour (principalement des hommes)[29].

[…]

Homophobie dans l’environnement de travail

Selon une recherche menée récemment à travers le Québec sur l’homophobie en milieu de travail auprès de 786 gais et lesbiennes, 80 % des personnes interro­gées disent avoir été témoins de blagues offensantes concernant l’homosexualité ou les personnes homosexuelles et 16 % disent en avoir été elles-mêmes la cible. […][30]. »

[Références de bas de page omises]

[224] La discrimination fondée sur l’orientation sexuelle est pourtant interdite au Québec dans la Charte depuis 1977.

[225] L’inclusion du motif de l’orientation sexuelle à titre de motif analogue est reconnue par la Cour suprême depuis 1995, en matière de droit à l’égalité au sens de l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés[31].

[226] En 1999, le législateur québécois adoptait la Loi modifiant diverses dispositions législati­ves concernant les conjoints de fait[32] (Loi 32) qui accorde aux conjoints de même sexe les mêmes droits et privilèges que ceux existants pour les conjoints hétérosexuels.

[227] Au Canada depuis 2005, le mariage entre personnes de même sexe est reconnu.

[228] Bien que la discrimination contre les personnes homosexuelles soit interdite depuis belle lurette et que les législations ont reconnu aux personnes de minorités sexuelles des droits qui leur avaient été refusés pendant longtemps incluant notamment le droit au mariage, des préjugés persistent dans les mentalités qui ne semblent pas avoir suivi l’évolution législative.

[229] Force est de constater que la discrimination envers les personnes homosexuelles est bien présente au Québec, durant la période où se produisent les incidents au cœur de ce litige. Elle est parfois subtile, parfois directe, elle se manifeste souvent par la violence qu’elle soit verbale, psychologique, elle a des effets néfastes.

[230] Un adulte sur deux, gai ou lesbienne, développe des idées suicidaires en raison de la violence homophobe subie à l’école. Le taux de suicide chez les jeunes gais et bisexuels est de six à seize fois plus élevé que chez les autres jeunes[33]. En milieu de travail, il est reconnu que le harcèlement psychologique et des remarques homophobes peuvent causer une lésion professionnelle[34].

[231] Une personne raisonnable est censée connaître le passé de discrimination dont ont souffert les groupes défavorisés de la société canadienne que protègent les dispositions de la Charte relatives aux droits à l’égalité[35], cette même personne raisonnable ne saurait ignorer le contexte social contemporain dans lequel se produit la discrimination reprochée, selon le Tribunal.

[232] Le contexte social qui permet de situer l’environnement sociétal existant dans lequel surviennent les gestes discriminatoires reprochés est un facteur, parmi d’autres, que le Tribunal prend en considération, tout en respectant les règles de preuve applicables.

Burden of proof

[233] In the present case, the Complainant, CDP, alleges the infringement of the Plaintiffs’ rights to full and equal recognition and exercise of their fundamental rights, without distinction based on their sexual orientation. The CDP claims that, on three distinct occasions, the Defendant had made vexatious and offensive remarks to the Plaintiffs as well as having harassed them because of their sexual orientation.

[234] In order for the Defendant’s alleged remarks and conduct to be found discriminatory, the CDP must prove that there is a connection between the alleged remarks and conduct and the ground protected by the Charter. The mere presence of a ground of discrimination cannot suffice in itself[36].

[235] In Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Périard, the Tribunal, per Justice Audet, of the Québec Human Rights Tribunal at the time, writes:

« [53]    En matière de discrimination, le fardeau de la preuve pèse sur la personne qui allègue qu’un acte donné a enfreint l’un de ses droits fondamentaux reconnus par la Charte. Elle doit alors convaincre le Tribunal par des faits établis que son droit est violé par l’acte illicite du défendeur visé.

[54]       Pour réussir un recours fondé sur l’article 10 de la Charte qui prohibe la discrimination, la Commission, au nom de la victime, doit démontrer l’existence de trois éléments :

1.         une distinction, exclusion ou préférence;

2.         fondée sur un des motifs énumérés au premier alinéa de l’article 10;

3.         qui a pour effet de détruire ou de compromettre le droit, en pleine égalité, à la reconnaissance et à l’exercice de tout autre droit ou liberté de la personne.

[55]       Il est par ailleurs bien établi qu’en matière de discrimination, une victime n’a pas à prouver l’intention de discriminer ou de porter préjudice, pas plus que l’auteur d’une discrimination ne peut se justifier en prouvant sa bonne foi ou ses bonnes intentions.

[56]       Enfin, qu’il s’agisse de prouver une violation à un droit reconnu par la Charte ou d’établir une justification à l’encontre de cette violation, le degré de preuve demeure celui propre aux affaires civiles, à savoir la prépondérance des probabilités.

[57]       La partie en demande peut notamment faire sa preuve aux moyens de présomption de fait, lesquels sont laissés à l’appréciation du Tribunal. Ces dernières doivent cependant être graves, précises et concordantes. Ainsi, la preuve offerte, pour être convaincante, doit aller au-delà des « vagues impressions » ou des « pures hypothèses[37]» »

[Références de bas de pages omises]

[236] Applying these principles, the Tribunal considers it necessary to examine each of the incidents in question and to analyze the evidence submitted, in order to determine if the CDP has established prima facie proof of the three elements previously mentioned.

[237] Subsequently, the Tribunal will analyse the evidence submitted by the Defendant in order to determine if it is sufficient to rebut the prima facie evidence. The Tribunal will then conclude whether or not the CDP has succeeded to prove, by a preponderance of the evidence, the violation of the Plaintiffs’ rights that are guaranteed by the Charter and as alleged in the application introductive of suit.

The incident during the winter 2001

[238] The Plaintiffs claim that the Defendant, who was playing hockey with a group of children on the street, lifted a hockey stick when in front of the Plaintiffs’ car and simulated the gesture of hitting their vehicle.

[239] They accuse him of having made homophobic comments to them when he approached the side door of their vehicle.  According to the Plaintiffs:

« […] the defendant said, “You didn’t make your stop. You turned at 100 miles an hour, you fucking faggots”. Mr. Thibault then raised the car window and left. »

[240] Mr. Lusk denies that he made these comments and denies that he lifted his hockey stick in a simulated gesture of hitting the Plaintiffs’ vehicle. His testimony is corroborated by the testimonies of both his son and his spouse.

[241] The Tribunal notes the existence of an atmosphere of animosity during this incident, notably between the Plaintiffs and the children who are playing hockey on the street with Mr. Lusk.

[242] According to the Plaintiffs, the children and the Defendant should not be using the street to play hockey. On the other hand, the children and Mr. Lusk reproach the Plaintiffs for driving with excessive speed in a residential neighbourhood.

[243] The Tribunal considers that the Defendant did succeed in rebutting the prima facie evidence presented by the CDP, who did not prove, by a preponderance of the evidence, the violation of the Plaintiffs’ rights during the incident of winter 2001.

The incident of June 2003

[244] This incident occurred on June 26, 2003 while Mr. Thibault was driving his vehicle on Delmar Avenue in Pointe-Claire.

[245] Mr. Thibault’s version of the incident, whereby the Defendant obstructed the road while suddenly braking so as to provoke an accident, is contradicted by the testimony of Mr. Lusk who categorically denies having made the remarks and having behaved in the manner described by the Plaintiffs.

[246] Clearly, the mutual animosity between the parties, that dates backs to 2001, is once again prevalent during this incident.

[247] The contradictory evidence presented is insufficient to establish, in regards to this particular incident, that the Defendant harassed the Plaintiffs because of their sexual orientation.

The incident of April 2004

[248] The accusation of excessive speed is what triggered the incident that occurred on April 24, 2004.

[249] Subsequent to Mr. Thibault having driven on the street where the children were playing hockey, Mr. Lusk, who was not present on the street at the time yet who was informed that the Plaintiffs were once again driving at an excessive speed, decided to go to the Plaintiff’s residence to complain and to reason with them.

[250] The Plaintiffs claim that Mr. Lusk made homophobic comments to them, invited them to fight, threatened to beat them up and threatened to kill them.

[251] The video camera recorded several of Mr. Lusk’s gestures; it did not record his spoken words.

[252] The Tribunal considers that the Defendant has not succeeded in rebutting the evidence presented during the Plaintiffs’ testimonies and which was partially corroborated by the evidence from the surveillance camera.

[253] The video recording clearly indicates that Mr. Lusk’s gestures and manner of walking went beyond the scope of animosity. After having gone to the gate of the Messrs. Thibault’s and Wouters’ residence, he clearly manifested aggression towards the Plaintiffs by inviting them, with his hand gestures, to come to the street and fight.

[254] It is probable that he made the alleged offensive comments in order to insult and provoke the Plaintiffs, and to incite them to get involved in a street fight which he felt confident of winning, considering his military experience.

[255] There exist no valid reasons to reject the clear and convincing version of the Plaintiffs.

[256] The Defendant’s version, whereby the Plaintiffs were the ones instigating a fight, is not supported by the evidence.

[257] The Plaintiffs’ initial reaction to call 911 when they noticed the Defendant on their property indicates, to the Tribunal, that the Plaintiffs were seeking protection from Mr. Lusk and not confrontation with him.

[258] In its analysis of the evidence, the Tribunal has also taken into consideration the fact that the Defendant signed the Recognizance to keep the peace and be of a good behavior pursuant to section 810 of the Criminal Code, following proceedings instituted against him in regards to this incident.

[259] In regards to the incident that occurred on April 24, 2004, the Tribunal concludes that the CDP has succeeded in proving, by a preponderance of the evidence, that the Defendant, by his behavior, his comments and his attitude, has violated the rights of the Plaintiffs, on the basis of their sexual orientation.

[260] The global context is one that can be described as a saga that originated with the Plaintiffs’ opinion that the children living in the neighbourhood should not be playing hockey on the street, which is meant for vehicular traffic. On the other hand, the children, with the support of their parents, consider that they have the right to play hockey on the street.

[261] The situation degenerated to the point whereby the Plaintiffs are obliged to resort to the “forces of order” and to the courts. In response, they are subjected to reprisals consisting of homophobic insults, which under no circumstances can be considered as justifiable behavior nor as a legitimate means of defense for the violation of the Plaintiffs’ fundamental rights that are guaranteed by the Québec Charter of Human Rights and Freedoms.

[262] A witness for the defense, Mr. Dumoulin, admitted that during the autumn 2002, the children, who were playing hockey on the street, participated in a chorus of homophobic insults addressed to the Plaintiffs as they drove by.

[263] It is reasonable to believe that, in the specific context of this case, it was not the first time that homophobic insults were directed at the Plaintiffs who lived in fear and, having been victims of criminal acts, were considered by IVAC to be in need of a surveillance camera on their property.

[264] In considering the global context, notably the situation of the Plaintiffs within their neighbourhood where an antagonistic atmosphere prevails, the claim that they are subject to harassment because of their sexual orientation is not unfounded.

[265] The evidence presented, however, is insufficient to allow the Tribunal to conclude that the Plaintiffs are subjected to harassment by the Defendant, who is only held responsible for one of the three incidents that are at the core of the present litigation.

7.         remedies

7.1       Moral damages

[266] In the decision rendered on March 21, 2008 in the case of CDPDJ c. X[38], the Human Rights Tribunal summarizes the principles established in the jurisprudence regarding moral damages and regarding quantum, to which the Tribunal adheres.

[267] Given that the state of the law has since remained unchanged in this matter, the Tribunal finds it useful and appropriate to reproduce the following excerpt from the decision CDPDJ c. X :

« [88]    The Court of Appeal has cautioned that although moral damages may be difficult to quantify, the harm suffered is no less real. As Justice Rayle has written:

Que le préjudice moral soit plus difficile à cerner ne diminue en rien la blessure qu’il constitue. J’irais même jusqu’à dire que parce qu’il est non-apparent, le préjudice moral est d’autant plus pernicieux. Il affecte l’être humain dans son for intérieur, dans les ramifications de sa nature intime et détruit la sérénité à laquelle il aspire, il s’attaque à sa dignité et laisse l’individu ébranlé, seul à combattre les effets d’un mal qu’il porte en lui plutôt que sur sa personne ou sur ses biens.[41]

[89]       In numerous cases of sexual harassment[42] or racial harassment[43], the Tribunal has awarded at least 5 000 $ for moral damages, often even implicitly noting that the sum would have been larger had the Commission asked for it. The same comment appears in three Tribunal decisions about discrimination and harassment based on sexual orientation, where the moral damages were granted as claimed.[44] »

[Références de bas de page omises]

[268] For the Tribunal, it is clear from the Plaintiffs’ testimonies that they have been affected and frightened by the Defendant’s behavior, who had gone to their home to insult them, making homophobic offensive remarks and inviting them to fight.

[269] It is reasonable to conclude that, due to these circumstances, the Plaintiffs suffered moral damages.

[270] There is sufficient evidence to conclude that the Plaintiffs’ rights to the safeguard of their dignity were violated by the disrespect and the contempt manifestly directed at them by the Defendant, as shown on the video that was filed as evidence by the CDP.

[271] The Commission is seeking the sum of $ 7 000 in moral damages for each of the Plaintiffs.

[272] In essence, the evidence of moral damages consists of the Plaintiffs’ testimonies, whereby they state that following the Defendant’s behavior, they suffered from insomnia and anxiety, and were thus obliged to take medications.

[273] In the decision CDPDJ c. X[39], submitted by the CDP, the Human Rights Tribunal concluded that since 2001, the Plaintiffs had been suffering from stress, anxiety and fear, which could not be wholly attributed to the Defendant.

[274] Applying the same reasoning, the Tribunal considers it reasonable, in light of the evidence submitted, to award the sum of $ 3 000 in moral damages to each of the Plaintiffs for the humiliation, the violation of their dignity, the stress and the difficulties caused by the Defendant’s behavior, in violation of the rights that are guaranteed by the Charter.

7.2       Punitive damages

[275] The CDP is seeking $ 3 000 in punitive damages for each of the Plaintiffs.

[276] The awarding of such damages, pursuant to the second paragraph of section 49 of the Charter, requires two conditions: unlawful and intentional interference.

[277] In CDPDJ c. Périard[40], the Human Rights Tribunal reviews the jurisprudence regarding the criteria for the attribution of punitive damages:

« [86]    Il convient par ailleurs de rappeler les enseignements de la Cour d’appel au regard des dommages punitifs :

« [108] La fonction préventive des dommages punitifs est fondamentale; ils visent un double objectif de punition et dissuasion mais ne peuvent excéder ce qui est suffisant pour atteindre ces objectifs. […] « c’est (…) vers l’avenir que le juge doit se tourner pour chiffrer un montant qui empêchera la récidive ». Il ne s’agit pas d’indemniser le demandeur mais de punir le défendeur comme il le mérite, de le décourager, lui et d’autres, d’agir ainsi à l’avenir et d’exprimer la réprobation de tous à l’égard de tels événements. »[41]

[Le soulignement est du Tribunal]

[87] La jurisprudence a aussi dégagé d’autres facteurs pour fixer la quotité des dommages punitifs. Les auteurs Baudouin et Deslauriers les présentent sommairement comme suit :

« De l’analyse de ces critères [ceux de l'article 1621 C.c.Q.], on peut dégager certaines constantes. D’abord, certains se basent surtout sur la conduite du défendeur, elle-même (durée de la conduite, évaluation de la sévérité de celle-ci, nécessité de prévenir des comportements du même type dans l’avenir). D’autres s’attachent davantage à la situation du défendeur (le profit qu’il a tiré de la conduite, ses ressources financières, les autres punitions qu’il a subies) ou à la situation de la victime (impact du comportement sur elle, provocation éventuelle de sa part) ; plusieurs, enfin, prennent en compte surtout le montant total accordé (nécessité de ne pas dédoubler par l’octroi de ces dommages une indemnisation déjà accordée sous un autre chef). » »

[278] Regarding the objectives of exemplary damages, in the case de Montigny v. Brossard (Succession)[42], the Honourable Justice Lebel, on behalf of the Supreme Court, writes:

« 47.     While compensatory damages are awarded to compensate for the prejudice resulting from fault, exemplary damages serve a different purpose.  An award of such damages aims at expressing special disapproval of a person’s conduct and is tied to the judicial assessment of that conduct, not to the extent of the compensation required for reparation of actual prejudice, whether monetary or not.  As Cory J. stated:

Punitive damages may be awarded in situations where the defendant’s misconduct is so malicious, oppressive and high-handed that it offends the court’s sense of decency.  Punitive damages bear no relation to what the plaintiff should receive by way of compensation.  Their aim is not to compensate the plaintiff, but rather to punish the defendant.  It is the means by which the jury or judge expresses its outrage at the egregious conduct of the defendant.

(Hill v. Church of Scientology of Toronto, 1995 CanLII 59 (S.C.C.), [1995] 2 S.C.R. 1130 , at para. 196) »

[48]       In Quebec law, the system of exemplary damages remains exceptional in nature.  Article 1621 C.C.Q. states that such damages may be awarded only where this is provided for by law.  As we have seen, the Charter so provides by allowing exemplary damages to be awarded in cases involving unlawful and intentional interference with the rights and freedoms it guarantees. […]

[49]       Because of the exceptional nature of this right, the Quebec courts have so far been quite strict in giving effect to the preventive purpose of exemplary damages under art. 1621 C.C.Q. by using them only for punishment and deterrence (both specific and general) of conduct that is considered socially unacceptable (Béliveau St-Jacques, at paras. 21 and 126; St-Ferdinand, at para. 119). […]

[…]

[53]       Since denunciation contributes to the preventive objective of art. 1621 C.C.Q. just as much as punishment and deterrence, I see no reason to refuse to recognize denunciation as an objective of exemplary damages in Quebec civil law.  This approach is all the more appropriate where the issue is respect for the rights and freedoms guaranteed by the Charter, a document that expresses the most fundamental values of Quebec society, as stated forcefully in its preamble. »

[279] These principles, established in the jurisprudence, apply to the case at hand.

[280] The context in which the Defendant violated the Plaintiff’s rights, the arrogance he manifested by taking the law into his own hands when he went to the Plaintiffs’ residence to hurl abuse at them and to invite them to fight, are factors that the Tribunal has taken into consideration in its decision to award the amount of $ 3 000 in punitive damages to each of the Plaintiffs, as sought by the CDP.

[281] An award of more substantial punitive damages would have been fully justified in this case, considering the objectives sought in the awarding of punitive damages[43].

[282] Based on all these reasons, the Tribunal rejects the defense and allows the application in part.

[283] FOR THESE REASONS, THE COURT:

[284] GRANTS in part the Plaintiffs’ action;

[285] ORDERS the Defendant, Gordon Lusk, to pay to Mr. Théodorus Wouters, the sum of $ 3 000 in moral damages and $ 3 000 in punitive damages and to pay to Mr. Roger Thibault, the sum of $ 3 000 in moral damages and $ 3 000 in punitive damages, the whole with interest thereon at the legal rate and the additional indemnity stipulated in article 1619 of the Civil Code of Quebec, from May 15, 2009, for moral damages, and from the date of this judgment for punitive damages.

[286] THE WHOLE with costs against the Defendant.

__________________________________

DANIEL DORTÉLUS, JTDP

Me Maurice Drapeau

Vizkelety Drapeau Bourdeau

360, rue St-Jacques ouest, 2ème étage

Montréal, H2Y 1P5

Avocat de la partie demanderesse

Me Stephen Angers

405, rue St-Dizier, bureau R-02

Montréal, H2Y 2Y1

Avocat de la partie défenderesse

Dates d’audience :

Les 15 et 16 avril 2010, ainsi que le 5 octobre 2010


[1] R. c. Lusk Gordon, 104 307 079.

[2] R. v. Walker, 500-01-012018-013.

[3] Résidences-hôtellerie Harmonie inc. c. Résidences-hôtellerie RGL, s.e.c., 2009 QCCS 5250 ; Centre hospitalier Robert-Giffard c. Gestion Francis Carrier inc., 2009 QCCS 3131 .

[4] Code de procédure civile, L.R.Q., c. C-25, art. 54.1 et suiv.

[5] Précité, note 4, art. 75.

