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1998- Les maisons d’hébergement SIDA et la trithérapie: Hôtels particuliers de luxe ou hébergement de dernier recours encore nécessaire?

Thursday, January 27th, 2011

La trithérapie anti-SIDA est en train de faire changer les statistiques en matière de mortalité mais, surtout, en matière de qualité de vie. Les malades attendaient depuis des années des médicaments qui allaient pouvoir leur donner une meilleur qualité de vie. Depuis près de deux ans, la trithérapie répond partiellement à cette attente. Cette thérapie se compose de trois éléments: l’AZT (et autres tels que le DDI) en combinaison avec deux inhibiteurs de protéase.

Les résultats sont surprenants. Baisse de 30% du taux de mortalité depuis 15 mois, retour au travail pour certains et charge virale normale chez d’autres. Les effets positifs de la trithérapie se font sentir chez plus de 60% des personnes atteintes. Les 40% restants étant ceux qui ne répondent pas aux médicaments, ceux qui refusent de les prendre et un groupe en augmentation constante, les toxicomanes et itinérants qui ne peuvent pas suivre la thérapie régulièrement.

En juin 1997, le Gouvernement du Québec augmentait le perdième octroyé aux maisons d’hébergement, celui-ci passait de 45$ à 60$ par jour, par résidant. Le perdième est la part de l’état consacrée aux soins directs aux malades, en plus du loyer ou de la contribution aux frais d’hébergement du résidant. Cette décision pouvait en surprendre plusieurs, justement parce que les nouvelles thérapies auraient du contrôler les dégâts et, éventuellement, réduire le recours à l’hébergement spécialisé.

Madame Michèle Blanchard, vice-présidente de la Coalition des Organismes Communautaires Québécois de lutte contre le SIDA, nous accordait une entrevue sur la nouvelle situation des maisons d’hébergement qui abriteraient maintenant de plus en plus de personnes en bonne santé.

Madame Blanchard affirme que les maisons actuelles répondent parfaitement à la demande. Contrairement aux années antérieures, il y aurait actuellement suffisamment de places pour répondre aux besoins des personnes atteintes. Le portrait aurait toutefois changé depuis quelques mois “Auparavant on accueillait des personnes venant de toutes les souches de la société, personne n’était à l’abri de la maladie et la clientèle était assez variée. Depuis peu, on remarque les effets positifs de la trithérapie et le profil des personnes hébergées change. Comme la majorité des gens prennent leurs médicaments et respectent la procédure, très sévère dans le cas de la trithérapie, la plupart en tirent d’énormes bienfaits. Il reste une partie de la population qui est plus difficile à rejoindre et ce sont les toxicomanes, les itinérants et ceux qui présentent des problèmes de santé mentale”. Madame Blanchard d’ajouter, “dans ces deux derniers cas, il est difficile, voire impossible, de suivre la prise des médicaments et ces patients se retrouvent plus malades parce que les médicaments n’agissent peu ou pas. La clientèle qui nécessite le plus de soins actuellement est donc celle-là. Certes, il reste ceux qui ne peuvent pas prendre la trithérapie pour plusieurs raisons, mais dans ce dernier cas, on peut beaucoup améliorer leur situation avec de bons soins plus conventionnels.”

Nous avons demandé à Madame Blanchard de nous expliquer pourquoi les maisons d’hébergement SIDA devraient encore recevoir une aide de l’état accrue si les patients sont en meilleure santé?

“Ceux qui peuvent reprendre des activités plus ou moins normales le font et certains quittent les résidences pour prendre un appartement. Il n’est toutefois pas rare qu’on doive suivre en “externe” des personnes réinsérées. Il faut réaliser qu’on avait bien préparé dans le passé les gens à faire face à la maladie et éventuellement à la mort. Aujourd’hui, il faut leur réapprendre à vivre et à accepter de retourner prendre une place dans la société. Certains vivent des angoisses terribles à l’idée de se retrouver seuls en sortie d’hébergement et, pour l’instant, nous travaillons sur la transition”. Surcroit de travail? La COCQ-SIDA est d’ailleurs à préparer une étude, avec la collaboration des résidences membres, portant sur la transition entre une maison d’hébergement pour personnes en phase terminale et une résidence de “remise sur pieds” qui servira, si la tendance devait se maintenir, à réapprendre à vivre aux malades qui reviennent de loin. Elle ajoute, “nous ne savons pas si la tendance positive de la trithérapie durera longtemps, si les médicaments seront efficaces pendant toute la vie ou si tout arrêtera dans 2 ou 3 ans. Nous voulons attendre un an et observer la tendance à long terme avant de décider de fermer ou non des ressources”.

