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RAYMOND GRAVEL Tourmenté jusqu’à la fin malgré tout…

Tuesday, September 9th, 2014

Roger-Luc Chayer

L’abbé Raymond Gravel, ce personnage connu et respecté de nombreux québécois, est décédé des complications d’un cancer des poumons récemment, à l’âge de 61 ans.

Malgré une façade très souriante jusqu’à la toute fin, Raymond, qui avait été collaborateur à la Revue Gay Globe il y a quelques années, souffrait d’une anxiété terrible à l’idée de ne pas pouvoir régler quelques affaires qui le tourmentaient depuis longtemps comme, par exemple, le fait de savoir que les organisations qu’il poursuivait en Cour supérieure, en diffamation, retardaient le plus possible l’avancement des dossiers, espérant sa mort avant qu’il ne puisse témoigner. C’est ce qui sera finalement arrivé. Raymond Gravel avait aussi manifesté un sincère regret à l’idée d’avoir été impliqué, malgré lui, dans une autre affaire en Cour, une histoire de faux journaliste qui avait attaqué notre magazine et qui avait finalement été condamné à plus de 12,000$ de dommages. Raymond s’était excusé auprès du magazine, personnellement, pour ses gestes dans cette affaire. Dossier clos…

André J. Saindon et Maison Urbaine condamnés à près de 14,000$

Wednesday, February 12th, 2014
Chayer c. Maison Urbaine inc.

2014 QCCQ 646

COUR DU QUÉBEC
« Division des petites créances »
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE MONTRÉAL
« Chambre civile »
 
DATE : 17 janvier 2014
______________________________________________________________________
 
SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE MARIE MICHELLE LAVIGNE, J.C.Q.
______________________________________________________________________
 
N° : 500-32-127858-118
 
ROGER-LUC CHAYER
Demandeur
c.
MAISON URBAINE INC.

et

ANDRÉ J. SAINDON

Défendeurs
______________________________________________________________________
 
N° : 500-32-127902-114
 
ROGER-LUC CHAYER
Demandeur
c.
MAISON URBAINE INC.

et

ANDRÉ J. SAINDON

Défendeurs
 
______________________________________________________________________

JUGEMENT
______________________________________________________________________
 

[1]           Les deux présentes causes sont réunies pour les fins de l’audition et pour les fins de la réclamation puisque que ces deux dossiers impliquent les mêmes parties dans le cadre des mêmes relations professionnelles.  Le demandeur comprend la situation et accepte de limiter ses réclamations à la somme de 7000,00$ pour les 2 dossiers.

[2]           À la suite de discussions entre les parties, il appert que la défenderesse Maison Urbaine Inc. a été incorrectement identifiée. Maison Urbaine inc. n’est pas une entité légale.  Les réclamations s’adressent plutôt à la Société en commandite Papineau-Sherbrooke et son commanditaire Maison urbaine Papineau Ltée. Puisque André J. Saindon est administrateur de ces 2 entités juridiques, qu’il est présent aujourd’hui et qu’il ne s’oppose pas aux amendements, la demande de modification du nom de la défenderesse est accueillie et la signification des procédures aux deux nouvelles défenderesses n’est pas requise.

[3]           André J. Saindon informe la Cour que ces 2 entités juridiques défenderesses ont été mises sous séquestre et sont maintenant administrées par PricewaterhouseCoopers.  

[4]           Il reconnaît que ces 2 entités juridiques défenderesses doivent à Roger-Luc Chayer des honoraires professionnels totalisant au moins 7000,00 $.

[5]           POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL

ACCUEILLE la demande d’amendement de la réclamation pour remplacer la défenderesse Maison Urbaine Inc. par les défenderesses la Société en commandite Papineau-Sherbrooke et son commanditaire Maison urbaine Papineau Ltée;

CONSTATE la renonciation de André J. Saindon à la signification des réclamations à la Société en commandite Papineau-Sherbrooke et son commanditaire Maison urbaine Papineau Ltée;

ACCUEILLE la réclamation de Roger-Luc Chayer faisant affaire sous le nom de Revue Le Point – Gay Globe Magazine;

CONDAMNE la Société en commandite Papineau-Sherbrooke, Maison Urbaine Papineau Inc. et André J. Saindon solidairement à payer à Roger-Luc Chayer la somme de 7000,00 $ avec intérets conventionnels au taux de 24% par année, à partir du 6 mai 2010;

LE TOUT avec les frais judiciaires pour les 2 dossiers.

 
  __________________________________

MARIE MICHELLE LAVIGNE, J.C.Q.

 
Date d’audience :  17 janvier 2014

Le calcul est donc de 7,000$ X 24% l’an depuis 2010 plus les dépens. 13,670$

Éric Messier: Jugement intégral de la Cour Supérieure

Wednesday, February 12th, 2014
Chayer c. Messier

2014 QCCS 357

 

COUR SUPÉRIEURE

 
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE MONTRÉAL
 
N° : 500-17-060774-109
   
 
DATE : Le 5 février 2014
______________________________________________________________________
 
SOUS LA PRÉSIDENCE DE : L’HONORABLE MARC DE WEVER, J.C.S.
______________________________________________________________________
 
 
ROGER-LUC CHAYER
Demandeur / Défendeur reconventionnel
c.
ÉRIC MESSIER
Défendeur / Demandeur reconventionnel
 
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JUGEMENT
______________________________________________________________________
 

[1]           Le demandeur, se disant victime d’écrits diffamatoires rédigés par le défendeur et propagés sur des sites internet, demande des ordonnances pour forcer leur retrait et l’arrêt de leur publication.  Il réclame aussi 85 000 $ à titre de dommages moraux, punitifs et frais d’avocat.

[2]           Invoquant son droit à la liberté d’expression, le défendeur nie le bien-fondé de la requête du demandeur et se portant demandeur reconventionnel réclame 90 000 $ à titre de dommages moraux et punitifs.

LES FAITS

[3]           Le demandeur se décrit à la fois comme musicien et journaliste.

[4]           En 1983 il s’inscrit au Conservatoire musical de Nice et obtient un diplôme équivalent à une maîtrise dans le système d’éducation québécois.  Il bénéficie de plusieurs bourses et joue dans différents orchestres en France.

[5]           En 1992, de retour au Canada, il écrit plusieurs centaines de chroniques culturelles dans la revue RG.

[6]           Le demandeur déclare qu’il œuvre essentiellement comme journaliste à compter des années 1998-1999 à titre de collaborateur au réseau de télévision TVA et du magazine Le Point.

[7]           En 2002, il acquiert le magazine Le Point qui devient Gay Club Média / Gay Club Magazine.  Parallèlement, il développe un site web pour la tenue de tables rondes et la projection de films.

[8]           Enfin, il organise sa propre compagnie de production de disques appelée Tempo; le dernier disque date de décembre 2012.

[9]           En novembre 2012, il reçoit la Médaille du jubilé de la Reine pour ses carrières musicale et journalistique.

[10]        Le demandeur explique qu’il rencontre pour la première fois le défendeur vers 1995-1996 alors que les deux collaborent à la revue RG.  Par la suite, ils se croisent à quelques reprises.

[11]        En 1997, le demandeur découvre que le défendeur imagine des événements qu’il décrit ensuite dans la revue RG.  Il décide de dénoncer ce fait au Conseil de presse.

[12]        Le demandeur soutient que de 1999 à septembre 2009 il n’a pas de contact avec le défendeur.

[13]        Le 12 septembre 2009, le défendeur, sous le pseudonyme Spiritos22, enregistre sur YouTube le commentaire suivant : « Ah, d’accord, « Devant » l’Assemblée nationale, je vois ! ciel quel clown. » (pièce P-4).

[14]        Le demandeur explique que le défendeur veut le ridiculiser en faisant allusion à sa prestation, devant l’Assemblée nationale, de la « Marseillaise » à l’occasion des Festivités du 400e anniversaire de la ville de Québec.

[15]        Le lendemain, 13 septembre 2009, il prend connaissance d’un document (pièce P-3, pages 6 à 10) intitulé « dossier Roger-Luc Chayer : une nuisance pour la société et la justice » mis en ligne par le défendeur sur son site web.

[16]        Il y a lieu de reproduire in extenso ce document qui marque le début du présent débat judiciaire :

« DOSSIER ROGER-LUC CHAYER : UNE NUISANCE POUR LA SOCIÉTÉ ET LA JUSTICE – DÉNONCIATION DU ²CONSEIL DE PRESSE GAI DU QUÉBEC² ET DE ROGER-LUC CHAYER :

La présente dénonciation vise à servir l’intérêt public à l’encontre de Roger-Luc Chayer (rue Bourbonnière, Montréal), un journaliste auto-proclamé, maintes fois blâmé par ses pairs et qui est reconnu pour avoir abusé du système de justice du Québec pour poursuivre un très grand nombre de personnes et d’organismes.

Le système de justice du Québec a décidé il y a quelque temps de prendre des mesures pour freiner les abus de cet individu, mais sans avoir un succès complet.

Attendu que le “Conseil de presse gaie du Québec” n’est ni légitime ni représentatif des communautés gaies et lesbiennes en ce qu’il est constitué de quelques individus qui se sont déclarés eux-mêmes membres de ce “Conseil”, sans consultation ni participation de ces communautés ni du milieu de la presse;

Attendu que ce “Conseil”, par ces quelques personnes, se saisit lui-même de l’essentiel des plaintes et en dispose par la suite;

Attendu que ce “Conseil” ne suit pas les règles élémentaires en matière de déontologie ET QUE ce “Conseil” ternit l’image des communautés gaies et lesbiennes;

Attendu que le Conseil de presse du Québec, l’autorité reconnue pour les questions de déontologie en matière journalistiques, a condamné à deux reprises les écrits de Roger-Luc Chayer (décisions D199603-020, décision maintenue en appel, et décision d199908-08);

Attendu que le “Conseil de presse gaie du Québec” est intimement et essentiellement lié à deux médias, Le National et Le Point, violant ainsi les règles élémentaires d’impartialité et d’objectivité;

Attendu que Roger-Luc Chayer est l’artisan du “National” et du “Conseil de presse gai du Québec“, et rédacteur en chef de la revue Le Point;

Attendu que Roger-Luc Chayer suscite et entretient inutilement, artificiellement et de façon tendancieuse la polémique à l’encontre de groupes et d’individus qui oeuvrent au sein des communautés gaies et lesbiennes;

EN CONSÉQUENCE

Nous ne reconnaissons pas les décisions du “Conseil de presse gaie du Québec” car nous ne reconnaissons pas sa légitimité. Nous nous dissocions des écrits et opinions de ce “Conseil“, du site “Le National” et de Roger-Luc Chayer, ainsi que de la revue “Le Point” tant que Roger-Luc Chayer en sera le rédacteur en chef.

Pour plus d’informations, visitez le site du comité de défense juridique

VOICI LA LISTE DES GROUPES ET INDIVIDUS

QUI ONT DÉNONCÉ LE JOURNALISTE AUTO-PROCLAMÉ ROGER-LUC CHAYER,

SES PRÉTENDUS MÉDIAS ET SON SUPPOSÉ ²CONSEIL DE PRESSE GAI²

29 GROUPES QUI ONT SIGNÉ LA DÉNONCIATION

48 INDIVIDUS QUI ONT SIGNÉ LA DÉNONCIATION (ordre alphabétique)

Comité de défense juridique des communautés LGBT

ROGER-LUC CHAYER DÉNONCÉ PUBLIQUEMENT

ÉCHEC DE LA TENTATIVE DE ROGER-LUC CHAYER DE MUSELER LA PRESSE

(Autre lien sur cette tentative échouée)

Lancement du Fonds de défense juridique des communautés lesbiennes et gaies du Québec

COMMUNIQUÉ :  LE (VÉRITABLE) CONSEIL DE PRESSE DÉNONCE LE PRÉTENDU JOURNALISTE ROGER-LUC CHAYER

Le National n’est pas un média au sens du cyberjournalisme, mais plutôt le site web personnel de M. Roger-Luc Chayer.

Le Conseil de presse du Québec a conclu à une faute professionnelle majeure de la part de M. Roger-Luc Chayer et retient la plainte, qui s’applique conjointe-ment au média écrit et électronique Le Point pour avoir cautionné un tel état de fait.

Détails sur le site de la Table (section Documents)

Les décisions du (seul véritable) CONSEIL DE PRESSE DU QUÉBEC concernant Roger-Luc Chayer

À remarquer qu’il est étonnant que le CPQ se préoccupe de Chayer puisque ce dernier n’est un “journaliste reconnu” par aucun regroupement professionnel, c’est-à-dire seulement par lui-même.

Mais pour PLEINEMENT MESURER le degré de nuisance de Roger-Luc Chayer pour la société, il faut consulter les innombrables poursuites judiciaires, dont certaines jugées ridicules par les juges eux-mêmes, qu’il a entreprises depuis 10 à 20 ans contre Pierre-Jean-Jacques

à la COUR DES PETITES CRÉANCES DU QUÉBEC

à la COUR SUPÉRIEURE DU QUÉBEC

et à la COUR DU QUÉBEC, entre autres.

Du vaudeville ! »

[17]        Or, le demandeur constate que ce document est presque en tout point identique à un communiqué émis en 2000 par l’Association des lesbiennes et des gais sur internet (ALGI) (pièce P-3, pages 11 à 15).  À la suite de ce communiqué, il intente alors  des procédures contre cette association et certains des signataires du communiqué. Ces procédures aboutissent à une déclaration de désistements réciproques et de règlement hors de cour homologuée par le Tribunal le 6 novembre 2007 (pièces P-1 et P-2).

[18]        Le demandeur mentionne que parmi les liens apparaissant dans le document (au bas de la page 8, pièce P-3), il y en a qui mène à un jugement (pièce P-6) rendu dans le cadre de procédures contre l’ALGI, jugement rejetant une demande de non-publication pendant l’instance et à un commentaire à propos de ce jugement.

[19]        En réaction à la diffusion par le défendeur du document se rapportant à lui (pièce P-3), le demandeur achemine au défendeur une mise en demeure (pièce P-8) lui demandant de retirer le document puisqu’il contient de graves et fausses informations.

[20]        Le défendeur ne s’exécute pas, mais, au contraire, apporte en plusieurs occasions des modifications au document original (pièces P-9 et P-10).

[21]        En décembre 2009, le demandeur constate que le défendeur persiste à mettre sur son site web le document découvert trois mois plus tôt et, à nouveau, avec des ajouts (pièce P-15).

[22]        Ainsi, en examinant un curriculum vitae du défendeur (pièce P-17, page 71), il note qu’il s’y trouve toujours un lien avec le document auquel il s’objecte (pièce P-17, page 72 et suivantes), dans une version modifiée et avec des liens additionnels (pièce P-18).

[23]        Dans la version du document de fin décembre 2009 (pièce P-19), le demandeur remarque que le défendeur insère même ses adresse et numéro de téléphone personnels (pièce P-19, page 80).  De plus, le défendeur présente maintenant une version anglaise du document (pièce P-19, page 80).

[24]        Le demandeur mandate alors ses procureurs pour transmettre au défendeur une mise en demeure (pièce P-16).

[25]        Le 5 janvier 2010, le défendeur répond au demandeur en ces termes : « pour quelle raison ? Allez tu peux sûrement en trouver deux-trois en te forçant, non ? Peut-être que je m’ennuyais tout simplement. Ou alors, c’était pour la vérité, toi qui aimes tant la vérité.  Ou alors pour « aller là où personne d’autre ne va » ? » (pièce P-20, page 85).

[26]        Toujours en janvier, le défendeur modifie le document pour inclure d’autres informations, notamment « Décisions de justice qui ont impliqué Chayer » (pièce P-21, page 102).

[27]        Le 10 janvier 2010, le défendeur insère la photographie du demandeur sur son site avec plusieurs liens (pièce P-23, page 107).

[28]        Le 20 janvier 2010, le défendeur émet un communiqué intitulé « le journaliste Éric Messier lance la veille médiatique où il parle, notamment, de son plus « récent dossier » au sujet du « journaliste gai et Montréalais, Roger-Luc Chayer, plusieurs fois condamné par le Conseil de presse du Québec, la plus haute instance en matière d’éthique journalistique » (pièce P-24, page 109).

[29]        Le défendeur voit à transmettre ce communiqué sur un site européen appelé Categorynet.

[30]        Le 26 janvier 2010, le défendeur ajoute à son document le titre suivant : « usines à faux diplômes » (pièce P-27, page 125) toujours avec un lien en rapport avec le demandeur.

[31]        Après d’autres ajouts ou modifications (pièce P-31), le 15 février 2010, le défendeur, dans une section intitulée « dossiers », juxtapose les titres « États-Unis : une business d’escroquerie » « Québec : l’Académie Ville-Marie créée par Roger-Luc Chayer est dénoncée par le Ministère de l’Éducation. » (pièce P-32, page 148).

[32]        Tout au long de février et mars 2010, le défendeur persiste à publier sur son site le document se rapportant à Chayer, et ce, avec ou sans modifications.

[33]        Le 21 mars 2010, le défendeur utilisant le site « pilule rouge ou bleue? », place la photo d’un singe à côté d’un texte qui commence par les mots : « Roger-Luc Chayer : délire de mars…» (pièce P-44, page 207).

[34]        Le demandeur témoigne qu’en voyant cette photographie d’un singe accolée à son nom il ressent une grande humiliation.

[35]        Quelques jours plus tard, le défendeur, toujours sur le site « pilule rouge – pilule bleue », relie le nom du demandeur aux mots : « faux, harcèlement, accusation au criminel, …fascisme. » (pièce P-55, page 305).

[36]        Le 3 mai 2010, le demandeur fait appel à un autre procureur pour acheminer au défendeur une deuxième mise en demeure (pièce P-57) qui reste sans réponse.

[37]        Le 7 juin 2010, le défendeur émet à nouveau le document au sujet du demandeur encore une fois avec des variantes.

[38]        Entretemps, le demandeur écrit à plusieurs responsables de sites pour tenter de mettre un terme à la dissémination du document puisque celui-ci se retrouve même en Chine.

[39]        En septembre, le demandeur intente les présentes procédures contre le défendeur.

[40]        Néanmoins, le défendeur non seulement ne retire pas le document, mais y rajoute même des propos au sujet de la carrière de musicien du demandeur.

[41]        Le 11 février 2011, le Tribunal émet une ordonnance de sauvegarde du consentement des parties, qui se lit notamment :

« ORDONNE aux parties de retirer dans les vingt-quatre (24) heures tous les articles publiés sur les sites internet sous leur contrôle, concernant l’autre partie, y incluant les ²TAGS² et autres liens permettant un renvoi sur d’autres sites ou moteurs de recherche;

ORDONNE aux parties de ne pas publier d’article relatif à l’autre partie d’ici le 10 juin 2011, sur tout support quel qu’il soit, informatique ou autre. »

[42]        Le demandeur constate qu’en dépit de cette ordonnance de sauvegarde plusieurs articles sur un site contrôlé par le défendeur restent accessibles (pièces P-82 à P-89).

[43]        Le 9 juin 2011, le Tribunal donne acte à l’acquiescement du défendeur aux conclusions de la requête en injonction interlocutoire.

[44]        Néanmoins, le demandeur constate que le défendeur, en dépit du jugement, ne retire pas des sites Web tous les documents à son sujet (pièce P-91 en liasse).

[45]        Enfin, le demandeur explique que plusieurs des requêtes introductives d’instance  (pièce D-1) auxquelles réfère le défendeur, ne concernent que des actions sur compte pour services rendus par lui-même ou ses entreprises.

[46]        De son côté, le défendeur explique qu’il exerce trois métiers au cours des ans.

[47]        De 1989 à 2011, à titre de journaliste, il écrit quelques 3,000 articles autant dans des journaux que sur l’internet.

[48]        Deuxièmement, à compter de 1993 jusqu’à ce jour, il enseigne les techniques de communication.  D’ailleurs, il est détenteur d’un baccalauréat en psycho-sociologie de la communication et en adaptation scolaire et sociale

[49]        Enfin, étant titulaire d’une maîtrise en relations internationales, au cours de ces mêmes années, il agit comme consultant en communication au niveau international.

[50]        Il rencontre le demandeur en 1995 lorsqu’il veut écrire pour la revue RG.

[51]        Quatre ans plus tard, le demandeur publie un article critique à son égard dans la revue Le National.  Il décide de porter plainte contre le demandeur au Conseil de presse du Québec (pièce D-7) qui ne retient qu’une partie de la plainte pour une simple inexactitude dans l’article.

[52]        Le défendeur n’a plus de contact avec le demandeur jusqu’en 2009.

[53]        En septembre 2009, à titre de citoyen et non de journaliste, il décide de publier sur son site web un dossier (pièce P-3) à propos du demandeur.

[54]        Il prend cette décision en réaction aux agissements du demandeur qui, selon lui, multiplie les procédures judiciaires, engorge le système judiciaire et cause du stress à maints défendeurs.

[55]        Il prend la peine d’insérer des commentaires (pièce P-3, page 7), d’ajouter le mot « véritable » pour distinguer le Conseil de presse du Québec du Conseil de presse gai du Québec (pièce P-3, page 8).  Lorsqu’il parle de dénonciation, il se réfère aux décisions du Conseil de presse du Québec (pièce P-3, page 8).  Il insère « rue Bourbonnière » (pièce P-3, page 7) pour départager tout autre individu portant le même nom que le demandeur.

[56]        Son dossier réfère à la déclaration de désistements réciproques et de règlement hors cour dans l’affaire ALGI (pièce P-1) parce que le demandeur achemine cette procédure à certaines personnes sous prétexte que ce règlement les lie.

[57]        Il veut donc expliquer à ces mêmes personnes qu’il n’en est rien.

[58]        Toujours dans ce dossier, le défendeur parle « d’échec de la tentative de Roger-Luc Chayer de museler la presse » (pièce P-3, page 8) et, plutôt que de mettre un lien avec le jugement en question (pièce P-6), il crée un lien avec un article sur ce sujet publié dans le magazine Fugues (pièce P-7, page 29).

[59]        Pour lui, le lecteur comprendra mieux la teneur de l’article dans Fugues que le jugement lui-même.

[60]        Au sujet de son commentaire à propos du demandeur interprétant la Marseillaise (pièce P-4), le défendeur déclare qu’il s’agit d’une boutade puisqu’il trouve cocasse que le demandeur se place devant l’Assemblée nationale pour interpréter cet hymne national.

[61]        Le défendeur soutient que tout site web nécessite des mises à jour, d’où les nombreuses modifications au document initial (pièce P-3).

[62]        Dans ce contexte, il décide d’ajouter l’adresse civique du demandeur (pièce P­10, page 39) trouvée dans un bottin téléphonique public.

[63]        Dans la version du 17 décembre 2009 (pièce P-15, page 65), il juxtapose au nom du demandeur, le nom de famille « Lacelle » car il se questionne quant à certaines identités utilisées par le demandeur.

[64]        Pour le défendeur, son but est toujours de protéger l’intérêt public.

[65]        Onze jours plus tard, il ajoute un lien intitulé « Chayer rend hommage à André Gagnon » (pièce P-17, page 73) parce que le demandeur est alors en dispute avec André Gagnon.

[66]        Toujours dans cette version, il écrit : « Chayer attaque un organisme communautaire (ALGI) mais abandonne après six ans » (pièce P-17, page 74).

[67]        Selon ses informations, le demandeur est celui qui propose le désistement d’où l’emploi du mot  « abandonne ».  Cependant, il ne contrôle pas cette information.

[68]        Le 5 janvier 2010, le défendeur écrit : « quant à ta condition de bipolaire, c’est effectivement quelque chose qui t’appartient, … » (pièce P-20, page 89).  Il ne vérifie pas l’existence d’un tel diagnostic et ne peut donner de raison pour y référer.

[69]        Dans la version du 21 janvier 2010 (pièce P-25), le défendeur explique qu’il parle de « poursuite bâillon » (pièce P-25, page 113) parce que le demandeur le poursuit aux petites créances après sa plainte au Conseil de presse du Québec.

[70]        Dans ce même document, à la page suivante (pièce P-25, page 114), le défendeur, après le titre « Il joue « devant l’Assemblée nationale » (sic), c’est intéressant! », écrit que « … (le demandeur) a été accusé il y a quelques années d’utiliser frauduleusement le logo de l’UIPF… » (pièce P-25, page 114).  À ce sujet, il déclare n’avoir aucune source fiable, mais se baser sur des ouï-dire.

[71]        À propos de l’utilisation de la photo d’un singe (pièce P-44, page 207), le défendeur affirme que son but est d’illustrer l’aspect cocasse de la situation qui existe alors entre le demandeur et lui-même plutôt que de comparer le demandeur à cet animal.

[72]        Le 26 mars 2010, le défendeur titre : « Roger-Luc Chayer traite de menteurs ses présumés collabos » (pièce P-55, page 305).  Il soutient qu’il utilise le mot « collabos » dans le sens de « collaborateur » et non dans le sens péjoratif souvent associé au mot « collabo ».

[73]        Pour cet article, il ne contacte pas le demandeur pour obtenir sa version parce qu’il n’a aucune confiance en lui.  Il ajoute qu’il comprend bien que si ce texte émanait d’un journaliste, et non d’un simple citoyen, il aurait eu le devoir de contacter le demandeur.  En effet, un journaliste doit vérifier ses sources.

[74]        De plus, le dossier étant sur un site web, il ne voit aucune utilité ou nécessité à vérifier la version du demandeur, d’autant qu’il est un spécialiste en communications incluant l’utilisation de l’internet.

[75]        Le défendeur reconnaît être l’auteur des trois commentaires qui apparaissent dans le document (pièce P-64, pages 455 et 456).  Il soutient qu’ils reflètent la vérité.