[6] C.D.P.D.J. c. Doucet, T.D.P.Q., 1999 CanLII 54 (QC T.D.P.), J.E. 99-662 ; Boulé c. Québec (Ministère de la Sécurité publique), J.E. 2002-1554 ; Turenne c. Québec (Procureur général) (Sûreté du Québec), 2007 QCTDP 30 , D.T.E. 2008T-106 ; C.D.P.D.J. c. Québec (Procureur général), 2006 QCTDP 20 , J.E. 2007-160 , D.T.E.2007T-61.

[7] Précité, C.D.P.D.J. c. Doucet.

[8] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Centre de la petite enfance Les Pandamis [2006] R.J.Q. 1727 (T.D.P.) paragr. 30.

[9] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c Centre de la petite enfance ‘‘le château des adorable [2009] QCTDP 22 paragr. 61.

[10] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Société des casinos du Québec inc. [2010]  QCTDP 11 .

[11] Les objectifs visés par la création du Tribunal des droits de la personne en 1990, sont décrits par le ministre de la justice Rémillard : « Une plus grande accessibilité à la justice : Le Tribunal des droits de la personne permet un accès à la justice particulièrement efficace pour les citoyens-nes en ce qui regarde les droits et libertés, pierre d’assise de notre stabilité sociale et de notre démocratie, accès que les autres tribunaux ne sauraient assurer avec autant d’efficience, compte tenu de leurs multiples fonctions. », Débats de l’Assemblée nationale (10/12/1990) à la page 5978.

[12] Matic c. Trottier, 2010 QCCS 1466 .

[13] Pogan c. Barreau du Québec (FARPBQ), 2010 QCCS 1458 (CanLII).

[14] Yves-Marie MORISSETTE, Abus de droit, quérulence et parties non représentées, (2003) 49 R.D. McGill 23 à 58;

[15] Barreau du Québec c. Srougi, 2007 QCCS 685 (CanLII), 2007 QCCS 685 , paragr. 26, Dubé c. Commission des relations de travail, 2007 QCCS 4276 (CanLII), 2007 QCCS 4276 , paragr. 17-18, Droit de la famille – 091286, 2009 QCCS 2462 (CanLII), 2009 QCCS 2462 , paragr. 36, F.L. c. Lesage, 2010 QCCS 117 (CanLII), 2010 QCCS 117 , paragr. 82 et suiv., et Dahan c. Delderfield, 2009 QCCS 5840 (CanLII), 2009 QCCS 5840, paragr. 45.

[16] Voir, au même effet, Bellemare c. Abaziou, 2009 QCCA 230 (CanLII), 2009 QCCA 230 , paragr. 9 de l’opinion du J. Beauregard.

[17] R. c. Lusk Gordon, 104 307 079.

[18] Précité, note 4, art. 54.2.

[19] Précité, note 4, art. 151.1.

[20] Weinberg c. Ernst & Young, l.l.p., 2010 QCCA 1727 .

[21] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. X, 2008 QCTDP 13 .

[22] Précité.

[23] R. c. S. (R.D.), [1997] 3 R.C.S. 484 , paragr. 44, 46.

[24] Committe for Justice and Liberty c. L’Office national de l’énergie, [1978] 1 R.C.S. 369 .

[25] Rapport de consultation du Groupe de travail mixte contre l’homophobie, « De l’égalité juridique à l’égalité sociale ». Vers une stratégie nationale de lutte contre l’homophobie, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, mars 2007.

[26] Le 1 er juin 2005, à l’occasion de la Journée nationale de lutte contre l’homophobie, le ministre de la Justice a confié à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse le mandat d’assurer la coordination des activités et la préparation du rapport de consultation du Groupe de travail mixte contre l’homophobie. Le mandat confié à la Commission consistait  entre autres à : brosser un bilan de la situation relative à l’homophobie dans le contexte québécois; dresser un inventaire des problématiques engendrées par l’homophobie.

[27] Léger Marketing, L’homophobie au Québec: mythe ou réalité? Étude omnibus, avril 2003, dossier 12717-004; Léger Marketing, Perception et opinion des Québécois à l’égard des personnes homosexuelles, Étude omnibus, mai 2004, dossier 12717-006.

[28] Précité, note 25, pages 15, 16.

[29] Précité, note 25, p. 23, 24.

[30] Précité, note 25, p. 52.

[31] M c. H (1999) 2 R.C.S. p. 3; Egan c. Canada, 1995 CanLII 98 (C.S.C.), (1995) 2 R.C.S. 513 .

[32] Projet de loi no 32, c-14 (Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait) adopté le 10 juin 1999, sanctionné le 16 juin 1999.

[33] Précité, note 25, p. 25.

[34] Club de golf Laval-sur-le-Lac et Butler,  2009 QCCLP 724 , SOQUIJ AZ-50582038 , paragr. 20.

[35] Précité, note 24.

[36] Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Montréal (Ville),   2000 CSC 27 (CanLII), [2000] 1 R.C.S. 665 .

[37] Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse c. Périard, 2007 QCTDP 10 .

[38] CDPDJ c. X (T.D.P.Q.), J.E. 2008-1193 .

[39] Précité, note 17.

[40] CDPDJ c. Périard, 2007 QCTDP 10 .

[41] Métromédia CMR Montréal inc. c. Johnson, [2006] R.J.Q. 395 (C.A.); J.-L. BAUDOUIN et P. DESLAURIERS, La responsabilité civile, voir note 24, paragr. 350.

[42] de Montigny v. Brossard (Succession), 2010 SCC 51 (CanLII).

[43] Précité, note 42.

Jugement Corriveau vs Canoe

Tuesday, September 14th, 2010

COUR SUPÉRIEURE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

QUÉBEC

N°:

200-17-009070-079

DATE :

23 août 2010

______________________________________________________________________

L’HONORABLE

DANIELLE BLONDIN, j.c.s. (JB2770)

______________________________________________________________________

SUSAN CORRIVEAU, domiciliée et résidant au […], Ste-Famille, Ile d’Orléans, district de Québec, […]

Demanderesse

c.

CANOE INC., personne morale légalement constituée ayant son siège au 612 Saint-Jacques, Montréal, district de Montréal, H3C 4M8

et

RICHARD MARTINEAU, exerçant sa profession au 4545 rue Frontenac, Montréal, district de Montréal, H2H 2R7

Défendeurs solidaires

______________________________________________________________________

JUGEMENT RECTIFIÉ

______________________________________________________________________

[1]        VU que des erreurs matérielles se sont glissées aux paragraphes 67 et 122 de même qu’aux notes de bas de pages 3, 4, 6, 24, 37, 48, 56 et 73 du jugement rendu par la soussignée le 30 juillet 2010;

[2]        VU l’article 475 du Code de procédure civile;

[3]        CONSIDÉRANT qu’il y a lieu de corriger ce jugement;

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:

[4]        RECTIFIE le jugement rendu le 30 juillet 2010 de façon à ce qu’il se lise désormais comme suit:

[1] Le 12 avril 2007, utilisant le portail internet www.canoe.ca, le défendeur Richard Martineau lance sur son blogue de «Franc-parler» un sujet de discussion sur ce qu’il nomme «L’affaire Corriveau». Les commentaires des internautes y apparaissent jusqu’à la mise en demeure de la demanderesse le 5 octobre 2007[1], celle-ci se plaignant de l’édition de commentaires injurieux et diffamatoires à son sujet.

[2] Ces circonstances amènent la demanderesse à poursuivre solidairement Canoë inc. et Richard Martineau en responsabilité civile. Elle leur réclame :

Ø 150 000 $ en dommages moraux pour atteinte à sa dignité, son honneur et sa réputation;

Ø 50 000 $ en dommages punitifs pour avoir porté atteinte de manière illicite et intentionnelle aux droits fondamentaux que lui garantit la Charte des droits et liberté de la personne («Charte»)[2];

Ø 7 000 $ en remboursement des frais et honoraires extrajudiciaires pour abus de procédure.

[3] Dans leur défense déposée le 5 juin 2008, les défendeurs soulèvent qu’ils ne sont pas responsables des commentaires faits par des tiers et plaident que les dommages réclamés sont exagérés voir inexistants parce qu’ils résultent plutôt de la couverture médiatique d’un jugement rendu dans les jours précédents où le juge critique sévèrement la façon dont la demanderesse a conduit le contre-interrogatoire d’une jeune victime d’abus sexuel.

[4] Un an plus tard et un peu moins de cinq jours avant le début du procès, la défense est réamendée et Canoë admet :

· Avoir commis une faute et que les commentaires faisant l’objet du litige sont soit injurieux ou diffamatoires[3];

· Qu’elle a «publié» les commentaires à l’exclusion du défendeur Martineau qui n’a pas commis de faute dans le présent litige vu qu’ils s’étaient entendus pour que Canoë soit seule responsable du respect du règlement P-3 et ainsi des propos apparaissant au blogue de Martineau[4];

· Canoë n’a pas pris les mesures pour que son règlement P-3[5] soit respecté et afin que les commentaires faisant l’objet du litige ne soient pas sur le blogue de Martineau, sans reconnaître qu’elle avait telle obligation en regard de tous autres commentaires de tiers sur ledit blogue[6].

LES PARTIES

[5] La demanderesse est avocate depuis 1980 et pratique en droit criminel, familial et civil. Elle s’est fait connaître au Québec lors de procès d’assises très médiatisés, notamment les affaires Benoît Proulx et Micheline Vaillancourt. Elle a plaidé devant toutes les juridictions, y compris la Cour suprême du Canada. La demanderesse a enseigné à l’École du Barreau et a été membre du comité sur la Cour d’appel du Barreau de Québec. Elle a aussi siégé pendant plusieurs années sur le conseil d’administration de l’organisme « Le Passage » qui vient en aide aux proches de personnes qui souffrent de dépendance. La demanderesse jouissait jusqu’au 12 avril 2007, et ce, depuis 25 ans d’une excellente réputation au sein de la profession, allègue-t-elle.  Le juge Richard Grenier qui a pratiqué comme avocat en droit criminel à Québec avant sa nomination à la Cour supérieure en 1998 a été entendu et il confirme cette prétention de bonne réputation et de quelqu’un de respecté dans le milieu à Québec. Pour lui, la demanderesse qu’il avait vue pratiquer et plaider pendant de nombreuses années est une avocate intègre et compétente. De plus, avant avril 2007, il n’a jamais entendu de commentaires négatifs sur Me Corriveau en 37 ans de carrière.

[6] La défenderesse Canoë est une société œuvrant dans le domaine de l’information, des communications et du commerce électronique. Elle exploite le portail internet www.canoe.ca qui fournit de l’information au public dans presque tous les domaines d’intérêts : actualités, divertissement, sports, économie, etc., et où l’on retrouve une vingtaine de blogues dont l’un des objectifs est de permettre les réactions rapides et spontanées des lecteurs.

[7] Le défendeur Martineau est notamment journaliste et chroniqueur au Journal de Montréal. Il tient aussi un blogue intitulé « Franc-parler » dans lequel il traite des sujets d’actualités et suscite les commentaires des lecteurs.

[8] Dans l’entente liant le défendeur Martineau à la défenderesse Canoë, il est prévu que des modérateurs de Canoë doivent se rendre plusieurs fois par semaine consulter les commentaires publiés sur le blogue afin d’éviter tout débordement. Le défendeur Martineau s’était aussi engagé, lors de la signature de cette entente, à prendre les mesures raisonnables pour s’assurer que le contenu du blogue respecte le règlement P-3. Cependant, les défendeurs se seraient ultérieurement entendus verbalement pour que Canoë soit seule responsable du respect du règlement P-3 et pour prendre les mesures raisonnables afin de s’assurer que le contenu du blogue soit exempt de propos injurieux et diffamatoires.

CONTEXTE FACTUEL

[9] En 2007, la demanderesse défendait un homme accusé de s’être livré à des contacts sexuels sur une enfant de huit ans. Dans son jugement du 10 avril 2007, le juge de la Cour du Québec critique sévèrement la demanderesse sur la façon dont elle a mené le contre-interrogatoire de l’enfant. Des extraits du jugement et les commentaires du juge font l’objet d’une couverture médiatique importante dans divers médias dont la une des nouvelles à la télévision, sur internet[7] et dans les journaux[8] dans les jours qui suivent.

[10] Dans ce contexte, le 12 avril 2007, le défendeur Martineau publie, sur le blogue de « Franc-parler », un court commentaire sous forme de questions sur « L’affaire Corriveau », dans le but, est-il plaidé, de susciter la discussion. En voici le texte :

« Concernant l’affaire de l’avocate Suzanne Corriveau

Les avocats manquent-ils de sens moral? Sont-ils prêts à tout pour gagner leur cause? Jusqu’où les avocats devraient-ils aller pour défendre leurs clients? Tous les coups sont-ils permis, dans un procès?

Il est déjà arrivé que de jeunes enfants “inventent” des histoires de viols et d’attouchements de toutes pièces… On fait quoi pour débusquer les “fabulateurs”?

Faut-il croire TOUS les jeunes sur parole?

A-t-on tendance à traiter les victimes d’agressions sexuelles comme s’ils étaient coupables? »[9]

[11] Des internautes ont par la suite transmis leurs opinions et commentaires sur Me Corriveau allant de la corruption du système judiciaire à des insinuations malveillantes, injures ou menaces.

[12] Parmi les commentaires dommageables se trouve d’abord celui de Danny Mansour exprimant qu’il avait «le goût de cassé (sic) la figure à cette !!! De sans génie là!… en tout cas si cette «dame» manque une marche ça me fera pas pleurer».

[13] Une dénommée Brigitte Ducas traite la demanderesse de «belle tarte» et de «stupide».

[14] Il y a ensuite le commentaire de Louis P. qui écrit:

«Tiré d’un ancien article:

Quelques mois plus tard, soit au printemps 2004, dans le procès de Robert Gillet, une conversation en arabe libanais entre le proxénète Georges Radwanli et une personne non identifiée fut mise en preuve au tribunal. Le 24 mars, l’équipe de TVA qui a récupéré le repiquage de la conversation et fait traduire le tout, diffuse la nouvelle en primeur au téléjournal de 17h. Dans cet échange, Radwanli propose à son interlocuteur les services d’une avocate, Me Suzanne Corriveau, personnage bien en vue à Québec qui gagne ses causes à coup sûr car elle fournit à certains juges de la Cour supérieure de jeunes prostituées…».

[15] Louis P. termine son intervention par cette question: «Quelqu’un en a réentendu parler?»

[16] L’internaute s’identifiant comme Raymond Pearson réplique «en complément de Louis P.»:

«Suzan Corriveau est la fille de l’avocat Lawrence Corriveau, client notoire du réseau qui a évité les accusations en raison de son décès. Le frère de Suzan, prénommé Richard, également avocat, a pour sa part purgé quelques années en prison pour différents délits de fraude».

[17] Tous les commentaires diffamants et injurieux ont été publiés en avril 2007.

[18] À l’époque, Alexandra, la fille de la demanderesse, en aurait pris connaissance et, après discussion avec sa sœur vivant en Australie, les deux décident de ne pas en parler à leur mère.

[19] Fin septembre 2007, un juge que la demanderesse connaît bien et qui venait d’apprendre l’existence des commentaires la concernant, la rencontre pour savoir si elle les avait déjà vus en lui tendant la version papier du blogue imprimée à partir du site internet de Canoë.

[20] Pour elle, c’était la honte et la dévastation après tous les efforts et labeurs qu’elle avait mis pour se monter une pratique et alors qu’à 57 ans, elle avait encore besoin de travailler. On attaquait son intégrité et donc sa réputation dans l’exercice de ses fonctions comme avocate. Nous y reviendrons.

[21] Le 5 octobre 2007, la demanderesse met en demeure les défendeurs de retirer ces commentaires du blogue. Elle les avise aussi qu’elle est à évaluer ses dommages considérant que les commentaires sont diffamatoires en ce qu’ils sont de nature à miner sa crédibilité et à diminuer l’estime et la considération dont elle pouvait jouir auprès de ses clients, de ses pairs, de la magistrature et du public en général.

[22] Les commentaires de Louis P. et de Raymond Pearson avaient été retirés le 27 septembre et ceux de Danny Mansour et Brigitte Ducas l’ont été le 6 octobre 2007.

[23] La demanderesse dépose sa poursuite contre les défendeurs le 22 novembre 2007.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

1. La demanderesse

[24] La demanderesse invoque que les règlements du blogue publiés sur le site internet du blogue de « Franc-parler » sur Canoë interdisent tout commentaire diffamant ou irrespectueux et prévoient que Canoë peut retirer du blogue tout message dont le contenu viole leur politique[10]. Les défendeurs peuvent donc exercer un contrôle sur les commentaires publiés. La responsabilité des défendeurs est en conséquence engagée en tant qu’éditeurs et ils sont responsables du préjudice causé à la demanderesse autant que les auteurs des propos diffamatoires.

[25] La demanderesse allègue également avoir été profondément atteinte dans sa dignité, son honneur et sa réputation. Elle a ressenti une vive douleur morale et une grande humiliation suite à la parution de ces commentaires. Elle dit avoir vu s’écrouler du jour au lendemain ce qu’elle a mis des années à bâtir, soit sa réputation et son intégrité professionnelle. Elle considère que les commentaires des internautes l’ont abaissé aux yeux de ses clients, de ses pairs, de la magistrature et du public en général[11]. La demanderesse réclame donc 150 000$ à titre de dommages-intérêts compensatoires.

[26] De plus, elle soutient qu’en contrevenant à leurs propres règles, les défendeurs étaient en mesure de connaître les conséquences que pouvait avoir la publication de tels commentaires et les ont tout de même tolérés sur leur blogue pendant plusieurs mois. Ils ont omis de respecter leur propre règlement. Ce comportement a eu pour effet de porter atteinte de manière illicite et intentionnelle aux droits fondamentaux de la demanderesse quant à la sauvegarde de sa dignité, son honneur et sa réputation. Elle se prétend donc bien fondée de réclamer des dommages-intérêts punitifs à hauteur de 50 000 $.

[27] La demanderesse réclame aussi 7 000 $ pour payer une partie des frais et honoraires extrajudiciaires qu’elle devra verser à ses avocats. Elle invoque qu’en tardant à admettre qu’elle n’était pas celle visée par les accusations de corruption du système judiciaire et en attendant près d’un an pour admettre leur faute et divulguer que le contrat de maintenance de Martineau avait été modifié, les défendeurs ont abusé de leur droit d’ester en justice et l’ont obligée à supporter des frais importants pour des recherches, des procédures et signification de subpoenas qui se sont avérés inutiles, le tout dans le but de la décourager à poursuivre le débat judiciaire et de l’épuiser financièrement.

2. Les défendeurs

[28] Les défendeurs prétendent que c’est l’importante couverture médiatique qui a suivi le jugement de la Cour du Québec, de même que les propos tenus par le juge qui ont essentiellement porté atteinte à la réputation de la demanderesse et ont nui à sa crédibilité professionnelle. La défenderesse Canoë admet ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour faire respecter le règlement de son blogue et pour que les commentaires faisant l’objet du litige n’apparaissent pas sur ledit blogue. Elle soutient à ce sujet que le défendeur Martineau n’a commis aucune faute, car un accord verbal intervenu après la signature de la première entente prévoyait que seul Canoë était responsable de la surveillance du blogue et du respect du règlement.

[29] Les défendeurs allèguent par ailleurs que le montant des dommages moraux est grossièrement exagéré compte tenu du fait que le blogue a été consulté par un très petit nombre de personnes. La somme réclamée à titre de dommages punitifs et pour honoraires extrajudiciaires serait aussi injustifiée.

QUESTIONS EN LITIGE

[30] La faute étant ici admise, les questions en litige porteront principalement sur les dommages et leur lien de causalité avec la faute. On peut ainsi les énoncer :

Ø Le défendeur Martineau doit-il être tenu responsable du préjudice subi par la demanderesse suite à la publication de commentaires diffamatoires?

Ø La demanderesse a-t-elle subi un préjudice ?

Ø Si oui, le préjudice a-t-il été causé par la faute des défendeurs ?

Ø Si oui, quel est le quantum des dommages ?

Ø Y a-t-il lieu de condamner les défendeurs au paiement de dommages punitifs et la demanderesse a-t-elle droit au remboursement de certains frais et honoraires extrajudiciaires ?

ANALYSE ET DÉCISION

[31] Avant de disposer de ces points litigieux et pour une meilleure compréhension, il nous apparaît utile d’amorcer notre analyse en exposant les principes de droit en matière de diffamation et d’injures.

