L’histoire au secours de l’homosexualité

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Les Chinois cherchent dans leur histoire et leur littérature les moyens de banaliser l’homosexualité, à l’encontre des idées qui avaient prévalu au temps du communisme

Philippe BarretD’un examen assez précis des textes historiques et littéraires nationaux, il ressort que l’homosexualité était un phénomène reconnu comme normal sous la dynastie des Zhou (XIe-IIIe siècle avant l’ère commune). Un proverbe alors très répandu disait : “De beaux mâles peuvent distraire les empereurs de la sagesse des esprits anciens.” Les récits relatifs à la pratique homosexuelle de cette époque nous introduisent surtout dans les chambres impériales. C’est ainsi qu’un passage des Annales des printemps et des automnes raconte comment un empereur, qui menaçait de faire tuer un homme qui le regardait de trop près, en est dissuadé par un sage, qui lui fait observer qu’il n’est pas juste de tuer quelqu’un qui “admire votre beauté”. Du coup, l’empereur permet au fonctionnaire “de le prendre dans ses bras par derrière”.

De Sima Qian, historien de la dynastie Han (IIe-Ier siècles avant l’ère commune), il résulte que tous les empereurs de cette dynastie ont eu des partenaires masculins.

Il y a une façon, en chinois, de désigner l’homosexualité : “Le découpage des manches de l’amour.” Cette expression renvoie à une anecdote concernant un empereur qui, se réveillant, constate que les manches de son habit sont repliées sous le corps de son compagnon. Ne voulant pas réveiller le garçon, il coupe ces manches !

A partir du XIIe siècle, on observe, à travers la littérature, que l’homosexualité est répandue dans l’aristocratie. Dans Le Rêve dans le pavillon rouge, grand roman du XVIIIe siècle, trois personnages masculins, qui ne délaissent pas les femmes, aiment aussi des hommes. Et l’on parlera bientôt de “la mode du sud”, parce qu’en chinois, “mâle” et “sud” s’écrivent différemment, mais se prononcent de la même façon. Et publiquement, l’homosexualité féminine est alors reconnue.

Sous la dynastie des Qing, la dernière dynastie chinoise, qui règne à partir du milieu du XVIIe siècle, il y a même une divinité spéciale, le “dieu lapin”, qui s’occupe des homosexuels.

Des sociologues notent aujourd’hui que dans le passé, l’homosexualité était mieux acceptée qu’elle ne l’a été dans la deuxième moitié du XXe siècle. La Chine a délaissé le marxisme-léninisme. Elle cherche une idéologie de substitution dans son passé, dans son histoire. Par ce détour historique sur la question de l’homosexualité, elle vise à retrouver la tolérance. Elle est ainsi en train de rejoindre l’Occident, non en l’imitant, mais en retrouvant ses propres racines. Le 4 janvier 2013, le premier mariage lesbien a été célébré dans un hôtel de Shenzen.

Par Philippe Barret


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