VIH-sida: les gens atteints de charge virale faible plus tenus d’informer leurs partenaires

Le Soleil

La Cour suprême du Canada statue qu’une personne atteinte du VIH-sida n’est plus tenue d’informer son partenaire sexuel de son état de santé si sa charge virale est faible et que la relation est protégée par un condom.

Dans deux jugements unanimes dévoilés vendredi, le plus haut tribunal du pays a ainsi établi les balises selon lesquelles une personne séropositive doit déclarer sa condition médicale avant une relation sexuelle.

C’est en 1998 que la Cour suprême abordait pour la première fois la question du VIH en droit criminel. À cette époque, elle avait jugé qu’une personne a l’obligation de divulguer sa séropositivité au VIH avant tout contact sexuel comportant un «risque important» de transmission.

Jusqu’ici, le droit criminel permettait de déposer des accusations de voies de fait graves et d’agression sexuelle contre toute personne qui maintenait son partenaire dans l’ignorance, que celui-ci pose la question ou pas. Douze ans plus tard, la Cour vient nuancer son jugement.

Aux yeux des juges, une charge virale faible et le port du condom représentent une absence de possibilité réaliste de transmission du VIH et empêche de conclure à l’existence d’un acte criminel.

La Cour suprême s’est basée sur l’examen de deux causes, l’une au Manitoba et l’autre au Québec.

Dans cette dernière, une femme a eu une relation sexuelle non protégée avec son partenaire, sans lui révéler sa séropositivité. Après qu’elle eut dévoilé son état, ils ont vécu quatre ans ensemble. Ce n’est qu’après la séparation que son ex-conjoint a porté plainte, même s’il n’avait pas contracté le VIH.

Déclarée coupable d’agression sexuelle et de voies de fait graves par le juge du procès, elle a ensuite été acquittée par la Cour d’appel parce que sa charge virale était indétectable et que le risque de transmission était très faible. Elle n’aurait pas, selon la Cour d’appel, exposé son ex-conjoint à «un risque important de préjudice grave».

La Cour suprême a confirmé l’acquittement, tout en précisant que le port du condom est aussi requis pour diminuer le risque de transmission de façon à éviter des accusations criminelles. Ici, la Cour a conclu qu’il n’avait pas été démontré que le couple avait omis d’utiliser un condom.

«La possibilité réaliste de transmettre le VIH crée un risque important de lésions corporelles graves. Ce risque est écarté à la fois par une charge virale faible et par l’usage du condom», a tranché la juge en chef de la Cour suprême, Beverley McLachlin.

Dans la seconde affaire au Manitoba, un homme a été condamné pour plusieurs agressions sexuelles sur quatre femmes parce qu’il ne leur a pas dévoilé sa séropositivité. Pour trois d’entre elles, il avait une charge virale faible, mais ne portait pas de condom. Dans ces cas, la Cour suprême a maintenu les déclarations de culpabilité. Cependant, elle a annulé la condamnation de l’individu concernant une quatrième plaignante avec qui il avait utilisé le condom.

Seulement le VIH

Les conclusions de la cour ne s’appliquent pas dans le cas d’autres maladies transmissibles sexuellement.

«Le critère de la possibilité réaliste de transmission proposé dans les présents motifs ne vaut que pour le VIH», tient à préciser la Cour. «Rappelons que le “risque important” tient à la fois de la gravité du préjudice et de l’ampleur du risque de transmission, deux facteurs inversement proportionnels».

«Une maladie transmise sexuellement et qui est traitable et qui ne bouleverse pas l’existence ni ne réduit sensiblement l’espérance de vie pourrait très bien ne pas emporter de lésions corporelles graves et de ce fait ne pas satisfaire à l’exigence de mise en danger de la vie que comporte l’infraction d’agression sexuelle grave», peut-on aussi lire dans le jugement.

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