1. Les principes de droit applicables

A. La loi

[32] Avant de référer à la jurisprudence et la doctrine, nous reproduisons les dispositions législatives pertinentes :

Charte des droits et libertés de la personne[12]

3. Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association.

4. Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation.

44. Toute personne a droit à l’information, dans la mesure prévue par la loi.

49. Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente Charte confère à la victime le droit d’obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.

En cas d’atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs.

Code civil du Québec

3. Toute personne est titulaire de droits de la personnalité, tels le droit à la vie, à l’inviolabilité et à l’intégrité de sa personne, au respect de son nom, de sa réputation et de sa vie privée.

7. Aucun droit ne peut être exercé en vue de nuire à autrui ou d’une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l’encontre des exigences de la bonne foi.

35. Toute personne a droit au respect de sa réputation et de sa vie privée.

Nulle atteinte ne peut être portée à la vie privée d’une personne sans que celle-ci y consente ou sans que la loi l’autorise.

1457. Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s’imposent à elle, de manière à ne pas causer de préjudice à autrui.

Elle est, lorsqu’elle est douée de raison et qu’elle manque à ce devoir, responsable du préjudice qu’elle cause par cette faute à autrui et tenue de réparer ce préjudice, qu’il soit corporel, moral ou matériel.

Elle est aussi tenue, en certains cas, de réparer le préjudice causé à autrui par le fait ou la faute d’une autre personne ou par le fait des biens qu’elle a sous sa garde.

1621. Lorsque la loi prévoit l’attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.

Ils s’apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.

[Notre soulignement]

[33] Les poursuites intentées en diffamation font en sorte que deux droits fondamentaux se heurtent : le droit à la sauvegarde de la réputation et de la dignité et le droit à la libre expression et à la liberté de presse. Dans une mesure moindre, cette dernière notion se rapproche aussi du droit à l’information. Si ces droits peuvent être exercés en parallèle, un juste équilibre entre ceux-ci peut être difficile à atteindre. Une personne qui se plaint d’atteinte à sa réputation doit faire la preuve d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre la faute et le dommage qu’elle prétend avoir subi :

« Puisque le droit civil québécois ne prévoit pas de recours particulier pour l’atteinte à la réputation, les règles générales en matière de responsabilité civile prévues à l’art. 1457 C.c.Q. s’appliquent. Dans un tel recours, le demandeur doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, l’existence d’un préjudice, d’une faute et d’un lien de causalité. »[13]

[34] Afin de savoir ce qu’est exactement la diffamation, nous nous reportons à l’arrêt Radio-Canada c. Radio Sept-Îles[14] qui a été maintes fois cité :

« Génériquement, la diffamation consiste dans la communication de propos ou d’écrits qui font perdre l’estime ou la considération de quelqu’un ou qui, encore, suscitent à son égard des sentiments défavorables ou désagréables. Elle implique une atteinte injuste à la réputation d’une personne par le mal que l’on dit d’elle ou la haine, le mépris ou le ridicule auxquels on l’expose. »

[35] De plus, les auteurs Baudoin et Deslauriers précisent que la diffamation peut résulter de deux genres de comportement :

« [...] Pour que la diffamation donne ouverture à une action en dommages-intérêts, son auteur doit avoir commis une faute. Cette faute peut résulter de deux genres de conduite. La première est celle où le défendeur, sciemment, de mauvaise foi, avec intention de nuire, s’attaque à la réputation de la victime et cherche à la ridiculiser, à l’humilier, à l’exposer à la haine ou au mépris du public ou d’un groupe. La seconde résulte d’un comportement dont la volonté de nuire est absente, mais où le défendeur a, malgré tout, porté atteinte à la réputation de la victime par sa témérité, sa négligence, son impertinence ou son incurie. Les deux conduites constituent une faute civile, donnent droit à réparation, sans qu’il existe de différence entre elles sur le plan du droit. »[15]

[36] Quand vient le temps de déterminer si les propos employés sont diffamatoires, la Cour suprême enseigne qu’il faut tenter de voir la situation avec les yeux d’une personne raisonnable:

« La nature diffamatoire des propos s’analyse selon une norme objective. Il faut, en d’autres termes, se demander si un citoyen ordinaire estimerait que les propos tenus, pris dans leur ensemble, ont déconsidéré la réputation d’un tiers. À cet égard, il convient de préciser que des paroles peuvent être diffamatoires par l’idée qu’elles expriment explicitement ou encore par les insinuations qui s’en dégagent. »[16]

[Notre soulignement]

[37] Dans la décision Genex Communications inc. c. Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo[17], le juge Dalphond, ayant rendu l’opinion de la majorité, précise l’utilité de distinguer entre la diffamation et l’injure :

33  Je crois aussi important de mentionner qu’il existe une distinction en droit civil québécois entre la diffamation et l’injure, deux notions souvent confondues. Certes, ces deux fautes se rattachent à des atteintes à la dignité de la personne et l’art. 4 de la Charte protège tout autant la réputation et l’honneur que la dignité ( Fillion c. Chiasson [2007] R.J.Q. 867 C.A. , paragr. 92). De plus, les deux fautes résultent d’un abus de la liberté d’expression. Il y a lieu cependant de les distinguer, notamment, pour l’évaluation du préjudice.

34  Le juge LeBel, alors de la Cour, écrit dans Radio Sept-Îles inc., précité, au paragr. 35, que la diffamation «consiste dans la communication de propos ou d’écrits qui font perdre l’estime ou la considération de quelqu’un ou qui, encore, suscitent à son égard des sentiments défavorables ou désagréables». (Voir aussi : Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers, La responsabilité civile, 7e éd., vol. 1, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2007, n° 1-292 à 1-293, p. 257 à 271). Le préjudice tient compte de la gravité des conséquences dans l’esprit des gens qui ont entendu les propos diffamatoires. Ainsi, des propos diffamatoires diffusés à des dizaines de milliers d’auditeurs méritent généralement une plus grande compensation que ceux communiqués à un groupe restreint de lecteurs.

35  Parce que le caractère diffamatoire des propos s’évalue en fonction des autres et de l’image qu’ils se font désormais de la victime des propos, on applique une norme objective plutôt que subjective (point de vue de la victime) pour déterminer s’il y a eu diffamation. [...]

36  Par contre, les propos injurieux sont plutôt ceux qui font mal à la victime, lui cause un préjudice qu’elle ressent dans son for intérieur sans par ailleurs que soit nécessairement diminuée l’estime dont elle jouit auprès de son entourage ou du public. […] ».

[Notre soulignement]

B. L’importance de la réputation pour un avocat

[38] La carrière d’un avocat est entièrement bâtie sur sa réputation et son intégrité professionnelle. Pour cette raison, une atteinte à cette réputation peut causer un tort immense dans l’exercice de sa profession. C’est d’ailleurs ce qu’enseigne la Cour suprême dans l’arrêt Hill[18] :

« 118 En l’espèce, il faut tenir compte de l’importance particulière que revêt la réputation pour l’avocat. La réputation d’un avocat est d’une importance primordiale vis-à-vis des clients, des membres de la profession et de la magistrature. L’avocat monte sa pratique et la maintient grâce à sa réputation d’intégrité et de conscience professionnelles. Elle est la pierre angulaire de sa vie professionnelle. Même doué d’un talent exceptionnel et faisant preuve d’une diligence de tout instant, l’avocat ne peut survivre sans une réputation irréprochable. Dans son essai intitulé “The Lawyer’s Duty to Himself and the Code of Professional Conduct” (1993), 27 L. Soc. Gaz. 119, David Hawreluk décrit l’importance d’une réputation d’intégrité. À la p. 121, il reprend les propos de lord Birkett sur ce point :

[Traduction] L’avocat a une obligation envers son client, la Cour et l’État; mais par-dessus tout, il a une obligation envers lui-même, celle de faire preuve, autant que possible, d’intégrité. Aucune profession n’exige un degré plus élevé de probité et d’intégrité, et aucune profession n’offre peut-être de plus fortes tentations d’y renoncer; mais quels que soient les talents d’un avocat, aussi éclatants puissent-ils être, s’il n’a pas cette qualité suprême qu’est l’intégrité intérieure, il n’atteindra pas les sommets. . .

119 De même, le juge Esson dans Vogel c. Canadian Broadcasting Corp., [1982] 3 W.W.R. 97 (C.S.C.-B.), aux pp. 177 et 178, écrit :

[Traduction] L’avocat qui aspire au sommet de sa profession doit être doué de plusieurs qualités, dont l’une est essentielle. Il s’agit de la réputation d’intégrité. Les programmes ont sévèrement attaqué cette réputation. Le tort causé à celle-ci ne peut jamais être complètement réparé, et par conséquent, les stigmates si injustement infligés demeureront toujours. »

[Notre soulignement]

[39] Si le droit à la sauvegarde de la réputation revêt une grande importance pour la population en général, il est essentiel dans le cas d’un avocat. Ici, le fait que la demanderesse pratique cette profession depuis 1980 peut avoir un impact sur le quantum des dommages pouvant lui être accordé.

C. La diffamation sur internet

[40] La définition donnée au terme « diffamation » ne change pas, peu importe le médium utilisé. Ainsi, les tribunaux ont reconnu que la diffamation en ligne devait être traitée comme toute autre forme de diffamation, qu’elle se fasse par le biais des journaux, de la radio ou de la télévision :

« [248] Les mots sont des outils puissants de communication : ils détruisent une réputation en peu de temps alors que, parfois, il a fallu des années pour la construire. L’Internet est un puissant outil de diffusion : la communication n’a presque plus de frontière. La liberté d’expression est une valeur fondamentale de première importance mais le respect de la dignité et de la réputation de la personne l’est tout autant. Ceux qui parlent ou écrivent et ceux qui diffusent sur Internet doivent le réaliser. »[19]

[Notre soulignement]

[41] S’il peut être plus ardu de retrouver l’auteur de commentaires diffamants publiés sur internet, d’autres personnes peuvent en être tenues responsables :

« Ce n’est pas seulement l’auteur même de la diffamation qui peut être poursuivi, mais également celui qui la diffuse au sens large du terme, par exemple, dans le cas d’un journal ou d’une revue, la maison d’édition, mais aussi l’imprimeur et, dans le cas d’une émission de radio ou de télévision, le poste diffuseur. »[20]

[Notre soulignement]

[42] Les fonctions exercées par les intervenants du milieu électronique étant quelque peu différentes de celles exercées dans un milieu de travail plus « classique », certains auteurs suggèrent de faire des analogies afin de bien établir le rôle de chacun :

« Ainsi, le fournisseur d’accès ou gestionnaire du réseau est notamment comparé à l’éditeur. L’éditeur communique des renseignements à des tiers sachant que ces renseignements seront lus, vus ou entendus, tout comme le fournisseur d’accès. La publication volontaire suppose la connaissance du contenu des renseignements transmis. Dans le contexte d’Internet, la publication peut résulter de la transmission de fichiers, de discussions électroniques ou de la mise à la disposition de renseignements dans des fichiers. La décision de publier appartient à l’éditeur et la responsabilité pour la transmission de renseignements préjudiciables découle de ce pouvoir de contrôle. De la même façon, le fournisseur d’accès qui exerce un degré de contrôle sur les renseignements est réputé agir à titre d’éditeur. Si le contrôle n’est aucunement de nature rédactionnelle mais de nature technique ou s’il ne vise qu’à empêcher un groupe de discussion de déborder du thème auquel il est consacré, l’exploitant du site ne sera toutefois pas automatiquement considéré comme un éditeur puisqu’il n’exerce aucun pouvoir rédactionnel en soi; son contrôle ne joue pas directement sur le contenu diffusé.

[]

Le fournisseur pourrait aussi agir comme un diffuseur. S’il est libre de diffuser, il sera alors généralement considéré comme un éditeur des déclarations qu’il transmet et il sera assujetti aux mêmes normes de responsabilité que celui-ci. »[21]

[Notre soulignement]

[43] La responsabilité qui pourra incomber au diffuseur ou à l’éditeur sera variable en fonction du contrôle qu’il exerce sur les informations mises en ligne. D’ailleurs, dans l’une des premières affaires de diffamation sur internet, la Cour suprême de l’État de New York a conclu que le réseau exploitant un babillard électronique exerçait un rôle d’éditeur :

« By actively utilizing technology and manpower to delete notes from its computer bulletin boards on the basis of offensiveness and “bad taste”, for example, PRODIGY is clearly making decisions as to content, and such decisions constitute editorial control. »[22]

[Notre soulignement]

[44] En l’espèce, le règlement du blogue prévoit que la défenderesse Canoë et le défendeur Martineau se réservent le droit de retirer dudit blogue tout propos diffamatoire. De plus, l’entente écrite conclue entre Canoë et Martineau indiquait aussi que les deux parties devaient assurer une certaine surveillance du blogue, et ce, plusieurs fois par semaine.

2. La faute de la défenderesse Canoë

[45] La défenderesse Canoë ayant admis sa responsabilité, il reste à évaluer le montant des dommages reliés à sa faute compte tenu des circonstances[23]. Il y a lieu de remarquer que dans sa défense, elle ne nie pas l’absence de préjudice moral, elle trouve seulement que le montant de 150 000 $ est exagéré. Par ailleurs, elle plaide que la réclamation pour les dommages punitifs et honoraires extrajudiciaires est injustifiée[24].

3. La faute du défendeur Martineau

[46] Le contrat conclu initialement entre Martineau et Canoë aurait peut-être permis de retenir sa responsabilité compte tenu de son engagement à assurer une surveillance de son blogue (P-5). Toutefois, lors de son témoignage, Marie-Claude Massie, directrice générale du contenu du portail francophone de Canoë, a indiqué que cette responsabilité avait été par la suite transférée dans son entièreté à la défenderesse Canoë. La demanderesse s’est objectée à cette preuve testimoniale visant à établir la conclusion d’une entente verbale postérieure au contrat P-5.

[47] À cet égard, il faut s’en remettre à l’article 2863 du Code civil du Québec[25] :

2863. Les parties à un acte juridique constaté par un écrit ne peuvent, par témoignage, le contredire ou en changer les termes, à moins qu’il n’y ait un commencement de preuve.

[48] À première vue, il semble exact de dire que la preuve que veulent faire les défendeurs est inadmissible. Toutefois, les parties au litige ne sont pas les parties à l’acte juridique et l’inadmissibilité de la preuve testimoniale ne vaut qu’entre les parties :

« [22] Toutefois, la restriction à la preuve testimoniale visée par 2863 C.c.Q. ne concerne que les parties elles-mêmes à l’acte juridique. Or, ANGELA n’est pas partie aux actes juridiques visés.

[23] Sur le sujet, l’auteur Royer, écrit :

“L’article 2863 C.c.Q. précise expressément que cette restriction à la preuve ne concerne que les parties à l’acte juridique. Ainsi, dans un litige entre un contractant et un tiers, ce dernier peut offrir son propre témoignage ou produire comme témoin une autre personne, et même une partie à l’acte juridique, pour contredire ou changer les termes d’un écrit.” »[26]

[49] La jurisprudence[27] prévoit d’ailleurs qu’un témoignage est recevable pour établir l’existence d’une entente postérieure et nouvelle :

« [11] D’ailleurs, la prohibition énoncée à l’article 2863 du Code civil ne s’applique pas lorsqu’il s’agit de prouver un acte juridique antérieur, concomitant ou postérieur à un acte juridique constaté par écrit. »[28]

[50] Une entente additionnelle à l’acte juridique écrit pourrait aussi être démontrée par une preuve testimoniale :

« Avant de faire l’analyse de la preuve, le Tribunal doit réaffirmer un principe bien connu et énoncé aux articles 1234 C.c.B.C. et 2863 C.c.Q., à l’effet que les parties à un acte juridique constaté par un écrit, ne peuvent par témoignage, le contredire ou en changer les termes. Cependant, pourrait être recevable, la preuve qui viserait à établir une entente complémentaire. »[29]

[51] Conséquemment, l’objection soulevée par la demanderesse est rejetée et il nous faut maintenant apprécier la crédibilité et la vraisemblance du témoignage de madame Massie sur la question.

[52] Dans les faits, rien ne permet de soulever un doute quant à l’intention des défendeurs de décharger Martineau de toute obligation de surveillance de son blogue. Le témoignage de Marie-Claude Massie était crédible et doit être retenu par le tribunal. De fait, il a été démontré que madame Massie a fait parvenir un courriel au service à la clientèle de Canoë les avisant qu’ils avaient, à partir de cette époque, l’entière responsabilité de la vérification du blogue du défendeur Martineau, ce dernier n’assurant plus de contrôle. Ainsi, nous retiendrons que le défendeur Martineau n’était plus, au moment de la publication des propos en litige, responsable d’assurer une surveillance du blogue et se contentait de suggérer des sujets de discussion. La défenderesse Canoë avait donc l’entière responsabilité de la modération des internautes.

[53] Par conséquent, le défendeur Martineau n’a pas commis de faute dans le présent dossier et sa responsabilité n’est pas retenue.

4. Les dommages compensatoires

[54] Établir l’existence d’un comportement fautif est insuffisant pour justifier l’octroi de dommages-intérêts parce que le plaignant doit aussi démontrer un préjudice et son étendue, de même qu’un lien direct entre celui-ci et le comportement fautif[30].

[55]Le préjudice moral est, par nature, difficile à évaluer et quantifier :

« La nature intangible des intérêts à indemniser sous ce chef [préjudice moral (la multiplicité des éléments entrant dans l'équation, ainsi que les inévitables jugements de valeur qu'implique cette évaluation en font un exercice essentiellement subjectif et intuitif. »[31]

[56] Tel que l’affirme avec justesse le juge Alain dans la décision Chiasson c. Fillion[32], il est difficile de quantifier le préjudice résultant d’une « blessure profonde à l’âme de l’être humain affecté au plus profond de lui-même ».

[57] La discrétion judiciaire[33] est omniprésente lorsqu’il s’agit de déterminer les montants à accorder pour des dommages moraux. Même si chaque cas en est un d’espèce, le système judiciaire requiert que des cas semblables soient traités de façon similaire. À ce sujet, Daniel Gardner résume la situation de façon précise :

« On aurait tort d’aborder l’évaluation des pertes non pécuniaires de manière trop technique, en imposant aux tribunaux le choix préalable entre plusieurs approches. […] Mais s’il est vrai que l’évaluation des pertes non pécuniaires ne doit pas devenir un processus standardisé et impersonnel, cela n’empêche pas de l’encadrer afin d’éviter des distorsions non motivées entre les indemnités, qui risquent d’être perçues comme autant d’injustices par le citoyen moyen. Dans un domaine où l’indemnisation est le fruit d’une « démarche essentiellement discrétionnaire en tenant compte d’un ensemble de facteurs personnalisés », laisser trop de liberté au juge risque d’instaurer un système de loterie où l’imagination créatrice de l’un l’emportera sur l’approche plus conservatrice de l’autre. L’être humain est ainsi fait : il fonctionne par comparaison et se valorise en mettant en parallèle sa situation et celle de ses semblables. [...] La meilleure façon d’indemniser la victime pour ses pertes non pécuniaires est de lui démontrer le caractère équitable du montant octroyé par rapport aux standards acceptés par notre société. »

[Notre soulignement]

[58] Sur ce point, dans l’arrêt Genex Communications, le juge Dalphond est d’avis que :

«…la quantification des dommages moraux en cette matière, même s’il s’agit d’un exercice qui comporte un volet discrétionnaire, demeure régie par certains principes, notamment celui de la proportionnalité par rapport à la gravité du préjudice…»[34]

[59] Il ne fait aucun doute que la demanderesse a subi un préjudice suite aux commentaires publiés sur le blogue « Franc-parler ». Son intégrité professionnelle a été directement attaquée et l’excellente réputation qu’elle s’était bâtie en a certainement été échaudée. De plus, la demanderesse a ressenti de l’humiliation et une vive douleur morale suite à la lecture des commentaires.

[60] Mais à quel montant peut-elle avoir droit? Nous commencerons par analyser l’atteinte à l’honneur et la réputation de la demanderesse (norme objective) (I). À cet égard, la jurisprudence a établi certains critères qui doivent être pris en compte lors de l’évaluation des dommages résultant de diffamation. Nous les étudierons plus en détail en faisant la corrélation avec la situation qui nous occupe. Ensuite, nous exposerons concrètement l’impact sur la demanderesse des propos injurieux portant atteinte à sa dignité et les dommages qu’elle a conséquemment subis (norme subjective) (II).