Quand nous lui avons demandé si elle serait volontaire pour fermer sa propre maison (Madame Blanchard est directrice générale de la Maison D’Hérelle) si l’évolution des thérapies et de l’état général des patients se stabilisait aux chiffres actuels? Est-ce qu’on en viendrait à maintenir artificiellement des maisons d’hébergement qui logeraient des personnes en parfaite santé dans l’unique but de sauver des emplois?

Madame Blanchard est catégorique. “Nous nous poserons cette question d’ici peu, tous ensemble en tant que société et communauté. Une chose est certaine, si la tendance se maintenait, il faudrait songer sérieusement à fermer sinon à réduire le nombre de places en hébergement” de nous dire Madame Blanchard. “Notre conseil d’administration aura à étudier cette question et j’appuierais cette demande. Je commencerais par fermer ma propre maison d’hébergement si on demandait des volontaires parmi les résidences”, de conclure sans hésitation la vice-présidente de la Coalition.

Il faut donc attendre l’évolution des statistiques avant de décider du sort des maisons d’hébergement. La COCQ-SIDA suit le dossier. On nous promet une décision dans l’année.

R.L.C.

1997- La triple combinaison: une arme terrible qui a ses limites.

Thursday, January 27th, 2011

L’année 1996 aura marquée le monde particulièrement pour l’utilisation d’une nouvelle catégorie de médicaments dans le traitement du SIDA: les inhibiteurs de protéase. Les patients découvrent un nouvel outil moins toxique, les médecins peuvent enfin faire la guerre au virus avec des armes à la hauteur et le gouvernement place le nouveau médicament sur la liste des produits remboursés. Tout le monde semble s’être donné le mot pour donner “une chance” à ce qui est en passe de devenir le miracle du siècle.

Afin de mieux comprendre les effets de cette nouvelle catégorie de médicaments anti-SIDA et d’en constater les effets positifs concrets sur les patients, RG a pensé vous proposer un dossier complet sur le sujet. Conversation avec un malade, rencontre avec un médecin traitant, explications plus techniques de la compagnie pharmaceutique qui produit les inhibiteurs de protéase, ce dossier est est un à garder précieusement pour référence.

Il frôle la mort et revit.

Denis (nom fictif) a 37 ans. Séropositif depuis plus de 11 ans, il admet avoir eu des pratiques sexuelles plutôt risquées à une époque où on ne connaissait pas encore assez bien le SIDA. Asymptomatique pendant de nombreuses années, la maladie lui est tombé dessus avec un malin plaisir. En 2 ans, il aura attrapé trois pneumonies, développé un sarcome de Kaposi, le candida, l’herpès, les verrues qui se déchaînent sans compter une dépression nerveuse. Ses CD4 sont même descendues à 3. En l’espace d’un mois et demi, il est passé de 183 livres à un mince 123. Affaibli et en constante douleur, on ne donnait pas cher de sa vie:<<… En dernier, on me donnait quelques semaines à vivre. J’étais toujours dans un semi coma, je me pensais fini…>> de nous confier avec émotion ce jeune entrepreneur montréalais. Denis se déplaçait en chaise roulante, on le lavait, il n’était plus ce jeune fringuant que tout le monde admirait.

Et puis tout change avec une pilule.

Sur son lit de mort, son médecin lui prescrit un nouveau produit. Encore sous protocole, seuls 200 canadiens peuvent entrer dans l’étude. Denis a donc avalé son premier inhibiteur de protéase en combinaison avec son AZT et son 3TC en février 1996. En moins de 7 semaines, il pouvait marcher à nouveau, monter l’escalier et pratique même aujourd’hui le ski, son sport préféré:<<… Ça a commencé assez rapidement. Je sentais monter en moi une nouvelle énergie. Je dormais moins longtemps, j’étais plus en forme. Puis un jour, j’ai réalisé que je revenais de la frontière finale, je revivais…>>

Denis prend ses médicaments assidûment, il se fait d’ailleurs une mission d’aller visiter les malades comme lui afin de les stimuler à prendre régulièrement leur médication. C’est vital!

Du sérieux ou de la frime?