[76]        Alors qu’il se trouve au Sénégal, son procureur l’avise de l’ordonnance de sauvegarde du 11 février 2011.  Il tente de cet endroit lointain de retirer de l’internet les textes que l’ordonnance lui commande de faire.

[77]        Pour lui, le dossier qu’il met sur internet à propos du demandeur équivaut à une anthologie.

[78]        Il réitère sa prétention que tout lecteur de ce dossier doit comprendre qu’il ne s’agit pas du travail d’un journaliste, et ce, d’autant plus que le tout se retrouve sur son site web.

[79]        Il répète que son but, en 2009, en insérant sur son site web le document au sujet des désistements et règlement hors cour dans le dossier ALGI, est de mettre en garde le public devant le fait que, selon lui, le demandeur se sert à tort et sans réserve de ce document pour intimider certaines personnes.

[80]        Dans la version du 5 janvier 2010 du document (pièce P-20, page 87), les mots « dossier médiatique », réfèrent au dossier sur son site web depuis septembre 2009.

[81]        Il est l’auteur du document intitulé « actualité-news » (pièce P-36, page 171).  Ce document, qui relève de sa discrétion éditoriale, regroupe des textes qui ne sont pas nécessairement de lui.

QUESTIONS EN LITIGE

[82]        Le demandeur prétend que le document publié par le défendeur, tant dans sa forme originale qu’en versions amendées, est diffamatoire et lui cause un grand tort.

[83]        Le défendeur, invoquant la liberté d’expression, affirme que le document mis sur son site web présente des commentaires loyaux et raisonnables, n’est nullement diffamatoire et ne vise qu’à protéger l’intérêt public.

[84]        Les questions en litige se résument de la façon suivante :

1)    Le document publié par le défendeur est-il diffamatoire ?

2)    Si oui, le défendeur commet-il une faute qui porte atteinte à la réputation du demandeur ?  S’agit-il d’une faute intentionnelle ?

3)    Y a-t-il un lien de causalité entre la faute et les dommages réclamés ?

4)    Si oui, quels sont ces dommages ?

LE DROIT

[85]        Les articles 4 et 5 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne protègent le droit à la réputation :

« 4. Toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation.

5.    Toute personne a droit au respect de sa vie privée. »

[86]        Les articles 3, 7 et 35 C.c.Q. édictent que :

« 3. Toute personne est titulaire de droits de la personnalité, tels le droit à la vie, à l’inviolabilité et à l’intégrité de sa personne, au respect de son nom, de sa réputation et de sa vie privée.

Ces droits sont incessibles

7. Aucun droit ne peut être exercé en vue de nuire à autrui ou d’une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l’encontre des exigences de la bonne foi.

35. Toute personne a droit au respect de sa réputation et de sa vie privée.

Nulle atteinte ne peut être portée à la vie privée d’une personne sans que celle-ci y consente ou sans que la loi l’autorise. »

[87]        D’un autre côté, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne stipule que la liberté d’expression s’insère parmi les libertés fondamentales :

« 3. Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association. »

[88]        Ainsi, le Tribunal doit concilier ces deux droits, celui à la réputation et celui à la liberté d’expression.

[89]        Sur ce sujet, la Cour suprême écrit :

(iii) Le régime civiliste de responsabilité

« Le droit civil québécois ne prévoit pas de recours particulier pour l’atteinte à la réputation.  Le fondement du recours en diffamation au Québec se trouve à l’art. 1457 C.c.Q. qui fixe les règles générales applicables en matière de responsabilité civile.  Ainsi, dans un recours en diffamation, le demandeur doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, l’existence d’un préjudice, d’une faute et d’un lien de causalité, comme dans le cas de toute autre action en responsabilité civile, délictuelle ou quasi délictuelle.

Pour démontrer le premier élément de la responsabilité civile, soit l’existence d’un préjudice, le demandeur doit convaincre le juge que les propos litigieux sont diffamatoires.  Le concept de diffamation a fait l’objet de plusieurs définitions au fil des années. De façon générale, on reconnaît que la diffamation « consiste dans la communication de propos ou d’écrits qui font perdre l’estime ou la considération de quelqu’un ou qui, encore, suscitent à son égard des sentiments défavorables ou désagréables ».

La nature diffamatoire des propos s’analyse selon une norme objective.  Il faut, en d’autres termes, se demander si un citoyen ordinaire estimerait que les propos tenus, pris dans leur ensemble, ont déconsidéré la réputation d’un tiers.  À cet égard, il convient de préciser que des paroles peuvent être diffamatoires par l’idée qu’elles expriment explicitement ou encore par les insinuations qui s’en dégagent.  Dans l’affaire Beaudoin c. La Presse Ltée, [1998] R.J.Q. 204 (C.S.), p. 211, le juge Senécal résume bien la démarche à suivre pour déterminer si certains propos revêtent un caractère diffamatoire :

«La forme d’expression du libelle importe peu; c’est le résultat obtenu dans l’esprit du lecteur qui crée le délit ». L’allégation ou l’imputation diffamatoire peut être directe comme elle peut être indirecte « par voie de simple allusion, d’insinuation ou d’ironie, ou se produire sous une forme conditionnelle, dubitative, hypothétique ». Il arrive souvent que l’allégation ou l’imputation « soit transmise au lecteur par le biais d’une simple insinuation, d’une phrase interrogative, du rappel d’une rumeur, de la mention de renseignements qui ont filtré dans le public, de juxtaposition de faits divers qui ont ensemble une semblance de rapport entre eux.

Les mots doivent d’autre part s’interpréter dans leur contexte. Ainsi, « il n’est pas possible d’isoler un passage dans un texte pour s’en plaindre, si l’ensemble jette un éclairage différent sur cet extrait ». À l’inverse, « il importe peu que les éléments qui le composent soient véridiques si l’ensemble d’un texte divulgue un message opposé à la réalité ». On peut de fait déformer la vérité ou la réalité par des demi-vérités, des montages tendancieux, des omissions, etc. « Il faut considérer un article de journal ou une émission de radio comme un tout, les phrases et les mots devant s’interpréter les uns par rapport aux autres.

Cependant, des propos jugés diffamatoires n’engageront pas nécessairement la responsabilité civile de leur auteur.  Il faudra, en outre, que le demandeur démontre que l’auteur des propos a commis une faute.  Dans leur traité, La responsabilité civile (5e éd. 1998), J.-L. Baudouin et P. Deslauriers précisent, aux p. 301-302, que la faute en matière de diffamation peut résulter de deux types de conduites, l’une malveillante, l’autre simplement négligente :

La première est celle où le défendeur, sciemment, de mauvaise foi, avec intention de nuire, s’attaque à la réputation de la victime et cherche à la ridiculiser, à l’humilier, à l’exposer à la haine ou au mépris du public ou d’un groupe. La seconde résulte d’un comportement dont la volonté de nuire est absente, mais où le défendeur a, malgré tout, porté atteinte à la réputation de la victime par sa témérité, sa négligence, son impertinence ou son incurie. Les deux conduites constituent une faute civile, donnent droit à réparation, sans qu’il existe de différence entre elles sur le plan du droit. En d’autres termes, il convient de se référer aux règles ordinaires de la responsabilité civile et d’abandonner résolument l’idée fausse que la diffamation est seulement le fruit d’un acte de mauvaise foi emportant intention de nuire.

À partir de la description de ces deux types de conduite, il est possible d’identifier trois situations susceptibles d’engager la responsabilité de l’auteur de paroles diffamantes.  La première survient lorsqu’une personne prononce des propos désagréables à l’égard d’un tiers tout en les sachant faux.  De tels propos ne peuvent être tenus que par méchanceté, avec l’intention de nuire à autrui.  La seconde situation se produit lorsqu’une personne diffuse des choses désagréables sur autrui alors qu’elle devrait les savoir fausses.  La personne raisonnable s’abstient généralement de donner des renseignements défavorables sur autrui si elle a des raisons de douter de leur véracité.  Enfin, le troisième cas, souvent oublié, est celui de la personne médisante qui tient, sans justes motifs, des propos défavorables, mais véridiques, à l’égard d’un tiers.

Ainsi, en droit civil québécois, la communication d’une information fausse n’est pas nécessairement fautive. À l’inverse, la transmission d’une information véridique peut parfois constituer une faute. On retrouve là une importante différence entre le droit civil et la common law où la fausseté des propos participe du délit de diffamation (tort of defamation).  Toutefois, même en droit civil, la véracité des propos peut constituer un moyen de prouver l’absence de faute dans des circonstances où l’intérêt public est en jeu.

Dans tous les cas, l’appréciation de la faute demeure une question contextuelle de faits et de circonstances.  À cet égard, il importe de rappeler que le recours en diffamation met en jeu deux valeurs fondamentales, soit la liberté d’expression et le droit à la réputation. Notre Cour a reconnu très tôt l’importance de la première de ces valeurs dans une société démocratique. »[1]

[90]        La Cour suprême ajoute :

« La défense d’immunité relative n’est pas exclusive aux élus municipaux. Elle trouve application chaque fois qu’une personne qui communique des renseignements a un intérêt ou une obligation légale, sociale ou morale, de les transmettre à une autre personne qui a un intérêt réciproque à les recevoir.  C’est notamment le cas lorsqu’un employeur ou un professeur donne des références sur son employé ou son étudiant ou encore lorsqu’un journaliste publie dans l’intérêt public des informations diffamatoires qu’il croit honnêtement vraies. »[2]

[91]        Par ailleurs, le Tribunal se range à l’opinion de madame la juge Blondin à l’effet que la définition du terme diffamation ne change pas d’un medium à l’autre :

« [40] La définition donnée au terme « diffamation » ne change pas, peu importe le médium utilisé. Ainsi, les tribunaux ont reconnu que la diffamation en ligne devait être traitée comme toute autre forme de diffamation, qu’elle se fasse par le biais des journaux, de la radio ou de la télévision :

[248] Les mots sont des outils puissants de communication : ils détruisent une réputation en peu de temps alors que, parfois, il a fallu des années pour la construire. L’Internet est un puissant outil de diffusion : la communication n’a presque plus de frontière. La liberté d’expression est une valeur fondamentale de première importance mais le respect de la dignité et de la réputation de la personne l’est tout autant. Ceux qui parlent ou écrivent et ceux qui diffusent sur Internet doivent le réaliser. »[3]

(Soulignement dans le texte)

ANALYSE

Le document publié par le défendeur est-il diffamatoire ?

[92]        Pour répondre à cette question, le Tribunal doit se demander si un citoyen ordinaire estimerait que le document publié par le défendeur, pris dans son ensemble, déconsidère la réputation du demandeur.

[93]        Avant de répondre à la question, rappelons les propos de notre collègue, monsieur le juge Sénécal:

« La forme d’expression du libelle importe peu; c’est le résultat obtenu dans l’esprit du lecteur qui crée le délit ». L’allégation ou l’imputation diffamatoire peut être directe comme elle peut être indirecte « par voie de simple allusion, d’insinuation ou d’ironie, ou se produire sous une forme conditionnelle, dubitative, hypothétique ».  Il arrive souvent que l’allégation ou l’imputation «soit transmise au lecteur par le biais d’une simple insinuation, d’une phrase interrogative, du rappel d’une rumeur, de la mention de renseignements qui ont filtré dans le public, de juxtaposition de faits divers qui ont ensemble une semblance de rapport entre eux. »[4]

[94]        Le Tribunal est d’opinion que le document préparé et publié par le défendeur à propos du demandeur, pris dans sa globalité et analysé dans le contexte de sa dissémination par le défendeur, est de nature diffamatoire.

[95]        Quel est ce contexte ?

[96]        En juillet 2001, une dénonciation (pièce P-3, pages 11 et suivantes) dirigée contre le demandeur voit le jour.

[97]        Celui-ci réplique en instituant des procédures contre l’ALGI et certaines des personnes signataires de la dénonciation.

[98]        Bien que le défendeur soit un des signataires, il ne figure pas à titre de défendeur dans la procédure intentée par le demandeur.  En novembre 2007, intervient le règlement hors cour (pièce P-1) entériné par la Cour supérieure (pièce P-2).

[99]        Presque deux ans plus tard, en septembre 2009, le défendeur met sur son site ce qu’il appelle le « dossier Roger-Luc Chayer » (pièce P-3, page 6 et suivantes).

[100]     Le défendeur structure le document de la façon suivante : sous le titre déjà cité, il inscrit : « une nuisance pour la société et la justice ».

[101]     Ensuite, avant de citer le texte même de la dénonciation de juillet 2001, il insère, en caractères gras, les deux commentaires suivants de son cru :

« La présente dénonciation vise à servir l’intérêt public à l’encontre de Roger-Luc Chayer (rue Bourbonnière, Montréal), un journaliste auto-proclamé, maintes fois blâmé par ses pairs et qui est reconnu pour avoir abusé du système de justice du Québec pour poursuivre un très grand nombre de personnes et d’organismes.

Le système de justice du Québec a décidé il y a quelque temps de prendre des mesures pour freiner les abus de cet individu, mais sans avoir un succès complet. »

[102]     Après ces deux commentaires, suit le texte original de la dénonciation.

[103]     Puis le défendeur, après l’énumération des signataires de la dénonciation, enchaine avec d’autres commentaires, toujours de son cru, regroupés sous le sous-titre « Comité de défense juridique des communautés LGBT: ROGER-LUC CHAYER DÉNONCÉ PUBLIQUEMENT, Échec de la tentative de roger-luc chayer de museler la presse ».                                                         (soulignement dans le texte)

[104]     Enfin, le défendeur inclut des liens qui, plus souvent qu’autrement, sont vides.  De plus, il omet de mettre les liens actuels permettant à un lecteur de prendre connaissance des décisions judiciaires elles-mêmes.

[105]     Le Tribunal constate qu’à la lecture du document, il est très difficile, sinon impossible, de différencier entre le texte original de la dénonciation en juillet 2001 et les ajouts par le défendeur en septembre 2009.

[106]     Une chose est certaine : l’organisation et la présentation du document laissent croire aux lecteurs que des tribunaux qualifient, de fait, le demandeur de nuisance, sans pouvoir y mettre un terme.

[107]     Le 14 septembre 2009, lendemain de la première diffusion du document, le demandeur écrit par courrier recommandé au défendeur lui demandant de retirer le document qui contiendrait de fausses informations.

[108]     Débutent alors la mise en ligne par le défendeur de versions amendées du document, chaque version ajoutant des commentaires tels : « lourd dossier sur Roger-Luc Chayer » (pièce P-10, page 38), « Il joue devant l’Assemblée nationale », trop drôle! (pièce P-10, page 39), « Chayer s’en prend à l’organisme de soutien ALGI, il se désiste après avoir grugé l’os pendant six ans » (pièce P-10, page 39), sans oublier la juxtaposition du défendeur à une photo d’un singe (pièce P-44, page 207), et l’association du nom du demandeur au régime du dictateur irakien Saddam Hussein (pièce P-28, page133).

[109]     Ce ne sont là que quelques exemples de la façon dont le défendeur crée et met en ligne ce qu’il appelle le dossier du demandeur.

[110]     Le défendeur soutient qu’il agit dans l’intérêt public.

[111]     Le Tribunal est d’avis qu’il n’en est rien.  Il s’agit plutôt d’un plan d’attaque contre le demandeur pour que le lecteur ne voit en lui qu’une personne agressive, constamment en guerre contre d’autres individus ou groupes, monopolisant le temps des tribunaux par ses sagas juridiques.

[112]     Non seulement les titres et expressions utilisés par le défendeur sont-ils péjoratifs, mais, de plus, leurs agencements sont tendancieux.

[113]     En somme, par des titres accrocheurs, des insinuations ou juxtapositions malveillantes, des résumés ou citations incomplètes de décisions judiciaires impliquant le demandeur sans que le lecteur puisse, de lui-même, lire in extenso les dites décisions, des références à de supposées poursuites bâillons, le défendeur crée chez le lecteur une croyance que le demandeur n’est qu’un quérulent, et au surplus un quérulent qui n’est qu’un clown.

[114]     Il est évident que le document monté par le défendeur a pour effet de faire perdre l’estime et la considération des lecteurs à l’égard du demandeur et de susciter contre lui des sentiments défavorables ou désagréables.

[115]     En somme, le Tribunal ne doute pas qu’un « citoyen ordinaire estimerait que le dossier constitué par le défendeur, pris dans son ensemble, déconsidère la réputation du demandeur ».

Y a-t-il faute du défendeur?  Si oui, est-elle intentionnelle?

[116]     Le demandeur a le fardeau de prouver une faute de la part du défendeur.

[117]     Tel que mentionné, les auteurs Baudoin et Deslauriers écrivent qu’une telle faute peut résulter d’une conduite malveillante ou simplement négligente, ce qui amène la Cour suprême, dans l’arrêt Prud’homme précité, à identifier trois situations qui engagent la responsabilité de l’auteur de l’écrit diffamatoire.  Répétons ces propos de la Cour suprême :

« À partir de la description de ces deux types de conduite, il est possible d’identifier trois situations susceptibles d’engager la responsabilité de l’auteur de paroles diffamantes. La première survient lorsqu’une personne prononce des propos désagréables à l’égard d’un tiers tout en les sachant faux. De tels propos ne peuvent être tenus que par méchanceté, avec l’intention de nuire à autrui. La seconde situation se produit lorsqu’une personne diffuse des choses désagréables sur autrui alors qu’elle devrait les savoir fausses. La personne raisonnable s’abstient généralement de donner des renseignements défavorables sur autrui si elle a des raisons de douter de leur véracité. Enfin, le troisième cas, souvent oublié, est celui de la personne médisante qui tient, sans justes motifs, des propos défavorables, mais véridiques, à l’égard d’un tiers. »[5]

[118]     Le Tribunal est d’opinion que la prépondérance de la preuve est à l’effet que le défendeur, sciemment, veut s’attaquer à la réputation du demandeur et, certainement, le ridiculiser et l’humilier auprès des lecteurs de son site web.

[119]     Ainsi, le défendeur est le premier à reconnaître qu’il entend mettre un terme à ce qu’il appelle de l’intimidation de la part du demandeur à l’égard de plusieurs personnes ce qui, toujours selon le demandeur, est dans l’intérêt public.

[120]     Or, le défendeur ne présente au Tribunal aucune preuve de semblable intimidation vécue par une personne ou l’autre  pas plus qu’il ne met en preuve que le demandeur utilise la déclaration de désistements réciproques et de règlement hors cour (pièce P-1) dûment homologuée (pièce P-2), pour tenter de bâillonner qui que ce soit.

[121]     Le procureur du défendeur est, d’ailleurs, le premier à le reconnaître en plaidoirie.

[122]     La preuve, de façon globale, révèle que le défendeur, en partant d’éléments réels et véridiques, telles la déclaration de règlement hors cour (pièce P-1) ou les diverses décisions du Conseil de presse du Québec (pièces D-7 à D-10), s’en sert comme point de départ pour son document, mais s’assure de présenter le tout de façon défavorable, médisante même à l’égard du demandeur.

[123]     Le Tribunal constate que le défendeur ne se contente pas de déformer la vérité en référant à des décisions judiciaires, lesquelles découlent des activités profession- nelles du demandeur à titre de journaliste, mais parle aussi du domaine de la musique, autre activité professionnelle du demandeur, pour encore là tenter de le ridiculiser et de l’humilier.

[124]     Le Tribunal ne voit aucun lien entre les prétentions du défendeur à l’effet que le demandeur tente d’intimider et de bâillonner certaines personnes et sa décision de référer au fait que le demandeur interprète la Marseillaise devant l’Assemblée nationale.  Ce geste en soi est public mais le défendeur le présente de façon à attaquer la réputation du demandeur.

[125]     Le défendeur a beau prétendre qu’il s’agit simplement d’une blague, tout comme l’association au singe, il n’en reste pas moins que le tout s’intègre dans l’ensemble du document constitué par le défendeur contre le demandeur.

[126]     Le Tribunal est d’avis que, dans le contexte global des faits mis en preuve, le demandeur a raison de prétendre être victime d’une conduite fautive de la part du défendeur.

[127]     Le défendeur soutient qu’il ne fait qu’exercer son droit à la liberté d’expression et que les commentaires dans le document se veulent loyaux et honnêtes.

[128]     Le Tribunal ne retient pas cette prétention.

[129]     Le Tribunal ne retrouve pas cette objectivité certaine qui est nécessaire en matière de commentaires loyaux.  Au contraire, en associant, à titre d’exemple, un dictateur tel Saddam Hussein au demandeur, le défendeur fait fi de cette objectivité.

[130]     De plus, puisqu’il n’y a aucune preuve d’intimidation ou de tentative de bâillonnement par le demandeur de quelques personnes que ce soit, le Tribunal ne saurait conclure que le document monté par le défendeur peut intéresser les gens en général ou certaines personnes en particulier.

[131]     Toujours en rapport avec l’argument de la liberté d’expression, le Tribunal rappelle ce que le juge Cory de la Cour suprême écrit dans l’arrêt Hill :

« Les démocraties ont toujours reconnu et révéré l’importance fondamentale de la personne.  Cette importance doit, à son tour, reposer sur la bonne réputation.  Cette bonne réputation, qui rehausse le sens de valeur et de dignité d’une personne, peut également être très rapidement et complètement détruite par de fausses allégations.  Et une réputation ternie par le libelle peut rarement regagner son lustre passé.  Une société démocratique a donc intérêt à s’assurer que ses membres puissent jouir d’une bonne réputation et la protéger aussi longtemps qu’ils en sont dignes.»[6]

[132]     En voulant agir en justicier, le défendeur s’investit d’une mission soit disant au bénéfice de l’intérêt public et bénéficiant de la liberté d’expression.  Or, l’ensemble du témoignage du défendeur manifeste son préjugé à l’égard du demandeur qu’il décrit comme un personnage abusant du système judiciaire et voulant bâillonner tout adversaire.

[133]     Le Tribunal se doit de conclure à l’intention de nuire de la part du défendeur à l’égard du demandeur.

[134]     Il s’agit donc d’une faute intentionnelle.

Le lien de causalité faute – dommages

[135]     Ce qui précède démontre amplement le lien de causalité entre cette faute intentionnelle et les dommages réclamés.

LES DOMMAGES

[136]     Pour évaluer les dommages, le Tribunal doit prendre en considération les éléments suivants :

-       La gravité des propos dans le document bâti par le défendeur ;

-       La diffusion du document tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif;

-       L’identité du demandeur, en d’autres termes, son statut social et sa profession;

-       L’identité du défendeur;

-       La conduite du défendeur suite à l’institution des procédures.

[137]     Toute diffamation revêt un caractère grave en soi.

[138]     En l’instance, même si le demandeur établit que le document circule jusqu’en Chine, par contre il omet d’établir, même de façon approximative, le nombre et le type de personnes qui accèdent à ces sites du défendeur.

[139]     Le demandeur affirme qu’il vit difficilement ces attaques menées contre lui par le défendeur et tente par maints moyens d’en arrêter la propagation.  Par contre, il ne présente aucune autre preuve pour démontrer une atteinte à son statut social, une entrave à l’exercice de sa profession.

[140]     En somme, la preuve quant aux dommages reste plutôt générale.

[141]     Ainsi, bien que le demandeur réclame à titre de dommages moraux une somme de 25 000 $, le Tribunal lui octroie à ce titre 5 000 $.

[142]     Il demande aussi, à titre de dommages punitifs, 15 000 $ pour violation,  notamment, des articles 4 et 5 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, plus une somme de 30 000 $ pour violation de l’ordonnance de sauvegarde du 11 février 2011 et ce en application de l’article 131 de ladite Charte.

[143]     L’article 1621 C.c.Q. stipule que :

« 1621. Lorsque la loi prévoit l’attribution de dommages-intérêts punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.

Ils s’apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.»

[144]     Au sujet des dommages punitifs, notre collègue, Madame la juge Blondin, écrit :

[93] L’atteinte illicite à un droit reconnu par la Charte confère à la victime non seulement le droit d’obtenir «la cessation de l’atteinte» et «la réparation du préjudice» subi, mais aussi, en cas d’«atteinte intentionnelle», le droit de réclamer à l’auteur de la violation «des dommages-intérêts punitifs»:

49.  Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente Charte confère à la victime le droit d’obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.

En cas d’atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs.

[94] Trois conditions sont requises en vertu de cette disposition :

§  le recours en dommage punitif ne pourra qu’être l’accessoire d’un recours principal visant à obtenir condamnation du préjudice moral ou matériel, en ce sens, il doit y avoir identification d’un comportement fautif constitutif de responsabilité civile;

§  il faut une atteinte à un droit reconnu par la Charte québécoise;

§  cette atteinte doit être illicite et intentionnelle. »

[97] La Cour suprême définit ce qu’il faut entendre par atteinte illicite et intentionnelle dans l’arrêt de principe Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand :

« En conséquence, il y aura atteinte illicite et intentionnelle au sens du second alinéa de l’art. 49 de la Charte lorsque l’auteur de l’atteinte intentionnelle a un état d’esprit qui dénote un désir, une volonté de causer les conséquences de sa conduite fautive ou encore s’il agit en toute connaissance des conséquences, immédiates et naturelles ou au moins extrêmement probables, que cette conduite engendrera. Ce critère est moins strict que l’intention particulière, mais dépasse, toutefois, la simple négligence.

