Mon meilleur ami va mourir

Voilà qui est saisissant comme titre non? Mais c’est bien ce qui m’arrive depuis quelques mois, mon meilleur ami se meurt et je ne peut pas lui dire comme son départ me causera un immense chagrin.

Ce chagrin n’est pas comme un sentiment de noirceur que l’on pourrait associer à la déprime ou au burn-out, c’est plutot un sentiment profond de tristesse, qui se ressent beaucoup plus facilement et plus directement que le reste. Mon ami se meurt depuis plus d’un an et pourtant, nous pourrions faire beaucoup plus pour lui. Est-ce que ce sentiment de ne pas pouvoir lui dire directement ce que je pense serait la cause de mon immense chagrin? Oui peut-être…

Il se meurt d’un cancer qui a commencé dans les ganglions à gauche de l’estomac, qui s’est ensuite réfugié dans son liquide cérébro-rachidien. Il y a 2 mois environ, le pronostique était bon, il n’avait plus que quelques cellules cancéreuses alors qu’au début, il était beaucoup plus actif.

Les traitements en passant sont féroces et beaucoup plus meurtriers que la maladie c’est vrai. Avoir son cancer au début signifiait avoir une bosse là et ne pas pouvoir manger trop… Une fois en place les traitements, chaque cellule de son corps est devenue une cible à atteindre pour la chimio. Son corps en entier réagissait à chaque chimio, 3 fois par semaine, directement dans la colonne et une fois avoir bien fait souffrir ce pauvre corps pendant des mois, on a annoncé à mon ami que les cellules proliféraient dans son cerveau, derrière son oeil, ce qui expliquait ses douleurs à la tête.

Mon ami se meurt et pourtant il y aurait tant à faire. De nombreuses recherches faites à l’extérieur du Canada démontrent l’efficacité de certains traitements très simples et beaucoup moins toxiques que ce qu’il reçoit actuellement. À Cuba par exemple, on offre aux personnes atteintes de cancers des poumons de leur donner une injection qui leur donnera la paix pendant 5 ans. Ici, on promet une espérance de vie de 2 ans avec ce cancer et dans les pires conditions. Pourquoi alors ne pas offrir ce traitement aux canadiens? Il est pourtant offert dans tous les pays qui ne sont alignés aux États-Unis et AVEC SUCCÈS…

En suisse on traite de nombreux cancers avec des traitements expérimentaux et ceux que je connais qui y ont été soignés sont encore là pour dire que les 7 jours de traitements étaient agréables et qu’ils ne retourneraient jamais à la chimio, ce coktail de traitements empoisonné que l’on donne faute d’avoir l’esprit ouvert et l’intelligence pour savoir accepter ce que d’autres considèrent comme une avancée.

Mon ami a les moyens de bouger et de se payer quelque chose. Il a au moins un Million à sa dosposition.

D’autres traitements sont offerts même ici au Canada mais pour les utiliser, il faut se résigner à en venir à la conclusion que ça marche pas, que les traitements ne font pas leur travail et que la mort est la conséquence à court terme. Mon ami ne m’a pas pas téléphoné depuis 3 semaines. Il avait pourtant l’habitude de me téléphoner aux deux jours.

Il agonise. Que faire?

À la simple idée de garder le silence sur la possibilité de traitements pouvant améliorer sa condition, je deviens fou! Et si mon ami devait mourir sans connaître ce que j’ai à lui dire? Quelle culpabilité non?

Et pourtant, à la simple idée de lui faire de faux espoirs que ses proches me reprocheront c’est certain, je n’ai pas le gout de m’embarquer.

J’ai pourtant de l’expérience. J’ai été le journaliste canadien qui a le plus accompagné les personnes en phase terminales du SIDA pendant les années 1990, on me voyait dans toutes les résidences SIDA et tout le monde savait que je ne pouvais pas dire non à un lecteur affligé de cete maladie qui avait des besoins qui, parfois, étaient, confidentiels, comme d’aller chercher de la nourriture dans une banque alimentaire pour ne pas crever.

Je me suis juré après le décès de Pascal, de Guy, de Jacques, d’Alain et des autres que je ne m’impliquerais plus, trop éprouvant que cette condition pouvait causer chez moi et principalement au décès de mon ami Pascal de Marseille.

Que feriez-vous? Dites-le moi… Je vous lirai religieusement et grâce à vos commentaires, je me déciderai peut-être à aller voir mon ami en personne pour lui parler dans le creux de l’oreille. Pour lui dire qu’il peut tout cesser et qu’il peut aller ailleurs rapidement voir si la vie pourrait lui donner quelques moments de plus.

Je l’aime beaucoup, comme un frère, un père. Il a un sale caractère mais c’est ce que j’aimais, il est devenu tellement doux depuis la maladie. Dites-moi ce que vous en pensez…

Merci

Roger-Luc Chayer

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