I – Les dommages résultant de l’atteinte à la réputation de la demanderesse

A. La nature des propos

[61] La gravité des propos tenus doit être considérée. Conséquemment, plus les commentaires sont graves, plus les dommages seront élevés.

[62] Dans les faits, les allégations de corruption du système judiciaire, de même que la prétendue association de la demanderesse à un réseau criminel, sont d’une extrême gravité. L’internaute qui a tenu ces propos s’est prétendument fondé sur les dires d’un journaliste crédible. S’il est plus laborieux de déterminer pendant combien de temps ces déclarations auront un effet préjudiciable sur sa réputation, il est à prévoir qu’une allégation de corruption, alors que la demanderesse se retrouve constamment confrontée à d’autres avocats et à des juges, peut avoir un effet qui perdura quelque temps. En effet, « [u]ne déclaration diffamatoire peut s’infiltrer dans les crevasses du subconscient et y demeurer, toujours prête à surgir et à répandre son mal cancéreux »[35]. Ce premier critère donne ouverture à des dommages compensatoires élevés.

B. La diffusion des propos

[63] À l’égard de ce critère, il faut prendre en considération l’aspect quantitatif de la diffusion, de même que son aspect qualitatif, lequel tient compte du « degré de pénétration des propos dans le milieu pertinent »[36].

[64] Concrètement, les commentaires publiés sur le blogue sont restés en ligne approximativement six mois, soit d’avril 2007 à septembre 2007[37]. Il s’agit manifestement d’une longue période de diffusion des propos diffamatoires.

[65] Selon la preuve, le commentaire injurieux de Danny Mansour a été consulté au maximum 2057 fois et celui de Brigitte Ducas 530 fois[38]. Le commentaire diffamant de Louis P. a été consulté au maximum 371 fois et celui de Raymond Pearson au maximum 293 fois[39]. À cet égard, la preuve ne permet pas d’établir si ce nombre comprend les personnes ayant consulté plus d’une fois le blogue (la fille de la demanderesse l’a elle-même consulté environ huit fois) ou si des personnes différentes l’ont vu.

[66] Ainsi, les commentaires diffamants et injurieux ont été consultés par peu de personnes si l’on compare avec la majorité des cas de diffamation dans les journaux, à la télévision ou à la radio. Cependant, même si le blogue a été consulté seulement à quelques reprises, on ne sait jamais avec certitude quels seront les effets de la diffamation dans le milieu et dans la population avec le temps et la trace qu’ils laisseront. L’on ne doit jamais sous-estimer la puissance et le rayonnement que peut avoir une rumeur colportée par le mode du « bouche à oreille ».

[67] À tout événement, les commentaires ont été publiés sur un site accessible au grand public, et non pas à une clientèle de juristes ou de magistrats. Si certaines personnes du « milieu pertinent » ont pu prendre connaissance du blogue, par exemple le juge Grenier, la preuve présentée n’a pas permis de démontrer que ce fut le cas. La demanderesse a d’ailleurs admis qu’aucun client ou confrère ne lui a parlé du blogue et elle n’a aucune raison de soupçonner que ces derniers ont eu connaissance de ces commentaires.

[68] L’évaluation de ce critère donne ouverture à des dommages compensatoires plus ou moins élevés.

C. L’identité de la demanderesse

[69] Les tribunaux ont tendance à prendre en considération le statut social et la profession de la victime dans l’évaluation des dommages-intérêts[40]. Or, les titulaires d’une fonction publique, les célébrités et les personnes ayant un haut statut social bénéficient habituellement de montants plus élevés puisque leurs réussites professionnelles dépendent de leurs bonnes réputations. La réputation dont jouissait la victime avant les propos diffamatoires doit être prise en compte. Enfin, les tribunaux doivent évaluer le comportement de la victime et se questionner afin de savoir si elle n’aurait pas provoqué ces allégations.

[70] Dans les faits, la profession de la demanderesse et l’excellente réputation dont elle bénéficiait avant les événements ont un poids important. De plus, si le contre-interrogatoire qu’elle a mené peut être à l’origine de ce litige, la demanderesse n’effectuait, à ce moment, que son travail, elle n’a en aucune façon provoqué les attaques portées à son égard. Ces éléments justifient un montant de dommages compensatoires élevé.

[71] Cependant, la situation de la demanderesse est un peu particulière. En effet, avant même la publication du blogue, elle faisait l’objet d’une grande couverture médiatique. Les commentaires du juge de la Cour du Québec à son égard, la crédibilité des propos tenus par ce juge et l’importante publicité qui s’en est suivie ont nui à la demanderesse, avant même la parution du blogue. Dans ces circonstances, il est difficile pour le tribunal de déterminer quel événement a davantage nui à la réputation de la demanderesse. Nous sommes d’avis qu’il faut tenir compte de ce facteur dans l’évaluation des dommages. Si la défenderesse Canoë doit indemniser la demanderesse pour le préjudice qu’elle lui a causé, il y a lieu d’en mitiger les effets pour tenir compte d’atteintes occasionnées par des gestes sur lesquels elle n’avait aucun contrôle.

[72] Le tribunal souligne que si la demanderesse a subi une atteinte à sa réputation résultant des propos du juge de la Cour du Québec et surtout de la couverture médiatique qui s’en est suivie, ils n’attaquaient pas la réputation de la demanderesse relativement à son honnêteté et son intégrité, mais plutôt sur sa façon de tenir un contre-interrogatoire à titre d’avocate. Or, la diffamation sur le blogue attaque directement l’honnêteté et l’intégrité de la demanderesse en la décrivant comme une personne qui corrompt le système judiciaire. Le tribunal doit également tenir compte de cet élément dans l’évaluation du lien causal entre la diffamation sur le blogue et l’atteinte à la réputation.

[73] L’évaluation de ce dernier élément donne ouverture à des dommages compensatoires plus ou moins élevés.

D. L’identité de la défenderesse

[74] Ce critère a son importance quand on le considère en corrélation avec la diffusion des propos et le sérieux avec lequel ils sont accueillis. Les commentaires diffusés par des journaux sérieux à tirage limité à un groupe restreint ou encore par un expert reconnu auront un plus grand impact que ceux publiés par d’autres journaux ou magazines à sensation. Les déclarations d’un quidam ont aussi une incidence beaucoup moins importante dans l’opinion publique.

[75] Dans le cas présent, les commentaires diffamants ont été publiés sur un site ayant acquis une certaine crédibilité ou notoriété, mais ils ont été rédigés par des gens inconnus des médias et à qui l’on accorde un moins grand crédit. Les citoyens commentateurs de l’actualité sur les blogues jouissent d’une crédibilité généralement assez faible aux yeux d’une personne raisonnable, du moins, beaucoup moindre comparativement à celle des journalistes professionnels[41]. Il était de plus aisé de faire la distinction, en consultant le blogue, entre les propos du journaliste et ceux du grand public. À noter que Louis P. inscrit qu’il a tiré ce commentaire d’un article et il précise que la nouvelle vient de journalistes de TVA.

[76] Considérant cela, nous sommes d’avis que l’identité des véritables auteurs des commentaires fait en sorte que la plausibilité accordée à ces déclarations est de moindre importance. Cependant, à cause du règlement de Canoë qui interdit de tenir des propos diffamatoires et injurieux sous peine que ledit commentaire soit supprimé, certaines personnes pourraient croire que si un message demeure sur le site, c’est que son contenu doit certainement être véridique, ce qui augmente la crédibilité des commentateurs sur le blogue.

[77] L’évaluation de ce critère donne ouverture à des dommages compensatoires plus ou moins élevés.

E. La conduite subséquente de la défenderesse

[78] Sous ce critère, il faut tenir compte d’éventuelles excuses ou d’une rétractation après la publication des commentaires diffamants pour possiblement réduire le montant des dommages. La conduite de l’auteur de propos diffamants qui corrige son erreur à la première occasion pourra tout de même jouer en sa faveur lors de l’octroi des dommages.

[79] Dans le litige actuel, la défenderesse a supprimé les commentaires diffamatoires presque à la réception d’une plainte. Néanmoins, les commentaires ont été accessibles pendant environ six mois et en aucune occasion les modérateurs n’ont effectué les vérifications nécessaires sur le blogue pour s’assurer de la conformité des messages publiés.

[80] Par ailleurs, la défenderesse n’a fait aucune excuse formelle ou rétractation relativement aux commentaires tenus à propos de la demanderesse.

[81] L’analyse de ce critère ne permet pas, à notre avis, de qualifier la conduite de la défenderesse Canoë de facteur aggravant ou atténuant dans l’évaluation des dommages devant être octroyés.

[82] L’évaluation de ce dernier élément donne ouverture à des dommages compensatoires plus ou moins élevés.

[83] Nous avons répertorié certains jugements ayant octroyé des dommages compensatoires à des avocats pour atteinte à leur réputation. Ces décisions permettront au tribunal d’apprécier le montant de dommage à accorder dans la présente espèce :

Intitulé

Résumé

Compensatoires

Punitifs

Fabien c. Dimanche Matin Ltée, J.E. 79-760 (C.S.)

Un avocat est associé à une transaction criminelle, soit un présumé pot-de-vin versé dans le cadre d’un important procès.

95 000 $

Aucun

Cherneskey c. Armadale Publishers Ltd., [1979] 1 R.C.S. 1067

Un avocat est accusé de racisme et d’avoir eu une conduite indigne à la profession d’avocat.

25 000 $

Aucun

Bélisle c. Grenier, J.E. 2000-2044 (C.S.)

Un avocat a été accusé de fraude dans le cadre d’élections municipales.

15 000 $

7 000 $

Barrière c. Fillion, J.E. 2000-1854
(C.S.)

Un juge est accusé d’avoir influencé le processus judiciaire en échange de faveurs sexuelles.

150 000 $

50 000 $

Blanchette c. Bury, J.E. 2001-1929 (C.S.)

Un avocat qui se présente à des élections a été insulté dans les journaux. On y allègue que les policiers ont même dû intervenir pour calmer le poursuivant.

30 000 $

35 000 $

Bertrand c. Proulx, J.E. 2002-1269 (C.S.)

Un avocat à la réputation controversée a été attaqué à son insu sur les ondes de la radio à l’égard d’une plaidoirie qu’il présente au tribunal en défense des intérêts légitimes de ses clientes. Le défendeur l’a traité de menteur, fanatique, hystérique, manipulateur, Méphisto et malade mental et a déclaré qu’un tel homme ne devait pas être laissé en liberté.

64 500 $

(comprend les frais extrajudiciaires)

20 000 $

Tremblay c. Groupe Québécor inc., [2003] R.J.Q. 2359
(C.A.)

Un avocat qui avait défendu des motards a été accusé d’avoir comploté pour faire assassiner un de ses anciens clients.

50 000 $

Aucun

II – Les dommages résultant de l’atteinte à la dignité de la demanderesse

[84] Nous passons maintenant à l’analyse des préjudices résultant des propos litigieux à la lumière du témoignage de la demanderesse, de son conjoint et de sa fille. Cet exercice permettra d’apprécier les conséquences de ceux-ci sur la demanderesse.

[85] Pour Me Corriveau, la carrière d’avocate a une importance prépondérante dans sa vie. Le travail d’avocat a toujours été valorisé dans sa famille et elle s’y consacre avec passion de nombreuses heures par semaine depuis plus de 20 ans pour se distinguer. La demanderesse qui a su se bâtir une réputation de compétence et d’intégrité exprime avoir extrêmement souffert de voir sa réputation ainsi attaquée. C’est ce qu’elle a de plus cher et parce qu’elle a tant travaillé pour la bâtir, elle a de la difficulté à accepter que son nom soit ainsi terni par les propos diffamatoires qui font l’objet du litige.

[86] Lorsque Me Corriveau a été informée de l’existence des propos diffamatoires et injurieux, elle a ressenti honte et humiliation sachant que les gens allaient parler de ces propos et a eu beaucoup de difficultés à informer les membres de son cabinet (ses futurs associés) des propos tenus.

[87] En bref, selon le témoignage de la demanderesse auquel le tribunal accorde une grande crédibilité, cette dernière considère qu’il s’agit de l’une des pires choses au monde que d’être accusée de quelque chose que l’on n’a pas fait et elle n’oubliera jamais ces commentaires. Même si la demanderesse sait que les propos tenus sont faux, elle a été déshonorée et il restera toujours en elle un sentiment de tristesse et de peine.

[88] Selon le témoignage de la fille de la demanderesse, Alexandra de Turis, également crédible, la première fois qu’elle a rendu visite à sa mère après que celle-ci ait eu connaissance des propos diffamants et injurieux, sa mère pleurait. En particulier, la demanderesse a été gravement atteinte lorsqu’elle a appris par sa fille que des clients à un bar à la mode où Alexandra travaille parlaient de la demanderesse en énonçant qu’elle fournissait des prostitués à des juges. Selon sa fille, la demanderesse a été affaiblie comme elle ne l’a jamais vue auparavant à cause des propos litigieux. Or, habituellement, la demanderesse est perçue par sa fille comme une femme énergique et forte.

[89] Selon l’époux de la demanderesse, Cyr de Turis, Me Corriveau a été complètement abasourdie et détruite lorsqu’elle a pris connaissance des propos diffamatoires et injurieux et avait peine à croire que ça pouvait lui arriver. Ce qui l’a frappé le plus depuis les événements, c’est qu’il voit et ressent encore la peine qu’elle éprouve chaque fois qu’il la prend dans ses bras. Pour lui, critiquer son travail d’avocate c’est d’ordre professionnel, ce qui est bien différent que de la traîner dans la boue.

[90] Mentionnons que la demanderesse n’a pas consulté de professionnels de la santé et qu’elle n’a pas pris de médicaments suite aux propos litigieux. La demanderesse soutient que parce qu’elle est considérée et se considère comme une femme forte, elle a décidé de ne pas le faire. Cependant, ce simple fait n’est pas suffisant pour nier en bloc la douleur et la tristesse morales de la demanderesse découlant de la lecture des propos diffamatoires et injurieux et la nécessité d’indemniser la demanderesse par l’octroi de dommages compensatoires sous ce chef.

[91] De l’avis du tribunal, «la blessure profonde à l’âme» de la demanderesse que les propos litigieux lui ont causée est importante. Aucun être humain quel qu’il soit incluant Me Corriveau, ne peut avoir une carapace assez solide pour rester imperméable aux insultes proférées à son endroit et aux propos diffamatoires colportant des faussetés[42]. La demanderesse a été dévastée suite à la connaissance des propos injurieux et diffamants et a subi et subit encore une atteinte importante à sa dignité qui lui cause tristesse, douleur, souffrance, troubles et inconvénients.

[92] Compte tenu de l’analyse précédente, à la lumière des décisions précitées et en vertu de la tendance en matière d’indemnisation des propos diffamatoires ou injurieux en droit civil québécois qui est désormais plus généreuse[43], un montant de 50 000 $ est accordé à la demanderesse pour atteinte à sa dignité, à sa réputation et à son honneur.

5. Les dommages punitifs

A. Principes de droit applicables

[93] L’atteinte illicite à un droit reconnu par la Charte confère à la victime non seulement le droit d’obtenir «la cessation de l’atteinte» et «la réparation du préjudice» subi, mais aussi, en cas d’«atteinte intentionnelle», le droit de réclamer à l’auteur de la violation «des dommages-intérêts punitifs»[44] :

49. Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente Charte confère à la victime le droit d’obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.

En cas d’atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs[45].

[94] Trois conditions[46] sont requises en vertu de cette disposition :

§ le recours en dommage punitif ne pourra qu’être l’accessoire d’un recours principal visant à obtenir condamnation du préjudice moral ou matériel, en ce sens, il doit y avoir identification d’un comportement fautif constitutif de responsabilité civile[47];

§ il faut une atteinte à un droit reconnu par la Charte québécoise;

§ cette atteinte doit être illicite et intentionnelle.

[95] En l’espèce, la défenderesse Canoë a admis qu’elle a commis une faute. Le recours en dommage punitif est donc l’accessoire d’un recours principal ayant octroyé des dommages compensatoires.

[96] La demanderesse a été victime de propos injurieux (atteinte à sa dignité) et diffamatoires (atteinte à son honneur et sa réputation)[48]. Elle a donc subi une atteinte à un droit reconnu par la Charte québécoise (l’article 4). Reste donc à déterminer s’il y a eu une atteinte illicite et intentionnelle.

[97] La Cour suprême définit ce qu’il faut entendre par atteinte illicite et intentionnelle dans l’arrêt de principe Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand :

« En conséquence, il y aura atteinte illicite et intentionnelle au sens du second alinéa de l’art. 49 de la Charte lorsque l’auteur de l’atteinte intentionnelle a un état d’esprit qui dénote un désir, une volonté de causer les conséquences de sa conduite fautive ou encore s’il agit en toute connaissance des conséquences, immédiates et naturelles ou au moins extrêmement probables, que cette conduite engendrera. Ce critère est moins strict que l’intention particulière, mais dépasse, toutefois, la simple négligence. »[49]

[Notre soulignement]

[98] Baudoin et Jobin résument ainsi l’état du droit sur la question :

«[L]a Cour suprême a réitéré le principe selon lequel le résultat du comportement fautif doit avoir été voulu pour que l’atteinte soit qualifiée d’intentionnelle. Elle a cependant interprété cette condition comme pouvant inclure la simple connaissance des conséquences immédiates et naturelles, ou au moins extrêmement probables, que la conduite fautive engendrera, un test qui dépasse de beaucoup la simple négligence mais qui se situe en deçà de la volonté de causer le dommage, et qui est appliquée avec souplesse par les autres tribunaux. »[50]

[Notre soulignement]

[99] La décision Construction Val-d’Or c. Gestion L.R.O. (1997) inc.[51], résume bien les deux tests de l’arrêt St-Ferdinand :

« Le caractère intentionnel de la mauvaise conduite est donc essentiel et doit ressortir de la preuve. Le fait d’avoir agi d’une manière insouciante, excessive et déraisonnable n’est pas suffisant pour justifier une condamnation à des dommages punitifs. Cette analyse comporte deux volets. Le premier, subjectif, consiste à déterminer si l’auteur de la violation souhaitait la conséquence de son acte et le second, objectif, vise à évaluer si une personne raisonnable, dans la même situation que l’auteur, aurait pu prévoir les conséquences subies par la victime »

[100] L’objectif, lors de l’attribution de dommages punitifs, diffère de celui visé lors de l’octroi de dommages compensatoires. Comme le précisait la Cour d’appel :

« Leur but est double : d’une part, sanctionner la conduite de l’auteur d’un acte jugé répréhensible; d’autre part, montrer publiquement la réprobation à l’égard de celle-ci. »[52]

« Les dommages punitifs sont destinés à marquer la réprobation devant une conduite de grande négligence ou qui démontre chez son auteur une intention de nuire ou de la mauvaise foi »[53].

[101] Les dommages punitifs prévus à l’article 49 de la Charte québécoise visent à dissuader les atteintes aux droits fondamentaux :

« [L]es dommages-intérêts punitifs peuvent vraiment jouer un rôle additionnel pour dissuader les atteintes intentionnelles aux droits et libertés d’autrui ou éviter les récidives ou incitations à ce faire pour d’autres personnes […] ils contribuent à contrer les atteintes aux droits fondamentaux »[54].

[102] En l’espèce, il nous faut vérifier si la conduite de la défenderesse Canoë a ouvert la porte à l’octroi de dommages-intérêts punitifs en vertu de la Charte. Y a-t-il eu une atteinte illicite et intentionnelle à un droit ou à une liberté reconnues par la présente Charte ?

[103] Canoë, comme toute personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances, ne pouvait ignorer qu’en mettant comme sujet du jour « l’affaire Suzanne Corriveau », cela aurait pour conséquences immédiates et extrêmement probables que certains individus allaient tenir des propos diffamatoires ou injurieux envers la demanderesse. Un tel sujet controversé ne pouvait que mener à des excès. De plus, en contrevenant à ses propres règles, la défenderesse Canoë était en mesure de connaître les conséquences que pouvait avoir la publication de tels commentaires.

