Un parasite favoriserait l’infection par le VIH en Afrique

Lemonde.fr

En Afrique, les femmes représentent 60 % des personnes vivant avec le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Une nouvelle hypothèse, rapportée dans le New York Times du samedi 10 mai, pourrait expliquer cette surreprésentation. Le quotidien donne les observations d’une équipe de gynécologues norvégiennes travaillant en Afrique du Sud. Ces médecins mettent en cause les lésions génitales liées à une maladie parasitaire, la bilharziose, qui serviraient de porte d’entrée à l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine.

Le Monde.fr a le plaisir de vous offrir la lecture de cet article habituellement réservé aux abonnés du Monde.fr. Profitez de tous les articles réservés du Monde.fr en vous abonnant à partir de 1€ / mois | Découvrez l’édition abonnés

Il est déjà établi que des lésions de la muqueuse génitale, dues à des infections sexuellement transmissibles, constituent des brèches par lesquelles le virus du sida entre dans les tissus et s’attaque aux cellules du système immunitaire.

RISQUE MULTIPLIÉ PAR TROIS

Installée avec son équipe à Otimati, dans la province sud-africaine du Kwazoulou-Natal, le docteur Eyrun Kjetland avance l’idée que les lésions génitales provoquées par le ver qui constitue l’agent de la bilharziose jouent ce rôle.

La bilharziose touche près de 200 millions de personnes dans le monde, en zone tropicale. L’infection a lieu dans un cours d’eau ou un lac, lorsque le ver, hébergé par un mollusque d’eau, pénètre à travers la peau. La femelle pond une énorme quantité d’oeufs, qui forment des granulomes dans les tissues ou les muqueuses.

Le docteur Kjetland a déjà publié des articles, notamment en 2012, sur ces lésions dues à la bilharziose qui rendraient les femmes infectées plus vulnérables au VIH, ainsi qu’à d’autres surinfections comme celle à papillomavirus humain (HPV). Elle a mené des études en Afrique du Sud et au Zimbabwe, et sa consœur Jennifer Downs, du Weill Cornell Medical College, à New York, a fait de même en Tanzanie. Ces travaux montreraient, pour les femmes porteuses de granulomes de bilharziose, un risque d’être infectée par le VIH multiplié par trois.

TRAITEMENT PRÉVENTIF

Cette hypothèse ne convainc toutefois pas Daniel Halperin, de la faculté de médecine et des sciences de la santé de Ponce, à Porto Rico, qui fut le promoteur de la théorie, confirmée depuis, que la circoncision protégerait partiellement les hommes de l’infection par le VIH. Cité par le New York Times, l’épidémiologiste fait valoir que des régions très touchées par la bilharziose, comme l’Afrique de l’Ouest, ont une faible prévalence d’infection par le VIH, et qu’à l’inverse, le Botswana ou le Swaziland, peu touchés par la bilharziose, ont une prévalence élevée d’infection par le VIH.

Dès son article, paru en 2012 dans la revue Trends in Parasitology, le docteur Kjetland appelait de ses voeux de nouvelles recherches sur le sujet. Il s’agit de déterminer si le traitement antiparasitaire préventif, à une échelle de masse, par un médicament, le praziquantel – qui peut ne coûter que 8 cents (moins de 6 centimes d’euro) –, peut avoir un impact sur les symptômes, les lésions et les surinfections par le VIH ou le HPV. Des études à grande échelle sont nécessaires pour répondre à une telle question.


Comments are closed.