Gay et handicapé, Vincent Sangnier veut briser les tabous avec son association A2H

Yagg.com

Vincent Sangnier a 30 ans et il habite Chépy, dans la Somme, avec son compagnon Éric. Depuis sa naissance, Vincent vit avec une infirmité motrice cérébrale. Homo et handicapé, il fait donc face à une double discrimination. Pour lutter contre ces inégalités, il a décidé, avec quelques soutiens, de fonder l’Association Handicaps et Homosexualités (A2H). L’organisation a été enregistrée en sous-préfecture d’Abbeville en juin dernier. Conversation avec un homme engagé, à la croisée de chemins.

Pourquoi avoir créé cette association? Notre association s’appelle Handicaps et Homosexualités. Les 2 mots sont au pluriel parce que les handicaps comme les homosexualités sont pluriels. Les personnes handicapées homosexuelles ne sont ni reconnues ni valorisées dans la communauté gay, où règne un culte du corps «parfait».

Comment se manifeste ce culte du corps vis-à-vis des handicapé-e-s? Le corps des personnes handicapées fait peur aux personnes valides, homos ou hétéros. Il y a un tabou, et donc, très peu de rencontres entre valides et handicapé-e-s. Nous sommes regardé-e-s comme des bêtes curieuses. Un-e handicapé-e peut avoir un corps atrophié par le handicap, ou avoir des gestes incontrôlés, bouger énormément… Cela fait peur. Nous ne voulons pas être toléré-e-s, mais totalement inséré-e-s à la société.

Avez-vous constaté un rejet des questions homosexuelles dans les associations d’handicapé-e-s? Au Conseil d’administration (CA) d’une association nationale qui s’occupe du handicap et que je ne préfère pas nommer, j’ai voulu porter ces questions.

J’ai notamment fait mon coming-out au CA, mais le sujet a été zappé, on m’a dit: «Vincent, pourquoi tu parles d’homosexualité?».

Quelles actions comptez-vous mener avec l’association? En priorité, nous allons mener des actions de prévention du VIH/sida, en partenariat avec l’antenne d’Amiens de l’association Aides. Les handicapé-e-s sont très touché-e-s par le VIH car [bon nombre d'entre elles/eux] ne peuvent pas mettre un préservatif. L’emballage n’est pas adapté… À plus long terme, j’ai pour projet de créer une Maison de la santé, avec un côté santé sexuelle. Je l’imagine comme un lieu de rencontres, dans le respect de chacun, pour éviter les lieux de drague très dangereux comme les parkings, qui sont ciblés par les homophobes. Ce ne sera pas un lieu de passe, mais un endroit de rencontres entre valides et handicapés et ensuite ils pourront aller ailleurs pour avoir des relations sexuelles s’ils en ont envie.

Les personnes handicapées souffrent-elles d’un manque d’intimité dans les institutions où elles vivent? Dans les foyers de vie, on ne parle pas de la sexualité, de l’homosexualité, du VIH… Je veux aller dans ces lieux pour témoigner de mon vécu [de militant homosexuel et handicapé, auprès du public et du personnel, ndlr]. Je vais aller à la rencontre des directeurs et directrices d’établissement.

Vous même, pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre vie affective? Je vis en couple avec Éric. Il a un petit handicap auditif, mais il est valide.

Mon compagnon est quelqu’un qui a compris qu’un handicapé est capable de désir, d’amour et de sentiments.

Pour revenir à l’association, à qui s’adresse-t-elle? Tout le monde est le bienvenu: les lesbiennes, les gays, les hommes et les femmes bisexuel-le-s, transgenres… Et je tiens à préciser que l’association ne travaille pas uniquement pour les personnes handicapées homosexuelles. Nous nous battons pour l’application de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées. Actuellement, je soutiens une jeune femme handicapée de 20 ans, hétérosexuelle, pour qu’elle et sa famille vivent dans un logement adapté. Elle vit avec ses parents dans un logement social qui n’est pas adapté: le père doit la porter dans sa chambre à l’étage, mais il vieillit et ne peut plus le faire. Par conséquent, cette jeune femme dort dans un lit de camp dans le salon… Pendant ce temps, un logement adapté du parc du bailleur social a été attribué à des personnes valides! Nous nous battons sur ce dossier.

Comptez-vous interpeller les élu-e-s? Je demande au plus haut. Droite, gauche, centre…

Je suis prêt à discuter avec tout le monde! Je n’ai pas peur. Si Monsieur Hollande veut me recevoir, je suis disponible.

Je souhaite utiliser mon expérience acquise dans d’autres associations. Mon but est que les personnes handicapées soient heureuses.

Quand auront lieu les prochaines permanences de l’association? Le programme est à confirmer mais elles devraient avoir lieu autour du 29 septembre au Bowling des 2 vallées, à Abbeville. Les propriétaires sont des gens très ouverts. Les personnes intéressées par les activités de l’association peuvent nous contacter par e-mail à l’adresse suivante: [email protected].

http://www.gayglobe.us


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