La page web de la revue Poz (http://www.) spécialisée dans les nouvelles s’adressant aux personnes séropositives, publiait dernièrement un texte intitulé “L’attaque du monstre mutant”. Dès le début, l’auteur Mike Barr affirme que l’AZT supprimerait le VIH mais qu’il créerait aussi un virus qui proliférerait plus vite, qui serait plus virulent et qui amènerait une mort plus rapide. L’auteur se baserait d’ailleurs sur des recherches encore très fragmentaires voulant que la prise irrégulière de la médication, en particulier les inhibiteurs de protéase, entraînerait la naissance d’un nouveau virus. Or, il semble bien que d’après les spécialistes sur le terrain, on devrait plutôt parler de résistance du VIH à un médicament si la prise ne se fait pas assidûment, à tous les jours, à chaque heure.

Qu’en pensent les médecins sur le front?

Le Docteur Marcel Bélanger, omnipraticien du C.L.S.C. des Faubourgs suit et traite de façon régulière plus de 25 patients séropositifs et sidéens. Son expertise remonte aux trois dernières années de la maladie et depuis ce temps, il est toujours resté à la fine pointe de l’arsenal médical:<<… Jusqu’à tout dernièrement, c’est à dire moins de deux ans à peine, je n’avais pas vraiment les moyens de contrer les effets de la maladie. Il n’y avait pratiquement que l’AZT et les analogues nucléosides conçu spécialement pour combattre le virus, nous parlions plus de conseils et d’espoir…>>

Aujourd’hui, le Dr Bélanger avoue que pour la première fois, nous avons des armes puissantes, efficaces et éprouvées (la triple combinaison). Le virus est mieux connu et on commence à produire des médicaments qui sont plus spécifiques:<<… Est-ce qu’on peut parler de guérison? définitivement pas. De chronicité? Ça reste à voir dans le temps, mais on peut certes parler de sursis…>> nous confie t-il le sourire aux lèvres. En effet, près de 90% des patients traités à l’aide d’une triple combinaison de médicaments présentent une amélioration notable voire même spectaculaire de l’état de santé. Les trois médicaments généralement utilisés sont deux analogues de nucléosides (AZT, 3TC, etc.) et un inhibiteur de protéase. Depuis un an, plusieurs patients du Dr Bélanger sont passés de la phase terminale avancée (phase IV) à un état de santé leur permettant de recouvrer une bonne autonomie, de faire du sport et certains pourraient même recommencer à travailler. Encore plus intéressant, certains patients démontrant une atteinte neurologique grave peuvent sortir de leur confusion et présenter des caractéristiques presques normales.

La charge virale: comment dénombrer l’énemie!

On évalue généralement l’état de la maladie en fonction de la charge virale, du décompte des CD4 et de l’examen physique. Plus le malade présente de symptômes, plus la charge virale peut-être élevée et vice versa. Grâce à la triple combinaison, on observe chez la plupart des malades une charge virale très basse ou indécelable. Comme la charge virale ne se mesure que dans le sang, le virus n’en est pas moins présent dans les organes qui agissent comme des réservoirs impossibles à sonder. En effet, à ce jour, il n’existe aucun moyen de vérifier la charge virale dans les organes sauf par une biopsie, qui n’est pas une procédure standard. C’est d’ailleurs ce qui inquiète les chercheurs:<<… Comme il est impossible pour l’instant de faire disparaître le virus des organes, il agit dans les réservoirs et peut causer des dommages à longue échéance….>> de nous confier le Dr Bélanger. La science chercherait donc une solution à ce dernier problème qui nous amènerait véritablement vers la chronicité si ce n’est la guérison.

Un défi de taille

Le défi à court terme résiderait donc dans la fidélité au traitement. Comme le virus a la capacité de se reproduire à un rythme effarant (de 100 à 1,000,000 unités par jour), la prise assidue de la triple combinaison devient LE facteur de survie. Il suffit d’une seule journée sans traitement pour que le virus reprenne de la force:<<…Quand un patient cesse temporairement de prendre sa médication, peu importent les raisons, il se créé une résistance au médicament, particulièrement aux inhibiteurs de protéases. On peut toujours changer le médicament mais comme la variété est limitée, on arrive vite à ne plus avoir d’alternatives. Plus le patient prend sa médication régulièrement, plus ses chances de survie sont grandes…>>

La triple combinaison est un avantage pour la clientèle et un nouvel outil pour les médecins. La science est en effervescence, ça bouge beaucoup. D’ici un an, on peut s’attendre à une flopée de nouveaux médicaments et de protocoles qui vont donner encore plus d’espoir de nous dire le Dr Bélanger. Les malades peuvent commencer à penser au lendemain, et pourquoi pas à l’an prochain? <<… Quand je vois un patient qui était mourant il y a quelques semaines à peine revenir à lui, reprendre vie, c’est la fête, je crie “victoire” dans ma tête, ne serait-ce que pour le présent…>>

R.L.C.