[98] Baudoin et Jobin résument ainsi l’état du droit sur la question :

«[L]a Cour suprême a réitéré le principe selon lequel le résultat du comportement fautif doit avoir été voulu pour que l’atteinte soit qualifiée d’intentionnelle. Elle a cependant interprété cette condition comme pouvant inclure la simple connaissance des conséquences immédiates et naturelles, ou au moins extrêmement probables, que la conduite fautive engendrera, un test qui dépasse de beaucoup la simple négligence mais qui se situe en deçà de la volonté de causer le dommage, et qui est appliquée avec souplesse par les autres tribunaux.» [7]

(Soulignement dans le texte)

[145]     Le Tribunal n’hésite pas à dire que ces trois conditions existent en l’instance.

[146]     Faut-il rappeler que le défendeur, à titre de spécialiste en communication, se doit de savoir que sa conduite fautive en diffusant le document tant dans sa forme initiale qu’avec les ajouts, aura «des conséquences immédiates et naturelles, ou au moins extrêmement probables» à l’égard du demandeur.

[147]     Madame la juge Blondin ajoute au sujet de la quotité de ces dommages punitifs :

« [110] Pour en fixer le quantum, le tribunal tiendra compte des critères suivants :

Ø  L’aspect préventif, dissuasif ou punitif de tels dommages;

Ø  La conduite du fautif et la gravité de la faute;

Ø  Le préjudice subi;

Ø  Les avantages retirés par le fautif;

Ø  La capacité de payer du fautif ou sa situation patrimoniale;

Ø  Le quantum des dommages compensatoires ou l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier;

Ø  L’inégalité du rapport de force, y compris les ressources, entre la victime et l’auteur du préjudice;

Ø  Le fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers. »[8]

[148]     En l’instance, la gravité de la faute du défendeur est évidente.

[149]     Devant le Tribunal, le défendeur persiste à affirmer qu’il agit dans l’intérêt public et comme simple citoyen, non comme journaliste, qu’il veut empêcher le demandeur de bâillonner ou intimider d’autres personnes.  Toutefois, tel que mentionné, concrètement il ne présente aucune preuve de tels gestes par le demandeur.

[150]     Par ailleurs, la preuve quant à la situation patrimoniale du défendeur est minime.

[151]     Ceci étant, le Tribunal est d’opinion qu’il y a lieu d’allouer une somme de 5 000 $ à titre de dommages punitifs pour violation des articles 4 et 5 de la Charte québécoise.

[152]     Par contre, le Tribunal n’accueille pas la demande en application de l’article 131 de la Charte.

[153]     En effet, même si au lendemain de l’émission de l’ordonnance de sauvegarde, le défendeur n’élimine pas entièrement le document du site web, la preuve est à l’effet qu’il tente de s’exécuter, mais rencontre certains problèmes du fait qu’il se trouve alors en Afrique.

[154]     Enfin, le demandeur réclame le remboursement de ses frais d’avocat totalisant plus de 20 000 $ depuis le début des procédures.

[155]     Le procureur du demandeur insiste sur le fait que le défendeur, à la toute dernière minute, accepte de se soumettre à la demande d’ordonnance de sauvegarde prévue pour deux jours de procès.

[156]     À la lumière des propos de Monsieur le juge Dalphond dans l’arrêt Genex[9], le Tribunal considère que rien ne pouvait forcer le défendeur à confesser jugement et, de plus, un débat sur la nature et la gravité de la faute, l’étendue des préjudices étaient nécessaires.

[157]     Dans les circonstances, le Tribunal refuse la demande de remboursement des honoraires extrajudiciaires.

LA DEMANDE D’INJONCTION PERMANENTE

[158]     Le défendeur plaide que le Tribunal ne peut accéder à cette demande essentiellement pour deux motifs : premièrement, le délai par le demandeur pour présenter sa demande; deuxièmement, selon la théorie des « mains propres », le demandeur lui-même ne répond pas à ce critère.

[159]     En ce qui concerne le délai, le Tribunal ne retient pas ce motif.

[160]     En effet, même si le défendeur met le document sur son site web dès septembre 2009 et que le demandeur n’intente ses procédures qu’un an plus tard, il n’en reste pas moins que pendant ces douze mois, le demandeur tente d’abord par lui-même de convaincre le défendeur de retirer le tout du site web puis, devant son échec, mandate ses procureurs pour obtenir le même résultat, malheureusement sans succès.

[161]     En ce qui concerne le critère des « mains propres », le défendeur prétend que les communiqués (pièce D-2 en liasse) émis par le demandeur en réplique au document, démontrent le bien-fondé de cet argument.

[162]     Le Tribunal n’endosse pas ce deuxième motif.

[163]     Rien ne saurait empêcher l’émission de ces communiqués par le demandeur, communiqués qui, selon le Tribunal, ne sont pas de nature diffamatoire et ne dépassent pas le « très raisonnable et très mesuré » selon l’expression du défendeur lui-même dans sa demande reconventionnelle.

[164]     Ainsi, le Tribunal accueillera la demande d’injonction permanente du demandeur.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[165]     ACCUEILLE la requête introductive d’instance;

[166]     ORDONNE au défendeur, Éric Messier de retirer, dans les trente-cinq (35) jours de la date du présent jugement, tous les articles diffamatoires (Pièces P-3, P-4, P-9, P – 10, P-17, P-19, P-21, P-22, P-23, P-24, P-25, P-26, P-27, P-28, P-29, P-30, P-31, P-32, P-34, P-35, P-36, P-42, P-43, P-44, P-53, P-54, P-55, P-58, P-62, P-64, P-66, P-68, P-69, P-70, P-71, P-72, P-82, P-83, P-84, P-85, P-86, P-87, P-88, P-89 et P-91) relativement au demandeur, Roger-Luc Chayer, publiés sur quelques sites internet ou quelques supports que ce soit;

[167]     ORDONNE au défendeur, Éric Messier, de cesser d’exprimer ou de publier, sur quelques supports que ce soit, tous commentaires, articles ou messages diffamatoires identiques à ceux déjà diffusés (Pièces P-3, P-4, P-9, P-10, P-17, P-19, P-21, P-22, P-23, P-24, P-25, P-26, P-27, P-28, P-29, P-30, P-31, P-32, P-34, P-35, P-36, P-42, P-43, P-44, P-53, P-54, P-55, P-58, P-62, P-64, P-66, P-68, P-69, P-70, P-71, P-72, P-82, P-83, P-84, P-85, P-86, P-87, P-88, P-89 et P-91) relativement au demandeur, Roger-Luc Chayer;

[168]     CONDAMNE le défendeur à verser au demandeur la somme de 10 000 $ avec intérêts et l’indemnité additionnelle selon l’article 1619 du C.c.Q. sur une somme de 5 000 $ depuis l’assignation et depuis le jugement sur une somme de 5 000 $;

[169]     LE TOUT AVEC DÉPENS;

[170]     REJETTE, sans frais, la demande reconventionnelle.

 
  __________________________________

MARC DE WEVER, J.C.S.

 
Me Claude Chamberland
Asselin Chamberland Avocats
Procureurs du demandeur
 
Me Jérôme Dupont-Rachiele
Ferland Marois Lanctôt sn
Procureurs du défendeur
 
Dates d’audition : Les 21, 22, 23 et 24 mai 2013

 



[1]     Prud’homme c. Prud’homme, [2002] 4 R.C.S. 663, p. 683 à 686.

[2]     Id., p. 691.

[3]     Corriveau c. Canoe inc. et Martineau, 2010 QCCS 3396, p. 8 de 30.

[4]     Beaudoin c. La Presse Ltée, [1998] R.J.Q. 204, p. 211.

[5]     Id. Note 1, p. 685.

[6]     Hill c. Église de scientologie de Toronto, [1995] 2 R.C.S. 1130, par. 108.

[7]     Précité note 3, p. 15 et 16 de 30.

[8]     Id., p. 17 et 18 de 30.

[9]     Genex Communication inc. c. Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo, 2009 QCCA 2201, p. 61 et 62 de 63.

André J. Saindon et Maison Urbaine condamnés à plus de 13,000$

Wednesday, February 5th, 2014

COMMUNIQUÉ

L’homme d’affaire André J. Saindon, administrateur des sociétés “Maison Urbaine Inc.”, Société en commandite Papineau-Sherbrooke et Maison Urbaine Papineau Limitée viennent d’être condamnés conjointement et solidairement à payer à l’éditeur Roger-Luc Chayer la somme de 13 632$ incluant les frais de Cour pour avoir floué l’éditeur en signant des contrats publicitaires sous de fausses représentations, en utilisant faussement un nom d’entreprise qui n’existait pas, services qui n’ont jamais été payés d’où la poursuite.

Pendant près des 3 ans durant les procédures judiciaires, Saindon déclarait dans sa défense assermentée et dans les contrats publicitaires parler au nom de Maison Urbaine Inc. obligeant le demandeur Chayer à des procédures inutiles puisque le jour du procès, Saindon avouait à la Juge Marie-Michelle Lavigne de la Cour du Québec à Montréal que la société n’existait pas et qu’elle n’avait jamais existée.

Enfin, André J. Saindon a déclaré lors de son procès être en faillite et avoir cédé ses biens selon la loi sur la faillite. Or, en communiquant avec le syndic responsable de cette prétendue faillite, il a été découvert que Saindon n’avait jamais payé son syndic et qu’il était en violation de la loi fédérale sur les faillites. Une enquête du Surintendant des faillites a été ouverte.

À suivre.

Royaume-Uni : licencié pour avoir appelé l’homosexualité un péché

Sunday, May 5th, 2013

Riposte-Catholique

Un professeur de sciences qui a été interdit d’enseigner pour avoir déclaré en classe que l’activité homosexuelle constitue un “péché” a perdu son recours devant la Haute Cour de Londres. Robert Haye (photo ci-dessus), 43 ans, n’avait pourtant fait que répondre à la question d’un de ses élèves du secondaire à la Deptford Green School en Angleterre ; on suppose que le jeune homme s’est empressé de dénoncer son professeur pour « homophobie ». C’est en tout cas un enseignant assistant qui est allé se plaindre à la direction. Une campagne sur Facebook a suivi…

D’emblée, Robert Haye a été écarté de toute activité enseignante par l’Agence de l’enseignement pendant une durée indéfinie. La sanction a été confirmée par le ministre de l’Education britannique, Michael Gove.

La Haute Cour, invitée pour la première fois à connaître d’un tel type d’affaire, a refusé de donner raison au professeur en assurant que sa réponse avait été « inappropriée » et qu’il s’était rendu coupable d’une conduite professionnelle inacceptable. Le juge King a souligné que l’école où enseignait Robert Haye avait un cahier des charges obligeant les professeurs à « fournir des informations positives sur l’homosexualité » en vue de « permettre aux élèves de récuser les stéréotypes négatifs et les préjugés ».

L’avocat de l’enseignant eut beau signaler que les croyances religieuses et la liberté d’expression de son client étaient ainsi mises à mal, le juge y a opposé le fait que cette politique de l’école fait partie des « valeurs britanniques modernes de tolérance ». L’enseignant va pouvoir cependant pouvoir demander à reprendre un poste devant une classe dans deux ans.

Robert Haye est un adventiste du Septième jour, et à ce titre il a également expliqué à ses élèves que les chrétiens qui sanctifient le dimanche rendent un culte au démon dans leurs temples et églises, mais cela n’a jamais dérangé personne. Ce sont les opinions obligatoires sur l’activité homosexuelle qui reçoivent la protection des tribunaux.

« Je ne renierai pas ce que crois. Dieu premier servi », a déclaré Robert Haye qui pense devoir abandonner sa carrière d’enseignant au Royaume-Uni : car en cas de retour devant les élèves, il devra faire amende honorable pour son « homophobie » en démontrant qu’il est prêt à comprendre la nécessité pour les professeurs de « promouvoir la tolérance et le respect pour les droits, les religions et les croyances d’autrui ». « Les chrétiens sont aujourd’hui persécutés dans ce pays parce qu’ils croient en la Bible », s’est-il indigné. Actuellement au chômage, Robert Haye doit quelque 4 200 livres pour ses frais de justice.

Le responsable de l’Agence de l’enseignement, Alan Meyrick, l’avait bien résumé à l’audience :

« Partager vos opinions avec des élèves n’était ni responsable ni approprié. Vous avez des croyances fortes et sincères qui ne sont pas fondamentalement incompatibles avec l’enseignement. Cependant, l’expression de ces opinions, de cette manière, n’est tout simplement pas appropriée pour un professeur travaillant au sein du système anglais d’éducation qui réunit des jeunes de sexualités, d’origines et de croyances diverses. »

C’est la dictature du relativisme identifiée par Benoît XVI.

Et largement partagée par la presse britannique qui parle du professeur « homophobe »

Arrêt de la Cour Suprême du Canada dans les dossiers de criminalisation SIDA (Mabior)

Friday, October 5th, 2012

EXCLUSIF: La Cour Suprême du Canada fait jurisprudence et déclare qu’une personne séropositive dont la charge virale est faible ou indétectable n’a pas à déclarer à ses partenaires sexuels qu’elle est séropositive si elle utilise un condom,

contrairement à l’ancienne doctrine. Toutefois, elle confirme qu’une personne séropositive doit obligatoirement utiliser le condom. Elle ne se prononce toutefois pas sur une personne dont la charge virale est indétectable totalement sauf pour dire que les Tribunaux peuvent déterminer au cas par cas de la criminalité de ces personnes selon le contexte. https://csc.lexum.org/fr/2012/2012csc47/2012csc47.html
Voici le jugement intégral:

COUR SUPRÊME DU CANADA

 

Référence : R. c. Mabior, 2012 CSC 47 Date : 20121005

Dossier : 33976

 

Entre :

Sa Majesté la Reine

Appelante

et

Clato Lual Mabior

Intimé

- et -

Réseau juridique canadien VIH/sida, HIV & AIDS Legal Clinic Ontario,

Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida, Positive Living Society of British Columbia, Société canadienne du sida, Toronto People With AIDS Foundation, Black Coalition for AIDS Prevention, Réseau canadien autochtone du sida, Association des libertés civiles de la Colombie‑Britannique, Criminal Lawyers’ Association of Ontario, Association des avocats de la défense de Montréal et

Institut national de santé publique du Québec

Intervenants

 

 

 

Traduction française officielle

 

Coram : La juge en chef McLachlin et les juges LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Rothstein, Cromwell, Moldaver et Karakatsanis

 

Motifs de jugement :

(par. 1 à 110)

La juge en chef McLachlin (avec l’accord des juges LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Rothstein, Cromwell, Moldaver et Karakatsanis)

 

Note : Ce document fera l’objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des arrêts de la Cour suprême du Canada.

 

 


 


r. c. mabior

Sa Majesté la Reine Appelante

c.

Clato Lual Mabior Intimé

et

Réseau juridique canadien VIH/sida,

HIV & AIDS Legal Clinic Ontario, Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida, Positive Living Society of British Columbia, Société canadienne du sida, Toronto People With AIDS Foundation,

Black Coalition for AIDS Prevention, Réseau canadien autochtone du sida,

Association des libertés civiles de la Colombie‑Britannique,

Criminal Lawyers’ Association of Ontario,

Association des avocats de la défense de Montréal et

Institut national de santé publique du Québec Intervenants

Répertorié : R. c. Mabior

2012 CSC 47

No du greffe : 33976.

2012 : 8 février; 2012 : 5 octobre.

Présents : La juge en chef McLachlin et les juges LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Rothstein, Cromwell, Moldaver et Karakatsanis.

en appel de la cour d’appel du manitoba

Droit criminel — Agression sexuelle grave — Consentement — Fraude — Omission de révéler la séropositivité — Accusé sous traitement aux antirétroviraux ayant des rapports sexuels protégés et non protégés tout en se sachant séropositif — La démarche établie dans R. c. Cuerrier, [1998] 2 R.C.S. 371, demeure‑t‑elle valable pour déterminer si la fraude vicie le consentement aux rapports sexuels? — L’omission de révéler la séropositivité lorsqu’il n’existe aucune possibilité réaliste de transmission du VIH peut‑elle constituer une fraude viciant le consentement? — Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C‑46, art. 265(3)c), 268, 273.

M a été inculpé de neuf chefs d’agression sexuelle grave par suite de son omission d’informer les neuf plaignantes de sa séropositivité avant d’avoir des rapports sexuels avec elles (al. 265(3)c) et art. 273 C. cr.).  Aucune des plaignantes n’a contracté le VIH.  La juge du procès a déclaré M coupable de six des chefs d’accusation et l’a acquitté des trois autres au motif qu’avoir des rapports sexuels en utilisant un condom lorsque la charge virale est indétectable n’expose pas le partenaire sexuel à un « risque important de lésions corporelles graves » comme l’exige l’arrêt Cuerrier.  La Cour d’appel a modifié la décision, concluant qu’une faible charge virale ou l’utilisation du condom pouvait écarter tout risque important.  Dès lors, M ne pouvait être déclaré coupable que de deux chefs, et la Cour d’appel a inscrit des acquittements pour les quatre autres.  Le ministère public a interjeté appel de ces acquittements.

Arrêt : Le pourvoi est accueilli en partie, et les déclarations de culpabilité pour agression sexuelle grave sont rétablies relativement aux plaignantes S.H., D.C.S. et D.H. Le pourvoi est rejeté en ce qui concerne la plaignante K.G.

Dans l’arrêt Cuerrier, notre Cour établit que l’omission de révéler sa séropositivité peut constituer une fraude viciant le consentement aux relations sexuelles pour l’application de l’al. 265(3)c) C. cr. Étant donné que le VIH présente un risque de lésions corporelles graves, l’infraction applicable est celle d’agression sexuelle grave (art. 273 C. cr.).  Pour obtenir une déclaration de culpabilité sous le régime de l’al. 265(3)c) et de l’art. 273, le ministère public doit démontrer, hors de tout doute raisonnable, que le consentement du plaignant aux relations sexuelles est vicié par la fraude de l’accusé concernant sa séropositivité.  Le critère exige essentiellement deux choses : (1) un acte malhonnête (le mensonge sur l’état de santé ou l’omission de révéler la séropositivité) et (2) la privation (d’éléments d’information qui auraient causé le refus du plaignant d’avoir des relations sexuelles l’exposant à un risque important de lésions corporelles graves).  L’omission de révéler peut constituer une fraude lorsque le plaignant n’aurait pas donné son consentement s’il avait su que l’accusé était séropositif et lorsqu’un contact sexuel présente un risque important de lésions corporelles graves ou inflige effectivement de telles lésions.

Le critère issu de l’arrêt Cuerrier fait l’objet de deux critiques principales.  Premièrement, on lui reproche son caractère incertain en ce qu’il ne permet pas de départager clairement actes criminels et actes non criminels. Deuxièmement, il confère au droit criminel une portée soit trop grande, soit trop restreinte (le problème de la portée). Bien qu’il puisse être difficile à appliquer, le critère de l’arrêt Cuerrier demeure valable sur le plan des principes.  Il circonscrit avec justesse la portée du droit criminel — réprimer les actes qui exposent à un « risque important de lésions corporelles graves ». La notion de consentement qui le sous‑tend s’inspire de la sagesse de la common law (qui s’abstient de criminaliser toute tromperie incitant à consentir à un rapport sexuel) tout en accordant une grande importance au consentement.

L’exigence d’un « risque important de lésions corporelles graves » formulée dans l’arrêt Cuerrier doit être interprétée comme obligeant une personne à révéler sa séropositivité lorsqu’il existe une possibilité réaliste de transmission du VIH. Cette interprétation est étayée par l’évolution de la common law et des lois en matière de fraude viciant le consentement aux relations sexuelles. Elle est en outre dans le droit fil des valeurs d’autonomie et d’égalité de la Charte qui ont pour effet de protéger le droit de chacun de consentir ou non à des rapports sexuels avec une personne en particulier.  Aussi, cette interprétation tient dûment compte de la nature du préjudice causé par la transmission du VIH et elle ne place la barre ni trop haut ni trop bas pour qu’il puisse y avoir déclaration de culpabilité.  En l’absence de possibilité réaliste de transmission du VIH, l’omission de dévoiler sa séropositivité ne constitue pas une fraude viciant le consentement aux relations sexuelles pour l’application de l’al. 265(3)c).

Il appert généralement de la preuve admise au procès que la possibilité réaliste de transmission du VIH n’est pas établie dans la mesure où, (i) au moment considéré, la charge virale de l’accusé était faible et (ii) un condom a été utilisé.  Cet énoncé général n’empêche pas la common law de s’adapter aux futures avancées thérapeutiques et aux circonstances où des facteurs de risque différents sont en cause.

En l’espèce, les quatre plaignantes ont toutes consenti aux rapports sexuels avec M et témoigné qu’elles n’auraient pas eu ces rapports si elles avaient su que M était séropositif.  Il y a eu pénétration vaginale et éjaculation lors des rapports sexuels avec les quatre plaignantes.  Lors de ses relations sexuelles avec S.H., D.C.S. et D.H., M avait une charge virale faible, mais il n’a pas utilisé de condom. Les déclarations de culpabilité doivent donc être confirmées dans ces cas.  En ce qui concerne K.G., le dossier révèle que la charge virale de M était faible.  Combinée à l’utilisation du condom, cette charge virale faible n’a pas exposé K.G. à un risque important de lésions corporelles graves. Par conséquent, la déclaration de culpabilité prononcée dans ce cas doit être annulée.

Jurisprudence

Arrêt appliqué : R. c. Cuerrier, [1998] 2 R.C.S. 371; arrêts mentionnés : R. c. D.C., 2012 CSC 48; Proprietary Articles Trade Association c. Attorney‑General for Canada, [1931] A.C. 310; Reference re Validity of Section 5(a) of the Dairy Industry Act, [1949] R.C.S. 1, conf. par [1951] A.C. 179; Lord’s Day Alliance of Canada c. Attorney General of British Columbia, [1959] R.C.S. 497; La Reine c. Sault Ste‑Marie, [1978] 2 R.C.S. 1299; Boggs c. La Reine, [1981] 1 R.C.S. 49; Skoke‑Graham c. La Reine, [1985] 1 R.C.S. 106; R. c. Roy, 2012 CSC 26, [2012] 2 R.C.S. 60; R. c. Beatty, 2008 CSC 5, [2008] 1 R.C.S. 49; The Queen c. Clarence (1888), 22 Q.B.D. 23; R. c. Flattery (1877), 13 Cox C.C. 388; R. c. Dee (1884), 15 Cox C.C. 579; R. c. Bennett (1866), 4 F. & F. 1105, 176 E.R. 925; R. c. Sinclair (1867), 13 Cox C.C. 28; Hegarty c. Shine (1878), 14 Cox C.C. 124, conf. par 14 Cox C.C. 145; Papadimitropoulos c. The Queen (1957), 98 C.L.R. 249; R. c. Harms (1943), 81 C.C.C. 4; Bolduc c. The Queen, [1967] R.C.S. 677; R. c. Petrozzi (1987), 35 C.C.C. (3d) 528; R. c. Lee (1991), 3 O.R. (3d) 726; R. c. Ssenyonga (1993), 81 C.C.C. (3d) 257; State c. Marcks, 41 S.W. 973 (1897) et 43 S.W. 1095 (1898); State c. Lankford, 102 A. 63 (1917); United States c. Johnson, 27 M.J. 798 (1988); United States c. Dumford, 28 M.J. 836 (1989); R. c. Maurantonio, [1968] 1 O.R. 145; R. c. Sharpe, 2001 CSC 2, [2001] 1 R.C.S. 45; Demande fondée sur l’art. 83.28 du Code criminel (Re), 2004 CSC 42, [2004] 2 R.C.S. 248; R. c. Ewanchuk, [1999] 1 R.C.S. 330; R. c. B., [2006] EWCA Crim 2945, [2007] 1 W.L.R. 1567; R. c. Mwai, [1995] 3 N.Z.L.R. 149; R. c. Find, 2001 CSC 32, [2001] 1 R.C.S. 863; R. c. Spence, 2005 CSC 71, [2005] 3 R.C.S. 458; Twining c. Morrice (1788), 2 Bro. C.C. 326, 29 E.R. 182; Conolly c. Parsons (1797), 3 Ves. 625n; Walters c. Morgan (1861), 3 De G. F. & J. 718, 45 E.R. 1056; R. c. McCraw, [1991] 3 R.C.S. 72; R. c. Jones, 2002 NBQB 340, [2002] N.B.J. No. 375 (QL); R. c. J.A.T., 2010 BCSC 766 (CanLII).

Lois et règlements cités

Charte canadienne des droits et libertés, art. 7.

Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C‑46, art. 265, 268, 271(1), 273.

Code criminel, 1892, S.C. 1892, ch. 29, art. 259b), 266.

Crimes Act 1958 (Vic.), art. 22, 23.

Crimes Act 1961 (N.‑Z.), 1961, No. 43, art. 145, 188(2).

Criminal Code Act (N.T.), art. 174C, 174D.

Criminal Law Consolidation Act 1935 (S.A.), art. 29.

Loi modifiant le Code criminel en matière d’infractions sexuelles et d’autres infractions contre la personne et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, S.C. 1980‑81‑82‑83, ch. 125, art. 19.

Offences against the Person Act, 1861 (R.‑U.), 24 & 25 Vict., ch. 100, art. 18, 20.

Doctrine et autres documents cités

Bingham, Tom.  The Rule of Law.  London : Allen Lane, 2010.

Boily, Marie‑Claude, et al. « Heterosexual risk of HIV‑1 infection per sexual act : systematic review and meta‑analysis of observational studies » (2009), 9 Lancet Infect. Dis. 118.

Burris, Scott, et al. « Do Criminal Laws Influence HIV Risk Behavior?  An Empirical Trial » (2007), 39 Ariz. St. L.J. 467.

Cohen, Myron S., et al. « Prevention of HIV‑1 Infection with Early Antiretroviral Therapy » (2011), 365 New Eng. J. Med. 493.

