70- La vie gaie en prison aux États-Unis… La réhabilitation en prison? Connais pas!

Par Stéphane G.
Photo Google.com

J’ai souvent parlé ici des conditions de détention qui sont imposées aux personnes incarcérées aux États-Unis.

Au début de mon incarcération, j’étais hébergé dans des dortoirs à aires ouvertes comme ce que l’on peut voir dans les films où les toilettes et les douches sont aussi ouvertes à la vue de tous, d’où la rumeur sur les savons que l’on échappe… Comme je suis un homosexuel déclaré, j’attirais l’attention bien malgré moi.

À prime abord, cela peut sembler agréable, même excitant, mais quand j’ai commencé à me faire réveiller à deux heures du matin par un premier, un second puis un régiment de détenus en chaleur, qui voulaient avoir du sexe la nuit, j’ai trouvé cela un peu moins amusant.

N’oubliez pas que tous les contacts sexuels en prison sont strictement interdits.

Il n’existe que trois unités de ce genre actuellement en Floride. Elles hébergent un total d’environ 240 à 250 détenus et sont peuplées de détenus qui sont à risque de subir une forme de violence quelconque de la part des détenus de la population dite “générale”.

On y retrouve d’anciens policiers, des avocats et autres représentants de la loi, des délateurs, des détenus d’un certain âge, trop jeunes ou trop vieux qui n’arrivent pas à s’adapter sans subir de pressions, un grand nombre de détenus comme moi qui sont homosexuels et qui ont été victimes de harcèlement sexuel et enfin de certains transsexuels.

Ces unités sont placées dans des institutions régulières souvent adjacentes à d’autres unités du même dortoir hébergeant des détenus généraux.

Tout cela nécessite une logistique spéciale au niveau de la sécurité afin qu’en aucun temps, un détenu protégé ne se trouve en présence d’un détenu de la population générale. Bien entendu, cela génère de nombreux délais lors des déplacements à l’intérieur du périmètre de la prison ne serait-ce que pour se rendre à la salle à manger ou au pavillon médical.

Comme cela s’est répété à plusieurs reprises, j’ai dû me résoudre à contacter la sécurité. Une équipe de classification a donc déterminé que j’étais matière à risque vu mon orientation sexuelle connue et qu’il valait mieux pour ma sécurité que je sois transféré dans une unité de protection. Je me suis donc retrouvé là où je réside actuellement, dans des conditions pas si inconfortable puisque j’ai une cellule climatisée.

Tout dernièrement, un juge de la Cour criminelle de Floride a été condamné pour corruption et a reçu une sentence de 20 ans de détention. Il est arrivé dans mon unité il y a deux semaines et a vite attiré l’attention des autres détenus. J’ai eu le plaisir de m’entretenir avec lui à quelques reprises et au cours d’une conversation, je lui ai demandé s’il avait déjà sentencé des prévenus à des peines de prison.

Après avoir répondu par l’affirmative, je me suis dépêché de le questionner sur ce qu’il pensait du système pour lequel il avait travaillé maintenant qu’il se trouvait à l’intérieur des murs. Il m’a répondu “en tant que juge, je t’avouerais que je n’avais aucune idée ce que qu’était la prison. Je crois que le système d’incarcération est aberrant et totalement défaillant. Si le but de l’incarcération est la réhabilitation, cela m’apparaît tout à fait inexistant ici.

Je crois que tout juge qui siège sur une Cour de justice devrait être incarcéré ne serait-ce qu’une semaine afin de se rendre compte de l’inutilité et de l’inefficacité du système.”  Adjugé votre honneur!!!

NDLR: Notre chroniqueur Stéphane G. est une personnalité de la culture québécoise incarcérée pour une sentence de longue durée suite à des actes graves. Sa contribution nous aide collectivement à mieux comprendre la réalité vécue dans une prison aux États-Unis et à comprendre le cheminement d’un homme gai dans cet environnement. On peut lui communiquer des suggestions ou lui transmettre des commentaires ou questions à [email protected]

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