Quoi de plus fascinant que de préparer un texte traitant d’un sujet aussi poignant que les oeuvres musicales issues de la vie homosexuelle de compositeurs célèbres. L’histoire a été plutôt généreuse bien que la documentation sur le sujet n’ait véritablement jamais été dévoilée avant la fin des années 50, le sujet étant vraisemblablement trop chaud pour les moeurs d’avant guerre. Ce que l’histoire ne nous dit pas, c’est que de nombreuses femmes lesbiennes composaient sous des pseudonymes laissant croire à des origines masculines. La presque totalité des oeuvres n’ont jamais été diffusées car les musiciennes, lorsque convoquées par les prélats ou des haut responsables de la cour afin de présenter leurs oeuvres, ne se présentaient jamais de peur d’êtres rejetées et ridiculisées. Nous ne traiterons dans ce texte que des compositeurs mâles gais, dont il est plus facile de suivre la carrière.
SCHUBERT (Franz-Peter), né en 1797 et mort en 1828, est un exemple évident et incontesté de compositeur homosexuel. Très tôt, le jeune Franz fut en contact avec le milieu dans le cadre du conservatoire ou de ses nombreuses relations avec certains poètes, danseurs, dramaturges ou juristes connus de l’époque. Tous affichaient leur choix de vie et donnèrent l’occasion au musicien de fréquenter et de vivre des relations amoureuses avec le sexe de son choix. L’oeuvre de Schubert est importante dans son style plutôt que dans sa quantité. Il mourut bien jeune à l’âge de 31 ans mais il avait déjà eu tout le temps d’imposer sa vision de la musique et d’aller influencer jusqu’aux officiels précepteurs de la cour dont le célèbre Saliéri, ennemi juré de Mozart. Parmi les nombreuses compositions musicales que Schubert composa lors des périodes tristes de sa vie notons la Symphonie Inachevée. Les plus romantiques des historiens se plaisent à expliquer que le compositeur n’a jamais eu le temps nécessaire avant de mourir pour terminer son oeuvre mais la bibliographie et les notes personnelles du compositeur sont plutôt éloquentes à ce sujet et l’explication la plus probable de cet état de fait est plutôt reliée au caractère de Franz. Trop souvent, les idées se chevauchaient dans sa tête et il lui arrivait continuellement de remettre ce qu’il avait déjà commencé à plus tard, pour travailler sur d’autres thèmes musicaux. La conjoncture et les événements ne lui donnèrent jamais l’occasion de terminer son oeuvre mais ce n’est certes pas la mort qui l’en empêcha puisque l’oeuvre elle même fut commencée plusieurs années auparavant. Schubert, que tout le monde aimait bien, vivait quand même dans une certaine misère. Son plus grand souhait était de vivre l’amour de façon passionnée. Comme ses contemporains, il alla jusqu’à risquer sa vie pour vivre la jouissance du corps. Par un soir de pluie, il alla rejoindre ses amis au bistro et c’est à cette occasion qu’il fit la rencontre d’un prostitué mâle. Il l’emmena chez lui et garda comme souvenir de cette nuit une maladie vénérienne qui le fit mourir trop jeune.
Wagner (Richard), né en 1813 et mort en 1883 est un cas bien particulier dans le cadre de ce dossier. En fait, il n’a jamais été démontré hors de tout doute que celui-ci eut quelques tendances homosexuelles mais son histoire parle d’elle même. De nombreuses fréquentations féminines suivies d’un mariage prolifique en descendance ne sont pas pour faire oublier les liens privilégier qu’il entretenait avec le jeune Roi Louis II de Bavière. Wagner a fortement influencé son époque et même la notre. De ce second point de vue, il représente un formidable coup de charrue dans les terrains un peu trop jardinés du drame lyrique traditionnel. Pour l’Allemagne, il signifie l’aboutissement d’un effort social, d’une tourmente métaphysique, d’une révolution décisive dans la conception du langage musical. Pour l’Europe, il signifie un phénomène de dépaysement, sinon de viol, mais aussi de découverte et de fécondation, le plus caractéristique qui se soit jamais présenté, peut-être, puisque nous en subissons aujourd’hui les ressacs. L’histoire récente est même remplie d’exemples d’utilisation des oeuvres du maître à des fins autres que la simple écoute musicale. Pensons à Adolf HITLER qui adorait assister aux représentations des opéras de Wagner et qui associait volontiers sa musique à la grandeur de la Rome antique. N’oublions pas que même les américains, dans le cadre de certaines opérations délicates de bombardement au Vietnam diffusaient à partir de haut-parleurs la musique de la Walkyrie afin d’effrayer les soldats ennemis. Dans les deux cas et ce, malgré nos opinions de pacifistes intellectuels, il faudra avouer que la stratégie était excellente. Les oeuvres de Richard Wagner sont effectivement très intenses dramatiquement et pour ceux qui souhaiteraient assister à ses opéras, soyez avisé qu’ils ont une durée allant de 2h30 à 7h30 l’unité. Sa relation avec le Souverain de Bavière était basée sur le secret absolu. Nous savons que Louis II de Bavière était homosexuel et qu’il vouait à Wagner, plus mature de plusieurs années, un culte sans bornes. Tout ce que demandait le compositeur, le Roi lui donnait au point de ruiner le pays en entier avec des dépenses d’un raisonnable douteux. Vers le dernier quart de sa vie, Wagner fit construire, aux frais du bon Roi, une salle réservée uniquement à la représentation de ses oeuvres. En 1872, on posa la première pierre du <<Festspielhaus>> de Bayreuth qui aujourd’hui encore reste exclusivement destinée à la représentation des oeuvres du maître. Le Roi dû abdiquer à cause du terrible état des finances publiques dans lequel il jeta le royaume et quant à Wagner, souffrant depuis longtemps d’une hypertrophie du coeur, il mourut d’une crise cardiaque à Venise.
Références musicales:
La Symphonie Inachevée (Franz SCHUBERT)
La Walkyrie (Richard WAGNER)