Grant, Isabel.  « The Prosecution of Non‑disclosure of HIV in Canada : Time to Rethink Cuerrier » (2011), 5 R.D.S.M. 7.

Leigh, L. H.  « Two cases on consent in rape » (2007), 5 Arch. News 6.

Nightingale, Brenda L.  The Law of Fraud and Related Offences. Scarborough, Ont. : Carswell, 1996 (loose‑leaf updated 2011, release 3).

Wainberg, Mark A.  « Criminalizing HIV transmission may be a mistake » (2009), 180 J.A.M.C. 688.

Weller, Susan C., and Karen Davis‑Beaty.  « Condom effectiveness in reducing heterosexual HIV transmission » (2002), 1 Cochrane Database Syst. Rev. CD003255.

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel du Manitoba (les juges Steel, MacInnes et Beard), 2010 MBCA 93, 258 Man. R. (2d) 166, 261 C.C.C. (3d) 520, 79 C.R. (6th) 1, [2011] 2 W.W.R. 211, [2010] M.J. No. 308 (QL), 2010 CarswellMan 587, qui a annulé des déclarations de culpabilité d’agression sexuelle grave inscrites par la juge McKelvey, 2008 MBQB 201, 230 Man. R. (2d) 184, [2008] M.J. No. 277 (QL), 2008 CarswellMan 406.  Pourvoi accueilli en partie.

Elizabeth Thomson et Ami Kotler, pour l’appelante.

Amanda Sansregret et Corey La Berge, pour l’intimé.

Jonathan Shime, Corie Langdon, Richard Elliott et Ryan Peck, pour les intervenants le Réseau juridique canadien VIH/sida, HIV & AIDS Legal Clinic Ontario, la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida, Positive Living Society of British Columbia, la Société canadienne du sida, Toronto People With AIDS Foundation, Black Coalition for AIDS Prevention et le Réseau canadien autochtone du sida.

Michael A. Feder et Angela M. Juba, pour l’intervenante l’Association des libertés civiles de la Colombie‑Britannique.

P. Andras Schreck et Candice Suter, pour l’intervenante Criminal Lawyers’ Association of Ontario.

François Dadour, pour l’intervenante l’Association des avocats de la défense de Montréal.

Lucie Joncas et François Côté, pour l’intervenant l’Institut national de santé publique du Québec.

 

Version française du jugement de la Cour rendu par

 

La Juge en chef —

I. Aperçu

[1]           Le présent pourvoi soulève la question de savoir si une personne porteuse du VIH qui a des relations sexuelles sans révéler sa séropositivité commet une agression sexuelle grave.

[2]           La personne qui a des rapports sexuels avec une autre sans le consentement de cette dernière commet une agression sexuelle suivant l’art. 265 du Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C‑46.  Dans l’arrêt R. c. Cuerrier, [1998] 2 R.C.S. 371, la Cour établit que l’omission d’informer le partenaire de sa séropositivité peut constituer une fraude viciant le consentement.  Étant donné que le VIH présente un risque de lésions corporelles graves, l’infraction applicable est celle d’agression sexuelle grave, dont la perpétration rend passible de la peine maximale d’emprisonnement à perpétuité (Cuerrier, au par. 95; art. 265, 268 et 273 du C. cr.).

[3]           Bien que l’arrêt Cuerrier définisse les éléments fondamentaux de l’infraction, les circonstances précises dans lesquelles l’omission de révéler sa séropositivité vicie le consentement et fait de l’activité sexuelle un acte criminel demeurent floues.  Les parties demandent à notre Cour de les clarifier.

[4]           Je conclus qu’une personne peut être déclarée coupable d’agression sexuelle grave en application de l’art. 273 du Code criminel lorsqu’elle omet de révéler sa séropositivité avant d’avoir des rapports sexuels et qu’il existe une possibilité réaliste qu’elle transmette le VIH.  Lorsque la charge virale de la personne séropositive est faible en raison d’un traitement et qu’il y a utilisation du condom, la condition de la possibilité réaliste de transmission n’est pas remplie, au vu de la preuve qui figure au dossier.

II. Contexte

[5]           L’intimé, M. Mabior, habitait Winnipeg et, chez lui, on faisait beaucoup la fête.  Les gens entraient et sortaient, y compris de nombreuses jeunes femmes.  L’alcool et la drogue abondaient.  À l’occasion, M. Mabior avait des relations sexuelles avec ses jeunes invitées, dont les neuf plaignantes en l’espèce.

[6]           M. Mabior n’a pas informé les plaignantes de sa séropositivité avant d’avoir des rapports sexuels avec elles; au contraire, il a dit à l’une d’elles qu’il n’avait aucune MTS.  Parfois, il enfilait un condom, d’autres fois non.  Il arrivait qu’un condom se brise ou soit retiré, et dans certains cas la nature précise de la protection n’est pas claire.  Huit des neuf plaignantes ont témoigné qu’elles n’auraient pas consenti aux rapports sexuels si elles avaient su que M. Mabior était séropositif.  Aucune n’a contracté le VIH.

[7]           M. Mabior a été inculpé de neuf chefs d’agression sexuelle grave (et autres infractions connexes) au motif qu’il a omis de révéler aux plaignantes sa séropositivité.  En défense, il a présenté des éléments de preuve selon lesquels il suivait un traitement et n’était pas infectieux ou ne présentait qu’un faible risque d’infection aux moments considérés.

[8]           La juge du procès a déclaré M. Mabior coupable de six chefs d’agression sexuelle grave (2008 MBQB 201, 230 man. R. (2d) 184).  Elle l’a acquitté des trois autres chefs au motif qu’avoir des rapports sexuels en utilisant un condom lorsque sa charge virale est indétectable n’expose pas le partenaire sexuel à un « risque important de lésions corporelles graves » comme l’exige l’arrêt Cuerrier.

[9]           M. Mabior a fait appel des six déclarations de culpabilité; le ministère public n’a pas interjeté appel des trois acquittements.  La Cour d’appel du Manitoba a modifié la décision de la juge du procès, concluant qu’une faible charge virale ou l’utilisation du condom (l’une ou l’autre) pouvait écarter tout risque important (2010 MBCA 93, 258 Man. R. (2d) 166).  Dès lors, M. Mabior ne pouvait être déclaré coupable que de deux chefs, et la Cour d’appel a inscrit des acquittements pour les quatre autres.  Le ministère public interjette appel de ces acquittements.  M. Mabior ne forme pas d’appel incident à l’encontre des deux déclarations de culpabilité confirmées par la Cour d’appel.

III. Les dispositions législatives

[10]        Les articles 265 et 273 du Code criminel disposent :

265. (1) Commet des voies de fait, ou se livre à une attaque ou une agression, quiconque, selon le cas :

a)  d’une manière intentionnelle, emploie la force, directement ou indirectement, contre une autre personne sans son consentement;

. . .

(2) Le présent article s’applique à toutes les espèces de voies de fait, y compris les agressions sexuelles . . . et les agressions sexuelles graves.

(3) Pour l’application du présent article, ne constitue pas un consentement le fait pour le plaignant de se soumettre ou de ne pas résister en raison :

. . .

c)  . . . de la fraude.

273. (1) Commet une agression sexuelle grave quiconque, en commettant une agression sexuelle, blesse, mutile ou défigure le plaignant ou met sa vie en danger.

(2) Quiconque commet une agression sexuelle grave est coupable d’un acte criminel passible :

. . .

b)  dans les autres cas, de l’emprisonnement à perpétuité.

IV. Les questions en litige

[11]        Les questions en litige sont les suivantes.

A. Que faut‑il entendre par « fraude » viciant le consentement à une activité sexuelle pour l’application de l’al. 265(3)c) du Code criminel?

(1) Difficultés découlant de l’interprétation actuelle de la « fraude » viciant le consentement :

a) l’incertitude;

b) la portée.

(2) Considérations présidant à l’interprétation :

a) les objectifs du droit criminel;

b) l’évolution de la fraude viciant le consentement aux relations sexuelles dans la common law et dans la loi;

c) les valeurs consacrées par la Charte;

d) la situation dans les autres ressorts de common law.

(3) Recherche d’une solution :

a) la tromperie active;

b) l’obligation absolue de révéler;

c) la prise en compte des faits de chaque espèce;

d) la connaissance d’office;

e) la distinction fondée sur la nature du lien entre les personnes;

f) la notion de partenaire raisonnable;

g) faire évoluer la common law.

(4) Possibilité réaliste de transmission du VIH.

V. Analyse

A. Que faut‑il entendre par « fraude » viciant le consentement à l’activité sexuelle pour l’application de l’al. 265(3)c) du Code criminel?

(1) Difficultés découlant de l’interprétation actuelle de la « fraude » viciant le consentement

[12]        Il y a quatorze ans, dans l’arrêt Cuerrier, notre Cour s’est penchée sur la notion de « fraude » visée à l’al. 265(3)c).  Le critère qu’ont établi les juges majoritaires peut être formulé de différentes manières, mais il exige essentiellement deux choses : (1) un acte malhonnête (le mensonge sur l’état de santé ou l’omission de révéler sa séropositivité) et (2) la privation (d’éléments d’information qui auraient causé le refus du plaignant d’avoir des relations sexuelles l’exposant à un risque important de lésions corporelles graves).

[13]        Les parties et la Cour d’appel du Manitoba en l’espèce, de même que la Cour d’appel du Québec dans le pourvoi connexe R. c. D.C., 2012 CSC 48, nous invitent à revoir le critère issu de l’arrêt Cuerrier.  Ce critère fait l’objet de deux critiques principales.  Premièrement, on lui reproche son caractère incertain en ce qu’il ne permet pas de départager clairement actes criminels et actes non criminels (d’où l’incertitude).  Deuxièmement, il conférerait au droit criminel une portée soit trop grande, soit trop restreinte (le problème de la portée).

[14]        Examinons d’abord le caractère incertain imputé au critère de l’arrêt Cuerrier.  L’une des exigences fondamentales de la règle de droit veut qu’une personne puisse savoir qu’un acte est criminel avant de l’accomplir.  La règle de droit exige que les lois délimitent à l’avance ce qui est permis et ce qui est interdit : lord Bingham, The Rule of Law (2010).  Condamner une personne pour un acte dont elle ne pouvait raisonnablement savoir qu’il était criminel est digne de l’univers kafkaïen et va à l’encontre de notre conception de la justice.  La condamnation d’un acte après coup est contraire au concept de liberté consacré à l’art. 7 de la Charte canadienne des droits et libertés et elle répugne au système de justice canadien.

[15]        Le critère de l’arrêt Cuerrier se révèle incertain sur deux points : ce qu’il faut entendre par « risque important » et ce en quoi consistent les « lésions corporelles graves ».  Il s’agit de termes généraux susceptibles d’être interprétés différemment par différentes personnes.

[16]        S’agissant de la notion de « risque important », certains affirment que tout risque de lésions corporelles graves est pour ainsi dire important.  D’autres font valoir que pour être important le risque doit atteindre un degré élevé.  Les tenants de l’une et l’autre thèses invoquent des données statistiques.  Un risque de 1 % est‑il « important »?  Doit‑on plutôt fixer la barre à 10 % ou à 51 %, et pourquoi pas à 0,01 %?  Comment le poursuivant peut‑il le déterminer, et le juge trancher?  Et dans la mesure où ni les poursuivants, ni les avocats de la défense, ni les juges ne sont fixés sur ce point, comment le citoyen canadien ordinaire peut‑il s’y retrouver?  À cette incertitude fondamentale s’ajoute une multitude de variables susceptibles d’influer sur le risque réel d’infection.

[17]        On s’est aussi interrogé sur l’exigence d’un risque de « lésions corporelles graves ».  Certaines maladies transmissibles sexuellement (« MTS ») n’occasionnent guère plus qu’un inconfort temporaire qui peut être traité.  Or, même cet inconfort, tant qu’il persiste, peut être grave du point de vue de la victime.  D’autres MTS, comme le VIH, sont extrêmement graves, s’accompagnant de symptômes permanents et invalidants et entraînant parfois la mort.  Il existe entre ces deux pôles de nombreuses autres MTS, certaines plus débilitantes que d’autres.  Lesquelles sont suffisamment graves pour commander l’application du droit criminel?  L’arrêt Cuerrier n’offre pas de réponse claire.

[18]        L’incertitude inhérente aux notions de risque important et de lésions corporelles graves est d’autant plus grande que ces notions sont interreliées.  On fait valoir que plus la nature du préjudice est grave, moins la probabilité de transmission doit être grande pour qu’il y ait risque important de lésions corporelles graves.  Il ne s’agit donc pas d’une simple question de pourcentage de risque et de gravité de la maladie possible.  C’est l’interrelation entre les deux qui importe.

[19]        Dès lors, on se retrouve aux prises avec des calculs complexes qui empêchent souvent de savoir à l’avance si un acte donné constitue ou non un acte criminel pour les besoins de l’al. 265(3)c).  La seconde grande critique dont fait l’objet le critère de l’arrêt Cuerrier concerne sa portée.  Une interprétation trop large risque de criminaliser un acte malgré l’absence du degré de culpabilité morale et du risque de causer préjudice à autrui qui justifient l’application de la sanction la plus grave du droit criminel.  La déclaration de culpabilité assortie d’une peine d’emprisonnement, sans compter les stigmates qui s’y rattachent, est la sanction la plus grave que la loi puisse infliger, et on la réserve généralement à l’auteur d’un acte hautement coupable, un acte perçu comme préjudiciable à la société, répréhensible et inacceptable.  Elle requiert à la fois un acte coupable — l’actus reus — et une intention coupable — la mens rea — dont les paramètres doivent être clairement définis par la loi.

(2) Considérations présidant à l’interprétation

[20]        Fondamentalement, pour interpréter une disposition législative, il faut déterminer quelle était l’intention du législateur, ce qui requiert d’examiner le libellé en cause à la lumière de l’historique, du contexte et de l’objet de la disposition.

[21]        À première vue, le libellé de l’al. 265(3)c) ne renseigne guère sur le sens qu’entendait donner le législateur au mot « fraude », une notion empruntée à la common law.

[22]        Quatre considérations président à l’interprétation de la « fraude » viciant le consentement aux relations sexuelles : a) les objectifs du droit criminel, b) l’évolution de la notion dans la common law et dans la loi, c) les valeurs consacrées par la Charte, en particulier l’égalité, l’autonomie, la liberté, le droit à la vie privée et la dignité humaine, de même que d) la situation dans les autres ressorts de common law.  J’examine chacune de ces considérations successivement.

a) Les objectifs du droit criminel

[23]        L’interprétation de la fraude viciant le consentement aux relations sexuelles doit favoriser la réalisation des objectifs du droit criminel, notamment la détection, la prévention et la répression de la conduite criminelle, laquelle est constituée d’un acte fautif et d’une intention coupable.  La moralité imprègne le droit criminel, mais le législateur n’entend pas criminaliser toute forme d’immoralité.  L’objet principal du droit criminel est la réprobation publique d’actes fautifs en ce qu’ils portent atteinte à l’ordre public et sont si répréhensibles qu’ils justifient une sanction pénale : Proprietary Articles Trade Association c. Attorney‑General for Canada, [1931] A.C. 310; Reference re Validity of Section 5(a) of the Dairy Industry Act, [1949] R.C.S. 1, conf. dans [1951] A.C. 179; Lord’s Day Alliance c. Attorney‑General of British Columbia, [1959] R.C.S. 497; La Reine c. Sault Ste. Marie, [1978] 2 R.C.S. 1299; Boggs c. La Reine, [1981] 1 R.C.S. 49; Skoke‑Graham c. La Reine, [1985] 1 R.C.S. 106.

[24]        Le droit établit une nette distinction entre la faute civile et la faute criminelle.  La conduite criminelle exige à la fois un acte fautif et une intention coupable.  Elle requiert un « haut degré de négligence » : R. c. Roy, 2012 CSC 20, [2012] 2 R.C.S. 60, au par. 32.  Comme le dit la juge Charron au nom des juges majoritaires dans l’arrêt R. c. Beatty, 2008 CSC 5, [2008] 1 R.C.S. 49, au par. 34 :

S’il faut considérer comme une infraction criminelle chaque écart par rapport à la norme civile, quelle qu’en soit la gravité, on risque de ratisser trop large et de qualifier de criminelles des personnes qui en réalité ne sont pas moralement blâmables.  Une telle approche risque de porter atteinte au principe de justice fondamentale voulant qu’une personne moralement innocente ne doive pas être privée de sa liberté.

Les conséquences éventuelles d’une déclaration de culpabilité d’agression sexuelle grave — qui peuvent aller jusqu’à l’emprisonnement à perpétuité — font ressortir l’importance d’interpréter l’al. 265(3)c) du Code criminel en mettant l’accent sur le caractère moralement blâmable de la conduite en cause.

b) La common law et l’historique législatif de la fraude viciant le consentement aux relations sexuelles

[25]        On relève trois périodes dans l’histoire de la common law en ce qui a trait à la fraude viciant le consentement aux relations sexuelles.  Dans un premier temps, les tribunaux ont estimé que l’omission d’une personne de révéler à un partenaire qu’elle était atteinte d’une grave maladie transmissible sexuellement pouvait constituer une telle fraude, et la personne fautive pouvait être reconnue coupable de viol ou de voies de fait.  Dans la décision The Queen c. Clarence (1888), 22 Q.B.D. 23, le tribunal a mis fin à ce courant et statué qu’il ne pouvait y avoir fraude qu’en cas de tromperie sur la nature sexuelle de l’acte ou sur l’identité du partenaire masculin.  Après maintes années d’application de la Charte, le retour à une conception plus large de la fraude viciant le consentement s’impose.

[26]        Les premières décisions rendues sur la question dont nous sommes aujourd’hui saisis résultent d’une interprétation extensive de la notion de consentement aux rapports sexuels, à savoir qu’un partenaire sexuel (toujours une femme à l’époque) était en droit de refuser un rapport sexuel et que son consentement ne devait pas être obtenu par la tromperie.  Les tribunaux privilégiaient alors une interprétation souple de la « fraude » viciant le consentement aux relations sexuelles.  Sans tenter de la définir, ils se montraient disposés à ce que la notion englobe les éléments fondamentaux du rapport sexuel.

[27]        Par exemple, dans R. c. Flattery, (1877) 13 Cox C.C. 388 (C.A.), une déclaration de culpabilité de viol a été confirmée dans le cas d’un exploitant de kiosque qui, lors d’une foire, avait eu des rapports sexuels avec une jeune femme de 19 ans en prétendant qu’il s’agissait d’un traitement médical.  La cour a statué que le consentement de la victime au contact physique avec l’accusé avait été vicié par la fraude, la victime n’ayant consenti qu’à une intervention chirurgicale, et non à un acte sexuel.

[28]        De même, il appert des premières décisions fondées sur la common law que l’usurpation de l’identité de l’époux — prétendre faussement être le mari de la victime — pouvait constituer une fraude viciant le consentement.  Dans R. c. Dee (1884), 15 Cox C.C. 579 (Ir.), le juge O’Brien ne laisse subsister aucun doute sur ce point :

[traduction]  Cela nous ramène à la question de ce en quoi consiste légalement le crime de viol.  C’est l’atteinte à l’intégrité physique d’une femme sans son consentement, et je ne vois aucune différence réelle entre l’acte commis sans son consentement et celui commis contre sa volonté, celui‑ci correspondant à la formulation de l’acte d’accusation, bien que lord Campbell fasse cette distinction, ou encore entre le refus du consentement et l’opposition.  Le consentement obtenu par le recours à la force ou à la tromperie, ou qui résulte de la crainte, de l’incapacité ou d’un état naturel n’en est pas un.  Le consentement doit viser non pas l’acte, mais l’acte avec la personne en cause — non dans l’abstrait, mais dans la réalité. . . . [p. 598]

[29]        Dans R. c. Bennett (1866), 4 F & F 1105, 176 E.R. 925, on a eu recours à un raisonnement semblable pour conclure que la dissimulation d’une maladie vénérienne équivalait à une fraude viciant le consentement :

[traduction]  Les voies de fait sont visées par la règle selon laquelle la fraude vicie le consentement, et par conséquent, si l’accusé, qui savait qu’il avait cette maladie honteuse, a incité sa nièce à coucher avec lui dans le but de la posséder, et l’a infectée alors qu’elle ignorait son état, tout consentement qu’elle peut avoir donné sera vicié, et l’accusé sera coupable d’attentat à la pudeur.  [p. 925]

[30]        Également, dans R. c. Sinclair (1867), 13 Cox C.C. 28, la Central Criminal Court conclut à la fraude viciant le consentement dans une affaire où l’accusé avait omis de révéler qu’il avait la gonorrhée.  Elle statue que dans le cas où la plaignante [traduction] « n’aurait pas donné son consentement si elle avait connu ce fait, son consentement est vicié par la tromperie dont elle a été victime, et l’accusé sera déclaré coupable de voies de fait » (p. 29).

[31]        Ces décisions se caractérisaient par une interprétation généreuse du consentement et des circonstances où la tromperie pouvait le vicier, une interprétation qui reconnaissait aux femmes en cause le droit de décider d’avoir ou non des rapports sexuels.  Toutefois, elles ont rapidement été écartées par une série de jugements qui ont débouché sur la décision Clarence.  La lecture des motifs rendus dans ces affaires nous fait plonger dans un univers étranger à notre sensibilité actuelle, celui de la moralité victorienne.

[32]        La décision qui amorce le changement de cap est Hegarty c. Shine (1878), 14 Cox C.C. 124 (H.C.J. Ir. (Q.B.D.)), une instance engagée au civil pour voies de fait.  Le maître des lieux, M. Shine, avait eu des relations sexuelles avec sa domestique pendant deux ans. Celle‑ci était devenue enceinte, puis avait donné naissance à un enfant.  La mère et l’enfant avaient contracté la syphilis.  La cour rejette l’action contre M. Shine sur le fondement de la règle ex turpi causa non oritur actio, la demanderesse étant victime de sa propre immoralité, que la loi ne pouvait approuver.  Au sujet de la fraude, les juges majoritaires opinent que cette notion ne s’applique qu’à l’erreur quant à la nature sexuelle de l’acte : [traduction] « dans la présente affaire, la défenderesse a activement consenti à la chose même, c’est‑à‑dire aux rapports sexuels, en ayant pleinement connaissance et conscience de la nature de l’acte » (p. 130).  La cour d’appel ((1878), 14 Cox C.C. 145) confirme que seule la tromperie sur la nature de l’acte peut vicier le consentement.  Elle déplore le triste sort fait à la victime, mais conclut que la loi n’y peut rien.

[33]        La décision Clarence marque la rupture définitive avec l’interprétation antérieure — plus extensive — de la fraude.  Elle confirme que la fraude ne peut vicier le consentement aux relations sexuelles que si la plaignante est trompée quant à la nature sexuelle de l’acte ou à l’identité de l’homme.  Dans cette affaire, les faits étaient simples et il s’agissait d’un couple marié.  Le mari n’avait pas dit à sa femme qu’il avait la gonorrhée et il la lui avait transmise.  Il a été accusé de voies de fait et d’infliction illicite de lésions corporelles.

[34]        Le fait que treize juges ont entendu l’affaire montre l’importance accordée à celle‑ci.  Ils statuent à raison de neuf contre quatre en faveur de l’acquittement du mari.  Les juges majoritaires estiment qu’on a jusqu’alors interprété trop largement la notion de fraude dans le contexte de relations sexuelles, et qu’il faut en limiter l’application aux situations où la plaignante a été trompée sur la nature sexuelle de l’acte ou sur l’identité de l’homme.  Dès lors s’est appliquée pendant près de cent ans la règle selon laquelle la fraude ne vicie le consentement aux rapports sexuels que si elle a trait à la « nature sexuelle de l’acte » ou à l’identité du partenaire sexuel.

[35]        L’opinion du juge Stephen résume le point de vue des juges majoritaires dans Clarence.  Il conclut que l’infraction d’infliction illicite de lésions corporelles ne pouvait avoir été perpétrée en l’espèce.  Le mari avait certes agi illicitement — infecter son épouse étant cruel et susceptible de prouver l’adultère, les dispositions sur le mariage l’interdisaient —, mais on ne pouvait affirmer qu’il avait infligé des lésions corporelles graves.  En effet, on considérait que l’« infliction de lésions corporelles graves » devait comporter une agression physique.  Le juge Stephen arrive à la conclusion que communiquer une maladie à autrui n’équivaut pas à l’agresser physiquement.

[36]        Le juge Stephen examine ensuite la question de l’obtention de relations sexuelles par la fraude.  Il estime que la seule fraude susceptible de vicier le consentement aux rapports sexuels est celle touchant à la nature des rapports ou à l’identité du partenaire sexuel.  La victime qui savait que l’acte était sexuel et qui n’a pas été trompée sur l’identité de son partenaire ne peut prétendre avoir été trompée ni soutenir que son « consentement » a été obtenu frauduleusement.  Le juge Stephen ajoute brièvement que ni R.c. Bennett ni R.c. Sinclair ne s’appliquent.

[37]        Le baron Pollock, également de la majorité, ajoute dans ses motifs que l’activité sexuelle d’un mari avec sa femme ne saurait être illicite (p. 63‑64).  Le mari possède des droits conjugaux sur sa femme, ce à quoi cette dernière a consenti en l’épousant.  Une fois mariée, l’épouse ne peut se soustraire aux exigences de son mari.  Suivant le raisonnement du baron Pollock, comme les actes sexuels entre époux sont licites, ceux accomplis par le mari, même lorsqu’ils revêtent un caractère cruel, doivent être tenus pour licites.