[104] Étant donné que Canoë ne pouvait ignorer que certains individus allaient tenir des propos de nature injurieuse ou diffamatoire à l’endroit de la demanderesse, elle ne pouvait davantage ignorer l’effet que produirait chez la victime de se voir injurier (atteinte à sa dignité) et l’effet des propos diffamatoires sur sa réputation (atteinte à son honneur et à sa réputation).

[105] La défenderesse a admis les éléments suivants :

« 6. La modération du blogue de Richard Martineau pendant la période couverte par le litige, soit du 12 avril 2007 au 6 octobre 2007, était effectuée par l’équipe du service à la clientèle de Canoë (ci-après « les Modérateurs »), en fonction des plaintes et des signalements reçus;

7. N’ayant reçu aucune plainte ou signalement concernant les commentaires faisant l’objet du litige, les Modérateurs de Canoë ne se sont pas rendus sur le blogue intitulé « L’affaire Corriveau » pour modérer les commentaires des usagers et n’ont effectué aucune intervention en regard des commentaires des usagers affichés sur ce blogue »[55].

« Canoë admet qu’en ce qui concerne les commentaires faisant l’objet du litige, elle n’a pas pris les mesures afin que le règlement P-3 soit respecté et afin que les commentaires faisant l’objet du litige ne soient pas sur le blogue de Martineau […] »[56].

[Notre soulignement]

[106] La négligence grossière de Canoë de vérifier et de supprimer de son site les messages à teneur diffamatoire malgré qu’il soit extrêmement probable que de tels commentaires allaient être exprimés, témoigne de son insouciance sur les effets de tels propos diffamants sur la réputation de la demanderesse et constitue une atteinte illicite et intentionnelle à la dignité, l’honneur et la réputation de celle-ci au sens de l’article 49 (2) de la Charte québécoise.

[107] Soulignons que l’omission d’un diffuseur de supprimer des commentaires de « blogueurs » à teneur diffamatoire ou injurieuse ne sera pas jugée comme étant une faute illicite et intentionnelle à un droit protégé par la Charte dans tous les cas. Le diffuseur a une obligation de moyen et non de résultat. Il peut arriver qu’un diffuseur prenant tous les moyens raisonnables qui sont nécessaires pour épurer les propos de nature diffamatoire ou injurieuse en échappe quelques-uns. Mentionnons que lorsqu’il appert qu’un sujet est hautement controversé et qu’il est extrêmement probable qu’il peut amener certains commentaires diffamants à l’égard d’un individu en particulier et que des droits fondamentaux risquent d’être violés, le diffuseur doit exercer une plus grande prudence et diligence dans la vérification et la suppression des commentaires pouvant porter atteinte aux droits protégés par la Charte. Dans tous les cas, le diffuseur ne peut se contenter d’agir en fonction des plaintes reçues et s’en remettre à ses lecteurs ou aux victimes pour lui signaler les abus.

[108] La détermination du montant des dommages punitifs relève de la discrétion du tribunal[57]. Au Québec, l’exercice de cette discrétion est encadré par les critères élaborés par la jurisprudence et le Code civil du Québec[58], en particulier l’article 1621 C.c.Q. :

1621 C.c.Q. Lorsque la loi prévoit l’attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.

Ils s’apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.

[109] Dans l’arrêt Compagnie d’assurances Standard Life c. Tremblay[59], la Cour d’appel a rappelé que ces critères ne sont pas les seuls que le juge peut retenir pour fixer le quantum des dommages punitifs. Il y est énoncé que ceux-ci « doivent être suffisamment importants pour atteindre les objectifs de prévention et de dissuasion, mais ils ne doivent pas être trop importants de façon à éviter de créer une injustice pour le débiteur ou à enrichir la victime déjà pleinement indemnisée pour le préjudice subi »[60]. Selon la Cour, il s’agit là du délicat exercice d’équilibre auquel le juge est convié. En fait, il « [d]oit être accordé ce qui est nécessaire pour dissuader »[61].

[110] Pour en fixer le quantum, le tribunal tiendra compte des critères suivants :

Ø L’aspect préventif, dissuasif ou punitif de tels dommages;

Ø La conduite du fautif et la gravité de la faute[62];

Ø Le préjudice subi;

Ø Les avantages retirés par le fautif;

Ø La capacité de payer du fautif ou sa situation patrimoniale[63];

Ø Le quantum des dommages compensatoires ou l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier;

Ø L’inégalité du rapport de force, y compris les ressources, entre la victime et l’auteur du préjudice[64];

Ø Le fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers;

B. Discussion et analyse

[111] Évaluons donc, de façon sommaire, chacun de ces critères. Tout d’abord, nous considérons qu’il est nécessaire, dans la situation actuelle, d’accorder une certaine importance au caractère dissuasif et d’exemplarité aux dommages qui seront accordés.

[112] En effet, étant donné l’achalandage important dont fait l’objet le portail internet de la défenderesse Canoë, soit près de 7.8 millions de visiteurs au Canada par mois[65], nous sommes d’avis qu’il faut intervenir afin d’éviter d’autres situations semblables à l’avenir. Les dommages punitifs qui seront octroyés doivent inciter la défenderesse à assurer une surveillance et un contrôle accru des commentaires publiés sur son site internet. L’émergence et l’importance accrues des blogues ne doivent pas se faire au détriment de la sauvegarde des droits fondamentaux d’une personne. Le tribunal doit lancer un message à tous les médias et aux sites sur internet qu’on ne peut faire fi de la vie des gens sans en subir de conséquences. Le montant des dommages punitifs doit donc être suffisamment élevé pour servir d’exemple et dissuader les acteurs de l’industrie des bloques d’agir et de développer des moyens afin de prévenir des atteintes aux droits fondamentaux. De plus, étant donné que la demanderesse exerce la profession d’avocate et que la réputation est un élément primordial dans la pratique de cette profession, les dommages punitifs doivent dissuader la diffamation envers les membres de professions dont la réputation est une condition sine qua non de leur réussite professionnelle[66].

[113] Concernant le deuxième critère, à savoir la conduite de Canoë, la négligence grossière de la défenderesse de vérifier et de supprimer de son site les messages à teneur diffamatoire malgré qu’il soit extrêmement probable que de tels commentaires allaient être énoncés et son insouciance sur les effets de tels propos diffamants sur la réputation de la demanderesse, laisse supposer une certaine indifférence à ce qui paraît sur son propre portail et qui est, d’une certaine façon, associé à son nom.  L’absence d’excuse formelle envers la demanderesse ou de toute tentative de rétractation constitue aussi une conduite aggravante. Cependant, le tribunal doit mentionner que la défenderesse n’a pas élaboré de stratagème pour diffamer la demanderesse, sa faute en est une d’omission et elle est responsable de propos tenus par des tiers, ce qui peut jouer en sa faveur au niveau de ce second critère. De plus, Canoë n’a pas récidivé dans sa faute d’omission vis-à-vis la demanderesse et a enlevé les propos diffamants et injurieux dès réception de la mise en demeure de la demanderesse et sur avis précédant d’autres personnes.

[114] Concernant le préjudice allégué par la demanderesse, il appert que cette dernière a subi une grave atteinte à sa dignité et à son intégrité professionnelle et à l’excellente réputation qu’elle s’était bâtie.

[115] Canoë ne semble pas avoir retiré d’avantages tangibles découlant de la diffamation résultant des commentaires publiés sur le blogue « Franc-parler ». Aucun chiffre et aucune preuve n’ont été avancés pour démontrer une hausse de la fréquentation dudit blogue en rapport avec les allégations qui sont parues.

[116] Compte tenu de la preuve, il est évident que la défenderesse a les capacités financières et une situation patrimoniale qui lui permettent de débourser des sommes importantes[67]. Les dommages punitifs doivent correspondre à la réalité économique de la défenderesse, de sorte que le jeu de l’objectif recherché par l’auteur n’en vaille pas la chandelle[68] et que les dommages accordés ne soient pas assimilés à des frais de permis ou d’exploitation[69]. Le tribunal doit donc octroyer un montant de dommage punitif significatif et non simplement symbolique.

[117] Ce seul critère ne doit cependant pas constituer le fondement de notre décision. Il faut aussi tenir compte du montant accordé au niveau des dommages compensatoires et éviter de créer une injustice en enrichissant au-delà du raisonnable la demanderesse qui est déjà pleinement indemnisée pour le préjudice subi[70].

[118] Un simple citoyen est vulnérable par rapport aux médias dans sa capacité de se défendre face à des propos calomnieux et diffamatoires. De plus, les moyens financiers et les ressources de Canoë, auteur du préjudice, sont nettement plus importants que ceux de la demanderesse. Le rapport de force est donc nettement en faveur de la défenderesse Canoë.

[119] Enfin, soulignons que la preuve ne démontre pas si la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.

[120] Les dommages punitifs variant d’un extrême à l’autre selon les circonstances propres à chaque espèce, nous avons répertorié quelques jugements octroyant des dommages punitifs pour diffamation à titre d’illustration.  Ces décisions permettront au tribunal d’apprécier le montant de dommages punitifs à retenir vu l’ensemble des faits et des principes applicables.

Intitulé

Résumé

Dommages punitifs

Doré c. Lefebvre,
2009 QCCS 5601

Un communiqué laisse supposer qu’un maire et qu’un conseiller municipal ont des antécédents criminels.

Maire : 35 000 $

Conseiller : 10 000 $

9083-7386 Québec inc. c. Layton, 2007 QCCS 3012

Un employé est accusé par son ancien patron de vol.

25 000 $

Chouinard c. Sigouin, 2006 QCCQ 14065

Un homme est faussement accusé d’agression sexuelle.

8 000 $

Sansregret, Taillefer & Associés inc. c. Demers, J.E. 2005-975 (C.S.)

Une lettre est envoyée aux clients d’une société spécialisée dans le courtage immobilier l’accusant de percevoir des commissions occultes.

5 000 $

Duhaime c. Mulcair, J.E. 2005-872 (C.S.)

Un ex-politicien est faussement accusé dans les médias de comportement criminel.

20 000 $

Lafferty, Harwood & Partners c. Parizeau, J.E. 2003-2015 (C.A.)

Les actes de deux politiciens ont été comparés, dans les journaux, aux agissements d’Hitler.

25 000 $ chacun

Perron c. Québec (Procureur général), J.E. 2000-1901 (C.S.)

Un procureur de la Couronne est victime d’une campagne de salissage de la part d’un accusé (plaintes et lettres au syndic du Barreau, au Premier ministre du Québec, aux ministres de la Justice provincial et fédéral et à la magistrature)

125 000 $

[121] Compte tenu de l’analyse précédente et à la lumière des décisions précitées, il y a lieu de faire droit à la demande de 50 000 $ à titre de dommages punitifs.

6. Frais et honoraires extrajudiciaires

[122] La demanderesse réclame un montant de 7 000 $ en remboursement de frais et d’honoraires extrajudiciaires. Elle fonde sa demande sur la tardiveté de la défenderesse à admettre qu’elle n’était pas l’avocate visée par l’accusation de corruption de juges. En effet, un premier projet d’admission a été transmis au procureur des défendeurs en juillet 2008. Or, le procureur du défendeur a exigé le retrait du paragraphe 8 dudit projet qui mentionnait ceci : « Susan Corriveau n’est pas l’avocate qui fut identifiée par Georges Radwanli lors du procès de Robert Gillet qui s’est tenu à Montréal en 2004 »[71]. Or, ce n’est que 11 mois plus tard, soit le 12 juin 2009, suite à l’envoi d’un subpoena au journaliste susceptible de disculper la demanderesse, que les défendeurs admettent finalement que Susan Corriveau n’est pas l’avocate qui fut identifiée par Georges Radwanli en demandant que le journaliste visé par le subpoena n’ait plus à se présenter[72]. De plus, la demanderesse fonde cette réclamation sur la tardiveté de la défenderesse à admettre sa faute. En effet, Canoë n’a concédé avoir commis une faute que dans sa défense réamendée, près de 19 mois après l’envoi de la requête introductive d’instance et que quelques jours avant le procès. Enfin, la demanderesse base sa demande sur le fait que Canoë a attendu quelques jours avant le procès, soit le 12 juin 2009, pour aviser la demanderesse que le contrat avec Martineau avait été modifié et que seul Canoë était responsable du respect du règlement P-3[73].

[123] La demanderesse prétend que ce retard a obligé ses avocats à effectuer plusieurs recherches qui se sont avérées inutiles et qui ont engendré des coûts importants qu’elle doit maintenant débourser. Ce retard l’a aussi contrainte à assumer les frais pour l’envoi d’un subpoena qui n’était pas nécessaire.

A. Principes de droit applicables

[124] L’abus du droit d’ester en justice est prévu à la section III (Du pouvoir de sanctionner les abus de la procédure) du chapitre III (Pouvoirs des tribunaux et des juges) du Code de procédure civile, entré en vigueur le 4 juin 2009[74] :

54.1. Les tribunaux peuvent à tout moment, sur demande et même d’office après avoir entendu les parties sur le point, déclarer qu’une demande en justice ou un autre acte de procédure est abusif et prononcer une sanction contre la partie qui agit de manière abusive.

L’abus peut résulter d’une demande en justice ou d’un acte de procédure manifestement mal fondé, frivole ou dilatoire, ou d’un comportement vexatoire ou quérulent. Il peut aussi résulter de la mauvaise foi, de l’utilisation de la procédure de manière excessive ou déraisonnable ou de manière à nuire à autrui ou encore du détournement des fins de la justice, notamment si cela a pour effet de limiter la liberté d’expression d’autrui dans le contexte de débats publics.

54.2.  Si une partie établit sommairement que la demande en justice ou l’acte de procédure peut constituer un abus, il revient à la partie qui l’introduit de démontrer que son geste n’est pas exercé de manière excessive ou déraisonnable et se justifie en droit.

La requête visant à faire rejeter la demande en justice en raison de son caractère abusif est, en première instance, présentée à titre de moyen préliminaire.

54.3.  Le tribunal peut, dans un cas d’abus, rejeter la demande en justice ou l’acte de procédure, supprimer une conclusion ou en exiger la modification, refuser un interrogatoire ou y mettre fin ou annuler le bref d’assignation d’un témoin.

Dans un tel cas ou lorsqu’il paraît y avoir un abus, le tribunal peut, s’il l’estime approprié :

1°  assujettir la poursuite de la demande en justice ou l’acte de procédure à certaines conditions;

2°  requérir des engagements de la partie concernée quant à la bonne marche de l’instance;

3°  suspendre l’instance pour la période qu’il fixe;

4°  recommander au juge en chef d’ordonner une gestion particulière de l’instance;

5°  ordonner à la partie qui a introduit la demande en justice ou l’acte de procédure de verser à l’autre partie, sous peine de rejet de la demande ou de l’acte, une provision pour les frais de l’instance, si les circonstances le justifient et s’il constate que sans cette aide cette partie risque de se retrouver dans une situation économique telle qu’elle ne pourrait faire valoir son point de vue valablement.

54.4. Le tribunal peut, en se prononçant sur le caractère abusif d’une demande en justice ou d’un acte de procédure, ordonner, le cas échéant, le remboursement de la provision versée pour les frais de l’instance, condamner une partie à payer, outre les dépens, des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par une autre partie, notamment pour compenser les honoraires et débours extrajudiciaires que celle-ci a engagés ou, si les circonstances le justifient, attribuer des dommages-intérêts punitifs.

Si le montant des dommages-intérêts n’est pas admis ou ne peut être établi aisément au moment de la déclaration d’abus, il peut en décider sommairement dans le délai et sous les conditions qu’il détermine.

54.5.  Lorsque l’abus résulte de la quérulence d’une partie, le tribunal peut, en outre, interdire à cette partie d’introduire une demande en justice à moins d’obtenir l’autorisation du juge en chef et de respecter les conditions que celui-ci détermine.

54.6.  Lorsque l’abus est le fait d’une personne morale ou d’une personne qui agit en qualité d’administrateur du bien d’autrui, les administrateurs et les dirigeants de la personne morale qui ont participé à la décision ou l’administrateur du bien d’autrui peuvent être condamnés personnellement au paiement des dommages-intérêts.

[Notre soulignement]

[125] L’alinéa 2 de l’article 54.1 n’étant pas limitatif[75], l’abus peut donc notamment résulter d’un acte de procédure manifestement mal fondé et de l’utilisation de la procédure de manière excessive ou déraisonnable.

[126] Soulignons le recours manifestement mal fondé n’est pas nécessairement un abus de procédure :

« En règle générale, la procédure mal fondée est rejetée et la partie qui succombe en supporte les dépens. L’article 54.1 dit que «les tribunaux peuvent [...]»; il s’agit d’un pouvoir discrétionnaire qui doit être exercé avec prudence et dans le respect des objectifs du législateur et du droit du justiciable de faire reconnaître son droit devant le Tribunal. »[76]

[127] Également, ce n’est pas parce qu’un tribunal rejette une requête ou qu’une partie se désiste que l’on doit conclure que la procédure était frivole[77].

[128] De plus, le tribunal doit manifester une grande prudence dans l’application de l’article 54.1 C.p.c. Cet article qui vise à améliorer l’accessibilité à la justice doit être appliqué avec discernement pour éviter de créer le mal qu’il est censé régler :

« 25  Ces dispositions sont de droit nouveau et ont pour but de prévenir l’utilisation abusive des tribunaux au moyen de procédures notamment pour limiter le droit des citoyens de participer à des débats publics.

26  Elles ont essentiellement pour but d’empêcher ou de réprimer les excès procéduraux de tout genre mais non d’empêcher l’accès à la justice, même si parfois la procédure peut se révéler maladroite ou boiteuse.

27  Le tribunal doit veiller à maintenir un équilibre entre l’accès à la justice et les abus possibles du système judiciaire en faisant preuve de discrétion judiciaire exercée avec une saine prudence.

28  L’article 54.1 C.p.c. doit donc être appliqué avec prudence. »[78]

[Notre soulignement]

[129] Enfin, « si une demande en justice manifestement mal fondée peut constituer un abus au sens de l’article 54.1 C.p.c. le tribunal conclut toutefois qu’elle ne donne pas nécessairement lieu à une ordonnance, par exemple, en vertu de l’article 54 .4 C.p.c., à moins d’être le fruit d’un comportement répréhensible, scandaleux, outrageant, abusif, de mauvaise foi ou, en d’autres termes, d’un abus du droit d’ester en justice, soit l’utilisation de la procédure de manière excessive et déraisonnable, de manière à nuire à autrui. »[79]

[130] L’arrêt Viel[80] est la décision de principe lorsqu’il s’agit de définir ce qu’est un abus d’ester en justice :

74. Avant d’examiner plus avant cette question, il importe de distinguer et de définir l’abus de droit sur le fond du litige (l’abus sur le fond) de l’abus du droit d’ester en justice. L’abus sur le fond intervient avant que ne débutent les procédures judiciaires. L’abus sur le fond se produit au moment de la faute contractuelle ou extracontractuelle. Il a pour effet de qualifier cette faute. La partie abuse de son droit par une conduite répréhensible, outrageante, abusive, de mauvaise foi. Au moment où l’abus sur le fond se cristallise, il n’y a aucune procédure judiciaire d’entreprise. C’est précisément cet abus sur le fond qui incitera la partie adverse à s’adresser aux tribunaux pour obtenir la sanction d’un droit ou une juste réparation.

