1997- Le Village est-il véritablement protégé. Un dossier sur une police de plus en plus menottée…

“4 citoyens appellent la police du nouveau poste 22 suite à une série d’entrées par effraction chez eux et les policiers n’arrivent que 8 heures plus tard pour les plus chanceux et ne viennent jamais pour les autres”. “Un policier en route pour répondre à un appel à l’aide d’un citoyen tombe en panne… à un coin de rue de la résidence du citoyen. Plutôt que de marcher le coin de rue, le policier ignorera l’appel et retournera au poste attendre une nouvelle voiture qui n’arrivera que 8 heures plus tard”. “Un citoyen se rend au poste 22 pour demander l’aide de la police et le policier de garde lui dit simplement de retourner chez lui téléphoner au 9-1-1″. “Des citoyens qui appellent la police et qui attendent plus de 10 heures retirent leur appel faute de service”. “Une demande d’information de RG avec promesse de réponse dans la semaine reste sans réponse après plus de 65 jours d’attente”. Deux policiers donnent une contravention de 316$ à notre journaliste tout à fait en règle mais, de dire le directeur du poste, il y aurait eu erreur. Le journaliste doit maintenant se faire juger à la cour et se défendre d’une erreur!…”. “Des policiers patrouillent dans le village et harcèlent les honnêtes citoyens, comme des vautours ou des prédateurs. Ils dévisagent les conducteurs d’automobile comme s’ils cherchaient continuellement à provoquer les gens, faute de s’occuper des vrais problèmes de NOTRE quartier qui sont la prostitution, la drogue, les squeegees, les punks et la violence reliée aux bars”. ” Un citoyen se rend à la police du 22 comme témoin d’actes de vandalisme sur la rue Dorion et le policier refuse de prendre son témoignage ni même son nom parce qu’il n’y avait pas encore eu plainte des victimes”. Voilà quelques observations recueillies auprès de plusieurs citoyens du village qui commencent à en avoir ras-le-bol des méthodes des policiers du nouveau poste 22 qui sembleraient se vautrer dans la parresse plutot que de répondre aux préoccupations des citoyens. Est-ce que l’arrivée de quelques nouveaux serait l’explication ou est-ce que le problème n’aurait pas une origine plus profonde? Est-ce que le policier ne ferait tout simplement pas ce que les autorités politiques leur demandent?

ALAIN, FIN DE L’ENCADRE…

C’est ce que RG a voulu savoir en sollicitant une entrevue avec le nouveau commandant du poste 22, M. Richard Fournel, pour lui demander si les résidants avaient raison de se plaindre.D’abord, M. Fournel n’a pas l’habitude, de toute évidence, de se faire questionner par des journalistes sur des dossiers de fond. Il faut savoir que les policiers ne sont pas des politiciens, qu’ils ont toujours peur qu’on perçoive mal leur travail et enfin, comme on parle d’un sujet très pointu, ils ne voudraient pas être mal cités. Qu’à cela ne tienne, Monsieur Fournel et son adjoint le sergent Robert Savard se plient de bon coeur à notre interrogatoire. Ce qui surprend d’emblée dans le contexte actuel, c’est que le sergent Savard admette que les plaintes des citoyens étaient fondées:<<… Il faut toujours prendre au sérieux les remarques des citoyens. Après vérification des faits fournis par RG, je dois conclure que les situations décrites sont vraies, que les plaintes sont fondées et que dans certains cas, le traitement accordé n’était pas adéquat…>> Le sergent Savard d’ajouter:<<… Il ne faut pas commencer à diminuer l’impact de ces plaintes. Nous voulons être très honnêtes avec les citoyens et nous admettons que la transition vers le nouveau poste de quartier ne s’est pas faite de façon toujours acceptable…>>.

En effet, depuis quelques années, la police de Montréal joue la carte de l’ouverture et de la transparence et ça marche! Le Sergent Savard n’avait rien à cacher lors de notre rencontre et nous avons reçu des explications et des engagements plus que satisfaisants de la part de ceux qui doivent nous protéger notamment, on serait sur le point de préparer des scéances de formation pour les policiers sur les réalités particulières du village. Nous suivrons d’ailleurs le développement de la situation avec le chef Fournel dans les mois à venir.

Onze heures de patrouille.

Voulant nous assurer de nos propres yeux du travail accompli et de la problématique actuelle, RG a demandé pour une seconde année de suite l’autorisation de patrouiller avec les policiers du 22 (anciennement le 33), ce qui nous a été immédiatement accordé. Le 23 mai dernier, notre journaliste patrouillait donc pendant 11 heures, de 20h à 7h du matin en compagnie de 4 policiers différents.