[38]        Le critère de l’arrêt Clarence a été reconnu dans tous les ressorts de common law et s’est appliqué jusqu’à une époque récente.  Une décision de 1957 de la Haute Cour d’Australie, Papadimitropoulos c. The Queen, (1957), 98 C.L.R. 249, illustre la rigueur de son application.  L’accusé avait incité la plaignante à avoir des rapports sexuels avec lui en lui faisant croire qu’ils étaient légalement mariés.  Il a été acquitté de l’accusation de viol.  La cour résume ainsi la règle :

[traduction]  L’affirmation selon laquelle elle a supposé qu’il était parfaitement moral d’avoir des relations sexuelles avec lui ne revient pas à dire qu’il n’y a pas eu consentement.  Pour revenir au point central, le viol consiste dans l’union charnelle avec une femme sans son consentement.  L’union charnelle s’entend de l’acte physique de la pénétration.  C’est le consentement à cet acte qui est requis.  Un tel consentement exige la connaissance de ce qui est sur le point de se produire, de l’identité de l’homme et de la nature de ce qu’il fait.  Mais dès lors que la personne consent véritablement et en toute connaissance, ce qui l’y a incité ne peut annuler la réalité du consentement et rendre l’homme coupable de viol.  [Je souligne; p. 261.]

[39]        Les opinions exprimées par les juges majoritaires dans Clarence ont trouvé écho dans le premier Code criminel canadien en 1892 (S.C. 1892, ch. 29).  Le législateur a défini strictement la fraude en matière de viol et d’attentat à la pudeur de manière qu’elle ne s’entende que des « fausses et frauduleuses représentations à l’égard de la nature et du caractère de l’acte » : al. 259b) et art. 266.  Le législateur donnait ainsi suite aux préoccupations des juges majoritaires dans Clarence.  Il n’y avait tromperie qu’en présence de « fausses et frauduleuses représentations » par opposition à la seule dissimulation, et l’objet de la fraude se limitait à la « nature et [au] caractère de l’acte ».  En conséquence, les tribunaux canadiens ont considéré que la décision Clarence établissait le droit applicable et ils ont continué de considérer que seule la fraude active quant à la nature de l’acte (son caractère sexuel) ou à l’identité du partenaire sexuel constituait une fraude viciant le consentement aux relations sexuelles : voir p. ex. R. c. Harms (1943), 81 C.C.C. 4 (C.A. Sask.); Bolduc c. The Queen, [1967] R.C.S. 677.

[40]        En 1983, le législateur a modifié le Code criminel pour créer l’actuel al. 265(3)c) : S.C. 1980‑81‑82‑83, ch. 125, art. 19.  La mesure s’inscrivait dans une réforme en profondeur du régime applicable aux infractions sexuelles en vue, notamment, de protéger l’intégrité de la personne et de purger le droit criminel de toute discrimination sexuelle.  La nouvelle disposition renvoyait seulement à la « fraude », laissant tomber les éléments « fausses et frauduleuses représentations » et « la nature et le caractère de l’acte » qui en limitaient la portée.  On pouvait certes y voir l’intention du législateur d’élargir la notion de « fraude », mais les tribunaux ont continué à interpréter cette notion restrictivement : voir R. c. Petrozzi (1987), 35 C.C.C. (3d) 528 (C.A.C.‑B.); R. c. Lee (1991), 3 O.R. (3d) 726 (Div. gén.); R. c. Ssenyonga (1993), 81 C.C.C. (3d) 257 (C. de l’Ont. (Div. gén.)).

[41]        À l’occasion, les tribunaux ont adopté une approche plus généreuse à l’égard des circonstances dans lesquelles la fraude pouvait vicier le consentement aux relations sexuelles.  Par exemple, les tribunaux américains se sont montrés plus enclins à déclarer l’accusé coupable de voies de fait ou de viol dans des circonstances semblables à celles de l’affaire Clarence : State c. Marcks, 41 S.W. 973 (1897), à la p. 973, et 43 S.W. 1095 (1898), aux p. 1097 et 1098; State c. Lankford, 102 A. 63 (Del. Ct. Gen. Sess., 1917), à la p. 64; United States c. Johnson, 27 M.J. 798 (A.F.C.M.R. 1988), à la p. 804; United States c. Dumford, 28 M.J. 836 (A.F.C.M.R. 1989, à la p. 839).  Au Canada, dans l’arrêt R. c. Maurantonio, [1968] 1 O.R. 145 (C.A.), le juge Hartt (ad hoc) conclut que [traduction] « les mots “la nature et le caractère de l’acte” . . . ne doivent pas être interprétés strictement et ne viser que l’acte concret accompli, mais doivent plutôt être interprétés comme englobant les circonstances concomitantes qui donnent un sens à cet acte » (p. 153).  Ce courant était cependant minoritaire.

[42]        Les affaires recensées ne sont évidemment pas nombreuses, ce qui s’explique par la portée concrète du critère énoncé dans la décision Clarence.  Il est évidemment rare qu’une femme consente à des relations sexuelles tout en pensant qu’il ne s’agit pas de relations sexuelles ou qu’un homme différent est en cause.  La personne qui se soumet à un examen médical pour finalement s’apercevoir qu’il s’agit plutôt d’un acte sexuel pourrait alléguer la fraude, car elle consent à un acte non pas sexuel, mais médical.  Suivant la décision Clarence et celles rendues dans sa foulée, lorsque la femme a consenti à l’acte sexuel avec l’homme en cause, peu importe qu’il y ait eu tromperie, l’homme ne peut pas être déclaré coupable d’un crime relativement à cet acte.  Il n’est pas surprenant que les répertoires juridiques recensent peu de cas de fraude viciant le consentement.  Le fait est que la fraude pouvait rarement vicier le consentement.

[43]        La common law canadienne en matière de fraude viciant le consentement aux rapports sexuels est maintenant entrée dans une troisième phase et a rompu avec la règle établie dans Clarence.  Les valeurs d’égalité, d’autonomie, de liberté, de droit à la vie privée et de dignité humaine que consacre la Charte commandent la pleine reconnaissance du droit de donner ou de refuser son consentement à des relations sexuelles.  C’est en ayant ces valeurs à l’esprit qu’il faut interpréter la notion de fraude visée à l’al. 265(3)c).  Le courant jurisprudentiel issu de la décision Clarence, qui réduisait la fraude à la question de la connaissance ou de l’ignorance du caractère sexuel de l’acte, n’a plus sa place dans la société canadienne.  Conclure que la plaignante consent au risque de contracter une maladie grave non révélée parce qu’elle sait que l’acte est sexuel heurte notre sensibilité moderne et les valeurs constitutionnelles actuelles.

c) Valeurs consacrées par la Charte

[44]        Les tribunaux doivent interpréter les lois en harmonie avec les normes constitutionnalisées par la Charte : R. c. Sharpe, 2001 CSC 2, [2001] 1 R.C.S. 45, au par. 33; Demande fondée sur l’art. 83.28 du Code criminel (Re), 2004 CSC 42, [2004] 2 R.C.S. 248, au par. 35.  Les valeurs consacrées par la Charte ont toujours leur place dans l’interprétation d’une disposition contestée du Code criminel.

[45]        Les valeurs constitutionnelles d’égalité, d’autonomie, de liberté, de droit à la vie privée et de dignité humaine revêtent une importance particulière lorsqu’il s’agit de définir la fraude qui vicie le consentement aux relations sexuelles.  L’ancienne conception étroite du consentement a été remplacée par une nouvelle selon laquelle chacun des partenaires sexuels est une personne autonome, égale et libre.  De nos jours, la répression de l’agression sexuelle vise à protéger le droit de refuser un rapport sexuel : l’agression sexuelle est répréhensible en ce qu’elle nie la dignité de la victime en tant qu’être humain.  C’est en fonction de ces valeurs qu’il faut interpréter la fraude visée à l’al. 265(3)c) du Code criminel.

[46]        Nous avons vu qu’avant l’adoption de la Charte en 1982 et la réforme du régime applicable aux infractions sexuelles en 1983, les tribunaux se montraient réticents à conclure à l’absence de consentement à des relations sexuelles et à l’annulation de ce consentement par la fraude.  Les règles de preuve et de procédure (telle l’ancienne règle voulant que le non‑consentement doive être étayé par la preuve d’un appel à l’aide lancé au voisinage immédiatement après l’agression sexuelle alléguée) ou l’empressement des juges à inférer le consentement de l’habillement ou de l’activité sexuelle antérieure ont fait en sorte que les tribunaux concluent systématiquement à l’existence du consentement.  Dans la même veine, la jurisprudence postérieure à la décision Clarence interprète elle aussi restrictivement la notion de fraude susceptible de vicier le consentement, estimant que celle‑ci n’intéresse que la nature sexuelle de l’acte et que la femme mariée ne peut l’invoquer car elle doit être soumise à son mari en toutes circonstances.

[47]        Après l’adoption de la Charte, le droit canadien a banni cette conception étriquée du consentement et de la fraude.  Des modifications apportées au Code criminel ont supprimé les fardeaux de preuve et les présomptions qui rendaient jusqu’alors difficile la preuve de l’absence de consentement.  Les tribunaux ont statué qu’on ne pouvait inférer le consentement de la manière dont était habillée la plaignante ni du fait qu’elle avait pu flirter : R. c. Ewanchuk, [1999] 1 R.C.S. 330.  Puis, en 1998, l’arrêt Cuerrier a marqué le retour à une interprétation généreuse de la fraude susceptible de vicier le consentement.

[48]        Dans l’esprit des valeurs d’égalité et d’autonomie que consacre la Charte, nous voyons aujourd’hui dans l’agression sexuelle non seulement un crime associé au préjudice émotionnel et physique causé à la victime, mais aussi l’exploitation illicite d’un être humain par un autre.  Se livrer à des actes sexuels avec une autre personne sans son consentement c’est la traiter comme un objet et porter atteinte à sa dignité humaine.  Même si la Charte n’est pas directement en cause, les valeurs qui la sous‑tendent doivent être prises en compte pour interpréter l’al. 265(3) du Code criminel.

d) La situation dans les autres ressorts de common law

[49]        Les parties et certains intervenants fondent leur thèse sur l’approche retenue à l’étranger.

[50]        Un examen comparatif révèle que les ressorts de common law criminalisent la transmission sexuelle effective du VIH lorsque la personne se sait séropositive et que son partenaire ne consent pas de façon éclairée à s’exposer au risque d’infection.  Certains ressorts considèrent la transmission du VIH sans révélation préalable de la séropositivité comme une infraction de voies de fait, et non une infraction de caractère sexuel.  La transmission sans révélation préalable a fait l’objet, en Angleterre, de poursuites pour infliction insouciante de lésions corporelles sur le fondement de l’art. 20 de The Offences Against the Person Act, 1861, 24 & 25 Vict., ch. 100), en Australie, dans l’État de Victoria, de poursuites pour [traduction]  « conduite ayant mis en danger la vie d’autrui» (art. 22 de la Crimes Act 1958 (Vic.)) et, en Nouvelle‑Zélande, de poursuites pour, notamment, [traduction] « indifférence insouciante à l’égard de la sécurité d’autrui . . . ayant causé des lésions corporelles graves » (par. 188(2) de la Crimes Act 1961).  Voir I. Grant, « The Prosecution of Non‑Disclosure of HIV in Canada : Time to Rethink Cuerrier » (2011), 5 M.J.L.H 7, aux p. 31 à 41.

[51]        Cependant, de nombreux pays ne criminalisent pas la tromperie qui expose le partenaire à un risque de transmission, sans toutefois entraîner la transmission effective du VIH.  En Angleterre, le fait d’exposer son partenaire au VIH sans lui révéler sa séropositivité ne vicie pas le consentement.  La fraude ne vicie le consentement que si elle touche [traduction] « à la nature ou à l’objet de l’acte », ce qui exclut la tromperie quant à la séropositivité : R. c. B., [2006] EWCA Crim 2945, [2007] 1 W.L.R. 1567, au par. 12.  Théoriquement, en Angleterre, le poursuivant peut, lorsque la séropositivité n’a pas été dévoilée, invoquer l’art. 18 de The Offences against the Person Act, qui criminalise l’infliction délibérée d’un préjudice, et soutenir qu’il y a eu tentative d’infliction délibérée d’un préjudice.  Cependant, la grande difficulté [traduction] « de prouver que l’intention de la personne était de transmettre sexuellement le VIH (et non seulement d’avoir une relation sexuelle non protégée) » est de nature à dissuader le poursuivant (Grant, à la p. 32).

[52]        En Australie, six des neuf ressorts ne criminalisent pas l’exposition lorsqu’il n’y a pas transmission du virus.  Parmi les trois États qui la criminalisent (au moyen des dispositions suivantes : Crimes Act 1958 (Vic.), art. 22 et 23; Criminal Law Consolidation Act 1935 (S.A.), art. 29; Criminal Code Act (N.T.), art. 174C et D), deux (Victoria et le Territoire‑du‑Nord) prévoient des infractions moindres lorsque aucune transmission ne résulte de l’exposition.

[53]        En Nouvelle‑Zélande, la responsabilité tient entre autres au fait qu’il y a eu ou non transmission.  Lorsque le VIH n’est pas transmis, celui qui a omis de révéler sa séropositivité avant un rapport sexuel fait l’objet de l’infraction moindre de nuisance criminelle (art. 145 de la Crimes Act, 1961; R. c. Mwai, [1995] 3 N.Z.L.R 149 (C.A.)).

[54]        Le professeur Grant résume comme suit ce qui différencie l’approche canadienne de celle retenue en Angleterre, en Australie et en Nouvelle‑Zélande :

[traduction]  Au Canada, la même accusation d’agression [sexuelle] grave est généralement portée peu importe la nature de la tromperie, que le virus soit transmis ou non ou que l’omission de révéler constitue un acte isolé ou habituel.  . . . Dans tous les autres ressorts [considérés dans l’étude], l’infraction reprochée est celle d’infliction d’un préjudice corporel, et non celle de contact sexuel sans consentement. [par. 42]

[55]        Bien que les solutions retenues dans les autres ressorts de common law ne nous lient pas, elles mettent en garde contre un accroissement indu de la portée du droit criminel dans ce domaine complexe et nouveau du droit.

(3) Recherche d’une solution

[56]        Nous avons examiné la nécessité d’un critère clair et adapté qui permette de déterminer l’existence d’une fraude viciant le consentement pour l’application de l’al. 265(3)c) du Code criminel lorsque la séropositivité n’est pas révélée.  Nous avons donc retenu quatre éléments susceptibles de nous guider dans l’interprétation de cette disposition, à savoir la juste portée du droit criminel, l’origine de la notion de fraude en common law et dans la loi, les valeurs consacrées par la Charte et l’approche d’autres pays à l’égard de non‑révélation de la séropositivité.  Dès lors, la question est essentiellement celle de savoir dans quelles circonstances précises l’omission de révéler la séropositivité équivaut à une fraude viciant le consentement pour l’application de l’al. 265(3)c).

[57]        Il appert des quatre éléments d’interprétation que le critère établi dans l’arrêt Cuerrier demeure valable sur le plan des principes et des conséquences.  Rappelons que ce critère exige la preuve de deux choses : (1) un acte malhonnête et (2) une privation.  De façon générale, la première s’entend de l’information inexacte sur la séropositivité ou de l’omission de révéler celle‑ci, et la seconde s’entend de manière tout aussi générale de l’exposition à un « risque important de lésions corporelles graves ».

[58]        Bien qu’il puisse être difficile à appliquer, le critère de l’arrêt Cuerrier demeure valable sur le plan des principes.  Il circonscrit avec justesse la portée du droit criminel — réprimer les actes qui exposent à un « risque important de lésions corporelles graves ».  Il respecte les valeurs constitutionnelles d’autonomie, de liberté et d’égalité, et il tient compte de l’évolution de la common law, soit la rupture justifiée avec le courant jurisprudentiel issu de l’arrêt Clarence.  La notion de consentement qui le sous‑tend s’inspire de la sagesse de la common law (qui s’abstient de criminaliser toute tromperie incitant à consentir à un rapport sexuel) tout en accordant une grande importance au consentement.  Il est vrai que, dans l’arrêt Cuerrier, la Cour repousse les limites du droit criminel plus loin que n’importe quel tribunal d’un autre ressort de common law. Toutefois, on peut soutenir que ce sont les autres tribunaux qui ne sont pas allés assez loin : voir L.H. Leigh, « Two Cases on consent in rape » (2007), 5 Arch. News 6.

[59]        Certains intervenants s’opposent à ce que la transmission du VIH relève du droit criminel parce que les gens pourraient hésiter à se faire traiter ou à dévoiler leur état, ce qui accroîtrait le risque pour la santé couru par le porteur du virus et les personnes avec lesquelles il a des rapports sexuels.  Je ne saurais faire droit à cette thèse à partir du dossier qui nous est présenté.  Les seuls « éléments de preuve » présentés par les intervenants à cet égard sont des études selon lesquelles il est « probable » que la criminalisation dissuade les gens de subir un test de dépistage du VIH : voir notamment M. A. Wainberg, « Criminalizing HIV transmission may be a mistake » (2009), 180 C.M.A.J. 688.  Selon d’autres études, les comportements observés dans les États qui ont opté pour la criminalisation diffèrent peu de ceux observés dans les États qui n’ont pas opté pour elle : S. Burris, et al., « Do Criminal Laws Influence HIV Risk Behavior?  An Emperical Trial » (2007), 39 Ariz. St. L.J. 467, à la p. 501.  Il s’agit de conclusions tirées sous toute réserve, et les études n’ont été ni produites en preuve, ni mises à l’épreuve dans le cadre d’un contre‑interrogatoire.  Elles n’offrent pas l’assise qui nous justifierait de modifier le rôle reconnu au droit criminel dans ce domaine.

[60]        Le critère de l’arrêt Cuerrier ne devrait donc pas être écarté.  Certes, il convient de remédier aux problèmes d’incertitude et de juste portée que soulève son application, mais dans le plus grand respect possible du cadre général établi par l’arrêt Cuerrier.  Je passe maintenant aux solutions préconisées pour remédier aux problèmes d’incertitude et de portée excessive rencontrés dans l’application du critère de l’arrêt Cuerrier.

a) La tromperie active

[61]        L’un des moyens de résoudre les problèmes d’incertitude et de portée liés à l’application de l’arrêt Cuerrier consisterait à ramener le concept d’acte malhonnête à celui de tromperie active, à savoir une déclaration nettement trompeuse ou un mensonge en réponse à une question claire.

[62]        Cette avenue remédierait en grande partie à l’incertitude.  Chacun saurait qu’il ne commet pas de crime s’il ne fait pas de déclaration trompeuse ni ne ment en réponse à une question claire.  L’approche apporterait également une solution à la portée apparemment excessive du droit criminel.  En effet, la définition plus stricte de la fraude empêcherait de criminaliser la conduite de celui qui, par inadvertance ou par négligence, omet de révéler sa séropositivité.

[63]        Cette piste de solution bénéficie d’un certain appui.  Selon les motifs concordants que j’ai rédigés dans l’arrêt Cuerrier, il y a fraude lorsque « la personne affirme qu’elle n’est pas malade » (par. 72; avec le concours du juge Gonthier).  Certains ont accueilli favorablement cette interprétation axée sur la « tromperie active » : voir Leigh, à la p. 7.

[64]        Cependant, cette approche soulève quelques difficultés, la première étant qu’il peut être ardu de distinguer tromperie active et tromperie passive par omission de révéler.  Tout dépend des circonstances.  La prise en compte du contexte brouille la ligne de démarcation entre l’acte criminel et l’acte non criminel.  Les propos échangés avant des ébats sexuels ne sont pas toujours des modèles de clarté.  Les gens ne s’expriment généralement pas de manière précise, et les gestes peuvent se substituer aux mots.  Par exemple, hocher la tête de gauche à droite en réponse à une question sur la séropositivité constitue‑t‑il une véritable dénégation de celle‑ci?  De plus, il peut arriver qu’en raison de propos ou de faits antérieurs, le partenaire ait tout lieu de conclure à l’absence de maladie.  Le juge du procès peut assurément démêler des données factuelles complexes et décider s’il y a eu ou non un acte trompeur.  Il n’en demeure pas moins que le critère pourrait ne pas faire ressortir totalement ou suffisamment la tromperie sous‑jacente à une fraude en particulier, de sorte qu’il pourrait se révéler difficile à appliquer en pratique.

[65]        La seconde difficulté est mise en relief par l’argument selon lequel il n’existe aucune distinction rationnelle entre la tromperie active et la tromperie passive.  Le sort de l’épouse qui fait confiance à son conjoint et qui ne le questionne pas directement sur sa séropositivité devrait‑il être pire que celui de la partenaire occasionnelle qui pose directement la question?  Le fait est que ni l’une ni l’autre n’aurait donné son consentement n’eût été la tromperie.  Une fraude est une fraude, qu’elle soit le fruit d’un mensonge flagrant ou d’une ruse.

b) L’obligation absolue de révéler

[66]        Le ministère public soutient qu’une personne atteinte du VIH devrait toujours être tenue d’en informer un partenaire sexuel, ce qui reviendrait à écarter l’exigence du « risque important de lésions corporelles graves » correspondant au deuxième volet du critère de l’arrêt Cuerrier.

[67]        En établissant un critère précis, cette approche remédie à l’incertitude, mais la solution qu’elle apporte au problème de la portée est moins convaincante.  On pourrait soutenir qu’elle ratisse trop large en matière de culpabilité criminelle.  Une personne qui agit de manière responsable et dont la conduite ne cause pas de préjudice ni n’est susceptible d’en causer pourrait se voir déclarée coupable d’une infraction criminelle et condamnée à une longue peine d’emprisonnement.  Qui plus est, l’approche paraît élargir plus qu’il ne faut la notion de fraude viciant le consentement visée à l’al. 265(3)c) en l’assimilant à la simple malhonnêteté et en supprimant de fait l’élément de « privation ».  Enfin, l’obligation absolue de révéler pourrait être qualifiée d’inéquitable et stigmatiser les personnes atteintes du VIH, qui constituent déjà un groupe vulnérable.  Dans la mesure où elles agissent de manière responsable et ne présentent aucun risque de préjudice pour autrui, les personnes séropositives ne devraient pas avoir à choisir entre révéler leur état de santé ou devoir faire face à la justice criminelle.

c) La prise en compte des faits de chaque espèce

[68]        L’intimé soutient que l’exigence d’un « risque important de lésions corporelles graves » établie par l’arrêt Cuerrier demeure valable.  Il croit toutefois qu’il faut la clarifier en précisant qu’elle ne fait qu’énoncer ce qui doit être prouvé pour que le tribunal conclue à l’existence d’une fraude aux fins de l’application de l’al. 265(3)c).  Dans tous les cas, le « risque important de lésions corporelles graves » doit faire l’objet d’une preuve médicale.  Il s’agit de déterminer si, au moment de la relation sexuelle en cause, celle‑ci présentait un risque important de transmission du VIH.  À cette fin, le ministère public fait habituellement témoigner un expert sur la charge virale de l’accusé au moment de l’infraction, de même que sur les risques liés à la forme de protection par condom utilisée en l’espèce.  Le juge du procès doit être convaincu que la preuve établit hors de tout doute raisonnable que la conduite de l’accusé, au moment de l’infraction, présentait un risque important de lésions corporelles graves.  Tout doute joue en faveur de l’accusé.

[69]        Bien qu’elle respecte les droits de l’accusé, cette approche ne résout pas les problèmes d’incertitude et de portée qui rendent le critère de l’arrêt Cuerrier difficile d’application.  La démarche requise serait onéreuse.  Des témoignages d’experts médicaux devraient être présentés dans tous les cas.  Il s’ensuivrait de longs interrogatoires et contre‑interrogatoires.  Le juge du procès devrait consacrer de longues heures à l’appréciation de la preuve en vue de déterminer si elle établit l’existence d’un « risque important de lésions corporelles graves » au moment de l’infraction alléguée.  Enfin, le risque que les jugements se contredisent entre eux pourrait compromettre l’équité du système judiciaire.  Tout en faisant droit aux conclusions du juge du procès sur la preuve, la cour d’appel pourrait trancher différemment la question mixte de fait et de droit liée au caractère « important » du risque.  Un vide juridique pourrait subsister pendant des années avant que l’accusé ne sache s’il est coupable ou non.  Il en résulterait des frais considérables tant pour la poursuite que pour la défense.  La présente affaire illustre tous ces inconvénients.

d) La connaissance d’office de l’effet de l’utilisation du condom

[70]        Afin de réduire l’incertitude liée au critère de nature factuelle qu’énonce l’arrêt Cuerrier, l’intimé propose que les tribunaux prennent connaissance d’office du fait que l’emploi du condom écarte toujours le risque important de lésions corporelles graves.