L’Actuel aurait soumis une étude intéressante au sujet du VIH

Thursday, August 27th, 2009

Une étude menée par des médecins de la clinique médicale l’Actuel, de Montréal, semble avoir trouvé une oreille attentive auprès des communautés scientifiques qui s’intéressent à la lutte au SIDA.

Dans un communiqué que la clinique fait paraître, mercredi, il est écrit que l’étude menée par le Dr Benoît Trottier auprès de 100 patients démontre qu’il est possible de diminuer le nombre de médicaments pris par des personnes infectées qui résistent à la trithérapie.

Réjean Thomas, médecin fondateur de la Clinique médicale l’Actuel, signale que l’hypothèse reste à confirmer avec d’autres études, mais il rappelle que si l’efficacité du traitement n’est pas directement proportionnel au nombre de médicaments pris, cela aura des conséquences énormes pour les malades, les scientifiques et les gouvernements dans le monde.

Le Dr Thomas ajoute que médication trop forte peut avoir de mauvaises conséquences pour la toxicité et les effets secondaires chez les patients.

L’Actuel affirme que son étude est jugée très pertinente par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et qu’elle a été citée dans le “Medscape Medical News”.

Entrevue : Roger-Luc Chayer L’avant et l’après trithérapie en 1996 pour les jeunes…

Thursday, December 4th, 2008

“J’ai vécu au premier degré l’avant 1996 alors que les personnes de la communauté gaie tombaient comme des mouches et l’après 1996, alors que les 18-24 sont aujourd’hui les premiers contaminés par le VIH-SIDA parce qu’ils n’ont aucune image de la mort liée à cette maladie”, déclare Roger-Luc Chayer, éditeur du Point et de Gay Globe TV.

“Je livre aujourd’hui ce témoignage car sans les témoins de l’apparition du VIH/SIDA dans notre communauté, entre 1984 et 1996, nous ne pourrons jamais faire comprendre aux jeunes les dangers qui les guettent car la mort est toujours présente”. Roger-Luc Chayer, qui collaborait de 1993 à 1998 à la revue RG, a été profondément marqué par son passage au magazine. Seulement que dans l’entourage de la publication, il a été témoin de la lutte et de la mort du correcteur de textes Guy, du graphiste, de deux amis de l’éditeur Jacques et Alain et c’est sans parler de son ami Pascal de Marseille et de nombreuses autres personnes qui sont toutes mortes avant l’arrivée de la trithérapie.

“Inutile de vous dire que ça laisse un goût amer que de repenser à tout cela mais il faut malheureusement le faire et en parler le plus possible car je suis aussi le témoin du comportement de la plupart des jeunes de moins de 30 ans qui n’ont rien vu de l’époque où près de 30% des gais sont morts du SIDA et qui ont des comportements sexuels tels qu’ils sont potentiellement condamnés”, explique Roger-Luc Chayer qui ne cache pas son impatience quand il donne des exemples de comportements dont il est témoin auprès des jeunes qu’il croise comme éditeur et personne impliquée dans la communauté.

“Si seulement nous pouvions revenir en images dans le passé et faire voir à ceux qui pensent que l’on peut guérir du SIDA aujourd’hui que cette maladie peut encore et toujours tuer, briser des vies et détruire toute qualité de vie pour certains qui en survivent, nous pourrions peut-être arriver à une prise de conscience équivalente à celle de la communauté gaie en 1996, juste avant que la trithérapie n’arrive, lorsqu’il était de rigueur et de bon goût d’utiliser le condom pour toute relation intime, c’est d’ailleurs à cette seule époque que le taux de transmission du SIDA a vraiment baissé au Québec”. “Si je ne suis pas atteint personnellement, c’est que j’ai vu l’horreur causée par la maladie chez les autres, je leur dois un peu la vie. C’est le message que nous pourrions livrer aux jeunes!”, conclut l’éditeur du Point.