Arc-en-Ciel Pourquoi il est devenu symbole de fierté gaie?

Historiquement, les homosexuels contraints de se dissimuler, recouraient aux couleurs vives pour se signaler l’un l’autre. Oscar Wilde était fameux pour l’œillet vert qu’il arborait à son revers, fleur utilisée, pense-t-on, par d’autres Londoniens et Parisiens à la fin du XIXe et au début du XXe siècle pour signaler discrètement leur orientation sexuelle.

Le romancier Robert Hitchens évoque ce phénomène en 1894 dans L’œillet vert, roman qui fut en partie à l’origine du procès pour sodomie intenté à Wilde. Le jaune était en Australie utilisé dans le même but. À en croire Sunshine and Rainbows, une étude de la culture gay au Queensland:

«Si vous cherchiez à attirer l’attention des personnes de même sexe, il suffisait bien souvent de porter une paire de chaussettes jaune vif.»

Au cours de la Shoah, les homosexuels étaient contraints de porter le triangle rose, un symbole que la communauté gay s’est par la suite réapproprié. Le violet fut également un symbole répandu de fierté homosexuelle dans les années soixante et 1970, au cours desquelles les habitants de San Francisco ont tenté d’ériger la «main pourpre» en symbole, les gays Bostoniens placardant, eux, des affiches ornées d’un rhinocéros violet.

Il faut attendre les années soixante-dix pour voir l’arc-en-ciel se populariser comme symbole officiel de la communauté gay. En 1978, l’artiste san-franciscain Gilbert Baker créé ce qu’on considère comme le premier étendard moderne de la fierté gay en associant huit bandes de couleur, toutes symboliques: le rose pour le sexe, le rouge pour la vie, l’orange pour la guérison, le jaune pour le soleil, le vert pour la nature, le bleu pour l’art, l’indigo pour l’harmonie et le pourpre pour l’esprit humain.

Passant au stage de la fabrication en vue de le commercialiser, il constate que le rose vif n’est pas aussi facile à obtenir que les autres couleurs, et le drapeau passe à sept couleurs. Par la suite, Baker abandonne également l’indigo pour conserver un nombre pair, et l’on en arrive aux six couleurs que l’on connaît aujourd’hui. En 1978, quand les militants de la cause gay de San Francisco défileront pour protester contre l’assassinat du conseiller municipal Harvey Milk, ils brandiront les drapeaux créés par Baker.

La culture pop a également contribué à la résonance de l’arc-en-ciel auprès des militants de la cause, et notamment Judy Garland et sa chanson emblématique «Somewhere over the rainbow». Garland fut tout au long des années cinquante et 1960 une énorme star au sein de la communauté gay. Ses concerts étaient d’incontournables rendez-vous pour les homosexuels masculins et à compter de la Deuxième Guerre mondiale.

Les émeutes décisives du Stonewall Inn ont démarré quelques heures à peine après l’inhumation de Garland, et sa mort pourrait avoir joué un rôle dans leur déclenchement.

Comme s’en était vantée Garland quelque temps auparavant: «le jour de ma mort je vois d’ici les tapettes chanter “Over the rainbow” et les drapeaux en berne à Fire Island».

Garland est morte en 1969, avant que se répande le drapeau LGBT tel qu’on le connaît aujourd’hui.

L’arc-en-ciel est un symbole important dans la bible, où il représente la promesse de paix de Dieu à Noé, et certains groupes chrétiens l’ont utilisé dans leur iconographie.

Les hippies ont parfois défilé sous des drapeaux arc-en-ciel lors des marches pour la paix des années soixante et 1970, et furent peut-être une source d’inspiration pour Baker.


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