[71]        Pour qu’un juge prenne connaissance d’office d’un fait, il faut démontrer que celui‑ci est à ce point « notoire » ou, pour employer un terme plus moderne, « admis », qu’aucune personne raisonnable ne saurait le contester : R. c. Find, 2001 CSC 32, [2001] 1 R.C.S. 863, au par. 48; R. c. Spence, 2005 CSC 71, [2005] 3 R.C.S. 458, au par. 53.  Or, en l’espèce, les thèses abondent quant à savoir si, à elle seule, l’utilisation du condom écarte ou non le risque important de lésions corporelles graves, et la controverse est exacerbée par l’évolution rapide de la science et le caractère circonstanciel du risque.  Il ne saurait y avoir connaissance d’office en l’espèce et, à défaut d’un consensus incontestable, celle‑ci ne peut servir de fondement à la formulation d’énoncés généraux sur la question factuelle du risque.

e) La distinction fondée sur la nature du lien entre les personnes

[72]        Une autre façon de resserrer l’exigence du « risque important de lésions corporelles graves » établie dans l’arrêt Cuerrier pour l’interprétation de la fraude visée à l’al. 265(3)c) consiste à ne l’appliquer qu’aux relations spéciales.  D’aucuns laissent entendre que, dans le contexte commercial, l’omission de révéler une chose peut s’apparenter à la fraude lorsqu’il existe entre les parties une relation fiduciaire, quasi‑fiduciaire ou de confiance : B. L. Nightingale, The Law of Fraud and Related Offences (feuilles mobiles).  Cette distinction pourrait fort bien s’appliquer aux relations où l’une des parties est vulnérable, ce qui était le cas des jeunes femmes, souvent intoxiquées, qui ont eu des relations sexuelles avec M. Mabior dans la présente affaire.  Cette approche repose sur le postulat que la personne qui ne demande pas à un partenaire sexuel s’il a une MTS s’expose au risque de contracter le VIH, sauf s’il existe entre eux une relation de confiance.

[73]        Le droit applicable en matière de fraude commerciale offre un certain appui à cette interprétation.  À l’origine, la common law et les tribunaux d’equity estimaient que le seul silence, sans aucune autre forme de comportement qui induisait autrui en erreur, n’était pas frauduleux : Twining c. Morrice (1788), 2 Bro. C.C. 326, 29 E.R. 182; Conolly c. Parsons (1797), 3 Ves. 625n; Walters c. Morgan (1861), 3 De G. F. & J. 718, 45 E.R. 1056.  Or, au fil du temps, l’equity a reconnu que, dans certaines circonstances précises, l’obligation positive de révéler des faits importants s’imposait, notamment dans le cas d’une relation fiduciaire, quasi‑fiduciaire ou de confiance.

[74]        On peut toutefois reprocher à cette approche de trop limiter l’application de la « fraude » visée à l’al. 265(3)c).  Est‑il justifié d’obliger le mari à informer son épouse, mais non une partenaire occasionnelle?  Lorsqu’il y a risque de contracter une maladie qui bouleverse la vie de sa partenaire sexuelle, la réponse est négative.

[75]        Historiquement, la fraude susceptible de vicier le consentement aux relations sexuelles n’a pas connu la même évolution que la fraude commerciale.  Vu son contexte particulier, la fraude d’ordre sexuel comporte des enjeux uniques.  C’est pourquoi elle a généralement fait l’objet d’une interprétation stricte qui obéit à des considérations qui lui sont propres et dont fait rarement partie le lien existant entre les partenaires dans un cas donné.  C’est à l’époque victorienne que l’approche axée sur la nature du lien a le plus imprégné le droit applicable, car on laissait entendre qu’épouses et prostituées — pour différentes raisons liées aux mœurs du temps — ne pouvaient jamais invoquer la fraude viciant le consentement aux relations sexuelles : voir Clarence.  De telles conceptions heurtent notre société éprise d’égalité, qui les juge choquantes.

f) Le partenaire raisonnable

[76]        Une autre interprétation de la « fraude » visée à l’al. 265(3)c) tient aux attentes d’une personne raisonnable et bien informée se trouvant dans la situation  du partenaire éventuel d’une personne atteinte du VIH.  Le critère serait objectif, mais son application prendrait en considération les circonstances propres à chaque cas, notamment la nature du lien entre les parties.

[77]        L’approche est intéressante, car elle tient compte des attentes des parties au vu des faits en cause.  Le critère retenu est donc plus juste que celui fondé sur une norme générale censée s’appliquer à tous les cas.  Dans les circonstances d’une l’espèce, la personne atteinte du VIH peut devoir tenir compte des attentes de son partenaire et agir en conséquence.

[78]        L’approche reconnaît également que le partage de l’obligation de prévenir la transmission sexuelle d’une maladie peut varier en fonction de la relation et de l’époque en cause.  Historiquement, l’une des difficultés inhérentes à la formulation d’un critère qui permette d’établir l’existence d’une fraude viciant le consentement aux relations sexuelles tient à l’évolution des normes sociales et des attentes.  À l’époque victorienne, un mari ne pouvait commettre une fraude viciant le consentement, puisque l’épouse n’avait pas le droit de se refuser à lui.  Plus récemment, certains ont fait valoir que les attentes avaient changé, passant de l’obligation faite à la personne infectée de veiller à la santé sexuelle des deux partenaires, à l’obligation de chacune des parties de veiller sur sa propre santé sexuelle.  Une approche axée à la fois sur la raisonnabilité et le contexte contournerait ces difficultés en adaptant le résultat à la relation qui est à l’origine de l’accusation criminelle.

[79]        Toutefois, l’approche fait elle aussi l’objet de critiques, la plus percutante voulant qu’elle n’établisse pas un critère clair permettant de conclure à la fraude, de sorte qu’on ne peut déterminer avec certitude si un comportement est criminel ou non.  À moins que les partenaires n’établissent eux‑mêmes les paramètres voulus, la personne séropositive doit inférer de la nature de la relation les attentes d’un « partenaire raisonnable ».

[80]        Ce qui appelle une seconde critique — la portée excessive du droit criminel et son corrolaire, l’absence d’équité envers l’accusé.  Dans le feu du désir et dans la perspective d’ébats sexuels, on peut aisément se tromper sur les attentes d’un partenaire raisonnable.  Faut‑il alors criminaliser ce qui constitue, somme toute, une erreur de jugement et condamner le fautif à une peine d’emprisonnement dont la durée peut être de plusieurs années?  Telle pourrait être la conséquence du critère fondé sur les attentes du partenaire raisonnable.

g) Faire évoluer la common law

[81]        Reste donc la possibilité d’accroître la certitude associée au critère de l’arrêt Cuerrier en précisant à quelles conditions est remplie l’exigence du risque important, sur les plans théorique et pratique.  Une telle approche est compatible avec la fonction des tribunaux de common law qui consiste à adapter progressivement les éléments d’une infraction aux exigences de la justice et de l’application concrète.

[82]        Il s’agit donc de pousser plus loin l’arrêt Cuerrier en déterminant dans quelles circonstances une relation sexuelle avec une personne séropositive présente un « risque important de lésions corporelles graves ».  Dès lors, il faut adhérer aux conclusions de fait du juge du procès, sauf erreur manifeste et dominante de sa part.  Que ces conclusions établissent ou non un « risque important de lésions corporelles graves » est une question de droit qu’il convient de trancher : voir C.A., au par. 37.  Il faut entendre par « lésions corporelles graves »  « toute blessure ou lésion, physique ou psychologique, qui nuit d’une manière importante à l’intégrité, à la santé ou au bien‑être d’une victime » : R. c. McCraw, [1991] 3 R.C.S. 72, à la p. 88.  La transmission effective du VIH inflige de toute évidence des lésions corporelles graves.

[83]        Les juridictions inférieures statuent différemment sur cette question de droit.  La juge du procès estime que tout risque de transmission du VIH, aussi minime soit‑il, constitue un « risque important de lésions corporelles graves » (voir le renvoi à ses motifs dans ceux de la C.A., au par. 66).  Par contre, la Cour d’appel conclut qu’un « risque important » connote un risque élevé de transmission du VIH.  À son avis, suivant l’arrêt Cuerrier, un « risque important de lésions corporelles graves » s’entend d’un [traduction] « risque important ou élevé » (par. 80), « par opposition à la preuve d’une “grande probabilité” de non‑infectiosité » (par. 127).

[84]        À mon sens, le « risque important de lésions corporelles graves » se situe entre les pôles que sont l’absence de risque (le critère retenu par la juge du procès) et le « risque élevé » (celui adopté par la Cour d’appel).  Lorsqu’il existe une possibilité réaliste de transmission du VIH, le risque important de lésions corporelles graves est établi, et le second volet du critère de l’arrêt Cuerrier la privation est respecté.  Les considérations suivantes militent en faveur de cette interprétation.

[85]        Premièrement, le « risque important de lésions corporelles graves » ne saurait s’entendre de tout risque, aussi minime soit‑il.  Pareille interprétation reviendrait à adopter l’approche de l’obligation absolue de révéler, qui comporte de nombreuses lacunes, et à faire abstraction du qualificatif « important » employé dans la formulation du critère de l’arrêt Cuerrier.

[86]        Deuxièmement, la norme du risque « élevé » ne tient pas dûment compte de la nature du préjudice causé par la transmission du VIH.  Dans l’arrêt Cuerrier, la notion de « risque important » tient à la fois au risque de contracter le VIH et à la gravité de la maladie lorsqu’elle est transmise, deux facteurs inversement proportionnels.  Plus la nature du préjudice est grave, moins la probabilité de transmission doit être grande pour qu’il y ait « risque important de lésions corporelles graves ».

[87]        Troisièmement, comme je le mentionne précédemment dans l’examen des principes d’interprétation, la norme de la possibilité réaliste de transmission du VIH ne place la barre ni trop haut ni trop bas pour qu’il puisse y avoir déclaration de culpabilité.  La norme correspondant à tout risque, aussi minime soit‑il, pourrait établir un seuil de criminalité trop facile à franchir.  Par ailleurs, limiter l’application de l’al. 265(3)c) aux cas où le risque est « élevé » pourrait avoir l’effet d’excuser un comportement irresponsable et répréhensible.

[88]        Quatrièmement, l’évolution de la common law et des lois en matière de fraude viciant le consentement aux relations sexuelles étaye la proposition selon laquelle le « risque important de lésions corporelles graves » exige une possibilité réaliste de transmission du VIH.  Cette évolution donne à penser que seule la tromperie grave et lourde de conséquences est susceptible de vicier le consentement aux relations sexuelles, ce qui est incompatible avec une interprétation voulant que le « risque important de lésions corporelles graves » requis dans l’arrêt Cuerrier vise tout risque de transmission.  On peut soutenir que la possibilité réaliste de transmission établit un juste équilibre dans le cas d’une maladie dont les conséquences bouleversent la vie, comme le VIH.

[89]        Cinquièmement, les valeurs d’autonomie et d’égalité que consacre la Charte militent en faveur d’une définition de la fraude viciant le consentement qui respecte le droit de chacun de consentir ou non à des rapports sexuels avec une personne en particulier.  La loi doit établir un équilibre entre ce droit et l’impératif de ne criminaliser que le comportement associé à un acte fautif et à un préjudice graves.  Départager l’inconduite criminelle et l’inconduite non criminelle en fonction de la possibilité réaliste de transmission pourrait établir un juste équilibre entre le droit à l’autonomie et à l’égalité du plaignant, d’une part, et la nécessité de faire en sorte que la répression criminelle n’ait pas une portée excessive, d’autre part.

[90]        Enfin, un certain nombre de décisions appuient l’assimilation du « risque important de lésions corporelles graves » à la possibilité réaliste de transmission du VIH.  Hormis celle rendue à l’issue du procès en l’espèce, nulle décision selon laquelle un « risque important » englobe tout risque, aussi minime soit‑il, n’a été invoquée devant nous.  Les décisions sur ce point sont certes peu nombreuses, mais elles valent d’être mentionnées.  Dans R. c. Jones, 2002 NBQB 340, [2002] A.N.‑B. n375 (QC), la cour conclut qu’un risque de transmission de l’hépatite C se situant entre 1,0 et 2,5 pour cent est [traduction] « si faible qu’on ne saurait le qualifier d’important » (par. 33).  Et dans R. c. J.A.T., 2010 BCSC 766 (CanLII), le juge du procès dit qu’[traduction]« [un] risque important s’entend d’un risque dont l’ampleur justifie qu’on le tienne pour important » (par. 56).

[91]        Ces considérations m’amènent à conclure que l’exigence d’un « risque important de lésions corporelles graves » formulée dans l’arrêt Cuerrier doit être interprétée comme obligeant une personne à révéler sa séropositivité lorsqu’il existe une possibilité réaliste de transmission du VIH.  À défaut d’une telle possibilité, l’omission de dévoiler sa séropositivité ne constitue pas une fraude viciant le consentement aux relations sexuelles pour l’application de l’al. 265(3)c).

[92]        Le critère de la possibilité réaliste de transmission proposé dans les présents motifs ne vaut que pour le VIH.  Rappelons que le « risque important » tient à la fois à la gravité du préjudice et à l’ampleur du risque de transmission, deux facteurs inversement proportionnels.  Une maladie transmise sexuellement qui est traitable et qui ne bouleverse pas l’existence ni ne réduit sensiblement l’espérance de vie pourrait très bien ne pas emporter de « lésions corporelles graves » et, de ce fait, ne pas satisfaire à l’exigence de mise en danger de la vie que comporte l’infraction d’agression sexuelle grave prévue au par. 273(1).  L’objet du présent pourvoi n’est pas de tracer la ligne de démarcation dans le cas d’autres maladies que le VIH.  Il suffit de signaler que le VIH est incontestablement une maladie grave qui met la vie en danger.  Bien que son évolution puisse être contrôlée à l’aide de médicaments, le VIH demeure une maladie chronique incurable qui, lorsqu’elle n’est pas traitée, peut entraîner la mort.  C’est pourquoi l’omission d’informer un partenaire sexuel de sa séropositivité peut donner lieu à une déclaration de culpabilité d’agression sexuelle grave suivant le par. 273(1) du Code criminel.  (Cela dit, il se peut que de nouvelles avancées médicales permettent de réduire le taux de mortalité au point de rendre le risque de mortalité presque inexistant, et que l’on ramène l’infraction à celle d’agression sexuelle simple prévue au par. 271(1) du Code criminel.  De même, les chercheurs pourraient un jour trouver un remède, de sorte que le VIH ne cause plus de « lésions corporelles graves » et que l’omission de révéler qu’on en est atteint ne constitue plus une « fraude viciant le consentement » pour l’application de l’infraction d’agression sexuelle.)

(4) Possibilité réaliste de transmission du VIH

[93]        Le principe de droit général suivant se dégage de la jurisprudence en matière de fraude viciant le consentement aux relations sexuelles : l’exigence par notre Cour dans Cuerrier d’un « risque important de lésions corporelles graves » suppose une possibilité réaliste de transmission du VIH.  Le principe vaut pour toute allégation de fraude viciant le consentement à des relations sexuelles fondée sur l’omission de révéler sa séropositivité.

[94]        La question se pose alors de savoir dans quelles circonstances il y a possibilité réaliste de transmission du VIH.  La preuve offerte me convainc que, de manière générale, cette possibilité est écartée i) lorsque la charge virale de l’accusé est faible au moment du rapport sexuel et ii) que le condom est utilisé.

[95]        La conclusion selon laquelle une charge virale faible combinée à l’utilisation du condom écarte la possibilité réaliste de transmission du VIH, de sorte qu’il n’y a pas de « risque important de lésions corporelles graves » pour l’application du critère de l’arrêt Cuerrier, découle de la preuve en l’espèce. Cet énoncé général n’empêche pas la common law de s’adapter aux avancées thérapeutiques et aux circonstances où d’autres facteurs de risque que ceux considérés en l’espèce sont en cause.

[96]        En l’espèce, il appert de la preuve admise au procès qu’il y a eu pénétration vaginale et éjaculation lors des rapports sexuels de M. Mabior avec les quatre plaignantes.  L’accusé suivait un traitement aux antirétroviraux sur une base régulière, mais il n’utilisait le condom qu’à l’occasion.  Son dossier médical indique également qu’il a été traité avec succès pour une gonorrhée et qu’il ne souffrait d’aucune autre infection sexuellement transmissible que le VIH au moment de ses rapports sexuels avec les quatre plaignantes.  À la lumière de cette preuve, trois éléments sont pertinents quant à l’évaluation du risque couru : le risque de base d’une relation vaginale avec un partenaire masculin séropositif, la réduction du risque lorsqu’un condom est utilisé et la thérapie antirétrovirale.  Je les examine tour à tour.

[97]        Comme le signale la Cour d’appel, le risque de base de transmission du VIH lors d’une relation vaginale avec un partenaire masculin infecté (à supposer que l’homme éjacule, qu’il n’emploie pas de préservatif et que sa charge virale soit normale, plutôt que réduite) varie selon les études.  Dans son rapport, le Dr Smith situe le risque par acte entre 0,05 % (1 sur 2000) et 0,26 % (1 sur 384) (p. 4).  Une infirmière en santé publique, Mme McDonald, a témoigné au sujet du protocole post‑exposition du Manitoba, lequel fait état d’un risque par acte de 0,1 % (1 sur 1000).  L’examen systématique et la méta‑analyse de 43 publications portant sur 25 études de population établit le risque couru dans les pays où les revenus sont élevés à 0,08 % par acte sexuel (1 sur 1250) : M.‑C. Boily et al., « Heterosexual risk of HIV‑1 infection per sexual act : systematic review and meta‑analysis of observational studies » (2009), 9 Lancet Infect. Dis. 118.

[98]        Nul ne conteste que le VIH ne passe pas à travers la paroi d’un préservatif masculin ou féminin en latex de bonne qualité.  Cependant, tout risque n’est pas éliminé, car le condom peut être défectueux ou mal employé.  Le Dr Smith a témoigné que l’utilisation systématique du condom réduit le risque de transmission du VIH de 80 pour cent, et il a cité à l’appui l’étude de Cochrane, qui jouit d’une large reconnaissance : S. C. Weller et K. Davis‑Beaty, « Condom Effectiveness in reducing heterosexual HIV transmission » (2002), 1 Cochrane Database Sys. Rev. CD003255.  Il a précisé que ce pourcentage de réduction correspondait à l’utilisation systématique du condom, car il peut être plus élevé s’il y a à la fois utilisation systématique et adéquate du condom, une hypothèse qui n’a cependant pas été vérifiée empiriquement.

[99]        Adoptant l’angle du « risque élevé » d’infection, la Cour d’appel conclut que l’utilisation du condom abaisse le risque de transmission du VIH [traduction] « sous le seuil du risque important » (par. 87).  Toutefois, à mon avis, la preuve n’établit pas que, à elle seule, cette protection écarte la possibilité réaliste de transmission, la norme proposée en l’espèce.  Selon la preuve d’expert, le risque pourrait toujours dépasser le seuil du risque « négligeable » : rapport du Dr Smith, à la p. 6.

[100]     Passons maintenant au dernier élément, la thérapie antirétrovirale.  Comme le signale la Cour d’appel, la transmissibilité du VIH est proportionnelle à la charge virale, soit le nombre de copies du VIH dans le sang.  La charge virale d’une personne séropositive qui n’est pas traitée se situe entre 10 000 et quelques millions de copies par millilitre.  Lorsque le patient suit un traitement aux antirétroviraux, sa charge virale chute rapidement à moins de 1 500 copies par millilitre (charge faible), voire jusqu’à moins de 50 copies par millilitre (charge indétectable) sur une plus longue période de temps.  Selon la preuve au dossier, ces données seraient celles admises de nos jours par la science.

[101]     Le Dr Smith explique dans son rapport que la thérapie antirétrovirale n’offre pas un moyen d’avoir des relations sexuelles sans risque et qu’[traduction] « il est fortement recommandé aux personnes qui ont plus d’un partenaire sexuel, même lorsque leur charge virale est indétectable, d’utiliser systématiquement et correctement le condom » (p. 5 et 7).  Citée par un certain nombre d’intervenants, l’étude à grande échelle la plus récente sur ce point conclut que le risque de transmission du VIH diminue de 89 à 96 % lorsque le partenaire séropositif est traité aux antirétroviraux, peu importe que sa charge virale soit faible ou indétectable : M. S. Cohen et al., « Prevention of HIV‑1 Infection with Early Antiretroviral Therapy » (2011), 365 New Eng. J. Med. 493.  C’est donc dire que la seule thérapie antirétrovirale expose quand même le partenaire sexuel à une possibilité réaliste de transmission.  Toutefois, il appert de la preuve au dossier que le risque de transmission résultant de l’effet combiné de l’utilisation du condom et d’une charge virale faible est de toute évidence extrêmement faible, si faible que le risque devient hypothétique plutôt que réaliste.

[102]     Pour arriver à cette conclusion, je retiens au nombre des éléments qui permettent d’évaluer le risque la charge virale faible, plutôt que la charge virale indétectable.  Ce choix évite les difficultés liées à la preuve d’une charge virale indétectable.  Le Dr Smith a témoigné que plusieurs choses, comme une infection banale ou un aléa thérapeutique, peuvent faire fluctuer la charge virale d’une personne.  Des variations brusques ou passagères élèvent au dessus du seuil de la détectabilité la charge virale d’une personne traitée aux antirétroviraux.  De plus, la détectabilité dépend de la précision d’une technologie en évolution constante : la charge virale qui n’est pas détectable aujourd’hui pourrait très bien l’être ultérieurement grâce à un nouveau test.  Enfin, il convient de signaler le désaccord du Dr Smith avec la Commission fédérale suisse sur le VIH/sida, qui a affirmé en 2008 qu’une personne séropositive dont la charge virale est indétectable n’est pas sexuellement infectieuse.  Il s’agit selon lui d’une affirmation controversée (p. 5).  Il ajoute que cet avis appelle des réserves importantes parce qu’il n’est fondé que sur un examen de la littérature scientifique et qu’il doit être confirmé par la recherche.

[103]     Au vu de la preuve au dossier, force est donc de conclure que l’effet combiné de l’utilisation du condom et de l’existence d’une charge virale faible écarte la possibilité réaliste de transmission du VIH.  Dans ces circonstances, il n’est pas satisfait à l’exigence établie par la Cour dans Cuerrier, à savoir l’existence d’un risque important de lésions corporelles graves.  Il n’y a aucune privation au sens de l’arrêt Cuerrier, et l’omission de l’accusé de révéler sa séropositivité ne constitue pas une fraude viciant le consentement aux fins de l’al. 265(3)c) du Code criminel.

(5) Résumé

[104]     En résumé, pour obtenir une déclaration de culpabilité sous le régime de l’al. 265(3)c) et de l’art. 273, le ministère public doit démontrer que le consentement du plaignant aux relations sexuelles est vicié par la fraude de l’accusé concernant sa séropositivité.  L’omission de révéler (l’acte malhonnête) constitue une fraude lorsque le plaignant n’aurait pas donné son consentement s’il avait su que l’accusé était séropositif et lorsqu’un contact sexuel présente un risque important de lésions corporelles graves ou inflige effectivement de telles lésions (la privation).  La possibilité réaliste de transmettre le VIH établit le risque important de lésions corporelles graves.  Selon la preuve au dossier, la possibilité réaliste de transmission est écartée par la preuve selon laquelle, lors de la relation sexuelle considérée, la charge virale de l’accusé était faible et un condom a été utilisé.  Cependant, l’énoncé général voulant que la charge virale faible combinée à l’emploi du condom écarte la possibilité réaliste de transmission du VIH n’empêche pas la common law de s’adapter aux futures avancées thérapeutiques et aux circonstances où d’autres facteurs de risque que ceux considérés en l’espèce sont en jeu.

[105]     Les règles de preuve habituelles s’appliquent en l’espèce.  C’est au ministère public qu’il incombe d’établir hors de tout doute raisonnable les éléments constitutifs de l’infraction, à savoir l’acte malhonnête et la privation.  Une fois ces deux éléments établis prima facie conformément aux présents motifs, l’accusé peut avoir l’obligation tactique de soulever un doute raisonnable par la présentation d’éléments de preuve selon lesquels, au moment considéré, sa charge virale était faible et un condom a été utilisé.

B. Application

[106]     En ce qui concerne les quatre chefs d’accusation visés par le pourvoi, les plaignantes ont toutes consenti aux rapports sexuels qu’elles ont eus avec l’accusé.  Chacune a déclaré qu’elle n’aurait pas eu de relations sexuelles avec l’accusé si elle l’avait su séropositif.  La seule question en litige est celle de savoir si leur consentement est vicié par l’omission de l’accusé de les informer de sa séropositivité.

[107]     La juge du procès reconnaît l’accusé coupable d’agression sexuelle grave quant aux quatre chefs dans la mesure où était établi que sa charge virale n’était pas indétectable ou qu’il n’avait pas utilisé de condom.  La Cour d’appel annule les déclarations de culpabilité au motif que soit une charge virale indétectable, soit une protection au moyen d’un condom était suffisante.

[108]     Comme je le dis précédemment, à cette étape de l’évolution de la common law, il est possible d’établir un critère clair.  L’absence de possibilité réaliste de transmission du VIH empêche de conclure à l’existence d’une fraude viciant le consentement suivant l’al. 265(3)c) du Code criminel.  Dans la présente affaire, nulle possibilité réaliste de transmission n’a été établie relativement aux rapports sexuels au cours desquels l’accusé avait une charge virale faible et utilisait un condom.  Le pourvoi doit donc être accueilli dans la mesure où la décision de la Cour d’appel va à l’encontre de cette conclusion.

[109]     Lors de ses rapports sexuels avec chacune des plaignantes S.H., D.C.S. et D.H., l’accusé avait une charge virale faible, mais n’a pas utilisé de condom.  Il convient donc de confirmer les déclarations de culpabilité prononcées par la juge du procès sur les chefs correspondants. Reste à statuer sur le cas de K.G. La juge du procès déclare l’accusé coupable au motif que, même s’il a utilisé un condom lors des relations sexuelles avec elle, sa charge virale [traduction] « n’était pas supprimée » (par. 128).  Je rappelle qu’une charge virale faible — par opposition à une charge virale indétectable — combinée à l’utilisation du condom écarte la possibilité réaliste de transmission suivant la preuve présentée en l’espèce. Il appert du dossier qu’au moment de ses rapports sexuels avec K.G., l’accusé avait une charge virale faible. Jumelée à la protection au moyen d’un condom, cette charge virale faible n’a pas exposé K.G. à un risque important de lésions corporelles graves.  La déclaration de culpabilité prononcée par la juge sur ce chef doit être annulée.