75. À l’opposé, l’abus du droit d’ester en justice est une faute commise à l’occasion d’un recours judiciaire. C’est le cas où la contestation judiciaire est, au départ, de mauvaise foi, soit en demande ou en défense. Ce sera encore le cas lorsqu’une partie de mauvaise foi, multiplie les procédures, poursuit inutilement et abusivement un débat judiciaire. Ce ne sont que des exemples. À l’aide d’hypothèses, Baudouin et Deslauriers cernent la nature de l’abus du droit d’ester en justice :

Fondement – La première hypothèse est celle où l’agent, de mauvaise foi, et conscient du fait qu’il n’a aucun droit à faire valoir, se sert de la justice comme s’il possédait véritablement un tel droit. Il n’agit pas alors dans le cadre de l’exercice ou de la défense de son droit, mais totalement en dehors de celui-ci. Une faute peut également être reprochée à l’agent qui, dans l’exercice d’un droit apparent, utilise les mécanismes judiciaires ou procéduraux sans cause raisonnable ou probable, sans motif valable, même de bonne foi. Tel est le cas de celui qui fait arrêter une personne sur de simples soupçons qu’une enquête rapide aurait suffi à dissiper. La mauvaise foi (c’est-à-dire l’intention de nuire) ou la témérité (c’est-à-dire l’absence de cause raisonnable et probable) restent donc les bases de l’abus de droit dans ce domaine. Contrairement à l’observation faite à propos du droit de propriété, il paraît difficile, sinon impossible, de concevoir un abus du droit au recours judiciaire dont le fondement ne serait pas une faute civile, mais le seul exercice antisocial du droit. Il ne saurait, en effet, y avoir abus lorsque, de bonne foi, et en ayant cause raisonnable et probable, un individu cause préjudice à autrui en recourant à la justice pour faire valoir ses droits. Ainsi, selon nous, celui qui utilise les recours que la loi met à sa disposition, dans un but strictement et exclusivement égoïste, mais de bonne foi et non témérairement, ne peut être tenu responsable des conséquences fâcheuses de son acte pour son adversaire.

[Notre soulignement]

[131] Le juge Dalphond, dans l’arrêt Royal Lepage Commercial inc. c. 109650 Canada Ltd[81] définit les paramètres de l’abus de droit d’ester en justice :

[45] Pour conclure à l’abus, il faut donc des indices de mauvaise foi (telle l’intention de causer des désagréments à son adversaire plutôt que le désir de faire reconnaître le bien-fondé de ses prétentions) ou à tout le moins des indices de témérité.

[46] Que faut-il entendre par témérité? Selon moi, c’est le fait de mettre de l’avant un recours ou une procédure alors qu’une personne raisonnable et prudente, placée dans les circonstances connues par la partie au moment où elle dépose la procédure ou l’argument conclurait à l’inexistence d’un fondement pour cette procédure. Il s’agit d’une norme objective, qui requiert non pas des indices de l’intention de nuire mais plutôt une évaluation des circonstances afin de déterminer s’il y a lieu de conclure au caractère infondé de cette procédure. Est infondée une procédure n’offrant aucune véritable chance de succès, et par le fait, devient révélatrice d’une légèreté blâmable de son auteur. Comme le soulignent les auteurs Baudouin et Deslauriers précités : «L’absence de cette cause raisonnable et probable fait présumer sinon l’intention de nuire ou la mauvaise foi, du moins la négligence ou la témérité».

[Notre soulignement]

[132] Les articles 54.1 et 54.4 C.p.c. font partie de la nouvelle section du Code de procédure civile introduite par Loi modifiant le Code de procédure civile pour prévenir l’utilisation abusive des tribunaux et favoriser le respect de la liberté d’expression et la participation des citoyens aux débats publics[82], qui stipulait en préambule :

«CONSIDÉRANT l’importance de favoriser le respect de la liberté d’expression consacrée dans la Charte des droits et libertés de la personne;

CONSIDÉRANT l’importance de prévenir l’utilisation abusive des tribunaux, notamment pour empêcher qu’ils ne soient utilisés pour limiter le droit des citoyens de participer à des débats publics;

CONSIDÉRANT l’importance de favoriser l’accès à la justice pour tous les citoyens et de veiller à favoriser un meilleur équilibre dans les forces économiques des parties à une action en justice;»

[Notre soulignement]

[133] Ce préambule vise, selon le ministre de la Justice en fonction lors de l’adoption de la loi, à « renforcer le message que le législateur souhaite faire part à la population »[83]. L’intention du législateur est donc claire : il veut changer les façons de faire en modifiant le droit antérieur (en présumant que le législateur ne parle pas pour rien dire[84]) pour prévenir l’utilisation abusive des tribunaux et favoriser l’accès à la justice[85]. Ainsi, les parties doivent s’assurer de respecter la règle de la proportionnalité[86] et elles doivent collaborer et agir de bonne foi (6 et 7 C.c.Q.) dans la mise en état du dossier judiciaire et ne doivent pas adopter des comportements dilatoires ou vexatoires ou présenter des actes de procédures manifestement non fondées qui prolongent inutilement le débat et épuisent les ressources judiciaires et celles des justiciables.

[134] Le législateur lance donc un message clair à l’ensemble de la communauté juridique et aux justiciables : l’abus du droit d’ester en justice, entrave majeure à l’accessibilité à la justice des citoyens, constitue un comportement inacceptable qui doit être sanctionné. Le législateur prévoit même la possibilité de condamnation à des dommages punitifs pour dissuader toute personne à abuser de son droit d’ester en justice. Les articles 54.1 et s. doivent donc être interprétés et appliqués dans cet esprit.

[135] La Loi modifiant le Code de procédure civile pour prévenir l’utilisation abusive des tribunaux et favoriser le respect de la liberté d’expression et la participation des citoyens aux débats publics énonce également, à son article 6, son caractère rétroactif[87] sauf en ce qui concerne les articles 54.6 et 54.2 al. 2 C.c.Q. :

Le caractère abusif des demandes en justice et des actes de procédure introduits avant l’entrée en vigueur de la présente loi est décidé suivant les règles nouvelles. Cependant, le deuxième alinéa de l’article 54.2 et l’article 54.6 du Code de procédure civile (L.R.Q., chapitre C-25), édictés par l’article 2 de la présente loi, ne s’appliquent qu’aux demandes introduites ou aux actes faits après le 4 juillet 2009.

[136] Ainsi, en l’espèce, les articles 54.2 al. 2 et 54.6 C.p.c. ne seront pas appliqués.

[137] Dans la décision Fillion c. Chiasson[88], le juge Yves-Marie Morissette écrit avec l’approbation du juge en chef J.J. Michel Robert et de la juge Lise Côté:

« […] l’abus du droit d’ester en justice peut résulter non seulement d’initiatives procédurales abusives parce qu’assimilables à une forme de harcèlement, mais aussi, et exceptionnellement, du refus injustifiable d’une partie de faire face à l’évidence et de renoncer, en demande ou en défense, à une procédure condamnée d’avance. Il faut cependant demeurer très prudent sur ce plan car il y a souvent risque que la position apparemment insoutenable d’une partie s’avère défendable au procès, même si celui qui l’a adoptée finit par échouer au fond. En règle très générale, qui ne souffre que de rares exceptions, on doit se garder d’évaluer le caractère abusif de la demande ou de la défense en orientant le débat vers ce que les parties plaident au fond. J’ajoute que bon nombre de litiges se présentent autrement que tout d’une pièce : on en a d’ailleurs un exemple ici, où la position qu’adoptaient les appelants sur la faute était précaire, voire hasardeuse, mais où le montant de la réclamation était exagéré – chose par ailleurs assez fréquente dans les dossiers de ce genre. »

[Notre soulignement]

[138] Dans la décision Genex Communications inc. c. Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo[89], le juge Dalphond, au nom de la majorité, énonce :

154  Comme le font valoir le Procureur général et les appelants, cette Cour enseigne depuis l’arrêt Viel, précité, que, hormis le cas de l’abus de procédures ou des circonstances exceptionnelles, les honoraires extrajudiciaires ne sont pas compensés autrement que dans la faible proportion incluse dans les dépens, si accordés (art. 477 C.p.c. et suivants), calculés selon le Tarif des honoraires judiciaires des avocats (Tarif).

[…]

155  Cette règle trouve application dans tous les dossiers régis par le Code de procédure civile, y compris ceux relatifs à la violation d’un droit protégé par la Charte, dont la dignité de la personne : Métromédia CMR Montréalaise inc. c. Johnson, Fillion c. Chiasson, Fondation québécoise du cancer c. Patenaude, Larose c. Fleury, précités.

[…]

157  Rien n’indique ici que les appelants ont abusé des procédures judiciaires en se défendant contre les prétentions des intimés, comme l’a reconnu l’avocat des intimés dans le cadre des plaidoiries en Cour supérieure, en réponse à une question du juge relative à l’arrêt Viel :

Regardez bien, Monsieur le juge, je vais être tout à fait candide. Il y a deux façons de voir l’abus de procédures. Le premier… le premier abus de procédures, c’est celui qui démultiplie les incidents, enfin les requêtes, etc. les objections et je dois vous dire que ce dossier-là, de ce point de vue là, je n’ai aucun reproche à faire à mon confrère.

158 Comme dans l’affaire Chiasson, notre Cour doit intervenir pour biffer la condamnation aux honoraires extrajudiciaires. Je rejoins ainsi la proposition de ma collègue la juge Duval Hesler, mais pour d’autres motifs que les siens qui sous-entendent un aspect compensatoire dans les dommages punitifs. Je réitère le principe que les dommages-intérêts punitifs n’ont pas une vocation compensatoire; leur octroi ne vise nullement à indemniser pour les frais d’avocats ( Larose c. Fleury , précité; le même principe s’applique en common law, Hill, précité, paragr. 196).

159 Subsidiairement, même si on devait retenir la prétention que les appelants auraient dû confesser jugement en partie ou, à tout le moins, admettre la faute de diffamation, il demeure qu’un débat sur la nature et la gravité des fautes, l’étendue des préjudices et la solidarité de Genex et de M. Demers demeurait pleinement justifié. Bref, seule une partie des honoraires aurait été évitée, alors que le jugement accorde la totalité, ce qui constituerait une erreur (Gingras c. Pharand, précité; Lévesque c. Carignan (Corporation de la ville de) , J.E. 2007-310 (C.A.)).

[Notre soulignement]

[139] Le paragraphe 159 de l’arrêt Genex précité est important dans cette affaire. En effet, il laisse clairement entendre que le fait pour une partie de ne pas admettre sa responsabilité, lorsque la faute est manifeste, pourrait être considéré comme un abus du droit d’ester en justice.

[140] Il convient de préciser que, dans cette affaire, ni le juge de première instance, ni la Cour d’appel, n’ont eu l’opportunité d’entendre les parties sur les nouvelles dispositions du Code de procédure civile traitant de l’utilisation abusive des tribunaux.

[141] Or, la Cour d’appel, dans la décision Ovo[90] rendue le 21 juin 2010, s’est prononcée pour la première fois sur l’application et la portée des nouveaux articles 54.1 à 54.6 C.p.c. qui « confèrent aux juges des pouvoirs très vastes pour sanctionner les abus de toutes sortes, à toutes les étapes de la procédure civile »[91]. Dans cette affaire, la Cour d’appel devait déterminer si la juge de première instance avait commis une erreur en concluant que la réponse aux engagements pris lors de l’interrogatoire après défense est survenue tardivement par rapport au contrat judiciaire qui liait les parties depuis les 25-26 mars 2009 et au jugement du 16 juillet 2009 tranchant les objections formées à l’encontre de certains engagements[92]. Voici la conclusion unanime des juges Chamberland, Rochon et Doyon :

« 27  Dans ces circonstances, je ne vois pas d’erreur dans la conclusion de la juge de première instance voulant que la production des documents et réponses se soit faite «tardivement» (paragr. 8) et qu’il y ait eu «un délai excessif» (paragr. 10), une situation qu’elle a choisi de sanctionner en ordonnant une indemnité de 7 500 $ à titre de dommages punitifs et en remboursement des honoraires et débours extrajudiciaires encourus par l’appelante incidente.

[…]

29  La juge de première instance a conclu que ce comportement était dilatoire et qu’il y avait lieu de le sanctionner. Il s’agit là d’une conclusion que le déroulement du dossier justifiait et que les règles énoncées aux articles 54.1 C.p.c. et suivants autorisent. Les justiciables se plaignent souvent, à raison, de la durée interminable des procédures judiciaires. Les juges ont longtemps demandé les outils leur permettant de faire avancer rondement les dossiers. Les règles énoncées aux articles 54.1 C.p.c. et suivants font partie de ces outils. Il n’y a ici rien de déraisonnable dans les constats faits par la juge de première instance et dans la façon dont elle a choisi de sanctionner le comportement dilatoire de l’appelante qui constituait, en l’espèce, un bris du contrat judiciaire entre les parties. »[93]

[Notre soulignement]

B – Discussion et analyse

[142] Le tribunal est d’avis que ce dossier satisfait aux critères établis par le législateur aux articles 54.1 al. 2 et 54.4 C.p.c. et aux critères énoncés par la Cour d’appel dans l’affaire Viel[94] pour permettre l’octroi d’honoraires extrajudiciaires.

[143] De l’avis du tribunal, la défense relativement à la faute par la défenderesse Canoë constitue un acte de procédure manifestement non fondé qui n’avait aucune chance de succès. La défenderesse a agi par témérité en mettant de l’avant une telle défense concernant sa faute. En effet, une personne raisonnable et prudente, placée dans les circonstances connues par la défenderesse Canoë au moment où elle a déposé cette défense, serait plutôt venue à la conclusion de l’inexistence d’un fondement pour cette défense relativement à la faute. En agissant de la sorte, la défenderesse a poursuivi inutilement et abusivement un débat judiciaire relativement à sa faute.

[144] Ainsi, l’omission par la défenderesse de reconnaître sa faute qu’elle était en mesure d’admettre dans un délai raisonnable constitue un abus de droit d’ester en justice qui doit être compensé par une condamnation au remboursement des frais extrajudiciaires qui ont été dépensés à cause de cet abus de procédure.

[145] Soulignons que dans la décision Fillion c. Chiasson[95], la Cour d’appel a considéré que les appelants n’avaient pas abusé de leur droit d’ester en justice parce qu’ils avaient admis le caractère diffamatoire des propos litigieux avant procès et qu’ils avaient raison de contester la nature et la gravité des fautes et de débattre sur le quantum des dommages-intérêts et punitifs réclamés. Or, les faits à l’origine de cette décision diffèrent de ceux de la présente espèce. En effet, c’est la tardiveté à admettre le caractère diffamatoire et injurieux des propos litigieux qui est ici en cause et qui constitue l’abus du droit d’ester en justice. La demanderesse ne soutient pas que la contestation par les défendeurs, de la nature et la gravité des fautes, de la faute de Richard Martineau et du quantum et du bien-fondé des dommages compensatoires, punitifs et extrajudiciaires constituent un abus de procédure.

[146] De plus, de l’avis du tribunal, l’admission tardive par les défendeurs que Susan Corriveau n’est pas l’avocate qui fut identifiée par Georges Radwanli et la divulgation tardive que le contrat de maintenance de Martineau avait été modifié et que seul Canoë était responsable du respect du règlement P-3 satisfont également aux critères établis par le législateur aux articles 54.1 al. 2 et 54.4 C.p.c. et aux critères énoncés par la Cour d’appel dans l’affaire Viel[96] pour permettre l’octroi d’honoraires extrajudiciaires parce qu’il s’agit d’un comportement dilatoire.

[147] Les admissions et divulgations tardives ont obligé la demanderesse à débourser des montants pour des recherches juridiques et des actes de procédures qui n’auraient pas été nécessaires si la défenderesse n’avait pas abusé de son droit d’ester en justice. Cet abus de la défenderesse Canoë a ainsi causé un dommage à la demanderesse qui, pour le combattre, a payé inutilement des honoraires et débours extrajudiciaires à ses procureurs.

[148] La demanderesse a déposé en preuve les honoraires de ses avocats[97]. Au moment du procès, ils totalisaient 14 000 $. Après analyse de la preuve documentaire, il est difficile pour le tribunal de déterminer quels sont les honoraires extrajudiciaires qui ont été facturés inutilement à cause de l’abus de procédure. Le tribunal doit donc arbitrer le montant et usant de sa discrétion, accorde à la demanderesse 7 000 $.

[149] Le tribunal peut même d’office, condamner à des dommages punitifs une partie qui abuse de son droit d’ester en justice pour sanctionner l’abus de procédure (54.4 C.p.c.). Contrairement à l’article 49 de la Charte québécoise,  il n’est pas nécessaire de prouver une atteinte illicite et intentionnelle à des droits fondamentaux pour obtenir une condamnation à des dommages-intérêts punitifs en vertu de ces dispositions[98]. Il est suffisant de prouver l’utilisation de la procédure de manière excessive ou déraisonnable ou de manière à nuire à autrui ou encore du détournement des fins de la justice pour donner ouverture à une condamnation à payer des dommages-intérêts punitifs.

[150] Cependant, les parties doivent être entendues sur ce point (54.1 C.p.c.). À tout événement, les dommages punitifs en cas d’abus de procédure doivent être accordés qu’en cas d’abus patent, dans les cas les plus graves[99]. Or, le tribunal ne croit pas que l’abus de procédure de la défenderesse Canoë entre dans cette catégorie puisqu’elle a tout de même admis sa faute avant l’audience plutôt que de continuer au procès ce débat qui était voué à l’échec.

[151] Pour ces motifs, nous sommes d’avis que la demanderesse a droit au remboursement des frais et honoraires extrajudiciaires supplémentaires qu’elle a déboursés en conséquence de l’abus de procédure de la défenderesse Canoë, soit 7 000 $.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[152] ACCUEILLE la requête introductive d’instance de la demanderesse;

[153] CONDAMNE la défenderesse Canoë à payer à la demanderesse la somme de 50 000 $ à titre de dommages-intérêts compensatoires avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter de la mise en demeure du 5 octobre 2007;

[154] CONDAMNE la défenderesse Canoë à payer à la demanderesse la somme de 50 000 $ à titre de dommages-intérêts punitifs, avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter du jugement;

[155] CONDAMNE la défenderesse Canoë à payer à la demanderesse la somme de 7 000 $ à titre de frais et honoraires extrajudiciaires avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter du jugement.

[156] Le tout avec dépens.

__________________________________

DANIELLE BLONDIN, j.c.s.

Le SPVM dépose sa preuve dans le dossier Vaillancourt (7 janvier 2010)

Thursday, January 7th, 2010

En 2007 et suite à une entente de règlement mettant un terme à des années de procédures judiciaires dans un dossier de diffamation intenté par l’éditeur de GGTV en 2001, la Cour Supérieure du district de Montréal prenant acte de l’entente, l’homologuait et la transformait en jugement ordonnant aux signataires de la respecter. L’entente devenait donc une ordonnance judiciaire et les contrevenants s’exposant à des accusations pénales et criminelles en cas de violation.

Or, suite à l’envoi de emails haineux par la suite contre l’éditeur de Gay Globe TV, le SPVM y allait de son enquête et grâce aux services technologiques du Service de Police de la Ville de Montréal et au serveur internet Vidéotron, l’auteur de ces documents haineux a été indentifié et traduit devant les tribunaux. Les détails de l’action peuvent être lus au http://www.gayglobe.us/vaillancourt131109.html

Aujourd’hui le 7 janvier 2010, dans le cadre d’une action en violation d’une ordonnance de la Cour supérieure, le tribunal a ordonné au SPVM (police) de déposer l’ensemble de son dossier prouvant l’identité de l’auteur des emails diffamatoires et haineux et les résultats de l’enquête, ce à quoi s’est immédiatement conformé le représentant du service de police de Montréal, pendant l’audience en salle 2.06 à 9h ce matin.

L’avocat de l’éditeur de GGTV, Me Claude Chamberland a, du coup, découvert que l’auteur s’était répandu sur Internet en messages anonymes haineux additionnels, dont sur un site professionnel de journalistes et des sites en langue arabe, malgré l’ordre direct de la Cour de 2007 et ces nouvelles preuves seront déposées sous peu devant le même tribunal.

L’auteur des courriels anonymes et haineux, identifié par le SPVM, Pierre-André Vaillancourt, un homme de la communauté gaie de Montréal, directement visé par l’ordonnance de la Cour supérieure de 2007, fait actuellement face à une condamnation possible de 24,000$ dont 12,000$ doivent être versés à une organisation communautaire venant en aide aux personnes atteintes du VIH-SIDA, en plus des dépens, des intérêts et s’expose à des poursuites additionnelles pour outrage au tribunal (criminel).

Depuis l’ordonnance de 2007, certaines personnes et sites internet pesistent à publier les documents ordonnés détruits, les enquêtes se poursuivent et d’autres accusations seront déposées sous peu.

Ce texte a été jugé non diffamatoire selon la Cour du Québec et le défendeur Vaillancourt s’est désisté en juin 2012 de son appel.