Une chose est claire, le village change et pas pour le mieux. Notre confrère Franco Nuovo de La Presse écrivait d’ailleurs récemment que le village serait devenu le quartier général des problèmes sociaux du Québec. Rétrospectivement, il faut savoir que les gais et lesbiennes ont fait beaucoup pour revaloriser ce quartier de Montréal. Le travail accompli au niveau de plusieurs organismes communautaires de même que par de courageux commerçants a produit des résultats enviés. Jusqu’à 1990, le village pouvait prétendre être une réussite et on pouvait y vivre presque en toute quiétude. Or depuis quelques années et particulièrement depuis l’année dernière, les choses changent et la criminalité revendique le Centre-sud. D’après un de nos policiers, plus de 100 piqueries, fréquentées par des narcomanes et des prostitués-es de toute sortes auraient pignon sur rue et c’est sans compter tous les squeegees, les centaines de prostituées, les 3000 sans abris et les inombrables punks qui vivent dans le quadrilatère. Mais au risque de nous répéter, que diable fait donc la police dans toute cette prolifération de problèmes socio-criminels? Devant ce qui est en passe de devenir cette année, une infestation grande envergure du village?

D’après tous les agents avec qui nous avons patrouillé, la police ferait ce qu’on lui demande de faire. Ils seraient d’ailleurs les premiers frustrés de ne pouvoir faire plus. Imaginez, ils ont beau arrêter les prostituées, les pimps, les drogués, les punks, etc, le lendemain ils sont tous dans la rue parce qu’il n’y aurait plus une seule place en prison. D’après un policier qui souhaite garder l’anonymat, les politiciens qui sont les seuls à pouvoir prendre les décisions relatives à ce problème ne les prennent pas. Ils se vautreraient derrière de vagues idées de concertation et seraient finalement à l’origine de l’inaction actuelle.

Ceux qui peuvent construire des prisons pour y placer les criminels ne le font pas. Ceux qui peuvent changer la loi sur l’aide juridique qui rendrait non admissibles les récidivistes criminels ne le font pas. Les avocats de la défense qui sont payés à même nos taxes font passer leurs clients pour des victimes dès qu’ils ont eu à faire à la police. Les procureurs de la couronne demandent aux policiers de ne plus arrêter les “piqueux”, ou qui que ce soit qui ne tue pas par manque de places en prison! Et ces organismes communautaires (subventionnés) qui se promènent dans le quartier pour rencontrer ces criminels et leur faire croire qu’ils sont des victimes du système alors que ce même système leur donne l’aide sociale, l’aide juridique, et la complicité de l’appareil judiciaire pour ne jamais prendre leurs responsabilités. D’après nos patrouilleurs, s’il fallait trouver des responsables à la situation actuelle, on pourrait commencer par cette liste!

Le policier est le bras de la justice et du gouvernement. Combien de fois ne m’a t-on pas répété lors de cette nuit de patrouille que le policier qui est occupé à nettoyer une piquerie, à contrôler les personnes à problèmes du village ou à donner des contraventions à des squeegees ne peuvent pas être partout à la fois. Il n’y aurait que 3 voitures dans tout le territoire du 22 (village) du soir au matin soit 6 policiers pour tout l’est du centre ville.

Encore des discours politiques

Dans le cadre de ce dossier, comme la plupart des policiers et des citoyens rencontrés semblaient considérer nos élus comme à l’origine même du problème, RG a tenté d’obtenir de chaque représentant local des gouvernements quelques commentaires brefs sur la situation. Nous leur avons demandé de nous indiquer ce qu’ils avaient fait individuellement et personnellement depuis la dernière année pour trouver une solution au problème et pour véritablement redonner aux citoyens la jouissance paisible de leur quartier?

D’abord M. Boulerice, député provincial de Ste-Marie-St-Jacques (village) a vite répondu à notre invitation et nous écrivait:<<…Pour ce qui est de mes actions, outre mon appui et les représentations faites auprès des différents ministères pour le dossier “Dire enfin la violence” qui s’adresse plus particulièrement à la communauté gaie et lesbienne, j’ai convoqué deux rencontres (septembre 1996 et mai 1997) très importantes à mon bureau de comté auxquelles assistaient les attachés politiques des cabinets des ministres et divers intevenants (…) afin de sensibiliser les ministres responsables à la situation dans le Centre-sud. Actuellement, j’appuie un projet d’expérience pilote qui a été déposé par la table interquartier de Montréal sur la prostitution et qui met en évidence l’importance de la collaboration et de la concertation entre les différents intervenants…>> Monsieur Boulerice poursuit sa lettre en complétant sa pensée.

Forcillo lui est plus pressé. Un petit coup de fil pour répondre à notre lettre mais sans plus. J’ai eu beau lui demander de m’écrire son opinion sur le sujet, rien à faire. Pour le moment, Monsieur Forcillo passe le plus clair de son temps à défendre son poste au parlement de Québec. Quant au député fédéral Gilles Duceppe, représentant du village à Ottawa, aucun signe de vie. Aux lecteurs de tirer leurs propres conclusions…

R.L.C.

About gayglobeus

Roger-Luc Chayer Journaliste et éditeur de Gay Globe TV et de la Revue Le Point
This entry was posted in Le Point and tagged , . Bookmark the permalink.

Comments are closed.