[110]     Je suis d’avis d’accueillir le pourvoi en partie et de rétablir les déclarations de culpabilité pour agression sexuelle grave relativement aux plaignantes S.H., D.C.S. et D.H., ainsi que de rejeter le pourvoi en ce qui concerne la plaignante K.G.

 

 

 

Pourvoi accueilli en partie.

Procureur de l’appelante : Procureur général du Manitoba, Winnipeg.

Procureur de l’intimé : Aide juridique Manitoba, Winnipeg.

Procureurs des intervenants le Réseau juridique canadien VIH/sida, HIV & AIDS Legal Clinic Ontario, la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida, Positive Living Society of British Columbia, la Société canadienne du sida, Toronto People With AIDS Foundation, Black Coalition for AIDS Prevention et le Réseau canadien autochtone du sida : Cooper & Sandler, Toronto.

Procureurs de l’intervenante l’Association des libertés civiles de la Colombie‑Britannique : McCarthy Tétrault, Vancouver.

Procureurs de l’intervenante Criminal Lawyers’ Association of Ontario : Schreck Presser, Toronto.

Procureurs de l’intervenante l’Association des avocats de la défense de Montréal : Poupart, Dadour, Touma et Associés, Montréal.

Procureurs de l’intervenant l’Institut national de santé publique du Québec : Desrosiers, Joncas, Massicotte, Montréal.

Saga Pierre-André Vaillancourt: Suite et presque fin d’une saga de plus de 10 ans

Tuesday, June 12th, 2012

Par Gay Globe Média

Suite à un jugement très sévère de l’honorable Juge Armando Aznar de la Cour du Québec reconnaissant Pierre-André Vaillancourt coupable de gestes graves à l’endroit de l’Éditeur de Gay Globe Magazine, Roger-Luc Chayer, en relation avec la violation d’un accord de règlement qu’il avait pourtant signé et qu’il s’était engagé à respecter suivant un ordre de la Cour Supérieure en 2007, le défendeur Pierre-André Vaillancourt avait, début 2012, porté la cause en appel.

Or, suite à une requête de l’avocat de Chayer, Maître Claude Chamberland, visant à faire déclarer l’appel frivole, abusif et non fondé, voilà qu’à quelques heures de l’audition devant les trois juges de la Cour d’Appel du Québec de la requête en rejet d’appel, Vaillancourt annonce, après avoir tenté quelques minutes auparavant de se négocier un nouveau règlement hors cour, qu’il se désistait purement et simplement de son appel sans plus, comme si l’ensemble des faits allégués dans le rejet d’appel était exact.

La Cour d’Appel, le 4 juin dernier, prenait donc acte du désistement mais réservait à Chayer ses recours car comme il y a eu geste frivole de la part de l’avocate de Vaillancourt, qui est maître de son appel, les conséquences financières d’un appel frivole devront être assumées.

Sans plus attendre, Chayer a annoncé qu’il allait réclamer l’ensemble de ses déboursés payés pour rien en appel directement à l’avocate de Vaillancourt en responsabilité professionnelle, comme la loi le prévoit, en espérant que ce dossier trouvera un dénouement final d’ici quelques mois.

“Le Tribunal a été cinglant avec Vaillancourt tout au long de son jugement initial, c’est de plein droit que je demande aux tribunaux de statuer sur la conduite subséquente de son avocate dans le cadre de cet appel bidon qui n’a été produit que pour me faire dépenser et c’est surtout avec la conscience en paix que maintiens le cap dans ce dossier qui n’a été que la démontration d’une haine envers moi du début à la fin, d’un individu que je ne connais même pas”, déclare Roger-Luc Chayer.

Noel Saint-Pierre, avocat connu des gais, reçoit une giffle des tribunaux pour incompétence en 2008

Tuesday, March 20th, 2012

Noel Si-Pierre, avocat très connu des gais, reçoit toute une giffle par les tribunaux et se voit poursuivi pour 3,4 millions de dollars.

Selon David Santerre – Journal de Montréal
En furie contre son avocat, qui n’a selon lui rien fait pour le faire acquitter d’agression sexuelle, Jean-
Christophe Chevreuil poursuit Me Noël Saint-Pierre pour 3,4 millions de dollars.
Depuis le 31 mars 2005, date du jugement de culpabilité du juge Jean Sirois, Chevreuil était détenu. Le
23 mars 2006, le promoteur immobilier de 41 ans était condamné à cinq ans de pénitencier.
On lui reprochait alors d’avoir sauvagement agressé à l’été 2002 deux junkies du Plateau Mont-Royal. À
la pointe d’un couteau, il aurait profité de l’intoxication des jeunes hommes pour les violer, rappelait le
juge Sirois. Sauf qu’en janvier dernier, la cour d’appel a annulé la décision du juge Sirois et ordonné que
Chevreuil subisse un nouveau procès.
Comme principal motif, la cour d’appel estimait que les erreurs et l’incompétence de l’avocat qui avait
défendu Chevreuil à son procès étaient si graves qu’elles constituaient un véritable «déni de justice».
Conséquemment, Chevreuil était remis en liberté quelques jours plus tard. Cette semaine, Chevreuil a
déposé une poursuite de près de 3,4 millions de dollars contre cet avocat, Me Noël Saint-Pierre.
Plusieurs fautes reprochées
Chevreuil reproche plusieurs fautes à son ancien avocat. Selon Chevreuil, Me Saint-Pierre misait ainsi
tout sur une défense d’alibi et sur la mise en doute de l’identification de leur agresseur par les victimes.
Sauf que peu de temps avant le procès, la police soumettait une preuve nouvelle mettant sérieusement
du plomb dans l’aile de l’alibi qu’aurait pu avoir Chevreuil. Et comme les agressions étaient déjà admises,
les moyens de défense de l’accusé devenaient quasi inexistants.
«Ces fautes ont causé des dommages au demandeur. En effet, le demandeur a été incarcéré du 31 mars
2005 jusqu’au 25 janvier 2008, à savoir 1130 jours», stipule la poursuite signée par la nouvelle avocate
de Chevreuil, Me Nadia Tucci.

-Selon Pierre Richard – Journal de Montréal
Condamné à sept ans de prison en 2005 pour cinq agressions sexuelles, Jean-Christophe Chevreuil a été victime de l’incompétence de son avocat et a subi un préjudice tellement grave et irréparable que la Cour d’appel a ordonné un nouveau procès.

C’est la décision qu’a rendue jeudi après-midi la Cour d’appel, estimant que Chevreuil a été victime d’un véritable «déni de justice», d’une véritable erreur judiciaire.

Et ces erreurs, explique la cour, sont le fait de son avocat de l’époque, Noël Saint- Pierre.

Chevreuil était accusé d’avoir agressé sexuellement deux jeunes hommes alors que ceux-ci tentaient de se droguer dans un parc. Les gestes reprochés auraient été commis entre le premier juillet et le quatorze août 2002.

Admission
Mis en accusation, Chevreuil voyait son avocat de l’époque admettre, dès les premières procédures, que les deux victimes avaient été effectivement agressées. En plus, il admettait la preuve d’actes similaires qu’offrait la poursuite.

Pourtant, dit la Cour d’appel, il n’avait qu’une vision partielle de l’affaire et tentait de sortir son client de sa mauvaise situation en présentant une preuve d’alibi et une preuve de bonne réputation. Or, quelques semaines avant le procès, la poursuite lui fournissait des preuves démontrant que l’alibi de son client ne tenait pas la route.

Preuves
En plus, la preuve de «bonne réputation», notamment les habitudes sexuelles de l’accusé, a fini le travail, convaincant le juge du procès du bien-fondé des preuves de la poursuite.

Pourtant, dit le juge Bich, ces preuves étaient discutables et un avocat au fait de son art aurait pu malmener les prétentions de la Couronne, tellement il y avait parfois des invraisemblances.

Le nouvel avocat de Chevreuil, Jean Bertrand, tentera cette semaine d’obtenir que son client reprenne sa liberté en attendant les nouvelles procédures.

Nous tentons de savoir ce qu’est advenue la poursuite de Monsieur Chevreuil contre l’avocat Noel Saint-Pierre, à suivre!

Jugement Vaillancourt: Publication de la version électronique

Wednesday, February 15th, 2012

Suite au jugement rendu par l’honorable juge Armando Aznar, de la Cour du Québec, district de Montréal, le 13 février 2012 dans l’affaire opposant Roger-Luc Chayer contre Pierre-André Vaillancourt, Gay Globe annonce que le jugement intégral sera publié sur le fil de presse Le Point dès que la version électronique sera disponible. Le demandeur se tiendra alors disponible pour toute entrevue sur les questions soulevées par le jugement.

Des propos haineux contre les homosexuels débattus

Sunday, November 6th, 2011

Canoe
La Cour suprême se penche, ce jeudi, sur la propagation de propos haineux contre les homosexuels et sur les limites de la liberté d’expression au Canada.

La Commission des droits de la personne de la Saskatchewan est convaincue que l’activiste anti-gai Bill Whatcott a dépassé les bornes en distribuant des brochures contre les homosexuels à Regina et Saskatoon en 2001 et 2002.

« Nous sommes ici pour protéger et promouvoir la valeur de la liberté d’expression, mais aussi pour vraiment souligner qu’il y a une limite à cela, et une responsabilité qui vient avec », a déclaré David Arnot, qui dirige la commission. Celle-ci avait ordonné en 2005 à M. Whatcott de payer 17 500 $ pour « atteinte à la dignité » aux quatre personnes qui ont déposé des plaintes à la suite de la diffusion des brochures.

Un tribunal de la Saskatchewan avait renversé cette décision, mais la Cour suprême du Canada a accepté d’entendre la cause l’an dernier.

M. Whatcott est tellement déterminé à faire passer son message qu’il a passé la journée de mardi à Ottawa à distribuer 3 000 brochures remettant en question la moralité de l’homosexualité. Il admet ouvertement vouloir choquer.

« Je peux comprendre que vous pouvez être offensés, a-t-il dit. Mais je ne comprends pas comment on peut appeler ça de la haine. Mettre une opinion en avant, ce n’est pas de la haine. »

Bill Whatcott estime que l’on veut freiner sa liberté religieuse et son droit à la libre expression. Il s’est aussi lancé dans une campagne pour abolir les commissions des droits de la personne au Canada.

L’Association canadienne des libertés civiles est l’un des 20 intervenants à comparaître devant les neuf juges de la Cour suprême. Sans cautionner les vues de M. Whatcott, la directrice du programme des libertés fondamentales, Cara Zwibel, s’inquiète que des dispositions légales portant sur le discours haineux conduisent à la censure de débats difficiles au pays.

Mme Zwibel maintient que ceux qui dénoncent le message de M. Whatcott et d’autres vues controversées au pays peuvent utiliser leurs propres outils de communication pour exprimer leurs préoccupations.

« Ce genre de discours doit être dénoncé et contré, dit-elle. Mais il ne doit pas être réduit au silence. »

Témoignage stupéfiant Robert Rousseau débouté en Cour!

Wednesday, October 26th, 2011

Le milieu des saunas fait parfois l’objet d’idées préconçues ou de clichés, cela a toujours été, mais depuis le jugement de la Cour Suprême du Canada qui reconnaissait ces institutions comme des lieux légitimes et réservés à une clientèle adulte responsable, la réputation des saunas s’était considérablement améliorée.

Or, Gay Globe mettait la main récemment sur un jugement qui jette une ombre considérable sur les progrès réalisés en matière d’information de la part de M. Robert Rousseau, Directeur général de l’organisme Rézo, chargé de favoriser des campagnes de prévention contre le VIH/SIDA principalement dans le milieu gai. Dans un témoignage qu’il livrait en 2010 dans la cause Wilcox, et qui vient de faire l’objet d’un jugement final, M. Rousseau n’y va pas de main morte. Il déclare à l’appui de la thèse de l’accusé voulant que les saunas gais soient des endroits où les clients vont spécifiquement pour s’exposer au SIDA et que la protection n’est pas importante, qu’il est de notoriété admise de la part du milieu que les saunas sont des vecteurs du SIDA et que les clients qui fréquentent ces établissements “veulent” et acceptent même d’être exposés au SIDA en toute connaissance de cause.

Le Juge Louis A. Legault de la Cour du Québec, outré de ces propos sous serment que l’on tentait d’introduire sous forme d’expertise, a rejeté du revers de la main non seulement le témoignage de M. Rousseau, qu’il qualifiait de “pseudo-expertise” mais ajoutait que ces opinions ne reposaient sur aucune base scientifique ou quelque recherche que ce soit, refusant de retenir ce témoignage ni la défense en ce sens. L’accusé ayant été condamné…

M. Rousseau, en y allant de telles déclarations devant un tribunal, attaquait non seulement la réputation des saunas mais l’intégrité de milliers de clients et des médias gais qui passent la publicité de ces commerces.

Dans une entrevue qu’il accordait dans une brochure gaie montréalaise en septembre dernier, Rousseau contredisait son témoignage assermenté qu’il ne pensait pas se retrouver entre nos mains et déclarait: “Mais le sauna reste un milieu plus sécuritaire que les lieux publics, puisqu’il est davantage contrôlé et sécurisé”. Est-ce qu’il aurait livré un faux témoignage en Cour sous le  pseudo titre d’expert?

Consultés par Gay Globe, quelques saunas gais montréalais se disent stupéfaits par les déclarations du Directeur de Rézo qui n’a jamais indiqué avoir cette opinion de leurs établissements et certains exigent maintenant sa démission de même qu’une intervention de l’État. En témoignant au bénéfice de l’accusé qui déclarait en défense ne pas avoir à divulguer sa séropositivité dans les saunas gais parce que les clients “s’attendaient  et désiraient attraper le VIH” et que les établissements reconnaissaient ce fait, Robert Rousseau donnait une opinion personnelle, très préoccupante d’ailleurs, basée sur aucune preuve scientifique. Il créait surtout un vent de panique au sein de commerces longtemps visés par la stigmatisation et l’homophobie alors qu’ils constituent historiquement un moyen d’émancipation qui a contribué non seulement à permettre aux gais de vivre leur sexualité dans un environnement sécuritaire, mais d’évoluer et de se faire une identité aujourd’hui reconnue et valorisée. M. Rousseau n’a pas répondu à notre demande d’entrevue à ce jour.

Média prend position!

Par Gay Globe Magazine

En près de 20 ans de carrière média dans le milieu gai, jamais il ne nous a été possible d’observer les éléments du témoignage de M. Rousseau en réalité sur le terrain. Tourisme Québec reconnaît même au moins 3 saunas québécois dont 2 montréalais comme hôtels avec les critères qui s’imposent. Les affirmations du Directeur général de Rézo sont gratuites, non fondées et ne correspondent en rien à la réalité!

Des saunas gais montréalais stupéfaits!

Par Gay Globe Magazine

Un regroupement de propriétaires et d’administrateurs de saunas gais montréalais, formé suite à la découverte et à la diffusion du témoignage du Directeur général de Rézo, décidait d’émettre un communiqué conjoint dont voici l’essentiel:

“Les représentants de certains saunas montréalais, déçus de découvrir la teneur des propos d’un représentant d’organisme voué à la promotion de la santé chez les hommes gais, réunis afin de discuter des déclarations de M. Robert Rousseau, Directeur général de Rézo en Cour criminelle dans le dossier Wilcox, souhaitent la démission de M. Rousseau de Rézo, demandent à Rézo de se dissoscier publiquement des propos de son Directeur général et endossent la position du Juge Louis A. Legault à l’effet que la pseudo-expertise de M. Rousseau ne reposait sur aucune preuve scientifique, que M. Rousseau avait failli le test de la preuve et que son témoignage entier, incluant ses propos stupéfiants sur les saunas gais, devait être rejeté. Enfin, les saunas signataires déclarent que M. Rousseau ne représente ni de près ni de loin les saunas face à d’éventuelles demandes de subventions qu’elles soient publiques ou privées.” (25 octobre 2011)

Steve Biron devant la Cour supérieure en révision

Wednesday, July 20th, 2011

EXCLUSIF AFFAIRE STEVE BIRON: Steve était entendu aujourd’hui par un juge de la Cour supérieure de Québec qui révisait son incarcération sans condamnation. La Cour supérieure peut intervenir dans toute décision de la Cour du Québec comme celle qui ordonnait l’incarcération de Steve sans jugement de condamnation. Selon les observateurs: Juge (Grenier) très à l’écoute, conciencieux, méticuleux et intéressé par la cause devant lui. Il a déclaré vouloir donner sa décision lundi mais a exigé la présence de l’avocate de la Couronne responsable de l’incarcération, Maître Gagnon, devant lui. Il a déclaré qu’il avait l’intention d’appliquer la Charte des droits et libertés! Bravo!

Steve Biron: Vivement que l’on passe au vrai procès, je serai assigné dans ce dossier afin de déposer le résultat d’une très volumineuse enquête qui fera la démonstration que certaines victimes, malgré leurs déclarations à la police, cherchaient volontairement le barebacking. Un dossier de plus de 700 pages a été constitué sur les agissements de certaines pseudo-victimes dans cette affaire.

Injonction prononcée contre Éric Messier par la Cour supérieure

Thursday, June 9th, 2011

Pour lire l’injonction en version Word https://www.gayglobe.us/ericmessier090611.doc

Pour lire l’injonction en version PDF https://www.gayglobe.us/ericmessier090611.pdf

Ordonnance de sauvegarde Roger-Luc Chayer contre Éric Messier

Friday, February 11th, 2011

Canada COUR SUPÉRIEURE

Province de Québec (Chambre civile)

District de Montréal ________________________________

NO : 500-17-060774-109

Roger-Luc Chayer

Demandeur

-c-

Éric Messier

Défendeur

ORDONNANCE DE SAUVEGARDE

ATTENDU qu’une requête introductive d’instance en injonction permanente pour diffamation et requête pour l’émission d’une ordonnance d’injonction interlocutoire a été présentée en l’instance;

ATTENDU qu’une audition d’une durée d’une journée a été fixée originalement pour le 14 février 2011;

ATTENDU que le défendeur a présenté le 11 février 2011 une requête pour obtenir une remise de ladite audition sur l’ordonnance d’injonction interlocutoire;

VU les représentations des procureurs;

LA COUR :

PRONONCE UNE ORDONNANCE DE SAUVEGARDE pour valoir jusqu’au 10 juin, date fixée pour l’audition de la requête pour ordonnance d’injonction interlocutoire;

ORDONNE aux parties de retirer dans les vingt-quatre (24) heures tous les articles publiés sur les sites Internet sous leur contrôle concernant l’autre partie, y incluant les tags et autres liens permettant un renvoi sur d’autres sites ou moteurs de recherches;

ORDONNE aux parties de ne pas publier d’articles relatifs à l’autre partie d’ici le 10 juin 2011, sur tout support quel qu’il soit, informatique ou autre;

AUTORISE la publication de ladite ordonnance par les parties, sans toutefois leur permettre de la commenter.

Le tout, frais à suivre.

Montréal, le 11 février 2011

(S) Danièle Mayrand, J.C.S.

55- Un journaliste de RG gagne en Cour grâce au Point!

Saturday, December 18th, 2010

Laurent Konyalian, journaliste-photographe pour les Éditions HMX Inc. qui publient le Magazine gai RG au Québec, obtient partiellement gain de cause dans une réclamation judi- ciaire pour violation de droits d’auteur contre le bar de danseurs nus l’Adonis à Montréal.
Dans le jugement signé de la juge Julie Veilleux le 29 janvier 2008, le demandeur Konyalian ré- clamait un montant de 1200$ pour une séance de photos et utilisation illégale par la défenderesse de certaines de ses photos. Le demandeur a expliqué au tribunal qu’il était photographe, qu’il avait effectué cette séance de photos en mars 2006 mettant en vedette un certain Jérôme, danseur à l’Adonis et qu’une fois la séance terminée, qu’il avait donné un CD avec les photos à l’Adonis avec une facture de 650$.
L’Adonis informe alors Konyalian qu’il n’a pas l’intention d’utiliser les photos ou de payer la facture, Konyalian demande alors la destruction du CD et tout est supposé en rester là jusqu’à ce qu’il dé- couvre, par hasard en passant devant l’Adonis, que ses photos sont utilisées sur la devanture du commerce pour faire la promotion des danseurs qui travaillent à l’intérieur.
Se sentant floué, Konyalian envoie une mise en demeure à l’Adonis en novembre 2006 exigeant le remboursement des frais de la séance de photos et des dommages additionnels pour utilisation illégale de celles-ci.
Dans son jugement no. 500-32-101182-063, le tribunal refuse d’obliger l’Adonis à rembourser la séance de photos vu l’absence de témoignage du modèle Jérôme mais retient toutefois tous les aspects quant à la violation des droits d’auteur du plaignant et mentionne dans le jugement que pour déterminer le montant des dommages, il s’inspire de la jurisprudence de Chayer c. Corporation Sun Media et octroie au plaignant une somme totale de 550$ avec intérêts et le remboursement de ses frais judiciaires de 94$.
Le Point a ouvert la voie avec un premier jugement contre Québécor…
Dans son jugement, le tribunal s’inspire d’une jurisprudence impliquant l’auteur de ces lignes contre le géant Québécor portant le numéro 125-32-001527-058 du 30 août 2005 qui avait condamné Québécor à des dommages importants suite à l’utilisation d’une photo appartenant à la Revue Le Point dans une campagne orchestrée par les médias locaux de Québécor en Gaspésie.
Dans cette jurisprudence, le juge Marc Gagnon avait considéré le comportement de Québécor et de sa filiale Sun Media de tellement inacceptable qu’il avait même octroyé un montant de 2200$ plus les intérêts et le remboursement des frais judiciaires de 116$. Depuis, ce jugement sert de ré- férence autant à l’Office des droits d’auteur du gouvernement du Québec qu’à l’UNESCO et auprès de plusieurs pays qui s’en servent pour établir les limites de l’utilisation du matériel protégé appar- tenant à des journalistes. L’auteur de ces lignes est donc très fier d’avoir balisé par son combat, le travail de ses confrères comme Laurent Konyalian de RG!

Éric Messier en Cour supérieure pour diffamation

Wednesday, November 10th, 2010

COMMUNIQUÉ – URGENT

Après avoir diffusé sur le web de nombreuses attaques contre le journaliste Roger-Luc Chayer, M. Eric Messier devra s’expliquer devant la Cour le 14 février 2011 dans la cause no 500-17-060774-109 de la Cour supérieure du district de Montréal.

Malgré la signification en septembre 2010 de cette procédure d’injonction de plus de 300 allégués dirigée contre lui, M. Messier continue malgré tout de difuser des propos diffamatoires et mensongers à l’égard de Roger-Luc Chayer.

Par exemple, dans un communiqué publié le 10 novembre 2010, Éric Messier déclare que le journaliste Roger-Luc Chayer aurait été banni à jamais du site de l’encyclopédie virtuelle Wikipédia, déformant volontairement et de façon fallacieuse les faits allant même jusqu’à prétendre que d’autres articles concernant les médias sous la responsabilité de Roger-Luc Chayer seraient sur le point de faire l’objet d’un retrait de Wikipédia.

D’abord, un article sur Roger-Luc Chayer, publié par Wikipédia a effectivement été retiré, À LA DEMANDE MÊME DE ROGER-LUC CHAYER, suite à de nombreux actes de vandalisme perpétrés par Éric Messier qui ont fait l’objet de commentaires publics par Wikipédia et d’un avis de diffamation contre Messier qui n’a plus accès à Wikipédia selon le service de validation des comptes contributeurs. À noter que le journaliste Chayer contrairement aux affirmations de Messier, n’a jamais été banni de Wikipédia tel que le démontre le même service de validation. De plus, l’article sur Gay Globe Média, que M. Éric Messier prétend faire l’objet d’un débat de suppression est bel et bien présent sur Wikipédia, le débat de suppression ayant été favorable à Gay Globe, le 12 février 2010 soit, il y a plus de 10 mois tel que le démontre le registre du débat. M. Mesier ne pouvant ignorer l’avis public publié par Wikipédia à ce sujet  qui déclare: “Cette page a été conservée après avoir été proposée à la suppression. Revue gay canadienne notoire dont le nom a été changé récemment en Gay Globe Magazine. Un renommage de la page est effectué en sus de la conservation.“, démontre une mauvaise foi évidente puisque les faits qu’il soulève n’existent tout simplement pas.

Le public est invité à ne pas prendre au premier degré les informations de cet individu pour se faire une opinion et à attendre qu’un jugement soit rendu dans l’affaire ci haut mentionnée.

Les plaintes d’Éric Messier au Conseil de Presse du Québec n’existent plus…

Wednesday, October 13th, 2010

COMMUNIQUÉ

Le journaliste montréalais Éric Messier avait déposé en 2010 une longue série de plaintes au Conseil de Presse du Québec contre Gay Globe TV, Gay Globe Média et contre le journaliste Roger-Luc Chayer, responsable des nouvelles pour ces médias. À la demande du Groupe Gay Globe, le Conseil avait déjà suspendu l’étude de ces plaintes vu la possibilité de procédures judiciaires à venir contre M. Messier.

En septembre 2010, une requête en injonction et en diffamation était déposée à la Cour supérieure du district judiciaire de Montréal par Maître Claude Chamberland, avocat de Gay Globe, contre Éric Messier, de manière à permettre au Tribunal d’intervenir dans une série de près de 40 pages d’allégations graves sur la conduite professionnelle de M. Messier et afin de demander à la Cour de mettre fin aux actes du journaliste Messier qui a annoncé dans des milliers de pages, sur Internet et depuis 2009, des fausses nouvelles que nous ne répéterons pas ici.