Jugement québécor

Saturday, November 14th, 2009

Les faits exposés démontrent clairement et sans équivoque possible
quʼune photo protégée par un droit dʼauteur en faveur du requérant
fut utilisée par des médias sous le contrôle de la partie intimée. Le
représentant et gestionnaire entendu pour le compte de celle-ci fait
valoir devant la cour que les deux journaux qui ont reproduit la photo en
question lʼont “utilisée de façon équitable” au sens de la loi. De plus, il
nous fait remarquer que le nom du photographe était mentionné et que
subsidiairement, si la réclamation devait être reçue, le quantum en est
grossièrement exagéré. Il y a lieu de reprendre et de discuter des trois
points soulevés.
“Lʼutilisation équitable” dʼune œuvre protégée. Les articles 29 et
suivants de la Loi sur le droit dʼauteur prévoient en effet des exceptions
à lʼinterdiction dʼutiliser une œuvre protégée. Cʼest ainsi quʼest né le
concept “dʼutilisation équitable”. Sous ce vocable, la loi a prévu que
lʼutilisation privée dʼune œuvre aux fins dʼétude ou de recherche, ou
bien encore pour la critiquer ou en faire un compte-rendu, voir même
en faire une nouvelle et la rendre publique, constituent des “utilisations
équitables” qui sont permises sans avoir à obtenir dʼautorisation.
Ainsi donc, lʼintimée nous représente que les reportages de ses deux
hebdomadaires accompagnés dʼune photo appartenant au requérant
constituaient des nouvelles dʼintérêt général et que partant elle pouvait
les publier sans autorisation préalable. Le Tribunal fait remarquer quʼil
est sans doute exact que lʼévénement rapporté pouvait constituer en soi
une nouvelle dʼintérêt public et faire lʼobjet dʼune chronique. Il nʼy aurait
rien à redire à ce sujet sʼil était présenté comme tel. Mais ce qui fait
problème et constitue une dérogation à la loi, cʼest dʼabord le fait dʼavoir
accompagné la nouvelle dʼune photo qui se irouve protégée par un droit
dʼauteur. Sans doute que la nouvelle, si elle en est une, rencontrerait en
lʼespèce les critères de “lʼutilisation équitable”, mais très certainement
pas la photo qui lʼaccompagne. Mais il y a davantage.
Quoiquʼen dise lʼintimée, le compte-rendu que lʼon fait de lʼévénement
dont il est question ici, revêt plutôt les allures dʼune publicité commerciale.
De lʼhumble avis de cette cour, le fait dʼinviter les lecteurs dʼun journal
à se rendre tel jour, à telle heure, dans un bar bien identifié pour se faire
offrir des consommations par une vedette de passage, constitue un
publireportage et non un reportage. Dans le Guide de déontologie de la
Fédération professionnelle des journalistes du Québec, dont un exemplaire
a été déposé au dossier sous la cote P20, on peut lire au paragraphe 5d que
“lʼinformation et la publicité doivent être séparées”. Le Guide va même
plus loin et précise que “les journalistes nʼécrivent pas de publireportages
et que sʼils le font, ils ne les signent jamais”. Or cela a été fait et a été
signé. Plus encore. Le meme reportage est reproduit textuellement dans
deux journaux distincts sous le nom de journalistes différents selon la
région où il est publié. Cette façon de faire pour le moins éthiquement
douteuse enlève tout sérieux à lʼargumentation de lʼintimée.
Lʼexception au privilège du droit dʼauteur revendiquée par la défense
est rejetée. Ce Tribunal considère quʼil nʼy a rien dʼéquitable dans la
manœuvre de lʼintimée qui prend prétexte dʼune nouvelle à caractère
publicitaire pour sʼemparer dʼune photo qui ne lui appartient pas et
lʼutiliser à des fins commerciales.“La mention du nom du photographe”.
Lʼintimée plaide également quʼen inscrivant le nom du photographe,
elle sʼest acquittée des obligations qui lui sont imposées par la loi. Avec
Les articles 29.1 et 29.2 stipulent bel et bien que “la source” doit
être révélée. Le Guide de déontologie… auquelnous avons référé un peu
plutôt indique lui aussi, en son paragraphe 6 que “les journalistes doivent
identifier leurs sources dʼinformation”. Or en lʼespèce, cela nʼa pas été
fait, la provenance précise de la photo nʼest pas révélée. Bref, la seule
mention du nom du photographe ne respecte ni les exigences, ni lʼesprit,
ni la lettre de la Loi sur le droit dʼauteur.
“Le quantum”. Le requérant réclame 5,225.70 $ à titre de dommages et
intérêts. Lʼintimée réplique que la demande est disproportionnée avec les
dommages réellement subis, que les sommes habituellement consenties
par les tribunaux en semblable matière sont beaucoup moindres et
enfin que des tarifs sont déjà établis pour couvrir les frais et honoraires
de lʼauteur dʼune photographie. En ce qui concerne ce dernier point,
le Tribunal fait remarquer tout de suite que si lʼintimée voulait sʼen
tenir au tarif, il eut mieux valu pour elle dʼen discuter avec lʼintéressé
avant dʼutiliser sa photo. Cela dit, dans le contexte du présent litige,
nous retenons que le tarif est un paramètre parmi dʼautres dans notre
évaluation de lʼindemnité pour compenser les préjudices dont se plaint
lʼauteur de la photo.
La défense soulève encore que ses deux journaux ont un tirage inférieur
à 25,000 copies et ne circulent que dans deux régions bien délimitées de
la Gaspésie, nous suggérant par là que lʼimpact du reportage litigieux
demeure bien modeste. Le requérant réplique à ce propos que les
reportages étaient bien mis en évidence dans les journaux en question,
que sa photo revenait à plusieurs reprises et que partant, dans les régions
visées, tout le monde sʼest trouvé bien informé. Nous tiendrons compte
de tout ceci. Nous sommes toujours dans le cadre de nos commentaires
concernant le “quantum” ou lʼévaluation du montant qui devrait être
attribué pour les dommages qui auraient été causés au requérant.
En plus dʼêtre photographe, le requérant est aussi journaliste, rédacteur
en chef et lʼéditeur dʼune revue qui sʼappelle Le Point La Revue Mec.
Il plaide avec insistance pour souligner que sa revue défend des valeurs
diamétralement opposées à ce qui est suggéré dans les reportages auxquels
on a associé sa photo. Ainsi, sa revue dénoncerait systématiquement
lʼusage du tabac pour favoriser des produits qui améliorent la santé. (…)
Somme toute, ce qui reste de plus accablant dans toute cette affaire, cʼest
que lʼintimée, sous un prétexte fallacieux, se soit permis de puiser une
photo dans les dossiers dʼune entreprise plus modeste. Ce quʼil y a de
plus détestable dans toute cette affaire, cʼest de voir cette même intimée
se replier ensuite derrière le paravent de la loi pour tenter de se disculper
ou de négocier à rabais. Lʼintimée devant nous sʼest dit de bonne foi. Ce
nʼest pas ce qui ressort de lʼensemble de la preuve dont il se dégage plutôt
quʼil a fallu la vigilance et le courage dʼun concurrent pour que le respect
de ses droits soit mené jusquʼà jugement.
Considérant le pour et le contre, mitigeant le tout à la lumière de ce qui
est habituellement accordée par les tribunaux en semblable matière, les
montants suivants sont alloués au requérant :
Frais et honoraires pour la création et la publication de la photo : 600.00$;
Utilisation non autorisée de la photo : 1,000.00 $;
Photocopies, présentation du dossier devant la cour et voyage du requérant
de Montréal à Matane pour le procès : 600.00 $;
Frais judiciaires, intérêts et indemnité additionnelle

Jugement québécor

Saturday, November 14th, 2009

Dans la dernière édition du Point, sans avoir connaissance des détails
du jugement prononcé à Matane par le juge Marc Gagnon de la Cour du
Québec, puisque le jugement nʼavait pas encore été posté au moment
dʼaller chez lʼimprimeur, nous savions déjà que Québécor (Sun Média)
avait été condamnée pour violation des droits dʼauteur appartenant au
Point et que le Tribunal avait été dʼune rare sévérité à lʼendroit du géant
des communications.
Tout a commencé au moment où, voulant faire quelques vérifications sur
la diffusion de nos produits et textes sur Internet, une mention est apparue
et avait pour origine les sites internet de deux journaux appartenant à
Québécor et publiés… en Gaspésie! Surpris, nous sommes aller constater
de quoi il sʼagissait et, Oh surprise, on publiait une photo du célèbre Éric
Mc Cutcheon, photo qui appartenait à la revue Le Point depuis janvier
2004.
Il arrive parfois que des confrères utilisent du matériel journalistique
dans le but de transmettre une information ou de publier une nouvelle,
règle générale, cette utilisation est accompagnée du nom de lʼauteur de
la photo et de son origine et souvent, on demande lʼautorisation avant de
reproduire lʼoeuvre. Or, dans le cas des deux journaux de la Gaspésie, non
seulement aucune mention nʼétait faite de lʼorigine de la photo, on sʼen
servait pour annoncer une tournée de la vedette dans des bars de la région!
Il y avait manifestement violation de nos droits, dans un but commercial
et lʼauteur de cette violation ne pouvait feindre lʼignorance, il sʼagissait de
Québécor, chef de fil en matière de médias, donc de droits dʼauteur, dans
le monde! Immédiatement, Le Point a exigé que lʼon retire les photos des
sites internet et a demandé à ce quʼun cachet soit versé pour lʼutilisation
de lʼimage, puisque pour créer cette banque dʼimages, Le Point avait dé-
frayé des sommes en argent, en échange de publicité et en temps.
Éric Mc Cutcheon
Qui est Éric Mc Cutcheon? Pour ceux qui ne sʼen souviennent pas, Éric
est le grand gagnant de la première version de lʼémission Occupation
Double, elle-même grande gagnante au niveau des cotes dʼécoute avec
près de 2 Millions dʼauditeurs à chaque semaine au Québec. Éric est resté
très populaire sur la scène publique et cʼest dans le cadre dʼune entrevue
spéciale dans la revue le Point que les photos avaient été produites, en
janvier 2004. Comme il est de mise dans ce genre de travail, une entente
portant sur les droits dʼauteurs a résultée de la séance de photos et Le Point
sʼest retrouvé propriétaire des droits sur quelques dizaines de photos.
Québécor ne souhaitant pas négocier et démontrant une mauvaise foi
évidente en invoquant fallacieusement certains aspects de la loi pour
éviter de payer les droits réclamés, une poursuite a été déposée à la cour
du Québec et sʼengageait alors un combat non seulement intellectuel sur
la propriété dʼune oeuvre, mais aussi sur le simple fait pour un titan de
manger la laine sur le dos des petits indépendants. Nʼoublions pas que
Québécor publie des dizaines de magazines concurrents à la revue Le
Point, les moyens sont autrement plus imposants du côté de Québécor
que du côté du Point!
Après une multitude de manoeuvres légales plus ou moins élégantes, dont
une demande de transfert à une cour supérieure pour des motifs que la
question soulevée était dʼintérêt national ou une autre requête pour faire
transférer le dossier à Matane (8 heures de route de Montréal) alors que
les bureaux du Point et ceux de Québécor sont à Montréal, le tribunal, en
tenant compte non seulement des faits mais aussi du comportement de
Québecor, a décidé de condamner avec sévérité la multinationale à une
amende totalisant près de 2800.00$, à être versée à la revue Le Point.
Le jugement presque intégral est publié à la
page 18 pour consultation.

Michael Jackson: Le retour d’un vainqueur

Saturday, November 14th, 2009

Le retour dʼun vainqueur
Le Point avait suggéré à ses lecteurs la retenue, il était innocent jusquʼà preuve du contraire….
Par: Roger-Luc Chayer, Éditeur de la Revue Le Point et lʼagence AP
1- La nouvelle
NEW YORK (AP) – On a déjà sonné plusieurs fois le glas de la carrière
musicale de Michaël Jackson, mais il est toujours revenu sur le devant de
la scène. Cette fois encore, au lendemain de son acquittement, certains
estiment que «Bambi» peut rebondir. »The Jackson Five», le groupe quʼil
formait avec ses frères quand il était enfant, avait déjà connu des déboires
et on doutait quʼil puisse accéder au rang de star en devenant adulte. Puis,
revenu en haut de lʼaffi che avec son groupe rebaptisé «The Jacksons», on
doutait toujours quʼil puisse avoir du succès en solo. A chaque fois, les
spécialistes avaient tort.
En 1993, alors que sa popularité était au plus haut, sa carrière avait été ter-
nie par des accusations dʼabus sexuels sur mineur. Beaucoup ne croyaient
pas quʼune de ses chansons puisse de nouveau arriver en tête des palma-
rès. Cʼest pourtant ce qui arriva.
Depuis, Michaël Jackson a été la cible dʼaccusations similaires, no-
tamment dans le cadre de son dernier procès mais les spécialistes sont
formels: il est tout à fait capable de fl irter à nouveau avec les sommets.
«Il peut avoir du succès», estime ainsi Antonio «L.A» Reid, PDG de la
maison de disques «Island Def Jam». «Je dirai quʼil lui suffi t de faire de
lʼexcellente musique et dʼexcellents spectacles».
Depuis quelques années pourtant, Michaël Jackson nʼest plus que lʼombre
de lui-même. Son dernier album est sorti le jour de son arrestation en
2003. Et depuis un an et demi, on ne parlait du chanteur plus que pour les
accusations dont il faisait lʼobjet. «Même sʼil est sur le déclin en termes
de ventes dʼalbums et de réputation sur le plan musical, les gens sont fas-
cinés par Michaël parce que cʼest une célébrité», remarque Jack Isquith,
un dirigeant dʼAOL Music. «Il a tellement de fans que je suis sûr quʼil va
enregistrer à nouveau», croit pour sa part lʼacteur Colin Ferrell.
Depuis, Michaël Jackson nʼa réalisé que deux albums qui se sont vendus à
environ deux millions dʼexemplaires: un excellent chiffre pour la plupart des
artistes mais un «bide» pour Michaël Jackson si lʼon se réfère aux ventes précé-
dentes. A noter pourtant, à titre de comparaison, que lʼalbum «America Life» de
Madonna, sorti en 2003, sʼest vendu à seulement… un million dʼexemplaires.
2- Lʼanalyse
logique qui doit
suivre
(Le Point) Laissons tomber toute la campagne liée aux rumeurs et ana-
lyses de pacotilles pour nous concentrer uniquement sur la logique des
choses. Le Point avait déclaré, dans une édition datant dʼun an, que nous
avions tous le devoir de respecter la présomption dʼinnocence dans le cas
de Michaël Jackson parce que cʼest ce que nous exigerions et que nous
serions en droit dʼespérer si nous étions nous mêmes dans sa position.
Michaël Jackson avait le droit dʼêtre traité, considéré et réputé innocent
parce que la loi est ainsi faite aux États-Unis comme au Canada en matière
de justice criminelle. Que certaines personnes pensent ce quʼils veulent de
lʼhomme dans sa vie privée, face aux allégations de pédophilie et dʼabus
dʼenfants auxquelles il faisait face, Jackson avait le droit fondamental
dʼêtre innocent jusquʼà ce quʼun jury le condamne, ce qui nʼest pas arrivé
fi nalement. Il a clâmé son innocence dès le début et a répété, directement
ou par la bouche de ses avocats, quʼil entendait faire la preuve de cette
innocence. Il avait donc raison. Il nʼa jamais commis de crimes contre des
enfants, le jury qui a entendu plus de preuves que tout ce que lʼon a pu
voir ou entendre à la télé en est arrivé à la seule conclusion qui sʼimposait
à lui.
Michaël Jackson a été acquitté. lʼacquittement est une déclaration dʼun
tribunal qui a pour objet dʼinnocenter entièrement la personne acquit-
tée. Il ne sʼagit pas, comme on peut lʼentendre dans diverses émissions
dʼinformations, dʼune situation où il y aurait eu manque de preuves ou
impossibilité dʼen venir à un jugement de culpabilité. Une personne
acquittée est réputée vierge de toute offense et il est interdit de laisser
croire autrement. Lʼacquittement signifi e que rien ne sʼest produit un
point cʼest tout. Michaël jackson a donc le droit, plus que jamais, de
recevoir un traitement équitable et surtout respectueux des médias et du
public. Ceux qui lʼaiment comme musicien à la base peuvent maintenant
acheter ses disques et ses billets de concert sans avoir peur du jugement
des autres et ont presque le devoir de le supporter. Vivement le retour du
Roi de la pop à la radio et à la télé et vivement que Michaël relève la tête!

Le Président de Fierté Québec expulsé !

Saturday, October 10th, 2009

Dans un jugement datant du 2 février 2004 (500-02-124249-041), le Pré-
sident de Fierté Québec et Éditeur de la revue Être se voyait condamné
pour ne pas avoir payé son loyer depuis des mois et a été expulsé de ses
locaux suite à un ordre de la Cour.
«Attendu que la partie défenderesse (André Gagnon) devait remettre,
quitter, abandonner et céder les lieux… Attendu qu’une copie du jugement
a été signifiée à la partie défenderesse et que malgré cette signification la
partie défenderesse se trouve encore en possession des lieux et refuse de
les céder, quoique dûment requise… nous vous ordonnons d’expulser la
partie défenderesse, nous vous ordonnons de placer selon la loi, lesdits
meubles et effets sur le carreau…» voilà le contenu de l’ordre d’expulsion
prononcé contre le président de Fierté Québec, après avoir été condamné à
près de 3000$ de dommages pour non-paiement du loyer de la rue Alexan-
dre-de-Sève, à Montréal.
Pendant ce temps, Monsieur Gagnon poursuit sa quête inébranlable de
crédibilité en attaquant les représentants de la communauté qui exigent
qu’il respecte ses contrats et qu’il rembourse les jugements prononcés
contre lui, mais malgré les demandes, dont celles de la revue Le Point,
Monsieur Gagnon persiste à ne pas assumer ses responsabilités. En effet,
de nombreuses dettes n’ont toujours pas été acquittées par Fierté Québec
et André Gagnon et plutôt que de collaborer avec les journalistes, il s’en
prend radicalement à la crédibilité des gens et ce comportement doit con-
tinuer à être dénoncé. Si Fierté Québec et son président n’avaient pas de
dettes, nous ne pourrions certainement pas remettre en question sa gestion
de l’intérêt collectif gai mais devant des dettes énormes, toujours impayées,
il est devenu urgent non seulement de réagir mais de s’offusquer publique-
ment d’un comportement inacceptable. Fierté Québec est seule dans son
aventure et Le Point suggère à la communauté de s’abstenir de s’impliquer
financièrement avec cet organisme tant que les dettes ne seront pas payées.

Cas de VIH fulgurant détecté à New York

Thursday, October 1st, 2009

Justice: Monsieur André Gagnon ne se pré-

sente même plus devant les juges…

Par: Le Point

Dans trois causes récentes, le Président de Fierté Québec, bien que convoqué

devant différents juges afin de répondre de diverses accusations quant à la

gestion des affaires de sa corporation ou de ses affaires personnelles, ne se

présente même pas aux procès et se retrouve avec des jugements prononcés

contre lui et la corporation.

D’abord, dans une affaire de salaire impayé, la Commission des Normes du

Travail le condamnait par défaut vu son absence à payer un ex-employé ce

qui lui était dû. Peine perdue, d’après un rapport d’huissier obtenu par Le

Point, la saisie aurait été impossible puisqu’un employé de M. Gagnon aurait

déclaré qu’il n’avait ni actifs ni entreprise au Québec! Et la revue Etre elle?

Dans deux autres causes datant de janvier 2005 (200-32-036034-048 et  200-

32-035136-042) Fierté Québec et Monsieur Gagnon ont été condamnés à plus

de 6,000.00$ de dommages toujours par défaut puisqu’il refuse ou néglige de

se présenter devant les juges et d’expliquer sa gestion, Monsieur Gagnon pré-

férant attaquer la réputation des journalistes qui le questionnent. Il serait donc

prudent de ne plus signer aucun contrat avec l’organisation ou l’individu tant

et aussi longtemps que la situation ne se sera pas réglée comme il se doit.

Éditorial: Le Point

«Non seulement l’organisation et ses administrateurs ne semblent plus

avoir le contrôle de son président, je suis de plus en plus persuadé que les

victimes dans cette affaire, ceux et celles à qui on doit des sommes im-

portantes d’argent, n’y trouveront finalement jamais leur compte», déclare

Roger-Luc Chayer, Éditeur de la revue Le Point.