Or, suite au dépôt de cette requête, le Conseil de Presse du Québec annonçait le 7 octobre 2010, dans une lettre signée du Secrétaire général Guy Amyot, que l’ensemble des plaintes de M. Messier contre le Groupe Gay Globe étaient fermées, le Conseil ne souhaitant pas donner suite aux récriminations du journaliste Éric Messier.

Bien qu’informé de la suspension des plaintes et de la fermeture de ses dossiers, le journaliste Messier persiste à annoncer sur son site Internet que ces plaintes sont actives et que Gay Globe devra répondre des faits soulevés par lui. Rien n’est donc plus faux et nous publions pour l’information légitime du public, la lettre émanant du Conseil qui le prouve.

La lettre peut-être lûe intégralement au https://www.gayglobe.us/cpq131010.jpg


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-30-

Entente de règlement historique

Monday, January 18th, 2010

COMMUNIQUÉ

Suite à un litige survenu à la fin 2006 portant alors sur une intention d’acquisition de la Revue Le Point, des procédures judiciaires ont été intentées à Montréal. Or, une entente de règlement est survenue le 15 janvier 2010 entre Roger-Luc Chayer, éditeur du Point et François Robert Lemire, Président de la compagnie 656870-0 Canada Inc. mettant un terme définitif à ce litige à la satisfaction des deux parties.

Cette entente comprend la cession de toutes les revendications de M. Lemire, des droits d’auteur, des revues Le Point, de toutes les raisons sociales impliquées et de l’ensemble des objets de la vente à Roger-Luc Chayer, éditeur et propriétaire du magazine.

M. Roger-Luc Chayer est donc confirmé dans son poste d’éditeur et propriétaire du magazine et de ses divisions, poste qu’il occupe depuis 2002.

L’accord de règlement confirme que M. Chayer est le seul propriétaire de la Revue Le Point et qu’il en possède tous les droits afférents.

Le SPVM dépose sa preuve dans le dossier Vaillancourt (7 janvier 2010)

Thursday, January 7th, 2010

En 2007 et suite à une entente de règlement mettant un terme à des années de procédures judiciaires dans un dossier de diffamation intenté par l’éditeur de GGTV en 2001, la Cour Supérieure du district de Montréal prenant acte de l’entente, l’homologuait et la transformait en jugement ordonnant aux signataires de la respecter. L’entente devenait donc une ordonnance judiciaire et les contrevenants s’exposant à des accusations pénales et criminelles en cas de violation.

Or, suite à l’envoi de emails haineux par la suite contre l’éditeur de Gay Globe TV, le SPVM y allait de son enquête et grâce aux services technologiques du Service de Police de la Ville de Montréal et au serveur internet Vidéotron, l’auteur de ces documents haineux a été indentifié et traduit devant les tribunaux. Les détails de l’action peuvent être lus au https://www.gayglobe.us/vaillancourt131109.html

Aujourd’hui le 7 janvier 2010, dans le cadre d’une action en violation d’une ordonnance de la Cour supérieure, le tribunal a ordonné au SPVM (police) de déposer l’ensemble de son dossier prouvant l’identité de l’auteur des emails diffamatoires et haineux et les résultats de l’enquête, ce à quoi s’est immédiatement conformé le représentant du service de police de Montréal, pendant l’audience en salle 2.06 à 9h ce matin.

L’avocat de l’éditeur de GGTV, Me Claude Chamberland a, du coup, découvert que l’auteur s’était répandu sur Internet en messages anonymes haineux additionnels, dont sur un site professionnel de journalistes et des sites en langue arabe, malgré l’ordre direct de la Cour de 2007 et ces nouvelles preuves seront déposées sous peu devant le même tribunal.

L’auteur des courriels anonymes et haineux, identifié par le SPVM, Pierre-André Vaillancourt, un homme de la communauté gaie de Montréal, directement visé par l’ordonnance de la Cour supérieure de 2007, fait actuellement face à une condamnation possible de 24,000$ dont 12,000$ doivent être versés à une organisation communautaire venant en aide aux personnes atteintes du VIH-SIDA, en plus des dépens, des intérêts et s’expose à des poursuites additionnelles pour outrage au tribunal (criminel).

Depuis l’ordonnance de 2007, certaines personnes et sites internet pesistent à publier les documents ordonnés détruits, les enquêtes se poursuivent et d’autres accusations seront déposées sous peu.

Ce texte a été jugé non diffamatoire selon la Cour du Québec et le défendeur Vaillancourt s’est désisté en juin 2012 de son appel.

Jugement québécor

Saturday, November 14th, 2009

Dans la dernière édition du Point, sans avoir connaissance des détails
du jugement prononcé à Matane par le juge Marc Gagnon de la Cour du
Québec, puisque le jugement nʼavait pas encore été posté au moment
dʼaller chez lʼimprimeur, nous savions déjà que Québécor (Sun Média)
avait été condamnée pour violation des droits dʼauteur appartenant au
Point et que le Tribunal avait été dʼune rare sévérité à lʼendroit du géant
des communications.
Tout a commencé au moment où, voulant faire quelques vérifications sur
la diffusion de nos produits et textes sur Internet, une mention est apparue
et avait pour origine les sites internet de deux journaux appartenant à
Québécor et publiés… en Gaspésie! Surpris, nous sommes aller constater
de quoi il sʼagissait et, Oh surprise, on publiait une photo du célèbre Éric
Mc Cutcheon, photo qui appartenait à la revue Le Point depuis janvier
2004.
Il arrive parfois que des confrères utilisent du matériel journalistique
dans le but de transmettre une information ou de publier une nouvelle,
règle générale, cette utilisation est accompagnée du nom de lʼauteur de
la photo et de son origine et souvent, on demande lʼautorisation avant de
reproduire lʼoeuvre. Or, dans le cas des deux journaux de la Gaspésie, non
seulement aucune mention nʼétait faite de lʼorigine de la photo, on sʼen
servait pour annoncer une tournée de la vedette dans des bars de la région!
Il y avait manifestement violation de nos droits, dans un but commercial
et lʼauteur de cette violation ne pouvait feindre lʼignorance, il sʼagissait de
Québécor, chef de fil en matière de médias, donc de droits dʼauteur, dans
le monde! Immédiatement, Le Point a exigé que lʼon retire les photos des
sites internet et a demandé à ce quʼun cachet soit versé pour lʼutilisation
de lʼimage, puisque pour créer cette banque dʼimages, Le Point avait dé-
frayé des sommes en argent, en échange de publicité et en temps.
Éric Mc Cutcheon
Qui est Éric Mc Cutcheon? Pour ceux qui ne sʼen souviennent pas, Éric
est le grand gagnant de la première version de lʼémission Occupation
Double, elle-même grande gagnante au niveau des cotes dʼécoute avec
près de 2 Millions dʼauditeurs à chaque semaine au Québec. Éric est resté
très populaire sur la scène publique et cʼest dans le cadre dʼune entrevue
spéciale dans la revue le Point que les photos avaient été produites, en
janvier 2004. Comme il est de mise dans ce genre de travail, une entente
portant sur les droits dʼauteurs a résultée de la séance de photos et Le Point
sʼest retrouvé propriétaire des droits sur quelques dizaines de photos.
Québécor ne souhaitant pas négocier et démontrant une mauvaise foi
évidente en invoquant fallacieusement certains aspects de la loi pour
éviter de payer les droits réclamés, une poursuite a été déposée à la cour
du Québec et sʼengageait alors un combat non seulement intellectuel sur
la propriété dʼune oeuvre, mais aussi sur le simple fait pour un titan de
manger la laine sur le dos des petits indépendants. Nʼoublions pas que
Québécor publie des dizaines de magazines concurrents à la revue Le
Point, les moyens sont autrement plus imposants du côté de Québécor
que du côté du Point!
Après une multitude de manoeuvres légales plus ou moins élégantes, dont
une demande de transfert à une cour supérieure pour des motifs que la
question soulevée était dʼintérêt national ou une autre requête pour faire
transférer le dossier à Matane (8 heures de route de Montréal) alors que
les bureaux du Point et ceux de Québécor sont à Montréal, le tribunal, en
tenant compte non seulement des faits mais aussi du comportement de
Québecor, a décidé de condamner avec sévérité la multinationale à une
amende totalisant près de 2800.00$, à être versée à la revue Le Point.
Le jugement presque intégral est publié à la
page 18 pour consultation.

POursuites judiciaires contre la Voix du Village et Sylvain Sourdif

Saturday, November 14th, 2009

Le Point (Montréal): Poursuite judiciaire contre le magazine La Voix
du Village pour concurrence déloyale
La revue Le Point annonce que suite à une longue enquête portant sur
certaines pratiques commerciales du magazine montréalais La Voix du
Village Inc., publié par Prestige Média inc. et lʼÉditeur Sylvain Sourdif,
une poursuite à la Cour du Québec a été déposée afin dʼobliger “La
Voix” à cesser ses activités trompeuses face au marché publicitaire gai
québécois.
En effet, le dossier comporte les aspects suivants qui ont fait lʼobjet de
la poursuite déposée dans le district judiciaire de Montréal fin juin 2005:
Fausses factures fournies aux clients pour garantir un faux tirage (quantité
de magazines), faux tirage de 30,000 revues, utilisation illégale du logo
de certification CCAB alors que “La Voix” nʼa jamais été certifiée sur
son tirage ni sur sa distribution, témoignage de lʼimprimeur sur le tirage
non conforme à la réalité et autres détails sur des fausses informations
transmises aux clients par lʼÉditeur de “La Voix”.
La revue Le Point, publication québécoise pour hommes, tout comme
la revue Fugues à lʼorigine, souhaite se dissocier de tels agissements
et suite à de longs mois dʼintenses négociations infructueuses avec les
représentants de “La Voix”visant à ramener une éthique commerciale
acceptable face aux clients floués, préfère mettre cette affaire dans les
mains dʼun Tribunal neutre qui pourra statuer sur la situation et forcer
La Voix à prendre les mesures apprpriées, incluant le remboursement
à ses clients de la surfacturation conséquente. À noter que les clients
floués par le tirage dʼun magazine peuvent obtenir le remboursement de
leurs factures publicitaires et porter plainte à lʼOffice de la Protection du
Consommateur du Québec au www.opc.gouv.qc.ca
Enfin, le Bureau Canadien de la Concurrence a été saisi de lʼaffaire et une
imposante preuve de plus de 400 pages, a été déposée au bureau. Cette
affaire est à suivre et la prudence est requise face à la situation.
Un avis juridique cinglant à lʼencontre de la
Voix du Village!
Le Point a consulté une firme spécialisée en droit des affaires et voici
ses conclusions:
Vous nous avez confié le mandat dʼexaminer le portrait juridique de
certaines pratiques dʼaffaires utilisées par des entreprises oeuvrant dans
votre domaine, soit lʼédition de magazine à distribution gratuite. Lʼopi-
nion juridique que nous émettons ici est directement tributaire des faits
que vous nous avez rapportés et elle pourrait varier sʼil advenait que des
renseignements pertinents nʼaient pas été portés à notre attention ou si
nous avons une mauvaise compréhension des faits que vous nous avez
exposés. Les éditeurs de parutions à distribution gratuite dépendent pres-
que uniquement des revenus quʼils tirent des publicitaires qui acceptent
de placer une annonce dans leur magazine. Partant de ce concept de base,
vous nous avez interrogé sur la portée de la responsabilité légale des édi-
teurs quant à leurs représentations ou promesses faites à ces publicitaires.
Rappel sommaire des faits :
De façon plus précise, vous nous avez rapporté quʼun de vos concurrents
prétend avoir un tirage nettement supérieur à la réalité afin dʼattirer des pu-
blicitaires et de sʼapproprier de façon déloyale dʼune part du marché. Nous
avons constaté que cette entreprise a utilisé à lʼintérieur de plusieurs de ses
numéros le logo « CCAB » qui émane de BPA Worldwide Media.
BPA Worldwide Média est une entreprise prestigieuse et indépendante de
certification spécialisée dans le domaine des médias. Il appert quʼun maga-
zine qui veut apposer le logo de « CCAB » à lʼintérieur de ses pages doit être
un membre en règle de cette organisation, doit avoir subi une vérification
avec succès et doit publier un nombre suffisant dʼexemplaires. Nous avons
pris connaissance de la lettre de monsieur Matt Pasquale du CCAB qui men-
tionne clairement que votre concurrent « délinquant » nʼétait pas membre en
règle de leur organisme en date du 1 décembre 2004 et quʼil nʼa jamais été
membre CCAB. En conséquence aucune utilisation du logo « CCAB » nʼest
permise et aucune représentation à lʼeffet que cette entreprise est membre
CCAB nʼest autorisée par ce tiers certificateur. Au surplus, le courriel éma-
nant dʼun des administrateurs de votre concurrent à lʼeffet que son entreprise
nʼest pas certifiée CCAB constitue un aveu extrajudiciaire important.
Vous nous avez de plus mentionné que cette entreprise concurrente repré-
sentait à ses clients que son magazine était imprimé à 30 000 exemplaires
chaque mois. Nous avons dʼailleurs pris connaissance dʼun document qui
semble émaner de votre concurrent et qui mentionne clairement que ce men-
suel gratuit est : imprimé à 30 000 exemplaires, distribué dans 400 points de
chute, dans 300 présentoirs de distribution et que la première certification
CCAB fut pour le mois de septembre 2004. Dʼaprès les renseignements que
vous nous avez fournis, ces informations de vente sont totalement inexactes,
voire fallacieuses et elles induisent en erreur. Vous nous avez mentionné
avoir eu la confirmation que le tirage de ce concurrent nʼavait jamais été
supérieur à 20 000 exemplaires mensuels.
Responsabilité civile :
Nous comprenons que le domaine de lʼédition est extrêmement compétitif
mais néanmoins les règles élémentaires de droit sʼappliquent.  Les publi-
citaires qui ont acheté des espaces de publicité dans le magazine de votre
concurrent ont conclu des contrats au sens du Code civil du Québec. La
bonne foi, les représentations exactes, le consentement éclairé et la rencon-
tre de la volonté des parties sont des concepts obligatoires qui sʼappliquent
directement à ces contrats de publicité. Les fausses représentations sur le
tirage du magazine représentent des faits qui ont pu vicier le consentement
des publicitaires. Le consentement nʼétant pas éclairé au sens de la Loi, les
parties lésées pourraient réclamer la nullité du contrat et la remise en état
des parties ou la réduction de leurs obligations.  Nous sommes dʼavis que les
publicitaires qui ont été bernés par votre concurrent pourraient prendre des
recours contre celui-ci pour faire annuler les contrats ou pour faire réduire
les obligations qui en découlent. Les éléments nécessaires à une poursuite
en remboursement sont tous présents, soit la faute, le dommage et le lien de
causalité. En conséquence, en toute probabilité, ils auraient gain de cause.
Nous espérons que cette opinion juridique réponde à vos interrogations.
Veuillez agréer, monsieur Chayer, lʼexpression de nos sentiments distingués.
La publication fait face à de nombreuses poursuites autant à la Cour du Québec quʼau Bureau de la Concurrence du Canada
Par: Le Point

Cas de VIH fulgurant détecté à New York

Thursday, October 1st, 2009

Justice: Monsieur André Gagnon ne se pré-

sente même plus devant les juges…

Par: Le Point

Dans trois causes récentes, le Président de Fierté Québec, bien que convoqué

devant différents juges afin de répondre de diverses accusations quant à la

gestion des affaires de sa corporation ou de ses affaires personnelles, ne se

présente même pas aux procès et se retrouve avec des jugements prononcés

contre lui et la corporation.

D’abord, dans une affaire de salaire impayé, la Commission des Normes du

Travail le condamnait par défaut vu son absence à payer un ex-employé ce

qui lui était dû. Peine perdue, d’après un rapport d’huissier obtenu par Le

Point, la saisie aurait été impossible puisqu’un employé de M. Gagnon aurait

déclaré qu’il n’avait ni actifs ni entreprise au Québec! Et la revue Etre elle?

Dans deux autres causes datant de janvier 2005 (200-32-036034-048 et  200-

32-035136-042) Fierté Québec et Monsieur Gagnon ont été condamnés à plus

de 6,000.00$ de dommages toujours par défaut puisqu’il refuse ou néglige de

se présenter devant les juges et d’expliquer sa gestion, Monsieur Gagnon pré-

férant attaquer la réputation des journalistes qui le questionnent. Il serait donc

prudent de ne plus signer aucun contrat avec l’organisation ou l’individu tant

et aussi longtemps que la situation ne se sera pas réglée comme il se doit.

Éditorial: Le Point

«Non seulement l’organisation et ses administrateurs ne semblent plus

avoir le contrôle de son président, je suis de plus en plus persuadé que les

victimes dans cette affaire, ceux et celles à qui on doit des sommes im-

portantes d’argent, n’y trouveront finalement jamais leur compte», déclare

Roger-Luc Chayer, Éditeur de la revue Le Point.

C’est en effet suite à la publication dans notre dernière édition d’un dos-

sier sur la décision de la revue le Point de ne plus endosser l’organisation

Fierté Québec que son Président, Monsieur André Gagnon, y allait dans

sa publication d’une attaque en règle contre tout ce qui bouge au Québec

accusant le Québec en entier de ne pas le comprendre.

L’Éditeur de la revue Le Point a pourtant invité Monsier Gagnon à ouvrir

ses livres et à faire la preuve de sa bonne gestion financière mais plutôt

que de collaborer, Monsieur Gagnon de Fierté Québec a préféré attaquer

Le Point, Fugues, Le Soleil de Québec et de nombreux autres, en réus-

sissant en l’espace de trois pages à ne pas répondre aux questions qui lui

sont pourtant posées depuis des mois: Où est le fric et quand allez-vous

payer vos dettes?

Malheureusement, Monsieur Gagnon préfère ne pas répondre aux ques-

tions du public ni même des juges puisqu’en plus de ne pas avoir la grâce

de s’expliquer à ses créanciers, il ne se présente pas aux procès résultant

de poursuites contre lui et son organisation. Quand un juge ne peut même

plus avoir le respect de Monsieur Gagnon, c’est que tout va bien mal dans

la caboche du Président de Fierté Québec…

NEW YORK (AFP) – Une forme fulgurante de VIH résistant à tout traite-

ment a été décelée chez un New-Yorkais, poussant les autorités sanitaires

de la ville à renouveler leurs mises en garde à la communauté homo-

sexuelle. «Une variété hautement résistante de virus HIV progressant très

rapidement a été décelée pour la première fois chez un résident de New

York», a annoncé dans un communiqué vendredi le service de Santé de

la ville. Cette variété «ne répond pas à trois classes de médicaments anti-

rétroviraux (sur les quatre existants) et semble aussi réduire fortement

l’intervalle entre l’infection au VIH et le sida déclaré».

Le patient, un homme d’une quarantaine d’années qui a indiqué avoir

cumulé plusieurs relations homosexuelles non protégées, semble avoir été

infecté récemment, il y a peut-être deux ou trois mois, et au maximum il

y a vingt mois. Après avoir découvert sa séropositivité en décembre, il a

développé la maladie.

Habituellement, le sida met quelque 10 ans à se déclarer, relève la même

source. «La résistance aux traitements est de plus en plus commune pour

les patients déjà traités contre le VIH, mais les cas (de résistance) sur

les patients tout juste diagnostiqués et n’ayant jamais été traités sont très

rares. Et la combinaison de cette résistance aux médicaments et de la pro-

gression rapide du sida pourrait très bien n’avoir jamais été diagnostiquée

auparavant», assurent les responsables new-yorkais.

«C’est un signal d’alerte», dit Thomas Frieden, chef du service de Santé

de New York. «D’abord pour les hommes qui ont des relations avec des

hommes, en particulier ceux qui consomment des méthamphétamines

(drogue de synthèse hautement addictive, nldr)… Cette communauté a

réussi à réduire les risques du VIH dans les années 80, et elle doit de nou-

veau le faire pour stopper les ravages du VIH et du sida et l’expansion de

souches résistantes.»

Plus de 88,000 New-Yorkais vivent avec le VIH, et on estime que quelque

20,000 sont infectés sans le savoir, selon la même source.

Accord de règlement Chayer/Irazoo/Verma – Settlement agreement Chayer/Irazoo/Verma

Monday, August 24th, 2009

COMMUNIQUÉ GAY GLOBE TV

Un accord de règlement est intervenu plus tôt aujourd’hui entre Roger-Luc Chayer, éditeur du Magazine Le Point et de Gay Globe TV, Mr. Neal Verma, Président de la compagnie Irazoo.com et Irazoo Inc à l’effet de régler leur mésentente et de mettre un terme aux procédures judiciaires intentées quant à la pérénité des oeuvres, des écrits et du matériel offert dans la Revue Le Point et sur Gay Globe TV.

La situation a été réglée à la satisfaction des 3 parties signataires de l’accord qui a confirmé que l’ensemble du matériel diffusé ou publié sur GGTV et sur les sites gayglobe.us, gglobetv.com, le-national.com et uvillemarie.org sont l’entière et exclusive propriété de Roger-Luc Chayer et de GGTV.

24 août 2009

A settlement agreement was reached earlier today between Roger-Luc Chayer, editor of the magazine Le Point and Gay Globe TV, Mr. Neal Verma, chairman of Irazoo.com and Irazoo Inc. for the purpose of settling their misunderstanding and stop the legal proceedings regarding the copyrights of all work, writings and materials available in Le Point Magazine and Gay Globe TV.

The situation has been resolved to the satisfaction of the 3 parties to the agreement which confirmed that all materials posted on GGTV and sites gayglobe.us, gglobetv.com, le-national.com and uvillemarie. org are the sole property and exclusive use of Roger-Luc Chayer and GGTV.

August 24 2009

Christian Vanneste gagne contre Jean-Luc Romero

Thursday, November 13th, 2008

(Intégralement selon 20minutes.fr)

Dire que «l’homosexualité est inférieure à l’hétérosexualité» relève de la liberté d’expression. C’est la décision que vient de rendre ce mercredi la Cour de cassation. Elle a en effet blanchi le député UMP du Nord Christian Vanneste et annulé sa condamnation pour injure envers la communauté homosexuelle, estimant qu’il n’avait pas dépassé les limites de la liberté d’expression. Le Syndicat national des entreprises gaies envisagerait déjà un recours devant la Cour européenne de Justice.

Le député a cependant tenu à exprimer ses regrets. «Je regrette le mot “inférieure”», a-t-il assuré, avant de se lancer dans une tentative d’explication de sa «maladresse»: «je voulais dire: “l’homosexualité c’est moins bien parce que ça ne peut pas être universalisé, tout le monde ne peut pas être homosexuel, sinon la société serait mal partie”».

Il se félicite cependant de ce revirement de situation. «Cette décision de justice me satisfait car elle me fait retrouver deux idées sur lesquelles j’avais de sérieux doutes depuis quatre ans, a déclaré à 20minutes.fr Christian Vanneste. La première est une certaine idée de mon pays. Car depuis quatre ans, on empêchait tout de même un citoyen, et qui plus est, un parlementaire de s’exprimer. La seconde chose, c’est que cette décision de justice prouve qu’il y a une vérité… »

>> A lire, trois questions à Jean-Luc Romero, conseiller régional (divers droite) d’Ile-de-France

Le 25 janvier 2007, la cour d’appel de Douai avait confirmé sa condamnation à 3.000 euros d’amende pour «injure envers les homosexuels». Christian Vanneste avait été condamné en janvier 2006 pour avoir affirmé deux ans plus tôt que l’homosexualité était «inférieure à l’hétérosexualité». Estimant qu’«un parlementaire est investi d’une parcelle de la souveraineté nationale» et que «sa liberté d’expression est une condition de la démocratie et de l’Etat de droit», le député s’était pourvu en cassation.

«La décision de la Cour de cassation ne peut pas s’appuyer sur l’immunité parlementaire dans la mesure où Christian Vanneste n’a pas tenu ces propos dans l’hémicycle», réagit Agnes Tricoire, juriste à la Ligue des Droits de l’homme. «Dans les affaires de presse, la Cour de cassation se montre vigilante et se prononce souvent sur le contenu des jugements et non sur leur forme», ajoute-t-elle.

Contre l’avis de l’avocat général

L’affaire était née de la vive opposition de Christian Vanneste à la loi du 30 décembre 2004, réprimant les injures et discriminations homophobes au même titre que les injures et discriminations racistes ou sexistes.

Il avait notamment affirmé dans la presse régionale que l’homosexualité était «inférieure à l’hétérosexualité. Si on la poussait à l’universel, ce serait dangereux pour l’humanité.»

Allant contre l’avis de l’avocat général, qui avait conclu au rejet de ce pourvoi le 14 octobre, la chambre criminelle a «cassé» ce mercredi la décision de la cour d’appel, sans même renvoyer le dossier devant une autre cour d’appel. «Cela siginifie qu’elle estime qu’il n’y a pas d’autre qualification des faits que la sienne. C’est une décision autoritaire», commente Agnès Tricoire.

«Une décision de grande ampleur»

«Si les propos litigieux, qui avaient été tenus dans la suite des débats et du vote de la loi du 30 décembre 2004, ont pu heurter la sensibilité de certaines personnes homosexuelles, leur contenu ne dépasse pas les limites de la liberté d’expression», a considéré la Cour.

«C’est une décision de grande ampleur dans la mesure où la plus haute juridiction sanctionne l’ensemble de la procédure et des poursuites au regard de la protection de la liberté d’expression», a réagi l’avocat de Christian Vanneste, Eric Morain, saluant «l’aboutissement d’un long combat judiciaire».