C’est en effet suite à la publication dans notre dernière édition d’un dos-

sier sur la décision de la revue le Point de ne plus endosser l’organisation

Fierté Québec que son Président, Monsieur André Gagnon, y allait dans

sa publication d’une attaque en règle contre tout ce qui bouge au Québec

accusant le Québec en entier de ne pas le comprendre.

L’Éditeur de la revue Le Point a pourtant invité Monsier Gagnon à ouvrir

ses livres et à faire la preuve de sa bonne gestion financière mais plutôt

que de collaborer, Monsieur Gagnon de Fierté Québec a préféré attaquer

Le Point, Fugues, Le Soleil de Québec et de nombreux autres, en réus-

sissant en l’espace de trois pages à ne pas répondre aux questions qui lui

sont pourtant posées depuis des mois: Où est le fric et quand allez-vous

payer vos dettes?

Malheureusement, Monsieur Gagnon préfère ne pas répondre aux ques-

tions du public ni même des juges puisqu’en plus de ne pas avoir la grâce

de s’expliquer à ses créanciers, il ne se présente pas aux procès résultant

de poursuites contre lui et son organisation. Quand un juge ne peut même

plus avoir le respect de Monsieur Gagnon, c’est que tout va bien mal dans

la caboche du Président de Fierté Québec…

NEW YORK (AFP) – Une forme fulgurante de VIH résistant à tout traite-

ment a été décelée chez un New-Yorkais, poussant les autorités sanitaires

de la ville à renouveler leurs mises en garde à la communauté homo-

sexuelle. «Une variété hautement résistante de virus HIV progressant très

rapidement a été décelée pour la première fois chez un résident de New

York», a annoncé dans un communiqué vendredi le service de Santé de

la ville. Cette variété «ne répond pas à trois classes de médicaments anti-

rétroviraux (sur les quatre existants) et semble aussi réduire fortement

l’intervalle entre l’infection au VIH et le sida déclaré».

Le patient, un homme d’une quarantaine d’années qui a indiqué avoir

cumulé plusieurs relations homosexuelles non protégées, semble avoir été

infecté récemment, il y a peut-être deux ou trois mois, et au maximum il

y a vingt mois. Après avoir découvert sa séropositivité en décembre, il a

développé la maladie.

Habituellement, le sida met quelque 10 ans à se déclarer, relève la même

source. «La résistance aux traitements est de plus en plus commune pour

les patients déjà traités contre le VIH, mais les cas (de résistance) sur

les patients tout juste diagnostiqués et n’ayant jamais été traités sont très

rares. Et la combinaison de cette résistance aux médicaments et de la pro-

gression rapide du sida pourrait très bien n’avoir jamais été diagnostiquée

auparavant», assurent les responsables new-yorkais.

«C’est un signal d’alerte», dit Thomas Frieden, chef du service de Santé

de New York. «D’abord pour les hommes qui ont des relations avec des

hommes, en particulier ceux qui consomment des méthamphétamines

(drogue de synthèse hautement addictive, nldr)… Cette communauté a

réussi à réduire les risques du VIH dans les années 80, et elle doit de nou-

veau le faire pour stopper les ravages du VIH et du sida et l’expansion de

souches résistantes.»

Plus de 88,000 New-Yorkais vivent avec le VIH, et on estime que quelque

20,000 sont infectés sans le savoir, selon la même source.

Judiciaire Les policiers à la chasse à QC

Thursday, August 27th, 2009

Dans une nouvelle tentative visant à inciter les hommes qui se livrent à des activités sexuelles dans les parcs de la ville à changer leur comportement, la police de Québec procédera à des actions de sensibilisation en compagnie de représentants du Mouvement d’information et d’entraide dans la lutte contre le sida à Québec durant deux jours.

Par la suite, ceux qui persisteront à commettre des actes indécents dans les endroits publics seront de nouveau passibles d’amendes de 214 $, auxquelles pourraient s’ajouter des poursuites criminelles.

Les opérations répressives provoquent une diminution à court terme des actions indécentes, indique Sandra Dion. Mais les hommes reprennent rapidement leurs jeux sexuels. C’est pourquoi les policiers mèneront pour la première fois une campagne de sensibilisation de deux jours dans les parcs en compagnie de représentants de MIELS-Québec. Aucune amende ne sera donnée durant cette période qui prendra fin aujourd’hui. Dès samedi toutefois, les personnes qui «seront surprises à flâner» ou à «commettre des actions indécentes» dans les endroits publics recevront une amende de 214 $. «Selon le contexte, des accusations en vertu du Code criminel pourraient aussi être portées», indique M. Dion.

“Les femmes ont besoin d’une raison pour faire l’amour : les hommes ont juste besoin d’un endroit.” (Billy Crystal)

Philippe De Carufel, intervenant chez MIELS-Québec, connaît bien la clientèle qui fréquente les parcs à la recherche de relations sexuelles furtives. L’organisme sans but lucratif oeuvre depuis 11 ans à prévenir le VIH par des actions de sensibilisation. Selon M. De Carufel, la taille de la ville pousse certains hommes menant une double vie à rechercher des partenaires sexuels dans les parcs. «À Québec, la communauté gaie est assez petite. Il n’y a qu’un ou deux bars gais et quelques saunas. Beaucoup d’hommes qui fréquentent les parcs ne s’identifient pas comme gais, mais comme hétéros. Ils évitent les endroits publics pour vivre une sexualité clandestine.»

Les intervenants de MIELS se rendent dans les parcs pour offrir des condoms et du lubrifiant aux hommes. Le but de l’organisme est avant tout de prévenir la maladie. C’est ici que le mot «sensibilisation» prend un sens différent selon que l’on est un policier ou un intervenant de MIELS. M. De Carufel ne condamne pas clairement les relations sexuelles dans les parcs.

«On considère que la répression n’est pas une réponse adéquate. Quand il y a une frappe policière à un endroit, les hommes se déplacent ailleurs.»

M. De Carufel demande surtout aux hommes de faire preuve de jugement. «Surtout quand il y a des gens autour. Notre association avec la police est intéressante, car elle nous permettra d’informer les hommes qu’il y aura de la répression.» Allez-vous leur conseiller d’éviter les parcs? «Dans la mesure du possible.»

Judiciaire Renvoi pour manque de virilité

Thursday, August 27th, 2009

Gay Globe Magazine souhaite publier certaines décisions des tribunaux du Québec afin de mieux comprendre l’application concrète des lois quant à l’orientation sexuelle. Les jugements publiés ici proviennent du site Jugements.qc.ca

(Résumé) Le Tribunal des droits de la personne est saisi d’une demande dans laquelle la Commission des droits de la personne, agissant au nom du plaignant M. X, allègue que les défenderesses, Bronzage évasion et Mme Lorraine Dumaresq, ont porté atteinte de manière discriminatoire au droit à l’égalité de M. X en mettant fin à son emploi en raison de son orientation sexuelle, contrevenant ainsi aux articles 10 et 16 de la Charte des droits et libertés de la personne.

Le 18 décembre 2003, M. X débute un emploi à temps partiel au salaire minimum, à raison de 20 heures par semaine, auprès de la défenderesse Bronzage évasion. Ses tâches consistent entre autres à prendre les rendez-vous en personne ou par téléphone, à prendre les messages ainsi qu’à effectuer le nettoyage des cabines du salon. Le 12 janvier au matin, Mme Dumaresq le rappelle à nouveau chez lui. C’est le père du plaignant, M. Y, qui répond au téléphone. Voyant qu’elle ne peut parler à M. X car il dort encore, elle questionne alors son père sur son orientation sexuelle en lui demandant à deux reprises si son fils était « gai ». En réponse à sa question, son père lui répliquera qu’« elle n’a qu’à lui demander elle-même ». C’est alors que Mme Dumaresq dit : « Ah, tu ne savais pas que X était gai ? ».

Témoignant au sujet de cette conversation avec Mme Dumaresq, M. Y confirme les propos échangés entre eux sur l’orientation sexuelle de son fils. Il déclare d’ailleurs que ce dernier lui avait fait part de son orientation sexuelle seulement 15 jours avant les évènements. M. Y témoigne que Madame lui a également mentionné le fait que son commerce n’était pas un « dépanneur », mais un «endroit respectable», et qu’elle avait besoin à son emploi de « quelqu’un de viril ». La même journée, M. X retourne chez Bronzage évasion afin de rapporter les clefs de l’entreprise. S’ensuit un entretien avec Mme Dumaresq qui porte «majoritairement», aux dires du plaignant, sur son orientation sexuelle. Tout en réitérant son insatisfaction face au travail, elle lui dit qu’il « manquait de virilité », ce dont des clients se seraient plaints. Elle lui mentionne aussi désapprouver son comportement, car il ne correspondait pas aux exigences d’un salon.

À la fin de cet entretien, Mme Dumaresq lui a alors indiqué la porte de l’établissement, en ajoutant qu’elle le congédiait pour le protéger des préjugés de la clientèle. Au moment de son départ, Mme Dumaresq s’est pointée le doigt sur la tempe en lui disant : « Le problème est dans ta tête ». Après ces incidents, le plaignant a témoigné qu’il s’était senti profondément blessé. Selon lui, il est particulièrement frappant et choquant à 17 ans d’être renvoyé d’un emploi en raison de son orientation sexuelle.

DÉCISION: L’emploi des termes « peu viril » et « gai » par Mme Dumaresq fait une référence directe à l’orientation sexuelle du plaignant, d’autant plus qu’elle a utilisé les mêmes termes avec insistance, au téléphone, lors de sa conversation avec le père du plaignant. Il est évident, dans le contexte social actuel, qu’une personne raisonnable placée dans la situation de Mme Dumaresq aurait dû prévoir et savoir que le congédiement de M. X pour les raisons invoquées était une atteinte à son droit d’être traité sans discrimination fondée sur son orientation sexuelle. Plus qu’une simple négligence de la part de Mme Dumaresq, le fait d’avoir prétexté son comportement peu viril et la nécessité de le protéger contre les préjugés de la clientèle, tout comme les propos qu’elle a tenus au père du plaignant en lui demandant directement si son fils était gai, manifestent une volonté certaine d’aller dans le sens de l’atteinte à son droit à l’égalité dans la reconnaissance et l’exercice des droits de la personne.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL: CONDAMNE les défenderesses, Mme Lorraine Dumaresq et l’entreprise 9113-0831 QUÉBEC INC., à verser solidairement à M. X une somme de huit mille cinquante-huit dollars (8058,00$).

Jean-Luc Romero se donne gain de cause en Cour (faussement)

Saturday, July 4th, 2009

Jean-Luc Romero, le fonctionnaire français de troisième ordre connu pour se prendre pour la Président de la République, a dépassé toutes les limites normales de la bonne foi en se déclarant vainqueur d’un procès impliquant le député français Christian Vanneste, faussement, alors que le Tribunal a justement donné gain de cause à Vanneste sans lui octroyer toutefois de compensations financières à cause d’un bogue technique dans la poursuite.

Seul Jean-Luc Romero, selon les procédés qu’il connait très bien et qui ne causent plus de surprise à qui que ce soit, pouvait annoncer publiquement une victoire alors qu’en fait, un Tribunal venait de lui donner toute une giffle.

La question jugée par le Tribunal était simple: Est-ce qu’il y avait eu diffamation sur le site de Jean-Luc Romero à l’endroit de Christian Vanneste? Réponse du Tribunal: OUI!

Est-ce que le député Vanneste se méritait une compensation financière pour la diffamation commise par Romero: Non! Uniquement parce que le rédigé de l’acte d’accusation comportait une erreur à l’effet que la diffamation n’était pas orientée vers un personnage politique mais un individu.

Conclusion: Il a avait bien eu diffamation, cela Romero est assez malhonnnête pour ne pas l’admettre mais le Tribunal l’aura fait à sa place. Est-ce que M. Romero aide sa cause en mentant à l’opinion publique sur les conclusions d’un tel procès, bien sur, mais est-ce qu’il existe encore une seule personne au monde qui ne sache pas que Jean-Luc Romero déforme la réalité pour servir les causes qu’il défend?

Selon 20minutes.fr

Christian Vanneste a bien été diffamé, mais pas « en tant que député ». Comme en première instance, la cour d’appel de Paris a débouté, hier, le député (UMP-CNI) du Nord de ses poursuites contre le conseiller régional (DVD) Jean-Luc Romero. Il lui reprochait simplement d’avoir diffusé sur son blog des propos désobligeants à son encontre, en 2006. Ces écrits émanaient d’un internaute qui disait au sujet de Christian Vanneste : « Il va vous faire le coup de son habituelle démagogie : “Non mais je n’ai rien contre les homos (je souhaite juste leur extermination dans des chambres à gaz)”. » Hier, la cour d’appel de Paris a jugé que ces propos étaient bien diffamatoires.

Pour autant, elle a débouté Christian Vanneste estimant qu’il n’avait pas été diffamé « en tant que député » mais en tant que personne. Or, la poursuite concernait « une diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public »

Selon le site Internet de Jean-Luc Romero

Le député UMP Christian Vanneste, qui m’avait poursuivi pour un message déposé sur mon blog par un jeune mineur, a été débouté de son recours contre moi par la cour d’appel de Paris ce jeudi 2 juillet 2009. J’ai appris la bonne nouvelle à Porto où j’intervenais à la conférence internationale sur la RDR. Après avoir déjà été débouté en première instance, M. Vanneste l’est donc en appel.
Alors que M. Vanneste estime que dire que l’homosexualité est inférieure à l’hétérosexualité fait partie de la liberté d’expression, ce monsieur est moins tolérant dès qu’il est lui-même mis en cause. La liberté d’expression l’intéresse quand cela l’arrange. M. Vanneste vient aussi d’être débouté dans le procès qui l’opposait à Bertrand Delanoë. Amusant de constater que M. Vanneste a en peu de temps poursuivi deux élus gays et a aujourd’hui dans le collimateur des associations LGBT comme SOS Homophobie et Act Up… Mais jeudi, pas de chance pour lui, la justice est allée dans le sens d’élus… inférieurs car gays !

Jean-Luc Romero ometant comme toujours de mentionner un fait important: le Tribunal a bein déterminé qu’il y avait eu diffamation, Est-ce que cet oubli a été fait de bonne foi? Posons-lui la question…

Christian Vanneste gagne contre Jean-Luc Romero

Thursday, November 13th, 2008

(Intégralement selon 20minutes.fr)

Dire que «l’homosexualité est inférieure à l’hétérosexualité» relève de la liberté d’expression. C’est la décision que vient de rendre ce mercredi la Cour de cassation. Elle a en effet blanchi le député UMP du Nord Christian Vanneste et annulé sa condamnation pour injure envers la communauté homosexuelle, estimant qu’il n’avait pas dépassé les limites de la liberté d’expression. Le Syndicat national des entreprises gaies envisagerait déjà un recours devant la Cour européenne de Justice.

Le député a cependant tenu à exprimer ses regrets. «Je regrette le mot “inférieure”», a-t-il assuré, avant de se lancer dans une tentative d’explication de sa «maladresse»: «je voulais dire: “l’homosexualité c’est moins bien parce que ça ne peut pas être universalisé, tout le monde ne peut pas être homosexuel, sinon la société serait mal partie”».

Il se félicite cependant de ce revirement de situation. «Cette décision de justice me satisfait car elle me fait retrouver deux idées sur lesquelles j’avais de sérieux doutes depuis quatre ans, a déclaré à 20minutes.fr Christian Vanneste. La première est une certaine idée de mon pays. Car depuis quatre ans, on empêchait tout de même un citoyen, et qui plus est, un parlementaire de s’exprimer. La seconde chose, c’est que cette décision de justice prouve qu’il y a une vérité… »

>> A lire, trois questions à Jean-Luc Romero, conseiller régional (divers droite) d’Ile-de-France

Le 25 janvier 2007, la cour d’appel de Douai avait confirmé sa condamnation à 3.000 euros d’amende pour «injure envers les homosexuels». Christian Vanneste avait été condamné en janvier 2006 pour avoir affirmé deux ans plus tôt que l’homosexualité était «inférieure à l’hétérosexualité». Estimant qu’«un parlementaire est investi d’une parcelle de la souveraineté nationale» et que «sa liberté d’expression est une condition de la démocratie et de l’Etat de droit», le député s’était pourvu en cassation.

«La décision de la Cour de cassation ne peut pas s’appuyer sur l’immunité parlementaire dans la mesure où Christian Vanneste n’a pas tenu ces propos dans l’hémicycle», réagit Agnes Tricoire, juriste à la Ligue des Droits de l’homme. «Dans les affaires de presse, la Cour de cassation se montre vigilante et se prononce souvent sur le contenu des jugements et non sur leur forme», ajoute-t-elle.

Contre l’avis de l’avocat général

L’affaire était née de la vive opposition de Christian Vanneste à la loi du 30 décembre 2004, réprimant les injures et discriminations homophobes au même titre que les injures et discriminations racistes ou sexistes.

Il avait notamment affirmé dans la presse régionale que l’homosexualité était «inférieure à l’hétérosexualité. Si on la poussait à l’universel, ce serait dangereux pour l’humanité.»

Allant contre l’avis de l’avocat général, qui avait conclu au rejet de ce pourvoi le 14 octobre, la chambre criminelle a «cassé» ce mercredi la décision de la cour d’appel, sans même renvoyer le dossier devant une autre cour d’appel. «Cela siginifie qu’elle estime qu’il n’y a pas d’autre qualification des faits que la sienne. C’est une décision autoritaire», commente Agnès Tricoire.

«Une décision de grande ampleur»

«Si les propos litigieux, qui avaient été tenus dans la suite des débats et du vote de la loi du 30 décembre 2004, ont pu heurter la sensibilité de certaines personnes homosexuelles, leur contenu ne dépasse pas les limites de la liberté d’expression», a considéré la Cour.

«C’est une décision de grande ampleur dans la mesure où la plus haute juridiction sanctionne l’ensemble de la procédure et des poursuites au regard de la protection de la liberté d’expression», a réagi l’avocat de Christian Vanneste, Eric Morain, saluant «l’aboutissement d’un long combat judiciaire».

Jean-Luc Romero définitivement compromis dans la diffamation

Wednesday, November 12th, 2008

Le politicien gai français Jean-Luc Romero, qui fait l’objet d’une dénonciation de plus en plus importante tant en France qu’à l’étranger pour ses actes incohérents et son style de vie princier vient de recevoir toute une claque de la Cour de Casation de France dans une affaire où, justement, Romero invoquait depuis longtemps l’homophobie du député Christian Vanneste.

Alors qu’il criait depuis des années à qui voulait l’entendre que sa haine du député Vanneste reposait sur de prétendus propos homophobes à son endroit et contre les homosexuels en général, voilà que le 12 novembre 2008, le tribunal suprême français, la Cour de Cassation, annulait les jugements antérieurs et déclarait que le député Vaneste n’avais pas dépassé les limites de la liberté d’expression et que les propos du député n’étaient pas homophobes.

Comme il ne sont pas homophobes et que Romero en fait sa campagne de haine personnelle, associant du coup toutes les personnes qui s’intéressent à la question Romero-Vanneste d’alliés homophobes de M. Vanneste comme il l’a fait pour l’auteur de ces lignes et éditeur d’un média homo (Oui, invraissemblable mais vrai), ce jugement met dorénavant en évidence l’incapacité totale de M. Romero d’agir publiquement et surtout au nom des gais.

Son incohérence et sa haine aveugle de la différence fait de M. Romero un dénonciateur sans contenu, qui accuse sans justification et qui se sert comme toujours de ses accusations montées de toutes pièces pour faire carrière et, bien sur, créer les conditions de la haine envers ceux qui le contredisent.

Jean-Luc Romero s’expose maintenant à un appel dans un procès en diffamation qui pourrait résulter de la décision de ce jour de la Cour suprême française. Il a encore une fois crié à l’injustice mais depuis quelques mois, c’est tout ce qu’il est capable de faire, crier au loup face à ses moutons, en l’absence de la moindre substance.

Jean-Luc Romero est fini, il est devenu incohérent, non pertinent à la cause gaie, il n’a plus la crédibilité politique ou morale pour parler au nom des gais, qu’il se taise donc…